Le nouveau Musée d'art moderne; à l'arrière-plan on voit le palais de Charles de Lorraine. (Photo P. van den Abeele).
tous les conservateurs, l'autre résolument contemporain.
La section d'art moderne, strictement respectueuse de la chronologie, présente d'abord les courants les plus anciens, puis, au fur et à mesure qu'on descend, ceux de date plus récente. Arrivé au niveau-8, tout le monde doit rebrousser chemin, soit à pied, ce qui signifie une sérieuse remontée, soit en empruntant un vaste ascenseur pouvant contenir un nombre assez considérable de visiteurs. Le circuit est donc quelque peu comparable à celui du musée Guggenheim à New York où le visiteur, déposé par l'ascenseur à l'étage supérieur, regagne ensuite le rez-de-chaussée en descendant le fameux escalier en colimaçon. Une construction de ce type, qu'elle soit en hauteur ou souterraine, n'offre guère d'autres solutions surtout si l'on sait que le terrain revient plus cher, au mètre carré, qu'un tableau de même superficie. Toujours est-il que le visiteur ne risque pas d'être frappé de claustrophobie. La lumière, tombant des hauteurs du patio, assure le contact avec l'extérieur.
Si le musée constitue une pomme de discorde artistique, cela est dû avant tout aux lacunes qu'accusent les collections. On est en droit de penser que tout ce qui, faute d'espace suffisant, s'est trouvé, des années durant, enfoui dans les réserves, est à peu près intégralement exposé à l'heure actuelle. On peut même se demander si l'on n'a pas trop exposé, entre autres à des murs qui, supportant un couloir, peuvent être sujets à vibrations. Face à cette explosion de toiles, on se montre compréhensif. Quel soulagement, en effet, après tant d'années de frustrations, de pouvoir enfin tirer tous les registres! Cependant, cette pléthore, loin de les occulter, ne met que mieux en lumière les lacunes. C'est surtout à partir du post-expressionnisme flamand que vous accablent les reproches des absents. Il faudra sans doute bien des années et beaucoup d'argent pour rattraper le retard pour autant qu'il soit encore rattrapable. En outre, il faudra avoir le courage de retirer certaines choses, bravant ainsi d'éventuelles dispositions testamentaires. Toutefois, à en croire certaines rumeurs, le conservateur ne disposerait que d'un budget des plus modestes pour mener à bien une telle action. Il est clair qu'une politique d'achat, respectueuse tant des contraintes budgétaires que des impératifs scientifiques, constitue la seule issue. Il convient d'ajouter par ailleurs que les options à prendre risquent d'être sérieusement hypothéquées par l'internationalisation indispensable de la collection. Un musée national d'art moderne ne saurait offrir une vue d'ensemble de l'évolution des divers courants artistiques sans y intégrer les représentants étrangers les plus significatifs. Voilà en tout cas une tâche
singulièrement rude, compromise à coup sûr tant par la modicité des crédits alloués que par les inévitables manifestations d'amour-propre national.
Gaby Gyselen / B-Brugge
(Tr. U. Dewaele)