Ajournement
La panique, qui n'épargna ni le monde politique ni l'administration néerlandaise, fut complète. Au sein de l'opposition, le PvdA (socialiste), profita de la catastrophe pour souligner la justesse de ses vues - il convient de rappeler que, sous le mandat présidentiel de Den Uyl, ce parti, lui-même partisan naguère de la construction de nouvelles centrales, avait fini, sous la pression des milieux écologistes, par en devenir un adversaire acharné -.
Lubbers hésitait. Au sommet de Tokyo, début mai, et peu après, devant un groupe d'entrepreneurs américains, il s'était encore déclaré partisan de la construction de nouvelles centrales nucléaires, mais, dans la semaine qui suivit, lui aussi se montra acquis à l'idée d'un ajournement. Les élections imminentes, qui, selon Lubbers, seraient une affaire entre luimême et le leader PvdA Den Uyl, semblaient n'être pas étrangères à ce revirement. Van Aardenne, en qualité de ministre responsable, fut forcé de lui emboîter le pas sous la pression de son propre parti et surtout sous celle de son collègue et camarade de parti Winsemius (Environnement), ce qu'il fit tout à fait à contrecoeur.
Braams, qui avant Tchernobyl était un fervent partisan de Van Aardenne, déclare maintenant: ‘Pour moi, Tchernobyl a été un véritable lavage de cerveau. Ma confiance dans la possibilité de maîtriser un jour l'énergie nucléaire n'est pas ébranlée.; par contre ma confiance dans le niveau actuel de la technique l'est très sérieusement. Je comprends maintenant qu'il nous faut parvenir à un niveau de sécurité plus élevé. Et que nous devons recommencer
Les centrales nucléaires néerlandaises sont équipées de plusieurs systèmes de sécurité. Voici une des unités de secours de la centrale de Borssele, qui garantit le refroidissement, lorsque le réacteur ne fonctionne plus lui-même.
à convaincre le public des avantages de l'énergie nucléaire. Mais je me rends bien compte en même temps qu'il s'agit là d'un processus qui prendra des années’.
Lansink quant à lui affirme: ‘Ce qu'il faut faire dans le court terme est évident. D'abord se livrer au niveau national et international à une évaluation de la catastrophe de Tchernobyl. Il faudra bien ensuite en revenir à une vue rationnelle des choses. Sitôt la catastrophe, je me suis moi aussi écrié: quel drame que cette catastrophe! Mais si je laisse parler ma raison, je dis: il est naturellement impossible que tous les arguments qui militaient en faveur de l'énergie nucléaire se soient soudain évanouis avec cette catastrophe, de même que les nuisances liées à l'emploi du charbon. Les arguments qu'on lui oppose ont seulement acquis plus de poids désormais’.
Braams en tombe tout à fait d'accord. Selon lui, il est très important que dans un cadre européen on accorde plus d'attention à la sécurité, même s'agissant des centrales de pays voisins. ‘Car même si nous ne faisions rien aux Pays-Bas, nous avons encore les centrales de Belgique et de la République Fédérale. Elles sont parfois toutes proches, à Doel par exemple’. A condition que cette information reste à usage externe, le porte-parole du VVD en matière énergétique consent à ajouter que pour