On ne croit plus celui qui manque á sa parole.
Un enfant, qui manque á sa parole, a beaucoup de ressemblance avec celui qui ment: l'histoire suivante suffit pour prouver cette vérité.
Jean, fils d'un paysan, voyant que son camarade avoit deux pommes, lui promit un liard s'il vouloit les lui donner: ce bon garçon y conjentit & lui donna les deux pommes; sur quoi Jean lui ria au nez, mangea les pommes, & ne lui en donna rien. Cette conduite injuste & malhonnête de Jean envers son petis voisin fit verser á ce dernier bien des larmes, de quoi le pere de Jean s'étant apperçu, il voulut en savoir la cause, & il n'eus pas de peine á comprendre que, pour n'avoir pas tenu sa parole, son fils avoit causé tout le mal; c'est pourquoi il le reprit & Jean promit de se corriger. Peu de temps après arrive la foire, & le pere de Jean prit avec lui le garçon du voisinage, pour lui faire voir ce qu'il y avoit de plus beau & de plus curieux: vous avez, dit le pere á son fils, trompé cet enfant, & pour réparation de cette faute, je le ménerai avec moi, & vous, vous resterez á la maison. Jean se mit á pleurer amérement, & promit á son pere de n'y plus retomber, s'il vouloit aussi lui permettre de l'accompagner. Non, dit-il, il faut réparer votre faute envers l'enfant que vous avez attristé & trompé, il faut rester au logis; & quoi que vous promettiez maintenant de vous corriger, comment voulezvous qu'on ajoute foi á vos promesses; car celui qui, dans une chose ne tient pas sa parole, mérite bien
de n'être pas cru aussi dans les autres: il faut donner des preuves de votre amendement, avant que je puisse croire á vos promesses. Jean resta au logis, & le petit voisin se divertit toute la journée á la foire.