Annees d'enfance
En 1978, parut aux Pays-Bas Kinderjaren, nouvelle de Jona Oberski. Le petit livre connut assez vite une deuxième puis une troisième édition ainsi que des traductions en anglais, en allemand, en finnois, en italien et en hébreu. En 1983, le ‘Mercure de France’ publia à son tour une traduction française de l'opuscule intitulée Années d'enfance et due à Philippe Noble. Un succès presque comparable à celui du Journal d'Anne Frank.
Mais l'analogie avec le célèbre journal ne s'arrête pas là. Jona Oberski est lui aussi un Juif néerlandais et, dans l'ouvrage, il raconte également les souvenirs d'enfance que lui laissa la période la plus effroyable de l'histoire récente
de l'Europe: la chasse aux juifs et leur extermination sous le régime nazi.
Jona Oberski, né en 1938, avait à peine cinq ans quand il fut arrêté avec ses parents et déporté au camp néerlandais de Westerbork, puis au camp d'extermination de Bergen-Belzen. Le livre est donc pratiquement tout entier autobiographique.
Mais si bouleversant que soit cet épisode de l'histoire d'une vie, un livre n'est bon que s'il est bien écrit. Cette nouvelle est rédigée dans une langue d'une grande sobriété. Une sobriété dont la traduction française de Philippe Noble n'a rien perdu du reste. Mais c'est surtout le point de vue narratif qui fait de ce texte une oeuvre exceptionnelle. Tout le récit est vécu et raconté par le gamin de cinq ans Jona Oberski lui-même. Des événements inhumains remplissent ses journées passées à Westerbork et surtout à Bergen-Belzen: la faim, la mort de son père, une visite à l'ossuaire (knekelhuis) - que les enfants appellent toutefois la serrerre (ketelhuis) -, la mort de sa mère, le premier contact avec ses parents adoptifs. Autant d'images choquantes, traumatisantes pour le garçonnet.
D'un autre côté, il semble ne pas en avoir pleinement conscience. Il décrit les événements exactement comme il les voit et non comme un lecteur adulte les ressent sans doute. Ainsi les derniers instants de son père:
Tout à coup il s'est retourné sur le dos. Il a avalé sa salive. Il a poussé un profond soupir et ouvert les yeux. Il a eu un regard étonné. Mais le docteur avait bien dit qu'il dormait quand on