Maurice Carême.
Van de Woestijne, Van Ostaijen, Van Nijlen), par la traduction d'une vingtaine de poèmes caractéristiques de chacun d'eux. J'ai eu le plaisir de présenter ces
Etoiles aux lecteurs de
Septentrion en mai 1974 (no. 3-1, p. 25).
Henry Fagne.
Trois semaines à peine après la mort de Maurice Carême, nous avons été frappés par le décès, également à Bruxelles, de l'éditeur et poète Henry Fagne (4 février 1978).
On peut difficilement imaginer une poésie plus opposée à celle de Carême que les vers beaucoup moins éclatants de Fagne. Pour ce petit homme vif en combatif, la croyance en l'homme, sa présence sur terre et sa lutte pour l'éternelle Beauté n'était nullement le fruit d'un conviction sans faille, mais un acte de volonté toujours répété; il devait conjurer coup sur coup les échecs, le doute, le découragement:
Tu cherches à dire, gosier serré.
Règne, règne, ou meurs, tu ne peux pas
donner un sens, plus de symbole.
Grands esprits, il pleut menu et froid,
des jours, des heures, la demeure
ne réchauffe que bouches et flancs.
De cela seul on te sépare, Est-ce là: mort?
La vie absorbera la mort, et règnera.
Dure pluie intermittente, in De plante et de fantôme, 1967.
Les quinze dernières années de sa vie, Henry Fagne manifestait son activité en premier lieu comme éditeur de poésie (cela même étant l'ultime refuge d'un désespéré?) et de Nouvelles à la main, un petit journal sur et pour les poètes. Il publia également la collection Poètes néerlandais, dont chaque numéro nous donnait une quinzaine de poèmes en traduction française, après une courte présentation du poète sélectionné.
Il a surtout voulu informer son public francophone, jeter un pont entre deux cultures si proches et si éloignées en même temps. Son attention n'allait pas à la valeur littéraire de ses traductions, mais davantage à sa vraie intention ‘d'attirer l'attention des amis de la poésie... sur un domaine infiniment riche de la poésie mondiale’; infiniment riche, certes, mais trop inconnu au dehors de ses propres frontières.
Maurice Carême et Henry Fagne ont essayé ce que trop peu de personnes font en Belgique: introduire la littérature de l'autre aire linguistique auprès des lecteurs de son propre territoire.
Malgré les difficultés de tout ordre, malgré les augures parfois inquiétants de la constellation politique, ils ne se sont jamais laissé décourager dans leurs efforts. La Flandre, et par la Flandre toute la communauté néerlandophone continuera à faire honneur à leur mémoire.
Jan Deloof.