par les deux partis qui constituent la majorité parlementaire: les chrétiens-démocrates et les socialistes. Le cabinet Lubbers, désireux d'annuler les augmentations de salaires déjà accordées, appelait de ses voeux la conclusion d'un accord interprofessionnel entre pouvoirs publics, syndicats et patronat, prévoyant le blocage des salaires et la renégociation des conventions collectives déjà signées. Les chrétiensdémocrates préconisaient en outre une baisse des impôts afin de maintenir le revenu disponible net des ménages à son niveau actuel. Bien que l'idée d'une réduction des impôts fût rejetée par le gouvernement et nonobstant le refus catégorique des syndicats d'envisager un blocage éventuel des salaires et de renégocier les conventions déjà signées, le gouvernement et les partenaires sociaux ont poursuiviles discussions dans l'espoir d'aboutir à un accord interprofessionnel.
Au Parlement, le président du groupe socialiste était même allé jusqu'à prophétiser ‘la fin de l'économie concertée’ au cas où on ne parviendrait pas à un accord interprofessionnel. Le modèle néerlandais de ce qu'on appelle l'économie concertée vit le jour à la fin de l'année 1982, lorsque les employeurs et les représentants des salariés signèrent un accord interprofessionnel instaurant la modération salariale dans le but de rétablir la compétitivité des entreprises et de créer de nouveaux emplois. Il fut recommandé aux négociateurs des conventions collectives de renoncer à l'indexation des salaires en échange d'une réduction de la durée du travail. Depuis lors, les syndicats et les organisations patronales ont continué à respecter l'accord, ce qui a permis, d'une part, de rétablir en très peu de temps la rentabilité des entreprises et, d'autre part, de réaliser la plus forte croissance d'Europe en matière de création d'emplois.
L'état de santé actuel de l'économie néerlandaise est loin d'être aussi mauvais qu'en 1982. L'accord interprofessionnel auquel on vient d'aboutir ne risque donc pas de faire des vagues. Il ne prévoit ni gel ni amputations des salaires. Par contre, patronat et syndicats ont lancé un appel pressant aux négociateurs des divers secteurs professionnels pour qu'ils renoncent à entamer les pourparlers avant le 1er mars 1993. Ils ont proposé la prorogation des conventions collectives existantes, préconisant un temps d'arrêt pour les conventions venant à échéance entre le 1er janvier et le 1er mars 1993.
On pourrait comparer le récent accord interprofessionnel à la montagne qui a accouché d'une souris. L'appel adressé aux syndicats, les incitant à prendre en compte la détérioration de la conjoncture économique, semble en définitive fort peu contraignant. Toutefois, on aurait tort d'en sousestimer la signification et la portée. Les négociations interprofessionnelles entre gouvernement, employeurs et organisations syndicales ont créé un climat tel qu'il y a fort à parier qu'en matière de salaires, les augmentations revendiquées n'excéderont guère 3%. Les syndicats ont clairement manifesté leur volonté d'apporter leur pierre au raffermissement du tissu économique néerlandais et de faciliter ainsi l'entrée des Pays-Bas dans la future Union économique et monétaire.
Christiaan Berendsen
(Tr. U. Dewaele)