De Zeventiende Eeuw. Jaargang 12
(1996)– [tijdschrift] Zeventiende Eeuw, De– Auteursrechtelijk beschermd
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Christaan Huygens et la lunette sans tuyau ‘Astroscope’
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Les frères Huygens, réalisateurs de lunettesRetourné en Hollande, Christiaan Huygens s'intéressa à nouveau au problème des lunettes. Son frère Constantijn se révéla motivé et talentueux pour la fabrication des lentilles de lunette et une collaboration s'instaura entre les deux frères. Avec sa machine à polir les verres d'optique, Christiaan réalisa en 1683 des objectifs de 12 à 13 pieds de longueur focale (en fait, environ 4 mètres), dont deux de 6, 7 cm de diamètre sont actuellement conservés au Musée Boerhaave de LeidenGa naar eind2., l'un d'eux signé par Christiaan le 30 mai 1683. Constantijn, qui habitait à Dieren près de Arnhem, entreprit à son tour la taille d'objectifs de mêmes caractéristiques.Ga naar eind3. L'action des deux frères fut d'abord de réaliser des grandes lunettes terrestres, à tube coulissant, avec oculaire à trois verres redressant l'image, selon la disposition dite ‘Campanine’ adoptée par l'opticien italien Guiseppe Campani. La correspondance échangée entre les deux frèresGa naar eind4. atteste d'essais sur les planètes par | ||||||||||||||||||
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1. L'Observatoire Royal de Paris vers 1670.Ga naar eind1. Méthode d'observation avec une lunette à tuyau. Agrandissement, portion d'une gravure de l'époque.
Christaan, sur des paysages par Constantijn; elle atteste des difficultés rencontrées avec le comportement mécanique du long tube coulissant. Le Musée Boerhaave de Leiden conserve une telle lunette.Ga naar eind5. Mais surtout, Christiaan étudia la réalisation de lunettes plus puissantes pour les applications astronomiques. L'habitude s'était instaurée d'exprimer la capacité d'une lunette astronomique par sa longueur, donnée comme seul paramètre définissant la puissance de l'instrument. Mais Christiaan Huygens savait bien que la réelle aptitude d'une lunette à rapprocher les objets se mesure à la valeur du grossissement, lequel n'est pas lié | ||||||||||||||||||
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à la longueur de la lunette mais au diamètre de l'objectif. Il savait aussi que la capacité à déceler les astres faibles, tels les satellites de planètes, doit se mesurer à la surface de l'objectif, c'est à dire au carré de son diamètre. Ceci, à condition que toute la lumière recueillie par la lentille soit bien concentrée en un seul point. D'ou la nécessité de produire des images très fines, et par suite d'utiliser pour celà une grande longueur focale. Les deux frères avaient pu approvisionner des dalles de verre permettant de sortir des lentiles de 11 à 13 cm de diamètre. La machine à polir pouvait donner les courbures de surface donnant une longueur focale de 35 pieds, soit environ 10 mètres. Aprés l'adjonction d'un léger diaphragme pour masquer les bords de la lentille toujours défectueux, le rapport entre la longueur focale et le diamètre de l'objectif (rapport d'ouverture) était voisin de 100. Cette valeur se révélait nécessaire pour assurer la finesse de l'image, elle conduisait déja à des tubes trés longs. Christiaan réalisa une lentille de 11,5 cm de diamètre et de 10,96 m de longueur focale et la signa le 10 mai 1683.Ga naar eind6. La lentille devait être déja disponible en Février 1683 car on note dans le Régistre des Observations AstronomiquesGa naar eind7. une séance d'observation le 26 février 1683 sur Jupiter à 7h et Saturne à 7hl/4. Un mât approprié avait donc été érigé dans la propriété des Huygens. La lunette devait être du type conventionnel à tuyau, mais nous n'en possédons plus d'information. Jusqu'en mai 1683, on note encore 6 séances d'observation sur la planète Mars et 3 sur Jupiter.Ga naar eind7. Pendant cette période, Constantijn se mit à fabriquer d'autres lentilles analogues. A Dieren, il adapta sa machine à polir et reçut de Christiaan le calibre (le ‘bassin’) de rayon de courbure 10,6 m qui lui avait servi à réaliser sa lentille de 35 pieds. Cette lentille était bi-convexe symétrique et utilisait par conséquent le même calibre de mise en forme pour chacune des deux faces. En octobre et novembre 1683, Constantijn réalisa, en quelques semaines, au moins quatre lentilles semblables, conservées au Musée Boerhaave, et plus tard une autre en 1684.Ga naar eind8. L'action de Constantijn sur le polissoir devait être légèrement différente de la façon d'agir de Christiaan, car les longueurs focales résultantes, désignées 34 pieds, sont légèrement plus courtes (en moyenne 10,16 m).Ga naar eind9. | ||||||||||||||||||
Conception de la lunette sans tuyauPendant que Constantijn polissait les lentilles, Christiaan réfléchissait au problème des très puissantes lunettes qui pourraient permettre des découvertes en astronomie. L'augmentation du diamètre de l'objectif devait entrainer l'accroissement de la longueur focale. Déja le tuyau de la lunette de 35 pieds posait de délicats problèmes. Aller plus loin impliquait la mise en oeuvre d'autres concepts. L'idée de remplaçer le tuyau par un fil tendu fit son chemin. En novembre 1683, à la page 94 de son cahier, Christiaan Huygens ébaucha quelques idées sur la manière d'orienter l'objectif vers l'astre tout en matérialisant la distance focale, à l'aide d'un fil tendu (Figure 2).Ga naar eind10. Le 28 novembre, la solution s'impose (figure 3 extraite de la figure 2). La mention ‘Eureka’ écrite en grec renforce les commentaires donnés en français. L'objectif est hissé à la bonne hauteur par une glissière le long d'un mât. Il doit | ||||||||||||||||||
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3. Cahier de C. Huygens; Extrait de la page 94Ga naar eind10., 28 novembre 1683.
être porté par une rotule, la ‘boule’ (appelée ensuite ‘genou’). Un contrepoids met la monture et sa lentille en équilibre indifférent. La ‘queue’ qui prolonge le montage sert de point d'attache à un ‘fil de soie’. En tendant ce fil, on oriente la lentille vers l'astre à observer. L'extrémité inférieure du fil est liée à l'oculaire par une queue analogue. La pièce optique est orientée de même, tandis que la longueur du fil fixe la distance focale à respecter. Dans ce premier montage, selon le croquis, l'oculaire est supporté par un trépied à tige, probablement celui là même qui avait servi pour appuyer le bas du tube de la lunette à tuyau qui avait précédé. Christiaan Huygens exécute un dessin plus détaillé de son invention, reproduit ici sur la figure 4 dans son état final, c'est a dire après la retouche dont il sera question plus loin. | ||||||||||||||||||
Premières observations avec l'AstroscopeLa mise en oeuvre de l'invention est alors extraordinairement rapide. Nous avons vu que l'idée originelle du principe vint à Christiaan le 28 novembre 1683, date du croquis ‘Eureka’ de la figure 2. Or, le premier essai sur le ciel est noté le 24 décembre 1683.Ga naar eind7. La première observation complétement réussie sur les planètes | ||||||||||||||||||
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4. Principe de la lunette à fil tendu. Dessin originel de Christiaan HuygensGa naar eind13., préparé pour son mémoire Astroscopia et terouché par collage d'une vignette, pour inclure le dispositif de losange et chevalet.
5. Constantijn Huygens, 30 décembre 1683. Première observation avec la lunette à fil de 34 pieds.Ga naar eind9.
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6. Constantijn Huygens, 5 mai 1684. Lunette à fil de 34 pied. Observation de Titan, Rhea et Japet.Ga naar eind9.
est datée du 30 décembre 1683,Ga naar eind7. soit 32 jours après la naissance même de idée. Trente deux jours pendant lesquels les deux frères, Christiaan et Constantijn, construisent toutes les pièces mécaniques de la lunette et le montage des optiques. Le grand mât existait dans le jardin de la maison des Huygens mais il fallait lui adapter une glissière. Dès la première observation, reproduite ici la figure 5, l'image de Saturne revèle une très grande finesse. L'ombre de l'anneau apparait comme un filin sombre projeté sur le disque. Le satellite Titan est bien visible, celui là même découvert par Christiaan lui même vingt huit ans auparavant. Le disque de Jupiter exhibe de nombreuses bandes. Les deux frères collaborent ensemble derrière la lunette. Les deux très belles reproductions de l'aspect des planètes par le dessin sont de la main de Constantijn. La figure 6 est une observation de Saturne effectuée quatre mois plus tard, le 5 mai 1684. Outre l'anneau, trois satellites sont visibles, Titan, Rhea et Japet. Une autre observation de Saturne est recueillie le ler décembre 1684, à la date presque exacte du passage de la Terre dans le plan de l'anneau, circonsetance rare que le mouvement des astres ne reproduit que tous les 14 ans. L'anneau se montre alors pratiquement de profil; le très fin ligament lumineux, à peine perceptible, prouve à Huygens la trés faible épaisseur de cette nappe de matière. Le 23 décembre 1684, une nouvelle observation montre l'objet déja plus ouvert, encore très mince mais aisément perçu. | ||||||||||||||||||
Diamètres des planètesLes dimensions des planètes, en cette fin de 17 ème siècle, n'avaient encore pu faire l'objet d'aucune détermination précise. Christiaan se rappele les essais d'estimation de diamètre des disques planétaires qu'il avait entrepris de 1657 à 1659. Sa nouvelle lunette lui permet maintenant de revenir sur le problème: | ||||||||||||||||||
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Lettre à son frère Constantijn, le 19 juin 1684: ‘Hier, j'ai voulu observer de quelle grandeur paraissait Jupiter et Saturne dans la lunette, comparée avec la Lune à l'oeil nu. Et je trouvais que le diamètre de Jupiter paraissait environ le double de celui de la Lune vue oculo non armato, ce qui me surprend extrêmement car, en supputant la multiplication du télescope de 34 pieds, qui est de 163 fois, et supposant le diamètre de Jupiter d'une minute, comme je l'ai trouvé autrefois, et d'autres avec moi, le diamètre dans le télescope devrait être plus de 4 fois celui de la Lune, qui est de 30 ou 32 minutes’.Ga naar eind11. Christiaan se trompe sur la valeur du grossissement, mais aussitôt il imagine le dispositif adéquat. Il écrit à nouveau à son frère, sept jours plus tard le 26 juin: ‘J'ai ajusté un petit bout de tuyau joignant celui qui contient le verre oculaire au télescope, pour observer les planètes; ce qui se fait par le moyen d'une vergette plate de cuivre qui traverse ce tuyau postiche, et qui va en diminuant. Car, ayant remarqué l'endroit de cette verge qui couvre justement la planète, il ne faut que comparer cette largeur avec la longueur du télescope, qui se mesure sur le filet [le fil joignant l'objectif à l'oculaire] et alors les tables de sinus font voir le diamètre de la planète, c'est à dire l'angle sous lequel elle est vue. Je crois que Jupiter n'à présentement que 40 secondes’.Ga naar eind12. Nous savons maintenant que cette valeur se révèle très correcte. Elle constitue même, semble-t'il, la première détermination de diamètre planétaire vraiment précise. | ||||||||||||||||||
Le losange articuléLes premiers essais sur le ciel amènent alors Christiaan Huygens à apporter à son instrument quelques perfectionnements. De suite, il imagine un dispositif pour permettre d'immobiliser l'instrument une fois l'astre trouvé, et de suivre son mouvement sans rien perdre de l'alignement de l'ensemble. Il s'agit d'un ‘losange’ (un polygone articulé) porté par un ‘soutien’ (un chevalet), très bien décrit par le dessin que Christiaan fait de sa main, reproduit ici sur la figure 7.Ga naar eind13. ‘Lorsque l'astre a été trouvé, le visiteur le moins expérimenté prend aisément la place du premier observateur et jouit du même spectacle. En effet, le fil qui joint les deux lentilles fait que le soutien [le chevalet], légèrement incliné du coté de l'observateur, garde sa position quoique reposant sur deux pieds seulement, et en même temps le fil est tendu par le poids du soutien... de sorte qu'on ne peut désirer dans cette affaire rien de plus apte ni de plus commode’ [Astroscopia - Ad lectorum].Ga naar eind13. Lorsque, après quelques dizaines de secondes, l'astre qui se déplace gagne le bord du champ visuel, une légère détente du fil et une action sur le losange permet de replacer la planète dans le champ. Toutes les quelques minutes, il faut déplacer un peu le chevalet. Christiaan Huygens fait usage de son dispositif à losange pour la première fois sur le ciel le 22 mai 1684.Ga naar eind7. | ||||||||||||||||||
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7. Principe du Losange et du Chevalet. Dessin de Christiaan Huygens pour son mémoire Astroscopia, 1684.Ga naar eind13.
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Autres perfectionnementsDe plus, enseigné par les premières expérimentations de sa lunette sur le ciel, Huygens invente d'autres accessoires, qui tous manifestent une parfaite maitrise de l'art d'observer. Le premier dispositif est destiné à protéger le champ de vision contre la lumière directe du ciel. En effet, lors des observations dans le crépuscule ou sur la Lune, la lumière du ciel peut atteindre l'oculaire d'observation et produire un fond laiteux dans le champ de vision. Pour s'affranchir de cette nuisance, l'objectif est entouré d'un cercle de carton, dont Huygens calcule que le diamètre doit être ‘une quarentecinquième partie de la longueur du télescope’. Dans une lettre adressée à J.D. Cassini le 26 septembre 1696, Huygens remarque que ce cercle ‘est beaucoup plus sujet que le fil à être agité par le vent, mais j'y ai remédié en séparant ce cercle d'avec le verre et le fichant à part sur la traverse qui les porte tous les deux’ (voir figure 8).Ga naar eind14. Le second accessoire concerne le pointage initial de la lunette vers l'astre à observer, fonction que remplit les offices du ‘chercheur’ dans nos lunettes actuelles: ‘Il nous a semblé utile de placer sur la verge ou queue de la lentille oculaire un stylet vertical m [sur la figure 7] dont le sommet est élevé au dessus de l'axe de la lentille d'une longueur égale au rayon de la circonférence extérieure de l'anneau [le cercle de carton précédent]. Nous observons ainsi que si l'on place d'abord l'oeil en un endroit tel que l'étoile se trouve dans le prolongement du rayon visuel qui va au point le plus élevé de la marge extérieure de l'anneau... nous obtenons que, lorsqu'on regarde ensuite par le tuyau oculaire, la même étoile se montre dans le télescope.’ [Astroscopia - Ad lectorum].Ga naar eind13. Le troisième dispositif ajouté par Christiaan Huygens à la lunette est un diaphragme amovible, placé sur la pupille de sortie derrière l'oculaire (organe k de la figure 7): | ||||||||||||||||||
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8. L'écran circulaire entourant l'objectif pour protéger le champ de vision contre la lumière directe du ciel. Dessin originel pat C. Huygens.
‘Lorsque je cherchai attentivement les fameux satellites cassiniens de Saturne et que j'eus de la peine à les voir, surtout pendant les nuits pas tout à fait noires, je compris que l'obstacle gisait dans une certaine faible luminosité se propageant de l'air à l'oeil, il ne s'agissait pas de la lumière qui vient de la grande lentille, mais de celle qui passe à coté. Pour exclure cette faible lumière importune, je savais bien qu'il était utile d'entourer la lentille, comme je le faisais déja pour la Lune, de mon anneau de papier. Mais pendant que je m'occupai de ceci, un autre remède plus efficace, à ajouter au premier, me vint à l'esprit, savoir la co-arétation [masquage concentrique] par l'interposition d'une lame perforée, de la pupille de l'oeil, qui sinon est largement ouverte dans les ténèbres. Aussitôt que je fis l'expérience, je vis distinctement les trois lunules de Saturne....Toutefois, comme un astre déterminé est moins aisément trouvé avec une pupille aussi réduite que lorsqu'elle est largement ouverte, j'ai attaché cette lame ronde perforée, large d'un demi pouce, par un petit bras mobile [en k sur la figure 7].Ga naar eind13. | ||||||||||||||||||
Publication de ‘Astroscopia’Ayant réalisé son Astroscope tel que décrit sur la figure 3, puis l'avoir expérimenté et amélioré par le losange, le chevalet et les autres perfectionnements décrits cidessus, Huygens se trouve en mesure de publier son invention. Il modifie le dessin de la lunette à fil tendu (figure 4), déja préparé pour être publié, afin d'accomoder les nouveaux perfectionnements. Pour cela, il colle sur la partie du croquis figurant l'observateur une vignette comprenant le dispositif de losange et de chavalet. Cet ajout est bien visible sur la figure 4.Ga naar eind15. Le dessin, ainsi mis a jour, va servir pour l'établissement de la figure finale. | ||||||||||||||||||
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Il actualise de même son manuscrit ‘Astroscopia’, non encore imprimé, il ajoute une introduction ‘Ad Lectorum’ contenant sa description du losange et du chevalet, ainsi que la figure 7: ‘J'ai fait graver ici la figure que je vous ai montrée de mon zigzag [le losange] par ce Tarpentier, qui aurait bien mieux gravé aussi l'autre planche de mon Astroscopia [celle de la figure 4] étant homme entendu et pas trop cher...’ [Christiaan à son frère le 19 juin 1684].Ga naar eind11. Astroscopia Compendiaria Tubi Optici Molimine Liberata fut publié en latin vers le milieu de 1684, à La Haye chez Arnold Leers.Ga naar eind13. | ||||||||||||||||||
Quelques difficultésEvidemment, la mise en oeuvre d'un procédé d'observation aussi nouveau n'alla pas sans problèmes. Christiaan en tint méticuleusement informé son frère, dans la correspondance assidue qu'il échangea avec Constantijn, lorsque celui ci fut retourné à Dieren aprés les premiers essais de la lunette: ‘[10 aôut 1684]... la coulisse, au jardin, s'est si fortement élargie que, voulant ces jours passés tirer le verre en haut, le baton perpendiculaire en sortit dehors. C'est le grand chaud qui a produit tant et de si grandes fentes dans le mât que les deux régles sont plus éloignées qu'elles n'étaient. Je les ferai détacher et rapprocher un peu daventage. Que le mât ait été peint, la même chôse n'aurait pas laissé d'arriver, à ce que me disent les charpentiers...’.Ga naar eind15. Plus tard, le 6 avril 1686: ‘Le vent se renforça soudain, et si fort que l'agitation du mât empêchait absolument l'observation... Lundi, je fis monter un petit garçon que le charpentier m'envoya, pour remettre la corde dans la poulie d'où elle était sortie, mais ce ne fut pas sans appréhender pour lui, à cause du balancement du mât...’.Ga naar eind17. | ||||||||||||||||||
L'acceptation de l'inventionHuygens cherche à faire connaitre le principe de la lunette à fil tendu dans les milieux cultivés de l'époque. Il envoie des descriptions et sa publication Astroscopia Compendiaria... à différents collègues et savants du monde scientifique avec lequel il était en relation. A Paris, où Christiaan Huygens venait de passer 15 années de sa vie, c'est au Ministre de Louis XIV, Michel le Tellier, duc de Louvois, que, le 18 mai 1684 il écrit personnellement: ‘Monseigneur,..je croirais manquer à mon devoir, si je ne vous présentais cet écrit que je viens de publier, touchant une manière nouvelle et beaucoup recherchée de se servir des grands télescopes sans l'aide de tuyaux, qui, dans les longueurs extraordinaires devenaient entièrement intraitables. Je pense que cette invention sera d'autant mieux reçue par les curieux en France que j'ai su par les lettres de Mr Cassini qu'il est venu depuis peu de Rome des verres excellents pour le Roi, jusque pour des lunettes de 140 pieds, dont il serait très difficile de tirer aucun usage sans cette nouvelle méthode que je pratique tous les jours avec beaucoup de force et de commodité et qui pourra nous aider à faire dans le ciel de nouvelles découvertes...’.Ga naar eind18. | ||||||||||||||||||
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Ce fut Claude Perrault qui présenta l'invention à l'Académie des Sciences, lors de la séance du 17 mai 1684. Il répondit lui même ensuite à Huygens (lettre du 8 juillet): ‘J'ai communiqué, Monsieur, votre traité de l'Astroscopie à Mrs de notre Assemblée qui l'ont fort approuvé. Je le portais le lendemain à Mrs de la Chapelle ou étaient Mrs Cassini et Thévenot qui lui en dirent leurs avis. Mr Cassni fit quelques difficultés. Mr Thevenot dit qu'il aurait déja pratiqué cette manière’.Ga naar eind19. Une description précise de la lunette fut également donnée peu après dans le Journal des Sçavans du 4 décembre 1694; les deux dessins originaux de Huygens des figures 4 et 7 y sont regroupés en une seule gravure (figure 9). Ce journal avait à l'époque une très grande influence dans les milieux de la science.Ga naar eind20. La présentation à l'Académie fut l'occasion de ressortir d'autres projets et méthodes d'observation dont la Société avait été déja saisie et qui pourraient être comparés au procédé de Huygens. Claude Perrault lui même avait proposé un dispositif que l'on pourrait considérer comme l'ancêtre du sidérostat.Ga naar eind19. Un miroir plan, mobile et convenablement orienté, renvoie la lumière dans la direction fixe où se trouve la lunette, posée prés du sol horizontalement. Les dimensions de l'instrument peuvent alors être grandes. ‘...Si vous vous étiez donné la peine d'examiner ma machine, je ne comprends pas par quelle raison vous croyez qu'elle ne puisse pas servir aussi bien aux grands verres qu'aux petits, ne s'agissant que d'allonger le tuyau, lequel soit qu'il soit grand soit qu'il soit petit, met toujours les deux verres et le miroir dans une même ligne...’ [lettre de Claude Perrault à Christiaan Huygens, 25 aout 1984].Ga naar eind21. Huygens avait sans doute remarqué que la machine de Perrault ne pouvait fonctionner telle que décrite, les agencements des poulies E et F n'étant pas convenables. Claude Perrault communiqua aussi à Christiaan Huygens la description de la machine proposée à l'Académie par M. Boffat. Sa lettre du 8 juillet 1684Ga naar eind19. en donne la description. Il ne semble pas que l'instrument, très peu judicieux, ait jamais été réalisé. Mais, plus gravement, les rivalités aidant, l'idée fut assez mal accueillie à Paris. Adrien Auzout, qui avait été astronome à l'Observatoire, écrivit une lettre pour l'Angleterre à Justel, datée du 3 juin 1684, laquelle fut lue à la séance de la Royal Society de Londres le 4 juin: ‘J'ai vu l'imprimé de Monsieur Huygens sur la manière d'observer sans tuyau dont il se sert heureusement, ce qu'il faut croire dans cette longueur là. Mais j'ai de la peine à croire que cette manière là puisse réussir quand on viendra à de grandes longueurs, outre que ce serait hazarder un grand verre de grand prix que de le mettre sur un petit genou dont la boule n'est pas plus grosse qu'une aveline, puisque le vent fort médiocre pourrait l'enterrer. Et s'il met un plus gros genou à proportion, il faudra un plus gros fil qui pésera beaucoup, d'avantage qu'il ne suppose, qui par conséquent pliera considérablement dans une telle longueur et, tirant par la tangente du pliement, otera par trop l'objectif hors de la vraie ligne visuelle...’.Ga naar eind22. A l'évidence, Auzout n'avait pas expérimenté le procédé; il n'avait d'ailleur pas les moyens de le faire. Il exprima des craintes gratuites qu'il ne pouvait justifier. | ||||||||||||||||||
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9. Journal des Scavans. Lundi 4 décembre 1684.Ga naar eind20. Planche hors texte.
Mais le véritable problème se trouvait avec Jean Dominique Cassini, avec qui Christiaan Huygens eut à collaborer durant son long séjour parisien à l'Observatoire. Les deux hommes étaient très différents. Cassini, organisateur, gestionnaire, planifiait de longs et méticuleux programmes d'observation, qu'il exécutait patiemment avec les instruments existants. Ainsi établit-il des tables des mouvements des satellites, la carte de la Lune, des données fondamentales sur les mouvements de la Lune et il découvrit de nouveaux satellites. Huygens, inventif, créateur, mécanicien, géomètre, se plaçait constamment aux limites des connaissances et cherchait à les repousser, là ou l'idée, l'outil ou le raisonnement lui permettait de progresser. Il n'est pas sans intéret d'examiner, mais cela fait l'objet d'une autre étude, les relations entre les deux hommes et leurs réalisations pour accroitre encore la dimension et la puissance des lunettes astronomiques.Ga naar eind16.
MB = Musée Boerhaave de Leiden. UBL = Universiteits Biblioteek, Leiden. | ||||||||||||||||||
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Sources
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