vernements successifs, qui aboutit à trois courants différents. Le flamingantisme était l'un des trois, bien que n'étant pas le plus fort. Grâce à la relative démocratisation du droit de vote, certains groupes non-francisés furent associés au pouvoir politique. Le Mouvement flamand disposait ainsi, pour la première fois, d'un moyen d'expression politique. Dans sa lutte contre le catholicisme et en vue de préserver ses propres intérêts, le parti libéral était disposé à faire des concessions afin d'obtenir ces nouvelles voix.
La radicalisation du conflit qui opposait les cléricaux aux anticléricaux eut des répercussions directes dans les loges. En 1854 fut décidée la suppression, dans les statuts, de l'article 135 interdisant les discussions politiques. Le seul obstacle formel qui subsistait encore fut ainsi écarté, de sorte que dorénavant le chemin de l'action politique concrète se trouvait ouvert. En adhérant au parti libéral, des francmaçons réussirent à y faire accepter leurs propositions.
Les différentes sensibilités qui existaient au sein du mouvement libéral face à la lutte flamande avaient leurs porte-paroles dans les loges. De quelles tendances s'agissait-il exactement? La grande majorité des doctrinaires faisaient également preuve de conservatisme devant le problème flamand. Gagnés à la politique de ségrégation intégrale, qui séparait la classe bourgeoise des groupes socialement inférieurs, ils souhaitaient maintenir une barrière sociale également sur le plan linguistique.
Les libéraux progressistes, en revanche, nourrissaient des conceptions toutes différentes sur ce point. Leurs craintes devant la cléricalisation progressive de la Flandre leur inspirait une forme particulière de flamingantisme. Satisfaire aux revendications linguistiques signifiait pour eux en premier lieu combattre le clergé et répandre les idées laïques en Flandre et à Bruxelles. Pour des raisons faciles à comprendre, les prises de position pro-flamandes de ce groupe de libéraux atteignirent un point culminant dans la période 1870-1880. A cette époque les pressions anticléricales et sécularisantes s'avéraient les plus fortes au sein de leur parti. De plus, jusqu'en 1878, leur formation manifestait la volonté de reconquérir à tout prix le pouvoir sur les catholiques, de sorte que chaque voix, fût-elle flamande, était importante.
A côté de ceux qui étaient flamingants pour des raisons d'ordre anticlérical, le camp progressiste comptait d'autres membres dont le flamingantisme s'appuyait sur des motifs sociaux. A leurs yeux, la promotion du néerlandais en tant que langue culturelle ne constituait qu'un aspect de l'émancipation totale, c'est-à-dire à la fois culturelle, économique, sociale et politique. Bourgeois francisés, ils exprimaient ces aspirations en français, mais pour le reste, ils ne se différenciaient pas de leurs collègues néerlandophones au sein du parti.
Entre-temps, le Mouvement flamand avait évolué. Ce n'était pas un simple mouvement linguistique; il commençait à revêtir un caractère plus politique. Initialement il avait essayé de se poser en mouvement unitaire contre la politique de francisation du gouvernement, mais lorsque le conflit entre cléricaux et anticléricaux devint aigu, un changement de tactique s'imposa et le Mouvement flamand se mit à oeuvrer dans ces deux courants. C'est ainsi qu'une aile flamande naquit au sein du parti libéral. Ces flamingants libéraux assimilaient comme les autres l'anticléricalisme au flamingantisme, rendaient l'Eglise et le clergé responsables de l'état d'infériorité intellectuelle de la Flandre et se proposaient d'émanciper celle-ci par la voie de l'éducation populaire et de l'enseignement.
Parallèlement à la percée des anticléricaux radicaux et des progressistes sociaux au sein des loges, des noyaux actifs de flamingants apparurent dans l'ensemble des ateliers en Flandre et à Bruxelles. C'est à Anvers qu'ils étaient le plus nombreux. Entre 1865 et 1875, on trouve parmi Les Amis du Commerce et de la Persévérance Réunis un groupe de militants, constitué notamment des collaborateurs et rédacteurs de journaux libéraux et flamingants, des membres de la direction de la Fédération libérale flamande d'Anvers et des membres du fonds culturel libéral Willemsfonds (du nom d'un précurseur particulièrement actif). Vers 1876-1878, ce groupe passa à la loge Les Elèves de Thémis, qui acquit ainsi un caractère