Walter Fiers remporte le prix Baillet-Latour
Il n'arrive pas si souvent qu'un Flamand remporte un prix de renommée internationale. Ce fut pourtant le cas en 1989: Walter Fiers, né à Ypres en 1931, professeur de biologie moléculaire à la Rijksuniversiteit Gent (Université de l'État de Gand), s'est vu décerner le Artois Baillet-Latourprijs ter bevordering van de gezondheid (prix Baillet-Latour pour la promotion de la santé). Cette distinction venait souligner les éminents mérites scientifiques de Fiers dans la lutte acharnée et difficile menée contre le cancer.
Ce prix emprunte son nom long d'une lieue au comte Alfred de Baillet-Latour qui présida pendant de longues années aux destinées des brasseries Artois de Louvain (Brabant flamand). A l'initiative du comte, on créa en 1974 une fondation destinée à encourager et à récompenser des prestations scientifiques et artistiques exceptionnelles. Depuis 1979, la fondation attribue tous les deux ans un prix à un chercheur dont les travaux contribuent à un progrès fondamental dans le domaine de la santé. En peu de temps, le prix Baillet-Latour s'est acquis un prestige flatteur. Beaucoup l'appellent d'ores et déjà le Nobel belge, ce qui est loin de s'expliquer uniquement par la coquette somme que le vainqueur empoche (5 000 000 FB soit environ 793 500 FF). Impressionnante est en effet la liste, courte il est vrai, des lauréats internationaux. Tous sont des chercheurs d'un mérite exceptionnel et de renommée mondiale. C'est ainsi que le vainqueur de 1983 n'était personne de moins que Jean Bernard. Le chercheur français obtint le prix pour sa contribution au traitement de la leucémie aiguë.
Fiers, originaire d'Ypres (Flandre-Occidentale) termina ses études en 1954 à l'Université de Gand. Son diplôme d'ingénieur en chimie et industries agro-alimentaires ne semblait guère le prédestiner à une carrière en biologie moléculaire. Deux ans plus tard, il entamait un séjour long et particulièrement fécond à l'étranger. Après une période très instructive au laboratoire Carlsberg de Copenhague, Fiers gagna les Etats-Unis. Il commença par y travailler au réputé California Institute of Technology (Pasadena) puis au centre de recherche du futur prix Nobel Har Gobind Khorana (Madison, Wisconsin). Lorsque Fiers rentra à Gand en 1963, il disposait d'une large expérience en matière de recherche appliquée aux structures moléculaires et à la transmission de l'information génétique.
Dès son retour, Fiers se lança dans l'étude des virus. Ses recherches sur le virus cancérigène Simian 40 (SV 40) furent capitales: elle durèrent jusqu'à la fin des années 70. C'est alors que Fiers, sensiblement en même temps que l'équipe de l'Université de Yale, fut
Walter Fiers (o1931).
en mesure de déceler la structure exacte du virus, ce qui permettait un meilleur regard sur la structure des cellules cancéreuses. Par la suite aussi, le professeur gantois livra une contribution particulièrement importante à l'avancée des recherches sur le cancer. Il travaille pour l'instant à trois méthodes susceptibles de tuer sélectivement les cellules cancéreuses. En dépit de l'indéniable utilité pratique de sa recherche, Fiers ne dispose que de maigres moyens financiers et d'une bien modeste infrastructure. C'est aussi pour cette raison qu'il travaille souvent en collaboration avec l'Université de Louvain et l'institut Pasteur bruxellois.
On entend de plus en plus souvent les initiés évoquer Fiers comme lauréat potentiel du véritable prix Nobel, ce qui lui permetttrait d'égaler le tour de force de Jean Bernard. Avec le prix Baillet-Latour, Fiers a en tout cas accompli la moitié du chemin!
Hans Vanacker
(Tr. J. Fermaut)