Les Verts en Belgique
Il y a dix ans, ils n'existaient même pas. Il y a cinq ans, ils étaient déjà quatre députés à la Chambre des représentants. Aujourd'hui, on compte huit députés ‘verts’ au Parlement belge.
Qui sont-ils, ces ‘Verts’? Incarnent-ils une nouvelle force politique en plein essor ou s'agit-il du énième feu de paille? Il est de fait que leur succès confronte en même temps les Verts belges avec la triste expérience que l'écart entre le rêve et la réalité est parfois considérable et que nombre d'écueils pratiques contribuent à l'agrandir encore...
Les Verts flamands sont issus du mouvement Anders gaan leven (Vivons autrement), dont le sigle Agalev sert aujourd'hui de nom au nouveau parti politique. C'était un des nombreux groupements de défense de l'environnement - plutôt locaux, en général, et focalisant leur action sur des objectifs bien délimités - qui faisaient beaucoup parler d'eux au début des années soixante-dix. A l'époque, le gouvernement belge comptait parmi ses excellences un ministre de l'Environnement, et au niveau supranational on proclamait l'Année européenne de la protection de la nature. Bref, l'environnement préoccupait beaucoup les esprits, faisait la une des journaux et devenait un thème politique payant.
Le jésuite et professeur anversois Luc Versteylen, principal animateur du groupement Agalev, ne songeait certainement pas à la politique, du moins pas à la politique partisane. Il envisageait surtout de réunir des personnes désireuses de réfléchir sur des thèmes tels que l'accueil, la responsabilité, la solidarité, des personnes désireuses de se distancier de ce qui est dénoncé comme une société pourrie par la consommation, la concurrence et le besoin de se faire valoir. Cette réflexion va de pair avec toutes sortes d'actions, le plus souvent à caractère ludique, portant sur l'environnement. Ainsi, on a vu des ‘cyclistes verts’ peindre des pistes cyclables sur les routes, organiser des grèves de paiement dans les transports publics..., actions toujours symboliques, résolument non violentes et délibérément extra-parlementaires.
La question de la participation aux élections législatives se posa pour la première fois en 1974. Le mouvement demeure encore en marge de la politique, mais on trouve des membres d'Agalev sur des ‘listes vertes’ réunissant des politiciens professionnels et des défenseurs de la bonne cause. Le résultat électoral est franchement décevant. Il convient de souligner qu'à ce moment-là, ce sont les oppositions entre la Flandre et la Wallonie qui dominent la politique belge. Les élections pour le Parlement européen de 1979 marquent une accélération: le nombre des suffrages permet la conquête de trois sièges au Parlement belge. Le feu s'était mis au vert, si l'on peut dire!... Lors des élections législatives suivantes, fin 1981, les Verts conquièrent d'emblée leur place au soleil, rue de la Loi, à Bruxelles: près de cinq pour cent des voix en Flandre, glissement électoral important très rarement constaté dans la vie politique belge. Quand les Belges retournent aux urnes fin 1985, d'aucuns espèrent, beaucoup pronostiquent ou redoutent une véritable percée des nouveaux venus. Le nombre de voix s'accroît considérablement, mais ce n'est pas le raz-de-marée.