Selon lui, il n'existe ni architecture, ni Stijle modernes et tous les essais pour trouver un Stijle propre, expression de notre conception de la vie, n'ont produit que des insuccès. M. Pierre Hamp, au contraire, demande:
‘Arras sera-t-il voué à l'histoire ou au travail?’ et sans hésiter il répond: ‘Au travail’.
Mais il n'a nonplus une grande confiance dans les architectes modernes et leur architecture. ‘Point d'esthétique dans le Nord, dit-il, point d'art décoratif, point de frivolités! Les nouvelles maisons dans le Nord doivent être utiles, simples et pratiques dans leur disposition. Beaucoup de fenêtres pour faire entrer la lumière et l'air dans les pièces spacieuses. Les nouveaux quartiers devront offrir un aspect joyeux et salubre. Pour bâtir de pareilles maisons nous n'avons pas besoin d'architectes ni d'esthétique. Un entrepreneur, maitre-charpentier, nous fournit, avec son sens commun et sa connaissance des besoins de la population, les maisons qu'il nous faut’.
Nous nous permettons d'observer, à cause de ce qui précède, qu'évidemment M. Hamp ne comprend rien de l'architecture moderne, dont le sens, dans le Nord, semble identique à un art décoratif et frivole, de mauvais goût, comme nous la connaissons en Belgique depuis vingt ans au moins.
Là, en Belgique, les artistes sérieux ont compris, que les sentiers tortueux du Stijle ‘vermicelli’ ne menaient à rien et on se prépare à suivre les nouvelles voies, sur lesquelles d'autres nations ont déjà gagné des résultats réjouissants.
Dans le Nord de la France on est, à ce qu'il nous semble, encore bien éloigné de ces voies nouvelles, circonstance, dont les conservateurs profitent pour propager des principes qui ne sont plus de nos jours, tâche plus facile encore là, où ils sont sûrs de l'appui des administrations.
Comme nous trouvons rapporté, le conseil municipal d'Arras s'est déclaré sans discussion et unanimement pour ‘une reconstruction de la ville, de ses monuments détruits, et ceci dans leur forme primitive, afin que les générations futures retrouvent Arras sinon tel que la ville était avant la catastrophe (la patine du temps ne se remplace pas), mais avec la même physionomie générale, qui frappait tous les visiteurs de la capitale de l'Artois’. Pauvres sieurs, dirions nous, ces réactionnaires d'Arras, qui se vantent de leur résolution sur le projet vraiment audacieux, ‘mais avec de la volonté et de la persévérance il se réalisera’, selon l'opinion d'un des conseillers.
Ils oublient cependant, qu'il sont en route vers une falsification énorme, inouie dans l'histoire, du moins à une telle échelle.
Mais le manque de patine, dira-t-on, trahira immédiatement l'âge de ces monuments à chaque visiteur. Pourquoi pas imiter aussi cette patine, ce n'est qu'un tour de main pour un chimiste de nos jours.
Ne vous inquiétez pas sur cette question, messieurs les réactionnaires d'Arras! Aucun touriste de bon gôut, aucun connaisseur érudit, aucun artiste ne viendra plus dans votre bonne ville admirer ces contrefaçons de monuments et de maisons du Moyen-Age et de la Renaissance.
On ira ailleurs, là oú l'on trouve ces monuments, mutilés, peut-être, mais authentiques. Hélas! qui pourra nous assurer que d'autres communes ne suivront pas l'illustre exemple de la capitale de l'Artois.