Mededelingen van het Cyriel Buysse Genootschap 11
(1995)– [tijdschrift] Mededelingen van het Cyriel Buysse Genootschap– Auteursrechtelijk beschermd
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Alice BuysseLe bon scout et le petit chienUn acte de courage et de bonté que je signale ici avec l'espoir de le voir r[é]compenser ainsi qu'il le mérite, de la part de ses supérieurs, fut héroïquement accompli par un jeune scout. Du haut du Pont Albert à Gand, des ‘méchants’ avaient précipité à l'eau une pauvre petite chienne entravée, infailliblement destinée à se noyer. Un scout passa. Attiré par des g[é]missements qui s'éteignaient tristement il prêta l'oreille, repéra aussitôt l'endroit du crime et, n'écoutant que son coeur, se précipita au secours de la petite bête qui se noyait dans un dernier crispement de ses pattes ficelées, les yeux hagards d'épouvante. Le bon jeune homme ramena la chienne à la terre ferme, la porta ‘chez nous’ à l'asile ensoleillé, si accueillant pour les malheureux à quatre pattes. La chienne accoucha quelques jours après - on l'avait impitoyablement noyée pour ça - le jeune sauveteur récolta les félicitations de notre Comité et la petite ‘rescapée’ a trouvé asile chez des maîtres plus cléments. Le scout s'appelle Eugène Claessens, de la 1e troupe de Gand et celle qui écrit ces lignes renouvelle ses chaleureuses félicitations au jeune sauveteur avec l'espoir que tous les scouts s'inspireront de son bel exemple d'altruisme.
Présidente | |
Nos chiens de traitLe chien, ce vieil ami, ce vieil allié de l'homme, le chien qui, depuis les origines de la civilisation lui a rendu d'inappréciables services, na pas à se louer plus que les autres animaux domestiques, de la reconnaissance de son maître. Et parmi les bonnes bêtes au regard aimant et reconnaissant pour la plus petite ébauche de bonté, deux catégories surtout m'inspirent | |
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une pitié très grande en me déchirant le coeur: le chien de garde et le chien de trait. J'ai parlé fréquemment ici même de l'affreux martyre du chien prisonnier à sa niche exposée à tous les vents et je ne m'y arrêterai pas aujourd'hui. Dans quelque temps nos Conseillers Provinciaux auront à discuter un projet de règlementation provinciale concernant les attelages des chiens en Flandre. Nous sommes la seule province en Belgique où ce règlement est inexistant et je viens par la voie de notre petit périodique demander à ces Messieurs qui ont certes bon coeur, d'arrêter un instant leur pensée sur la vie torturée de eet ami et auxiliaire de l'homme qui s'appelle ‘chien’ et qui dans tant et tant de cas est malmené et torturé. Hélas! le beau mâtin solidement campé sur ses pattes, bien attelé, tirant allègrement la charrette où des bidons remplis de lait étincèlent, n'existe plus que sur les cartes postales illustrées. Au lieu de cela, nos routes de province sont jalonnées de charrettes attelées de petits chiens mal nourris, maigres à faire pleurer, surchargés, défectueusement attelés, souvent blessés et poussés vers leur pénible but lointain par une brute - généralement jeune - armee d'un bâton comme les marchands de bestiaux. Ce spectacle navrant révolte les touristes étrangers qui visitent la Flandre si belle et si attrayante et les excursionnistes nous envoient fréquemment de véhémentes protestations à ce sujet. J'avoue que je comprends parfaitement l'indignation avec laquelle Sir Mevide Graham écrivit à la Société Protectrice les lignes qui suivent et qui - il faut le reconnaitre - sont un blâme cinglant que nous méritons. En voici un extrait: ‘Les traitements infligés aux chiens de trait sont indignes d'un peuple civilisé et produisent une pénible impression sur les personnes de langue anglaise habitant le pays. Je ne comprends pas qu'une pratique aussi cruelle soit permise en pleine civilisation. Je ne connais aucune race de nègres qui voudraient traiter leurs chiens de la sorte. Les étrangers, de séjour de votre pays, et témoins de ces cruautés en font rapport en retournant dans leurs pays, à leurs amis, à la presse et ces cruautés acquièrent de jour en jour une plus grande publicité.’ | |
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Voilà ce qu'écrivit Sir Mevide Graham. Il disait vrai, et cette juste opinion de la part d'un étranger fait mal, convenons-en. Il est temps, il est urgent que à l'instar des autres provinces Belges, la Flandre Orientale possède enfin un règlement qui permettra à la police rurale, aux gendarmes d'agir utilement en cas d'abus. Nous ne demandons pas d'intervention brutale, nous demandons du tact, les bons conseils, la persuasion avant de sévir. Mais notre corps policier rural doit pouvoir s'appuyer sur un règlement. C'est pour nous aider à orienter le campagnard vers plus de bonté envers ses humbles serviteurs, que nous demandons aux Autorités Provinciales de voter le règlement mûrement et sagement étudié qui leur sera soumis à la prochaine session du Conseil Provincial. Justice et bonté seront toujours notre guide et notre flambeau et l'humanité elle-même ne pourra que gagner à ce progrès moral. Qu'on nous y aide!
De Keyser-Buysse | |
Souvenirs d'autrefoisC'est avec une pointe d'émotion réelle que je reporte ma pensée au l4 juillet 1902 à l'époque bénie de notre belle jeunesse. Je nous revois en Suisse par une journée glorieuse de soleil et de ciel bleu, très inconfortablement assis - mais combien heureux - dans les coussins rocailleux d'une petite voiture de montagne. Je vois les deux poneys noirs gravir la côte longue et dure qui relie Martigny, située à 470 m. d'altitude, dans la vallée du Rhône, à Orsières, bourg de 1400 habitants - alors - juché à 887 m. au débouché du Val Ferret. Nous devions y passer la nuit pour gravir de grand matin, sac au dos, les pentes abruptes qui allaient nous mener le soir à l'Hospice du Grand St-Bernard. J'entends encore la voix sonore de notre postillon lancer des boutades joviales aux pâtres de la montagne et je revois la petite chambre de la modeste auberge, où, sur un lit dur comme pierre notre jeunesse allait trouver un sommeil bienheureux et les forces nécessaires pour l'escalade du lendemain. Et, au matin, frais, dispos, joyeux, nous enfilames allègrement le chemin muletier, avec les chèvres d'Orsières et leur petit pâtre qui, | |
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chaque jour menait son troupeau vers l'herbe rare, en écoutant le concert harmonieux de ses clochettes. Le monde était à nous! Et puis, ce grand désir caressé depuis mon enfance qui allait se réaliser: voir les moines et les chiens du Grand St-Bernard, dont mon père, au cours des longues soirées d'hiver à la campagne, avait raconté tant ‘d'histoires’ à sa petite fille attentivement blottie sur ses genoux devant l'antique feu de bois de la salie à manger. Après des heures de marche entrecoupées d'arrêts devant l'impressionnante grandeur des glaciers et des neiges du Mont Velan, nous traversons la gorge profonde de la redoutable Dranse du Valsorey et sa cascade et poursuivons notre chemin par le sentier escarpé que Bonaparte franchit en 1800 au prix d'incroyables difficultés avec une armée de trente mille hommes. Nous nous arrêtons au ‘pas difficile’ où par suite d'un faux pas de sa mule, le premier Consul faillit tomber dans les abîmes noirs de la rivière. Son guide le sauva miraculeusement en le retenant au-dessus du gouffre par les pans de sa redingote. Trois semaines après ce même général et cette même armée, redescendus de l'autre côté des Alpes, remportaient aux champs de Marengo la mémorable victoire que l'on sait. Nous pensions à tout cela en quittant cette gorge sinistre pour aboutir par des pâturages couverts d'éboulis au Plan de Proz, en face du glacier de Menouve et au morne défilé dit de Marengo, où l'ascension devient très pénible. Et pas un être vivant, ni homme, ni bête... Enfin Hospitalet! 2100 m. d'altitude! Deux chalets de pierre. La fatigue était venue, mais l'enthousiasme resta entier. Les sacs-audos coupaient nos aisselles, nos jambes étaient moins légères, les souliers commençaient à pincer... Nous nous regardions à la dérobée de temps en temps en essayant d'ébaucher un silencieux sourire, pas très sincère... ‘Tout de même, c'est long et c'est dur, risqua mon mari, résigné; et c'est toi qui l'as voulu.’ - ‘Je ne regrette rien, lui répondis-je crânement; marchons!’ Une pluie fine commençait à tomber, une pluie très différente de celle qui nous arrose ici. Ce n était pas une pluie d'eau, mais une pluie qui devait avoir fraternisé avec la neige. Un vent âpre se levait et nous cingla le visage. ‘Entrons dans le chalet.’ Une morgue! Nous apprîmes plus tard que c'est là qu'on déposait les cadavres trouvés dans les environs. Et le chalet à côté? Refuge en cas de mauvais temps! Il s'annonce, le | |
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mauvais temps, pressons le pas, grimpons, grimpons plutôt vers l'Hospice qui ne peur pas être loin. Infiniment las et nostalgiques nous escaladons tristement le site aride et sauvage devant nous. Le ciel devient gris et la singulière pluie se fait neige. Très vite la terre est blanche, le vent gémit en rafales, et nous coupe la respiration. Nous grimpons toujours... Je grelotte... Je ne me plains pas... l'ayant voulu. Fatigués et silencieux, nous poursuivons le sentier que la neige a rendu invisible mais que nous devinons; le désespoir allait envahir notre coeur lorsque - ainsi qu'en un conté de fées - une cloche se mit à tinter... Nous écoutons étonnés, nous nous regardons, nous nous arrêtons en levant les yeux vers ce que nous espérons voir et ce que nous ne voyons pas. ‘Ça doit être la cloche de l'hospice’ dit mon mari. Cette cloche ne cessa plus de tinter et c'est vers elle, guidés par sa voix, que nous dirigeons nos pas. La neige descendait épaisse du ciel assombri, nous aveugla, le vent se fit terrible, essayant de nous renverser... et la cloche sonnait... sonnait... Des aboiements de chien! des aboiements lointains! ‘Sais plus’ dis-je à bout de force, ‘je m'engourdis, je veux dormir’. Le besoin de sommeil qui m'envahit si subitement m'empêcha de comprendre l'angoisse de mon pauvre homme perdu dans la neige avec une femme qui s'obstinait à ‘vouloir dormir’. La cloche sonnait toujours... Je m'étais affalée, mon mari s'assit tristement à mes côtés et la neige nous couvrit d'un linceuil blanc. Je m'assoupis... Il paraît que peu après, un grand chien, un hercule de chien avait débouché sur la terre blanche, suivi d'un homme habillé de noir - un frère maronnier - que la bonne bête convoyait vers nous guidée par son mystérieux instinct. ‘Levez-vous bien vite, ma petite dame, et venez avec moi, tous deux, l'hospice nest pas loin.’ Le bon frère nous fit boire du rhum, caressa son chien, mon mari passa son bras sous le mien en me disant à l'oreille ‘méchante’ et l'escalade recommença, lente et pénible, à la suite du grand molosse et du frère maronnier qui nous dit avec bonhomie des paroles réconfortantes. Nous arrivâmes enfin devant la grande et froide maison et le frère aumônier en nous ouvrant la lourde porte nous tendit les deux mains en signe de bienvenue. Il était quatre heures, nous étions | |
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glacés et il fallut se mettre au lit tout de suite. Un grand verre de rhum encore, un bon feu de bois dans la vaste chambre, ébranlée par la fureur des éléments déchaînés, le réconfortant sommeil quand même... Quand la cloche du souper sonna, nous étions ranimés. Nous n'étions pas les seuls voyageurs. Bien avant nous et bien avant la tempête une phalange de musiciens était arrivée d'Aoste: des citoyens de Martigny en excursion depuis plusieurs jours s'en retournant vers leur ville faisaient halte cette nuit au Monastère. On y était hébergé et nourri gratuitement à cette époque et en quittant l'accueillant asile on donnait - avec sa gratitude - le don qu'on voulait bien donner. Nous soupions copieusement, tous réunis autour du Frère aumônier à la même table, dans l'immense salie à manger. L'ambiance était bruyante et joyeuse. Arrivés en retard au souper, nous levant de table les derniers, pour traverser le grand vestibule où, comme unique ornement, se trouve un grand chien de St-Bernard empaillé, nous vîmes la Fanfare de Martigny groupée autour de son chef qui, dès qu'il nous aperçut, leva[,] sa baguette. Une vibrante Brabançonne fit résonner les voûtes austères du cloître. L'émotion nous cloua sur place et notre pensée reconnaissante s'arrêta avec sympathie sur ces bons Suisses qui nous rappelaient à une altitude de 2472 m. notre chère patrie d'aussi impressionnante façon. La communion était établie: Suisses et Belges fraternisèrent, on servit du vin et encore du vin, on trinqua avec les bons ‘Frères’... Et je n'ai jamais passé de plus impressionnante soirée que celle au sommet du Grand St-Bernard, par un temps affreux de neige, de vent et de tempête... Il fallut se coucher prévenus par les Frères Augustins que des feux flamboyants attendaient les voyageurs dans des chambres bien chaudes, alors qu'au dehors la rafale faisait rage... Je dormis mal, les chiens hurlant à travers la tempête et à cause aussi du vent qui ébranla nos fenêtres de violentes secousses, jusqu'au matin. Et au matin, le frère aumônier prêt à satisfaire ma curiosité, malgré le mauvais temps, m'emmitouffla dans une pélerine chaude en me disant: ‘Venez’ nous irons voir les chiens. Nous sortons, cinglés par la tourmente, les jambes s'enfonçant jusqu'aux genoux dans la neige amoncelée. Un petit bâtiment portant une croix au pignon frappe le regard: la morgue. Encore! Tout est donc implacable et revêche dans cette solitude. Et le Frère nous conta qu'autrefois ce gîte était très habité par les cadavres qui | |
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dans ces hauteurs ne se décomposent pas vite; et que maint pauvre diable, faisant la route d'Aoste à Martigny, enseveli sous la neige, exhumé tardivement resta reconnaissable très longtemps dans sa rigidité éternelle... On frisson[n]e en écoutant le bon Frère. Et voici les chiens! Les chiens, ces grands amis, ces précieux auxiliaires des moines sont hébergés dans de vastes chenils soigneusement défendus contre les intempéries. Ils sont grands, forts, un peu trop gras: ils sont aimés! A la vue du Frère, les jeunes gambadent joyeusement autour de lui, dès qu'il ouvre la porte de leur maison, tandis que les vieux regardent le ‘maître’ d'un oeil interrogateur et impatient qui semble demander: ne faut-il pas partir? Dès que la tempête gronde, nous dit le frère, ils ne sont pas à tenir: ils veulent s'élancer à la recherche du voyageur égaré. Seulement, depuis que le téléphone est installé et quand la tempête n'a pas détruit les communications, nous sommes prévenus dès que les voyageurs sont en route et nous ne nous mettons à leur recherche que s'ils n'arrivent pas assez vite à l'Hospice. Les chiens courent, gambadent et jouent autour de nous. Ils sont une vingtaine, jeunes et vieux, au poil ras, noir et blanc tacheté, roux et blanc et roux entièrement. Ils sont vigoureux, alertes, agiles, ils sont bons et possèdent une finesse inouie d'odorat, retrouvent sans peine le sentier sous la neige, flairent de loin le voyageur égaré et parfois même pressentent la chute d'une avalanche, si redoutable dans ces régions. Par gros temps ils sont agités, tels cette nuit même, nous dit le Frère, leur instinct les pousse impérieusement à secourir et rien ne les arrête... Bonnes bêtes! Quel exemple êtes-vous donc au genre humain! Si chacun, comme vous, ressentait ce besoin de secourir, notre pauvre humanité vivrait une vie bien meilleure! Avec une pointe d'émotion, et caressant la grosse tête d'une bête agée, venant lécher sa main, le Frère nous paria du chien Barry dont la dépouille empaillée est conservée au Musée de Berne, qui en douze années sauva plus de vingt personnes ensevelies sous la neige, condamnées irrémédiablement à mourir sans son intervention. Barry fut décoré... d'une médaille attachée à son cou par ordre de la Confédération. ‘Nos bêtes ici font partie de la familie, nous dit le Frère. Isolés que nous sommes dans ce désert ils sont notre société et nos amis.’ | |
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Alors on paria de l'Hospice même fondé en 962 par St-Bernard de Menthon pour accueillir et soigner gracieusement les étrangers et pour aller au secours des voyageurs en danger pendant la saison des neiges, qui dure neuf mois. Les chiens ont sauvé une quantité incalculable de vies humaines. L'Hospice est l'habitation d'hiver la plus élevée des Alpes et on y envoie des moines jeunes et vigoureux qui, malgré leur résistance, sont obligés, après six mois de séjour dans ces hauteurs, de redescendre à la Maison-mère à Martigny pour s'y refaire la santé. L'Hospice était riche au moyen-âge, grâce à sa destination philantropique qui lui valut de nombreux dons. ‘A présent c'est fini, nous dit le frère tristement, et bien des voyageurs hébergés chez nous, s'en vont, sans nous donner la plus petite gratification. [’] Vers midi la tempête s'était calmée. Il fallut partir. La ‘fanfare’ de Martigny quitta d'abord, joyeusement, jouant pour nous une dernière Brabançonne en descendant la côte. Nous prîmes la route d'Aoste dans une minuscule voiturette vétuste arrivée l'avant veille de cette ville avec un douanier italien. Mon mari avait obstinément refusé de faire la descente à pied: le souvenir de la veille était vivace encore. La mule avec sa voiturette malade nous descendit par de longs lacets à la tombée du jour à Aoste, ville italienne au caractère méridional avec ses champs d'absinthe et ses vignes. Je voulus voir encore la tour du Lépreux connue par le récit de Xavier de Maistre et où vécurent de 1771 à 1803 le Lépreux Guasco et sa soeur Angelica. Mon rêve d'avoir vu l'Hospice du Grand St-Bernard était accompli et toute la misère vécue était effacée, pour laisser place à tout ce qui fut heureux durant ces deux jours. | |
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Il n'en était pas ainsi autrefois où cette ascension dont je vais vous parler était dure, dangereuse et très intéressante. C'est avec une pointe de réelle émotion que je reporte ma pensée à bien des années en arrière et que je me rappelle notre résolution héroïque de gravir à pied - le seul moyen de locomotion alors - les pentes abruptes et désolées du Grand St. Bernard. Ce grand désir caressé depuis mon enfance allait se réaliser: voir les moines et les chiens du Grand St. Bernard dont mon père, au cours des longues soirées d'hiver à la campagne, avait raconté tant ‘d'histoires’ à sa petite fille attentivement blottie sur ses genoux devant le feu de bois de la salie à manger. La course allait durer la journée entière et par un frais matin de juillet nous quittons Orsières, où nous avions passé la nuit, sur un lit dur comme une pierre. Peu importe, le monde était à nous! Six heures du matin. Sac au dos nous nous embarquons courageusement vers l'aventure...
Après des heures de marche entrecoupées d'arrêts devant l'impressionnante grandeur des glaciers, nous traversons la gorge profonde et redoutable de la Dranse de Valsorey et poursuivons notre chemin par le sentier escarpé que Bonaparte franchit en 1800 au prix d'incroyables difficultés avec une armée de trente mille hommes. Trois semaines plus tard ce même Bonaparte et cette même armée redescendus de l'autre côté des Alpes, remportaient aux champs de Marengo la mémorable victoire que l'on sait. L'ascension devient très pénible. Et pas un être vivant, ni homme ni bête... Et nous grimpons toujours... Enfin Hospitalet! 2100 m. d'altitude. Deux chalets de pierre. Il est midi. Assis sur le roe dur, nous ouvrons nos sacs pour nous restaurer. ‘Tout de même, c'est long et c'est dur, risque mon mari résigné; et c'est toi qui l'as voulu’ - ‘Je ne regrette rien’, lui répondisje crânement; marchons. Une pluie de fine neige commencait à tomber, un vent âpre nous cingle le visage. ‘Entrons dans le chalet’. Une morgue! Les moines nous dir[o]nt le soir que c'est là qu'on déposait les cadavres que les chiens découvraient sous la neige. Nous grimpons toujours, je grelotte, je ne me plains pas... l'ayant voulu. Fatigués et silencieux, nous poursuivons le sentier que la neige | |
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a rendu invisible, le désespoir allait envahir notre coeur lorsque - ainsi qu'en un conté de fées - une cloche se mit à tinter... ‘Àa doit être la cloche de l'hospice’ dit mon mari. Cette cloche ne cessa plus de tinter et c'est vers elle, guidés par sa voix, que nous dirigeons nos pas. La neige descendait épaisse du ciel assombri, nous aveugla, le vent devint terrible, et la cloche sonnait... sonnait... Des aboiements de chien! des aboiements lointains! ‘Sais plus’ disje à bout de forces, ‘je m'engourdis, je veux dormir’. Le besoin de sommeil qui m'envahit si subitement m'empêche de comprendre l'angoisse de mon pauvre homme perdu dans la neige avec sa femme qui s'obstinait à ‘vouloir dormir’.
La cloche sonnait toujours... nous étions repérés. Je m'étais affalée et je m'assoupis... Il paraît que peu après un grand chien, un hercule de chien avait débouché sur la terre blanche, accompagné d'un frère maronier que la bonne bête, des vivres suspendus à son cou, convoyait vers nous, guidée par son mystérieux instinct. -‘Levez-vous bien vite ma petite dame, et venez avec moi tous les deux, l'hospice n'est pas loin’. - Le bon frère nous fit boire du rhum, caressa son chien, mon mari passa son bras sous le mien et l'escalade recommença lente et pénible, à la suite de la bonne bête et du frère maronier qui avec bonhomie nous encouragea par ses réconfortantes paroles. Nous arrivâmes enfin devant la grande et froide maison et le frère portier en ouvrant la lourde porte nous tendit les deux mains en signe de bienvenue. Il était quatre heures, nous étions glacés et il fallut se mettre au lit tout de suite. Un grand verre de rhum encore, un imposant feu de bois dans la vaste chambre, ébranlée par la fureur des éléments déchaînés, le réconfortant sommeil quand même...
Quand la cloche du souper sonna, nous étions ranimés, et nous firnes honneur au copieux repas que le Frère aumônier nous offrit gratuitement. Jamais je n'oublierai l'impressionnante soirée passée au sommet du Grand St. Bernard, par un temps affreux de neige, de vent et de tempête... Après d'intéressants échanges de vue avec les Frères Augustins, on vint nous avertir que des feux flamboyants nous attendaient dans notre chambre très chaude, alors qu'au dehors la rafale faisait rage... | |
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On dormit mal, les chiens hurlant à travers la tempête et le vent furieux ébranlant nos fenêtres de violentes secousses jusqu'au matin. Profitant d'une éclaircie le frère aumônier nous emmitouffla dans une pélerine chaude et répondant à mon désir: ‘Venez, nous irons voir les chiens’. Nous sortons, les jambes s'enfonçant jusqu'aux genoux dans la neige amoncelée. Un petit batiment, surmonté d'une croix frappe le regard: la morgue. Encore! Tout est donc implacable et revêche dans cette solitude. Le Frère nous dit qu'autrefois ce gîte servait à recueillir les cadavres de pauvres diables faisant la route d'Aoste à Martigny, ensevelis sous la neige, découverts par les chiens et restant longtemps reconnaissables dans leur rigidité éternelle, à cause du climat glacial. On frissonne en écoutant le bon Frère. Et voici les chiens! Ces précieux auxiliaires des moines sont hébergés dans de vastes chenils soigneusement défendus contre les intempéries. Dès que gronde la tempête, nous dit le Frère, ils ne sont pas à tenir, ils veulent s'élancer à la recherche du voyageur égaré. Ils possèdent une finesse inouïe d'odorat, flairent de loin le voyageur perdu et parfois même pressentent la chute d'une avalanche, si redoutable dans ces régions. Bonnes bêtes! Quel exemple donnez-vous aux hommes! Si chacun, comme vous, ressentait ce besoin de secourir, notre pauvre humanité en serait bien meilleure! ‘Nos bêtes ici font partie de la familie, nous dit le Frère; isolés que nous sommes dans ce désert, ils sont notre société et nos amis’. Alors le Frère nous parla de l'Hospice même fondé en 962 par St. Bernard de Menthon pour accueillir et soigner gracieusement les étrangers et pour aller au secours des voyageurs en danger pendant la saison des neiges qui dure neuf mois. Les chiens ont sauvé une quantité incalculable de vies humaines. L'Hospice est l'habitation la plus élevée des Alpes et on y envoie des moines jeunes et vigoureux qui, malgré leur résistance sont obligés, après six mois de séjour dans ces hauteurs, de redescendre à la Maison-Mère à Martigny pour s'y refaire la santé. Après avoir accompli toutes nos obligations et remercié chaleureusement les bons Frères pour leur généreuse intervention au cours d'heures tragiques nous eûmes la chance de prendre place dans une cariole vétuste, arrivée la veille d'Aoste avec un douanier italien. La mule avec sa voiturette branlante nous descendit par d'inter- | |
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minables cahoteux lacets, vers le soir à Aoste, ville italienne au caractère méridional avec ses champs d'absinthe et ses vignes. Après tant d'années de recul je veux revoir ces lieux dramatiques dont la vision reste gravée dans ma mémoire; je veux refaire l'ascension du Grand St. Bernard au cours de l'été. En automobile cette fois, avec la certitude de courir au-devant d'une pénible déception: le modernisme et les temps nouveaux auront tué la poésie qui malgré tout se dégageait de la terre aride et désolée, du Monastère, des Frères si accueillants et de leurs grands amis, les chiens. De Keyser-Buysse | |
GaaJe la rencontrais presque chaque jour lorsque, lasse d'une longue course sous les rayons d'un soleil tapant, je revenais vers l'heure de midi à l'hôtel, je la voyais marcher, la bonne petite vieille française un peu courbée, toujours suivie de son cochon rose, gras, gentil, familier et qui se mouvait dans les rues animées de Nice avec une incroyable aisance en ce mois de janvier 1930.
Elle portait au bras un volumineux panier que le fidèle cochon reniflait de temps en temps de son petit groin mobile. Lorsque la foule était trop dense et que la petite bête semblait s'égarer un instant elle l'appelait: ‘Gaâ, Gaâ’ et aussitôt, bousculant tout, le petit Gaâ rejoignit sa vieille maîtresse. Les passants s'arrêtaient, la plaisantant impitoyablement parfois, ou tentaient de lier connaissance pour savoir... Un jour je l'accostai. Elle me regarda sans répondre, méfiante, et continua sa route d'un air de mépris. Elle crut que je riais d'elle, comme les autres. Je résolus de l'apprivoiser, j'y parvins et elle me fit des confidences. Ce petit cochon avait son histoire. Il fut acquis en guise de porte bonheur le jour de la Noël par deux fiancés en excursion dans la montagne. Animés, débordants de bonheur ils avaient au bras l'un de l'autre cotoyé une fermette où paissaient des porcelets avec leur mère. Tout de suite ils voulurent un cochon. Cette mascotte acquise | |
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pendant les fiançailles garantit un avenir de bonheur aux futurs époux, à la condition de ne pas immoler la bête avant les épousailles... Le lendemain le petit cochon rose fut amené à la ville avec les oeillets et les mimosas destinés au marché. Mais dans leur joyeuse étourderie les jeunes avaient oublié que leurs parents logeaient en appartement, à l'étage. Un chien, un chat, passé encore, mais un cochon! A ce moment précis la vieille Yvonne passa. Elle avait une courette, elle, habitant un petit rez-de-chaussée et elle était si bonne. Elle adopta le porcelet qu'on lui offrit, s'engagea à le faire vivre. C'est pourquoi, munie de son grand panier elle recueille chaque jour chez ses voisins - dont une vaste pension de familie - les restants qu'on lui donne de bon coeur pour sa mascotte. Plus d'une fois j'ai rendu visite à la vieille française dans sa courette au fond d'un couloir sombre, éprouvant un réel plaisir à la sentir heureuse sous le soleil qui dore les choses, heureuse avec son chien, son chat, son petit cochon, heureuse à la pensée - elle me l'a confié - d'avoir contribué au bonheur futur de deux jeunes fiancés.
Bonne petite vieille, va!
De Keyser-Buysse | |
MusscheMussche was mijn vaders hondje. Mussche was niet altijd vaders hondje geweest. Hij was vroeger een arme stakkerd, speelbal van kleine kinderen die een slordig huisje naast den ingang der fabriek bewoonden. Mussche was ook niet altijd Mussche genoemd geworden. In het vuil armoedig huisje, bij de jongens die hem martelden, die hem bij zijn krulstaartje rondsleurden heette hij ‘marquis’. Hij was niet schoon de arme stumperd met zijn vuil lang wit en zwart haar, met zijn mager klein lijfje, zijn pluimstaartje en zijne goede, droeve oogen... | |
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Niemand scheen hem lief te hebben. Alleen mijn vader die dagelijks langs kwam naar zijne fabriek, boog naar het kleine op straat zwervende hondje, streelde zijn stoffig lijfje en noemde hem ‘Mussche’ omdat hij zoo klein en zoo nietig was. Af en toe volgde Mussche vader in de fabriek of bleef naast hem op het kantoor liggen. En zoo kwam het dat Mussche een versleten mandje kreeg in vaders kantoor, waarin hij uren lang kwam liggen om aan de marteling der kinderen te ontsnappen. En de jongens durfden hem niet najagen; zij hadden schrik voor vaders hooge gestalte, voor zijn ietwat strengen blik en riepen bedeesd ‘Marquis hier’ als vader naar huis toeging gevolgd door Mussche. Op een middag, toen vader en Mussche huiswaarts kwamen voor het noenmaal, stond in onze keuken, naast de stoof, een rond mandje met een grijs matrasken erin. ‘'t Is voor Mussche’, zei de trouwe Julie, reeds bijna twintig jaren in dienst bij onze ouders en zij wees naar het mandje. ‘Dat is nu eens wel’ zei vader, ‘nu gaat Mussche niet meer weg’. Wij vroegen aan Vital, den meester van het hondje of wij hem behouden mochten: ‘'k Ben blij dat dat leelijk vuil ding uit mijn huis is’ was het antwoord. Mussche bleef bij ons en leefde er nog lange jaren in vaders schaduw. Waar vader was, zag men ook Mussche; de arbeiders der fabriek wisten het zoowel als wij, de kinderen. ‘Past op’ riepen ze elkander toe als enkelen aan het kuieren waren, ‘Mussche komt ginder’. ‘Past op[’], zei onze goede moeder, als wij krakeelden of al te luidruchtig waren, [‘]ik zie Mussche komen.’ En de kinderen bewust van wat die waarschuwing beteekende, bedaarden onmiddellijk, een beetje bevreesd omdat vader niet van lawaai[i]ge kinderen hield. Aldus leefde de kleine poedel ons leven mee, steeds verschrikt telkens dat iemand anders dan vader hem streelen wou: ongetwijfeld de onvergetelijke herinnering aan zijne vroegere marteljaren bij de onmeedoogende kleine jongens. Vader werd ziek en ging niet meer naar de fabriek. Met mijn oudsten broer wou Mussche niet mee en bleef weken en maanden lang naast vaders leunstoel of onder het ziekenbed liggen. Als de | |
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arme vader wat verzachting in zijn lijden voelde nam hij zijn hondje in zijn verzwakte armen op en meer dan eens heb ik een dikken traan over zijne bleeke wangen zien rollen... Als het tragisch oogenblik gekomen scheen, werd kleine Mussche zachtjes uit de kamer verwijderd en niemand in huis dacht nog aan het hondje. Vader stierf en het werd doodsch-stil in ons huis... 's Avonds, reeds laat, zouden moeder en wij, de kinderen, toch pogen wat te gaan rusten na den somberen dag. ‘Maar waar is Mussche’ merkte opeens de trouwe Julie, ‘waar is Mussche’. Niemand had nog aan het hondje gedacht, natuurlijk, aan vaders hondje! En nu moesten wij ze terug hebben, die levende herinnering aan den gestorven vader, het trouwe hondje dat hij zoo lief had. Wij gingen zoeken... De nacht door, in huis, in de tuinen, in de fabriek, in de buurt, zochten wij bij het schijnsel van een petroleumlamp, aldoor ‘Mussche, kleine Mussche’ oproepend. Hij kwam niet... hij kwam nooit meer terug. Waarom? 's Anderendaags beweerde een arbeider hem gezien te hebben zwervend in den landweg alwaar 's Zondags vader met zijn hondje wandelen ging. Den ganschen dag werd de omgeving doorzocht en doorkruist in de hoop het lijkje te vinden. Niets... De goede vader en zijn geliefd hondje verdwenen denzelfden dag.
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Pendant que mes compagnons se font magistralement douchet dans l'établissement thermal de l'exquise cité balnéaire je prends comme chaque jour, la clé des champs. Où irons-nous ce matin? Je décide de marcher durant deux heures: c'est ma cure à moi, et cette fatigue physique de chaque jour me repose délicieusement la tête. Je grimpe au hasard des sentiers, humant à pleins poumons l'air vivifiant, longeant les pâturages émaillés de scabieuses mauves, de pieds d'alouette roses, de marguerites jaunes et blanches sur l[es]quel[le]s des nuées de petits papillons bleus butinent... Il fait bon de vivre ici et j'aime cette promenade solitaire vers l'imposant Revard aux flancs sombres, boisés et mystérieux. Le sentier monte plus fort pour s'étirer entre des champs de vignes - ô combien prometteuses - des vignes qu'à cette époque de l'année les montagnards aspergent copieusement de la bienfaisante bouillie bordelaise, couleur bleue. Et c'est très drôle: la terre est bleue, les hommes sont bleus, la verdure même est bleue. Une mule porteuse de bidons bleus me frole légèrement en me dépassant. Son poil est constellé de taches bleues. Personne ne l'accompagne. Je la laisse passer, et, intriguée je la suis. Je veux savoir ce que cela signifie. Elle grimpe comme moi, de son pas cadencé, prenant un air sérieux de responsabilité et je la suis de près[;] j'entends des voix humaines au milieu d'un champ de vignes: un homme et un adolescent y labeurent. Père et fils sans doute car j'entends distinctement ceci ‘Va voir si Margot n'arrivé pas encore’. La mule s'est arrêtée et attend. Moi aussi. La tête du jeune homme surgit d'entre les vignes: ‘Viens Margot’. D'un bond la mule enjambe le talus et docile se laisse conduire entre les plantations tandis que j'interroge: ‘Toute seule comme ça?’ Bah oui, répond le gentil petit FraNçais, Margot connaît le métier, allez, et fera vingt fois la route entre maman et nous, si nous voulons. Et l'enfant caressant Margot, s'en va rejoindre son père avec la bête tandis que poursuivant ma grimpette je sens un sentiment réconfortant m'entrer dans le coeur. Il ne devait pas être de longue durée. Au débouché du joli sentier sur la route carrossable, un poteau attire mon regard ‘Tir aux pigeons’. Une ombre de tristesse passe sur mon front. Comme suprême ironie cet affreux tir aux pigeons est situé au hameau de Chante merle. Pour le moment le champ de meurtre est calme, très | |
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calme. L'herbe nest pas fauchée encore, le répugnant plaisir des désoeuvrés ne doit commencer que le 19 juin et la maison rose blottie dans la verdure fleurie de roses éblouissantes respire la paix, le bonheur et la quiétude. Elle va devenir bientôt cependant l'antre de ces dames et de ces messieurs désoeuvrés et le vin mousseux y coulera abondamment pour fêter le triomphe des tueurs d'innocentes bêtes, victimes d'un sport sans grandeur. Je me suis arrêtée en songeant à tout cela et mon regard parcourt le vaste champ fleuri qui dans peu de jours verra mutiler et mourir par milliers les pigeons, pour lesquels Verdun fit ériger un monument, en reconnaissance des inestimables services rendus par eux pendant la guerre. Pigeons de Verdun! Ce n'est pas ici qu'on reconnaîtra vos vertus. Absorbée par mes tristes pensçes, je n'avais pas remarqué que tout près de moi une conversation s'était engagée entre une jolie montagnarde poussant devant elle un petit char - bidon bouillie bleue - et un monsieur anguleux, dessêché, pantalon blanc, âge mur, accent anglais. Et j'écoutai en m'approchant. La jeune femme visiblement courroucée s'adresse à moi: ‘Parlez-vous le français Madame? - ‘Oui’ - ‘Imaginez-vous poursuit-elle, que cet anglais est décu paree que le tir aux pigeons n'est pas encore ouvert. Moi, ça me dégoûte de voir tomber ces malheureuses bêtes dans nos vignes, dans nos prés, partout. Chaque jour il en tombe à demi-morts chez nous, et mon père croit que c'est la Belgique qui vend ses pigeons pour les faire massacrer ici. Hélas elle disait vrai la petite. J'ai tourné les talons au sec anglais pour accompagner la jolie fille en qui je flairais une ‘soeur’ et je l'ai renseignée sur la lutte que nous, sociétés belges nous entreprenons contre la cruauté humaine. Je lui ai dit bien des choses auxquelles son ame sereine - aussi pure que son visage, j'en suis certaine - réfléchira et je lui ai serré une main amie en la quittant... Alors j'ai marché devant moi, machinalement, les pensées lourdes, sans plaisir désormais et sans apprécier même le charme du torrent turbulent que je longeais, le Nant, encaissé dans une gorge profonde, bondissant de roc en roe pour se hâter d'aller rejoindre le lac du Bourget qui l'engloutira. Ma promenade quotidienne n'empruntera jamais plus la route qui mène au tir aux pigeons. | |
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Sur le chemin de retourL'exquise vacance est terminée, il faut partir. C'est toujours un petit déchirement et je l'éprouvais une fois de plus en voyant, par un matin de soleil, l'automobile se ranger devant le perron de l'hôtel pour y hisser les malles, ranger valises et carton à chapeaux, tout ce matériel indispensable pour une période de cure, encombrant dans la voiture - je le reconnais - et ne faisant pas la joie des messieurs qui se résignent pourtant avec sagesse. Depuis la guerre j'avais maintes fois reporté mes pensées nostalgiques vers la Suisse, si riche en souvenirs d'autrefois, cette Suisse tant aimée mais désormais rayée du programme des voyages à cause du change élevé. Cette fois pourtant on ira par la Suisse, on vivra durant quelques jours la vie du montagnard, on reverra les petites vaches à clochettes et les chèvres alertes s'élancer sur la roche au-dessus de vertigineux abîmes. Mais on sera pratique, et à quelques kilomètres de la frontière avant Genève, on ajoute au réservoir 70 litres d'essence française, par mesure d'économie... pour nous apercevoir au bout d'une dizaine de kilomètres, que l'essence française coûte 0,20 centimes de plus au litre que l'essence suisse. Nous voilà du coup réconciliés avec ce captivant pays. Nous visitons rapidement Genève - la Belle, allons contempler le lac, les montagnes, les superbes palaces et le palais de la Société des Nations où nos pacifistes ne doivent pas trop s'ennuyer, nous longeons le lac si infiniment bleu par ce jour de chaleur, et sur les eaux duquel, d'innombrables voiles blanches glissent au gré du vent... Lausanne, Vevey, Montreux sont des amis que nous revoyons avec plaisir, et que nous quittons à regret pour escalader la côte assez raide et étroite qui mène par le col de Pillon au pays d'Enhaut sur lequel s'ouvre à 1030 mètres d'altitude une riante vallée parsemée de châlets dans le style ancien du pays et dominéé par les belles chaînes du Rubly à la Gumfluh et au Vanil noir. C'est un pays inoubliable, qu'autrefois nous avions traversé sans nous y être arrêtés et au milieu duquel je voulais passer une nuit et pénétrer la vie des gens de la montagne. Au centre de ce vallon du Pays d'Enhaut et au pied du massif du Rubly se trouve Rougemont qui a toujours conservé son cachet | |
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original ‘Châlet Suisse’ [.] Trois petits hôtels se partagent la clientèle l'été et l'hiver car, voisine du château d'OEx, Rougemont a organisé les sports d'hiver. C'est là que dans un hôtel charmant de propreté, de confort et d'accueil nous avons interrompu notre randonnée: Miel délicieux, truites succulentes, omelettes plantureuses, fromage de la montagne, sorte de port salut de qualité exceptionnelle, voilà ce qui nous attendait dans l'accueillante maison. Et tout de suite l'intimité s'établit entre l'aimable hôtesse et nous. Elle nous raconta que la nuit précédant notre arrivée, son mari était parti avec trois hommes et une quarantaine de vaches pour la haute montagne, afin d'y vivre jusqu'en septembre - nous étions en juin - et y faire le fromage. Une fois par quinzaine un homme descend dans la vallée pour y faire quelques provisions. Là-haut on fait le pain, on se nourrit de laitage et de fromage, on boit de l'eau et bêtes et gens connaissent des mois de bonheur dont ceux de la vallée ne se rendent pas compte. Ainsi paria l'hôtesse. Et je lui répondis: ‘Je voudrais monter là-haut, et, je voudrais voir partir une caravane’. Mais j'appris que ces caravanes d'été partent vers 3 heures de la nuit, en juin, et que je n'avais aucune chance d'assister a un départ, le patron de l'hôtel parti depuis quelques heures à peine étant généralement le dernier à monter paree que son châlet est situé à 1800 m. d'altitude. Quel est le Belge capable de trouver le bonheur dans une pareille existence? Quitter durant des mois sa familie, ses amis, son milieu, ses plaisirs pour s'isoler avec ses bêtes dans la haute montagne, seul avec l'immensité, les intempéries, seul ou presque seul à sept ou huit heures de montée à pied, pour voisiner dans un châlet rudimentaire avec son troupeau de bétail. ‘C'est triste, cette longue séparation’ dis-je. - ‘On s'y accoutume’. ‘Et la maladie toujours possible’? - ‘Là-haut on ne devient pas malade’. Elle est optimiste, la patronne. Nous lui serrons une main amie avant de nous retirer dans notre chambre, dont les fenêtres s'ouvrent sur les châlets dispersés dans les immenses versants des montagnes, couronnées de neige. | |
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Le soir est tombé et la nuit s'annonce chaude. Je ne parviens pas à trouver le sommeil à cause d'un lointain concert de cloches qui semble sortir de partout dans les flancs de la montagne. C'est si joli, c'est si plein de poésie que je me léve pour m'accouder à la fenêtre, écouter, regarder dans la nuit pour répérer les nombreux artistes de ce concert champêtre - les vaches qui broutent dans la nuit. Mais seules les scintillantes étoiles trouent le ciel d'une nappe lumineuse, tandis que vers le Nord de douces exhalaisons caressent la région d'Interlaken. Et jamais je n'oublierai cette heure captivante avec son concert de centaines de cloches dispersées dans la montagne et qui nous envoyaient à une altitude de plus de mille mètres leur surprenant concert dans la nuit. Je l'ai écouté durant plus d'une heure, fascinée, et je me suis endormie enfin, les fenêtres larges ouvertes au son de cette musique... 3 heures du matin. Il s'est passé quelque chose car je me trouve à demi éveillée, un peu inconsciente, devant la fenêtre. Il fait petit jour. J'écoute, je regarde et je comprends. Des cloches! Encore des cloches, d'autres cloches plus sonores, des cloches qui se rapprochent de nous dans un piétinement encore lointain. Je sens mon coeur battre de joie à l'idée qu'une caravane va passer... Piétinements et concert de cloches réveillent le joli village endormi sous ses vastes toits et ses fleurs, et la procession passe dans un tumulte de bêtes heureuses, sonnant triomphalement leurs cloches - symbole pour elles - d'un été de liberté au grand air. D'abord un homme, il est bossu, visage joyeux, habillé de velours, gros souliers ferrés, piolet dans la main gauche et un bâton dans la main droite pour diriger le troupeau qui, soumis, le suit sur les talons. Il parle à ses animaux, dit le même mot, sur le même ton, et les quatre-vingt-six bêtes, bétail blanc aux grandes taches couleur havane, moutons si doux, sympathiques veaux - la belle jeunesse - suivent docilement le petit bossu supérieur: l'homme. Je vois des vaches portant des cloches énormes. Comment parviendront-elles à brouter l'herbe, entravées par ces sortes de seaux renversés qu'on leur suspend au cou? Il paraît que c'est un luxe de voyage et que, une fois au châlet, les engins trop formidables sont enlevés pour être remplacés par le matériel - sonneur ordinaire. Deux veaux trop jeunes ont peine à suivre: la route sera dure pour eux, et deux hommes, beaux gaillards la hotte au dos, le piolet à la main, | |
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surchargés de solides cordes, en costume de rudes montagnards, engagent les petites bêtes à faire un effort pour ne pas se laisser distancer. Bêtes et gens sont visiblement heureux. Il paraît que, une fois le printemps venu, les vaches ne sont plus à manier dans les étables. Elles flairent le renouveau et la nuit du départ en leur attachant leur instrument de musique, elles sont littéralement folies de joie. Et voilà l'explication de la marche allègre de ce grand troupeau heureux. Le plus exubérant de la bande est un grand chien noir. C'est le gardien. Il bondit, aboie, court dans tous les sens en agitant sa queue. Il réveille les habitants du coquet village et les petites fenêtres s'ouvrent malgré l'heure matinale, des têtes à demi endormies émergent des corbeilles de géraniums rouges et de pétunias pourpres pour souhaiter bon voyage aux amis qui s'exilent avec joie dans la haute montagne pour la saison d'été. Le cortège se ferme par un primitif attelage: un bon cheval paisible marche tout seul, sans mors en bouche; il traîne un tout petit char très bas, encombré de matériel à faire le fromage. Personne ne le mène: il suit comme les autres faisant partie de la grande familie. Un peu en retard - à cause des nombreux adieux au passage, sans doute - vient le patron. Il ne porte ni hotte, ni cordes, ni bagages. Un simple piolet. Deux joyeux petits garçons l'accompagnent, autour desquels gambadent trois jeunes chèvres, couleur feu, sans aucun doute leurs compagnes de jeu. Elles sont superbes, je voudrais les emmener. Ces enfants n'ont pas sept ans. Ils rient, dansent avec leurs chèvres, ils vont à la fête... Mais qui donc soignera pour eux là-haut? Et longtemps je regarde se perdre la longue caravane, longtemps j'écoute le son des cloches qui meurt enfin dans une vaste forêt de sapins. Et ils monteront ainsi durant des heures avant d'avoir atteint le rustique châlet de bois où bêtes et gens vivront la saison estivale - à leur façon -. La nuit de Rougemont vaut pour moi le restant du voyage et j'ai quitté la captivante et délicieuse cité en promettant à la bonne hôtesse d'y revenir l'été prochain, pour escalader avec elle la route qui conduit au châlet de la haute montagne et vivre de plus près l'existence rude du vrai montagnard.
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Herinneringen uit mijn kindertijdOnze beestjes1. - BelloAls ik terugblik in het verre verleden zie ik naast mijn ouders huis, in 't dorpje waar ik geboren ben, een uitgestrekte weide, waarop een bruin-en-wit gevlekt koetje graast. Dat was Bello, moeders eerste koe. Bello had de schapen vervangen omdat de kinderen - zoo meende moeder - beter met koemelk zouden opgroeien dan met schapemelk. Een idee natuurlijk. Vader deed soms opmerken dat de drie kinderen gezondheid te verkoopen hadden en het waarachtig niet noodig was zorg te baren. En dat was ook zoo, want voor de kinderen kwam de dokter nooit in huis. Moeder beweerde dat de eenige reden van onze bloeiende gezondheid te vinden was in het feit dat wij, vóór zeven jaar bereikt te hebben, nooit vleesch te eten hadden gekregen maar wel veel melk hadden gedronken. En daarom kwam Bello. Zij was geen gewone koe: ietwat klein Fransch ras, niet veel, maar zeer rijke melk gevend. Hoeveel kopjes versch gemolken melk hebben beide broers en ik uitgedronken toen wij naast de goede meid Julie gingen staan terwijl zij zat te melken! Bello bleef jaren lang bij ons en was zoo tam als een hondje geworden. Wij speelden met haar, zij liep ons achterna om fijne beetjes - wortelen en roggebrood - te krijgen. Het goede beest maakte deel van de familie. Bello had reeds verscheidene kleine koetjes ter wereld gebracht en bij de laatste geboorte was zij zóó ziek geweest dat de veearts raadzaam gevonden had het dier te verkoopen. En Bello werd verkocht. Op een vroegen morgen - 't was in den herfst - werd het beest weggebracht. Ik heb het kleine drama zien gebeuren. De koe volgde gedwee den nieuwen meester, terwijl het kleine meisje dat ik was en de trouwe meid met betraande oogen haar nakeken. Nooit zal ik vergeten hoe het beest af en toe naar ons omkeek tot het eindelijk in de bocht der lange straat verdween. Wij bleven luisteren en hoorden onophoudend Bello's welbekend geloei. ‘Die koe zal nooit bij andere meesters wennen’ zuchtte Julie. En inderdaad... | |
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Drie dagen daarna verscheen een vergramd boerken bij ons in huis en zich tot moeder wendend: ‘Medam, ik ben bedrogen aan die koe. Ze wil niets eten en geeft geen druppel melk. Haal uw slechte koe terug en geef mij mijn schoone centen weer’. Moeder stond verbaasd. Moeder had natuurlijk nooit iemand bedrogen en er werd beslist, dat de meid het boerken vergezellen zou om met eigen oogen vast te stellen dat Bello haar eten weigerde. En ik mocht mee langs den eindeloozen zandweg naar de kleine boerderij. Zoodra wij in den stal kwamen naast het beest en Julie zooals gewoonte raapjes in de kribbe goot, begon Bello gretig te eten. Zij at, at, at alles wat zij kreeg. Maar toen wij heen gingen na zoete woorden en streelingen, staarde het beest ons na met droeve, droeve oogen... Dien blik vergeet ik nooit. ‘Arm beest’ zei zachtjes Julie en wij keerden zwijgend en bedrukt naar huis. Na een paar dagen was de boer terug bij moeder. ‘Die koe is betooverd. Ze weigert alweer haar eten en: wij krijgen er geen melk uit. Ik moet mijn geld terug hebben en gij uwe slechte koe’. - ‘Ga ze seffens halen’, zei vader woedend voor zooveel onverdiend wantrouwen. Ik huppelde van vreugde, Bello kwam weer! En zoo gebeurde het, dat de trouwe Bello bij ons terug kwam, dat de boer, overtuigd dat hij bedrogen was geweest zijn geld terug kreeg, en dat het lieve koetje zijn gansche verder leventje in de groene weide naast ons ouders huis mocht doorbrengen, melk gaf, nog verscheidene kleine koetjes schonk en gestreeld en geliefkoosd werd door groot en klein. | |
2. - CaboulZoo heette het hondje van mijn oudsten broer, 't was een kleine zwartharige poedel - straatras, zei vader - misschien wel, maar zoo buitengewoon slim dat men hem moest liefhebben. Hij sliep in een gezellig mandje naast mijn broeders bed en ik geloof wel dat, af en toe het mandje 's nachts ledig kwam en kleine Caboul met een wipje | |
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bij jongen meester in bed ging liggen. Want de trouwe meid Julie bromde wel eens omdat het witte linnen door vuile hondepootjes bezoedeld was, maar het hielp er niet veel aan. Als ik, na lange, lange jaren aan het lieve hondje terug denk, voel ik een verwijt op mijn geweten drukken. Ik was nog heel klein en ging met de dorpskinderen naar het nonnekensklooster ter school. Iederen middag en iederen avond, toen ik van school terug kwam, werd het arme hondje een geïmproviseerd gareel over de schouders getrokken, een lichte muilband om het kleine kopje vastgesnoerd en voor een minuscuul wagentje gespannen en moest met mij den tuin in. Waarom lieten vader en moeder dat gebeuren? Caboul had zoo 'n vreeselijken hekel aan dat rennen door den tuin met mij en zijne smeekende oogjes vroegen zoo dikwijls om genade... Ik begreep hem niet. Maar zijne slimheid had de reddingsplank ontdekt! Wanneer de kinderen al spelend met lawaaiig gedoe in onze straat kwamen gestormd wist Caboul dat de school gedaan was en zijne kwelling ging beginnen. Hij blafte om buiten in den tuin te gaan. De meid liet hem los en zag hem zacht-voorzichtig wegsluipen langs de haag die vaders erf van dit van den dokter scheidde en verdwijnen in de diepte van den tuin onder de hooge boomen. Daar voelde hij zich veilig en kwam niet te voorschijn als ik hem riep. Hij wist te goed wat hem wachtte en hield zich verborgen onder het kreupelhout langs de beek tot het op den kerktoren twaalf sloeg. Toen keerde hij voorzichtig weer naar huis en ging naast meesters stoel aan tafel zitten. De huisgenooten wisten dat Caboul voor mijn spel vluchtte, zij hadden pret met de list van het hondje en niemand wou mij zeggen, waar het zich verborgen hield om aan het stoute kind, dat ik was, te ontsnappen. De winter was gekomen en van het klein gespan was geen spraak meer. Caboul leefde voortaan een rustig leventje, steeds jongen meester op de hielen volgend. 's Avonds, na het eten, speelden de kinderen met hem in de keuken, deden hem ‘apportjes’ loopen, leerden hem allerlei guitige toeren. 't Was een heerlijke speelkameraad voor ons. Op een morgen - nare herinnering - lag het hondje roerloos in zijn mandje, met treurige oogjes naar alle dingen rondom hem, te kijken... | |
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Kon hij niet opstaan of wou hij niet? Men nam hem uit zijn mandje, hij viel, jankte en bleef liggen. De veearts kwam. ‘Te veel eten gekregen’ luidde het vonnis, ‘'t is een beroerte’. Dagen op dagen werd ons hondje met liefde verzorgd, maar niets hielp. Op een somberen regendag, met valavond stierf Caboul. Groote en kleine menschen stonden treurig rond het mandje met het doode hondje erin, en traantjes parelden aan groote en kleine oogen... 's Anderendaags zat ik op school te weenen, maar waagde het niet de reden van mijn leed te doen kennen, uit vrees voor spotternij. Liefde voor de dieren werd in dien tijd nog niet ontwikkeld in het hart der kinderen. Vader had een kistje getimmerd, Caboul werd op een bed van hooi erin gelegd, de tuinman had een graf onder de oude boomen naast de beek gedolven en de rouwstoet - twee jongens en een klein meisje - trok door den tuin om het lieve hondje te vergezellen naar zijne laatste rustplaats. En den dag daarna werd een houten paal op het terpje geplant, eene gladde witte plank eraan gespijkerd waarop in groote letters Cabouls grafdicht - verzen van Cyriel - te lezen stond: Gij die hier rust voor altijd Dat alles is een halve eeuw voorbij en niet zelden spreken wij nog van de lieve onvergeetbare Caboul en wij weten nog precies, na meer dan vijftig jaren waar hij begraven werd, in vaders tuin op ons geboortedorpje.
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J'ai vu les cigognesUn jour de printemps de cette année, après avoir traversé les inoubliables paysages montagneux du Jura et de la Franche-Comté, nous avions résolu de parcourir les Hautes-Vosges et de faire halte au délicieux endroit de repos estival: Hochwald. Un jour, en excursion au Mont-Sainte-Odile, nous découvrons, du belvédère du Couvent, bati au sommet du mont, l'immense plaine rhénane qui, s'entrecoupant de villages riants, s'étire jusqu'à la Forêt-Noire que nous voyons s'estomper à l'horizon. Quelque chose de mystérieux flotte sur ces lointains paysages et les vieilles légendes d'Alsace revivent dans nos souvenirs, les vieilles légendes mêlées à des bruits de guerre, de conquête, de joie et de douleur. Appuyée sur la rampe du belvédère, rampe de granit préservant le touriste d'une chute de quelque trois cents mètres à pic dans la plaine, les vieux souvenirs m'assaillent en foule, tandis que je sens grandir en moi un impérieux désir: parcourir la plaine d'Alsace! Je ne songeais guère aux cigognes à ce moment, aux cigognes qui se faisaient plus rares au dire des habitants, mais je voulus revoir les villages archaïques - admirés dans ma jeunesse et jamais oubliés - avec leurs vieilles portes à l'entrée et à la sortie, leurs antiques pressoirs, leurs pittoresques maisons suintant un passé de légendes émouvantes écoutées les soirs d'hiver au coin de l'âtre... De quoi ne parle-t-on pas les soirs de givre et de neige, ou quand le vent fait rage et que la pluie cingle les carreaux? Ceux de 1870 parlaient sans doute de guerre, de souffrance et d'espoir en dégustant un verre de Riesling, cette gloire d'Alsace. Ils devaient le dire à voix basse, car l'emploi du français était interdit en Alsace sous la domination allemande. Aujourd'hui, la France plus clémente ne prohibe pas l'allemand sous sa domination. Allons dans la plaine d'Alsace!... Dès le lendemain, la complaisante voiture descendit la montagne pour s'engager dans les superbes champs de vignobles débordant de promesses pour les vendanges futures. Les villages succèdent aux villages en un enchantement ininterrompu, au coeur d'un pays fertile, sillonné par les autocars en ce dimanche ensolleillé. Riquevir! Oh! la jolie chose. Une porte d'entrée antique, de vieilles maisons aux poutrelles décorées, des rues pittoresques, de | |
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captivantes surprises à chaque pas. Un essaim d'enfants joue sur la place. Ils parlent l'allemand, ces enfants, et marchent en rang, militairement. On dirait de petits soldats à l'exercice au lieu de bambins qui s'amusent. Un nuage rapide passé sur mon front, je léve machinalement mes yeux et... ô merveille un nid de cigognes s'offre à mes regard éblouis. Salut beaux oiseaux que le bruit des enfants qui jouent n'affole même pas. Quelle poésie se dégage de vous, beau couple paisiblement perché sur votre maison solide, si bien construite qu'elle résiste aux tempêtes. C'est donc là que vous allez vivre votre été, c'est là que vous vous reproduirez et que vous reviendrez chaque printemps, fidèles. Je ne parviens pas à m'arracher à l'attachante vision, mais on me rappelle à l'ordre et à regret je reprends le volant pour mettre le cap sur Ingwiller encore très éloigné. Nous y trouvons le village en fête, une sorte de fête folklorique sans doute, car dans la rue principale - combien captivante - une bande d'Alsaciennes ‘d'autrefois’ se donnent le bras et chantent d'harmonieuses chansons... Nous croisons un prêtre qui conduit des écoliers sans doute. Il parle le français, les enfants aussi, et nous saluons en souriant. Ici encore, il faut s'arracher et, ô bonheur, ici encore en levant les yeux - je ne fais plus que cela depuis Riquevir - j'aperçois des cigognes. L[a] femelle couve m'explique un aimable passant, en qui je flaire l'instituteur, et le mâle regarde, guette et pourvoit à la nourriture. Il nous raconte des détails intéressants de la vie des cigognes. Il les aime, le brave homme qui se révèle tout de suite grand ami et protecteur des bêtes. La cicogne, nous dit-il, est presque un animal sacré. Personne ne s'aviserait de la maltraiter. Chacun la respecte, car elle porte bonheur et fournit les petits enfants dans les jeunes ménages. Aussi la joie est générale au village quand, après la dure période hivernale la cicogne aimée reparaît pour s'installer dans sa résidence d'été. Les jolies bêtes reviennent en mars par une claire journée. Le mîle s'amène le premier, sans doute dans un sentiment de responsabilité de chef de familie. La femelle suit à peu de jours. Le départ des cigognes à fin août se fait en bandes. Les cicognes dispersées se rassemblent et s'exercent souvent à des envolées lon- | |
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gues: elles s'entraînent pour le lointain voyage... Car elles poussent parfois leurs randonnées à travers l'Afrique tropicale pour aboutir dans les régions tempérées de l'Afrique du Sud. D'autres bandes s'établissent au Maroc pour y passer l'hiver. La belle journée se termina sans rencontrer de nids de cigognes sur le parcours, mais, saturés des ravissantes visions vécues, le soir à l'étape, énivrés par tant d'impressions diverses, nous nous sentions heureux à pleurer de reconnaissance pour une journée si pleine de charme... Et j'avais vu les cigognes!
De Keyser-Buysse | |
Mes cygnesAvant la guerre nous avions dans nos étangs des cygnes que nous aimions beaucoup. Pendant plusieurs années ces grands oiseaux organisèrent avec les gentils et bruyants canards le service de nettoiement de l'eau qui, grâce à eux, resta limpide comme du cristal. Vint la guerre. Nous fûmes chassés de chez nous comme tant d'autres et nos pauvres cygnes disparurent tous dans la tourmente. Depuis longtemps je désespérais de revoir jamais de pareilles bêtes décoratives orner l'eau envahie désormais par les herbes sauvages lorsqu'un jour de l'automne 1931 un de mes meilleurs amis vint m'offrir un couple de superbes cygnes blancs. ‘Ils sont adultes, me dit-il, et ne se quittent jamais. C'est un ménage modèle qui, au printemps prochain te procurera des jeunes, car il vient d'entrer dans sa troisième année.’ Le cygne ne se reproduit pas avant d'avoir atteint trois ans, j'ignorais ce détail. Très vite acclimatés, baptisés des noms de ‘Coquin et Coquine’ les oiseaux - comme toutes les bêtes de chez nous d'ailleurs - firent très vite partie de la maison. Nous prenions plaisir à les voir vivre, à les observer... Un ménage uni, s'il en fut! Quel exemple pour les humains! Toujours ensemble, naviguant majestueusement côte à côte autour de la propriété, dormant côte à côte dans l'herbe au bord du grand étang, ils furent | |
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tout eet automne là, le grand attrait du jardin. Dès les premiers beaux jours, leur tendresse et l'empressement du mâle semblèrent se raffermir encore et je les vis souvent chercher nerveusement quelque chose dans les taillis ou sous les arbres... Je ne compris leur langage de cygne que le jour où je vis venir Coquine à moi, une branche morte dans son long bec jaune. Elle voulait me dire quelque chose et je compris... elle voulait construire sa maison. Aussitôt l'ordre fut donné d'amener trois brouettes pleines de branchages, de foin, de paille et de feuilles mortes qui furent déversés au bord de l'étang, bien en vue de la maison. Et au cours de cette même journée il nous fut donné d'assister à un très intéressant spectacle. Nos cygnes entreprirent la construction du nid de Coquine. Toute la journée le mâle amena à pied d'oeuvre les matériaux et l'épouse se mit courageusement à maçonner son nid. Elle débuta par casser les branches qu'elle rangea en une grande circonférence régulière tracée au compas et qu'elle consolida jusqu'au soir. La construction de ce mur d'enceinte par deux ‘bêtes’ fut un spectacle unique et jusqu'à la tombée du jour, infatigables Coquin et Coquine travaillèrent fébrilement à ériger le berceau de leur progéniture où l'épouse déposera ses oeufs qu'elle mettra 42 jours à faire éclore. Le lendemain dès l'aube le travail fut repris avec la même ardeur, le nid devint immense, plus grand que les nids des cigognes en Alsace et très semblables à ces derniers, perchés au haut des toits. Avant le soir tous les matériaux furent consommés et il nous fut donné de pouvoir admirer sur la rive du grand étang une oeuvre d'art dont de majestueux oiseaux avaient été les artistes. Nous pûmes admirer à distance, car l'approche de la maison des cygnes devint désormais chose interdite. Dès qu'elle fut achevée, Coquine s'arracha copieusement le duvet préservant sa large poitrine[,] en capitonna le fond de sa petite maison bâtie à ciel ouvert et s'y installa confortablement. Seule la tête attentive et le long cou émergeaient de la frêle forteresse. Coquin, vigilant et agressif faisait faction à côté du nid qu'il garda jalousement durant plus de 42 jours. Le jardinier pourtant brava son courroux pour répandre chaque matin le maïs à proximité du nid. Plus d'une fois il fut accueilli par un vigoureux et douloureux coup d'aile, surtout quand il voulut à toute force savoir ce qu'il y avait au fond du grand nid. Cinq oeufs! Que d'espérance! | |
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Mais le changement dans le caractère de nos bêtes autrefois si douces et apprivoisées, nous attrista quelque peu. J'ai vainement essayé de faire la paix: mes cygnes, devenus des furies sous l'influence de l'amour jaloux, foncent sur moi, les ailes déployées et le bec ouvert. Je me suis résignée et durant des semaines, toute cette partie du jardin fut terre interdite à tous. Patiemment nous avons attendu le moment de l'éclosion, espérant en la réconciliation. Un matin, à l'aube grand fut notre étonnement: nous vîmes Coquine enjamber son nid, en écarter les bords pour laisser passage à quatre petites boules grises - ses enfants - et s'acheminer vers l'eau, où toute la maisonnée prit un bain qui a dû être un délice, à voir les ébats des bêtes. Si les petits enfants poussaient ainsi! Le genre humain - race supérieure à ce que l'on dit - n'a pas la chance de naître et de grandir avec une pareille facilité! La bête serait-elle quelquefois supérieure à l'homme??? Avec joie nous nous précipitons vers l'étang pour mieux voir, mais mal nous en prit. Nos bêtes hélas! redoublent de jalousie et de rage et malheur à qui tentera de les approcher. Un coup d'aile peut casser un bras d'homme - nous le savons - et quand nous voyons papacygne bondir vers nous au paroxysme de la colère, nous prenons nos jambes à notre cou pour reprendre les allées permises. C'est ennuyeux, mais une fois de plus nous nous résignons en admirant tout de même cette exemplaire qualité: la défense du foyer. A force de patience, de prudence et de douces paroles la confiance est revenue: mes cygnes comprennent enfin que nous sommes des humains-amis et que nous ne leur voulons que du bien. L'homme doit avoir une très mauvaise réputation dans le royaume des bêtes pour les affoler ainsi dès qu'il se montre! C'est que, voyezvous, les bêtes sentent par instinct, que bien souvent l'homme est leur pire ennemi. Et combien cette crainte est justifiée, convenons-en! Tout de même entre nos bêtes et nous, la paix est signée. Nous pouvons approcher, les parents prennent de confiance les morceaux de pain de nos mains et nos petits poussent à vue d'oeil. A deux mois on les croirait adultes. Ils gardent leur robe grise et ne la quitteront qua l'age d'un an, pour endosser la blanche. Et c'est si joli de les croiser sur les pelouses ou dans les chemins: papa d'abord, puis les quatre enfants l'un derrière l'autre et maman fermant la colonne. La vie à la campagne a des charmes infinis pour qui la comprend! | |
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Mais, dans la vie des bêtes tout comme dans celle des gens, on ne rit pas tous les jours... Un matin de juillet l'étang est désert. ‘Où sont les cygnes?’ Chacun se hâte à la recherce des disparus qui se retrouvent dans les étangs de la propriété voisine. Il faut les capturer sans retard car le ch[â]telain ami possède, comme nous, un couple de cygnes et la bataille entre voisins pourrait occasionner la mort des enfants. La capture fut longue et pénible. La femelle prise enfin avec ses quatre petits fut ramenée à son port d'attaché, dans les bras du jardinier et de sa femme. La capture du mâle fut compliquée. Eperdu d'avoir vu partir les siens, se voyant pourchassé à son tour, la pauvre bête fendit l'eau d'un bout à l'autre de la propriété, se précipitant d'une berge à l'autre comme un fou. Epuisé, il dut se rendre et lorsque le jardinier le tint enfin serré dans ses bras pour me l'amener, je vis à ma grande surprise, couler d'abondantes larmes des yeux du cygne affolé, de vraies larmes qui faisaient sur la terre de petites taches humides en tombant. ‘Il pleure des larmes’ me dit le brave homme, tandis que, tout ému, il maintenait la tête du cygne dans le creux de sa main. Et j'ai vu les yeux de ce rude travailleur de la terre, se remplir de larmes, tout comme ceux de la bête... Qui donc oserait contester la douleur morale chez les animaux? Dès le lendemain des barricades de treillis furent organisées autour du grand étang, afin d'y maintenir le ménage animal, et vers la fin de la matinée tous les oiseaux se trouvaient de l'autre côté. ‘Tout de même! Comment ont-ils passé?’ Je fais soulever le treillis et les cygnes sont rechassés chez eux. Je m'embusque dans un taillis et j'attends. Ce ne fut pas long. Papa cygne quitte l'eau, appuie de tout son poids contre le treillis qui fléchit, s'y pose et attend - comme moi - Maman cygne arrivé, exécute le même manège à deux mètres de distance, à son tour se pose sur le treillis aplati et pousse un petit appel. Les quatre enfants s'empressent de quitter l'eau, passent sur le treillis couché, papa et maman les suivent, le leger mur rebondit derrière eux et tout le ménage se trouve à nouveau du côté défendu et broute avidement l'herbe verte de la grande pelouse. Cette initiative intelligente de mes deux bêtes m'émerveilla et pendant plusieurs jours nous avons maintenu le treillis pour avoir le plaisir d'assister à l'amusant manége. | |
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Qui donc oserait contester l'intelligence des animaux s'il s'est donné la peine de les étudier en les aimant? Mais les heures tristes sonnent pour les bêtes comme pour les gens. J'avais promis un couple de cygnes que des amis enlèveraient dès le lendemain et il fut décidé de les capturer tous pour leur faire passer la nuit dans l'orangerie. Quand le crépuscule enveloppa le jardin, le père et les enfants furent pris facilement, mais il ne fut pas possible de capturer la mère. On la laissa dans l'eau et on ne s'en occupa plus. Aucun de nous ne put dormir cette nuit-là, car toute la nuit la pauvre bête erra à la porte de l'orangerie geignant et pleurant lamentablement jusqu'au matin. N'est-ce pas un touchant exemple d'amour maternel? Le lendemain deux jeunes partirent vers une vie nouvelle, les parents avec les deux petits furent rendus à l'étang et durant huit jours il ne se passa rien d'anormal. La séparation semblait oubliée. Le neuvième jour j'allais, comme chaque matin, après déjeuner ofïrir du pain à mes cygnes. Ce jour-là ils ne répondirent pas à mon appel et je les vis rester immobiles serrés l'un contre l'autre, au milieu de l'étang. En approchant de la berge je vis avec effroi que le cygne male était mort, le bec figé au fond de l'eau. Et la familie faisant la veillée, tristement... Mes bêtes refusèrent toute nourriture et lorsqu'on eût retiré le mort, restèrent toute la journée obstinément à la même place. Quelque chose de triste plane sur l'étang depuis ce drame mystérieux, je sens que mes cygnes se méfient de moi et j'ai l'impression très nette que la familie par son indifférence à mon égard, m'adresse un silencieux reproche et me rend responsable de la mort du camarade. S'ils comprenaient, mes pauvres cygnes, combien je les aime, s'ils connaissaient ma décision de les laisser ensemble, la veuve et les enfants, sans les séparer jamais, ils reviendraient manger le pain dans ma main, ils reviendraient se ballader devant la terrasse ainsi que cela se passait chaque soir avant la mort inexpliquée du chef de la gentille familie et ils rendraient leur confiance à la présidente de la Société Protectrice des Animaux qui ne désespère pas de les re-apprivoiser.
De Keyser-Buysse
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Hoe ik dierenbeschermster werd't Was een zacht-zonnige Octoberdag, een dier herfstdagen die aan lentedagen doen denken. Vader wou per rijtuig naar Lokeren zijn trouwen tuinman Bruun, thans bedlegerig, een bezoek gaan brengen en ik mocht mee. Die goede oude Bruun! Eerst was hij tuinman bij grootvader en toen vader trouwde ging hij met hem mede verhuizen, omdat beiden zooveel van elkander hielden... Thans was hij ziek. Moeder gaf ons eene volle mand met fruit en lekkernijen mede met hare beste herstellingswenschen voor Bruuntje. Het zwarte paard werd voor het rijtuig gespannen, vader stapte met zijn groote gestalte statig erin, ik huppelde hem achterna en 't vlijtig Mietje snelde de richting naar Lokeren in. De najaarszon verwarmde gezellig onzen rug en de lucht was blauw en helder. Wij reden tusschen eindelooze groene rapenvelden en langs kleine boerderijen heen, zagen de koeien overal in de weide nog buiten en de naarstige boeren op den akker, met zwaren regelmatigen stap de ploeg volgen langs de diepe groeven in het land. In mijn kinderhartje was het glanzend van geluk. Het rijtoertje - het liefste wat ik deed - deed mij van vreugde op de kussens wippen, ik lachte luid, zonder dat ik wist waarom, en praatte maar aldoor, in overdreven opgewektheid: ‘O, gij zoete kwakkeltje’, zei vader en glimlachte mij met zijne goede oogen teeder aan. Wij reden lang en verre naar 't mij scheen, langs kronkelwegen en kleine huisjes, aldoor met zachte zon en in mijn kinderhartje een gevoel van gelukkig-zitten naast vader in het rijtuig, met het oog op het wakkere paard dat vol ijver naar het zieke Bruuntje snelde... Eensklaps, bij 't draaien van den steenweg, doorboorde een hartverscheurend hondengehuil de ruimte... Vader hield het paard op stap en luisterde... Het grievend schreeuwen moest vaders hart met een vliem doorstoken hebben, want schielijk hield hij het paard tot staan, vlak voor een grijshouten hekje. Vlug en zenuwachtig ijlde hij naar binnen toe, naar iemand neergebogen over iets, dat ik niet zien kon en die met opgeheven arm, een lang, puntig bebloed mes in de lucht slingerde met ruwe vloeken. ‘Schei uit, bandiet’ scheeuwde vader, en wou in razende woede ontstoken, den kerel bij de keel grijpen. | |
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Toen zag ik wat er gebeurde... Onder de knie van den beul lag een uitgestrekte rosharige hond erbarmelijk te janken en zich hopeloos te verdedigen tegen de ontelbare ijselijke messteken die de moordenaar hem met woede in kop en keel toebracht. Het bloed spatte ten allen kante en verfde de wangen van den woesten lafaard rood. 't Was gruwelijk!... ‘Wat heeft dat beest u misdaan’ gierde vader. ‘Niets, klonk het barsche antwoord. Hij is al drie dagen ziek en wil niet werken. Ik maak er een komaf van’. ‘Gemeene boef’, hoorde ik vader snauwen terwijl een geduchte oorveeg zijne woorden steunde, ‘zulke laffe daad zal u geen geluk medebrengen’. Vader was een reus en de lafaard bleef beweegloos en stond onthutst hem na te kijken terwijl hij weer in 't rijtuig stapte en de gemartelde hond in een plas bloed te sterven lag... met uitgedoofder jammeren... Wij reden verder, vader zei geen woord en zat peinzend voor zich te staren. Ik hoorde hem luidruchtig ademen en zag zijn forsche hand beven. De zon gaf mij geen warmte meer, het rijtoertje was niets geen plezier meer en ik voelde een onuitsprekelijke zwaarmoedigheid mij overweldigen... Ik zag steeds den uitgestrekten bebloeden stervenden hond, die zooveel geleden had; tranen, die ik niet weerhouden kon, stegen uit mijn geschokt kinderhart naar mijne oogen, en vloeiden langs mijne wangen overvloedig, overvloedig... ‘Kom, kindje, zei vader met ontroering in de stem, het hondje is uit het lijden. Wie weet welk een ellendig leven het arme beest doorbracht met zoo'n beul, 't is eene les, Liesken: Overal en altijd de dieren beschermen!’ Dat zei vader... en een snik onderbrak zijne laatste woorden. Wij waren aangekomen. Vader stapte peinzend uit het rijtuig, streelde lang... lang... den nek van zijn paard met zachte klopjes op het blinkend zwarte haar, en trad het huisje binnen... 't Is meer dan veertig jaar geleden en alles is nog frisch in mijn geheugen. Iets is zeker: van den dag dat het afgrijselijk schouwspel mijn kindergeluk vernietigde ben ik hartstochtelijk dierenbeschermster geworden.
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Par un jour de guerreC'était en août 1917. Depuis l'aube le canon roulait à l'ouest - angoissant trommelfeuer d'abord, durant des heures...; alors vint une accalmie, suivie d'explosions lourdes, régulières et continues... Énervée et ébranlée j'avais demandé à l'air calme et au ciel serein de la campagne un peu de détente pour mes pauvres nerfs. R[ô]dant d'abord autour de ma maison de campagne de laquelle j'avais été fra[î]chement expulsée avec fracas et après avoir constaté que les rideaux de soie de mon salon étaient cloués en guise de stores à la chambre de couture, je poursuivis avec tristesse ma route jusqu'au delà de ‘la planche’ dernière limite de notre liberté de guerre. Franchir cette planche, c'était s'exposer à la prison si on était capturé, ou tout au moins aux vexations d'un tribunal de contrebande et aux amendes. Je ne pensais pas à tout cela; j'étais mélancolique et je continuai mon chemin sur la terre interdite. Par les labourés j'arrivai devant une toute petite ferme, riante avec ses volets blanc et vert, calfeutrée dans un épais et tout petit verger. Derrière une haie basse et touffue des poules couraient. Je m'arrêtai, attirée par ces singulières poules qui tournoyaient sur elles-mêmes, sautillaient follement en lançant des petits cris inaccoutumés. Avec mon ame de fermière je compris aussitôt que ces bêtes étaient anormales et ‘ensorcelées’ diraient les superstitieux. Un peu ahurie tout de même et attirée par eet étrange spectacle, je ne vis pas deux messieurs, qui semblant surgir du sol se trouvaient de chaque côté de ma craintive personne et un peu rudement: ‘Madame que faitesvous ici?’ - Markenpakkers, fut ma première pensée, ça y est: ils vont me demander ma carte d'identité et ce soir je loge au Rolleken... La terre tremblait sous mes pieds et je ne trouvais qu'une réponse simple: ‘Je regarde, messieurs’. - Oui, nous aussi, me dit le plus grand et le plus effrayant des deux sur un ton rude, nous aussi nous regardons; nous regardons les poules qui sont saoules - et brusquement les deux messieurs foncèrent sur la petite maison riante et s'y engouffrèrent. Impressionnée et intéressée, je regardais toujours les poules titubantes. Après un temps relativement long, les deux messieurs sortirent de la maison, faisant marcher devant eux un campagnard vigoureux, rouge et bouffi. Ces messieurs tenaient dans leurs mains | |
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un instrument que je n'avais jamais vu, me demandèrent en passant mon nom et mon adresse et me crièrent en se retournant: ‘Cet idiot dénonce sa distillerie clandestine en saoulant ses poules avec les déchets de sa fraude.’ Et maintenant que tout cela est loin, je repense parfois à cette journée de coups de canon, de mort et de tristesse et je revois la bande de poules énivrées plaçant malgré tout une note gaie au milieu de toute la détresse de cette angoissante période de malheur.
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OorlogsvisioenenWat ik zag...De konijntjesNa de vreeselijke bombardementen van Merelbeke en Gentbrugge bracht ik een bezoek aan de geteisterde en vernietigde sectoren. 't Was een hartverscheurend schouwspel: ingestorte huizen, honderden broeikassen zonder glas in dewelke duizenden kostbare planten stierven, rouw en verdelging overal.
Midden in de puinen stond nog recht, een huisje. Geen dak, geen ramen en de zijmuur ingebeukt. De deuren ook vernietigd. Ik trad binnen en zag een oud vrouwtje zitten aan den rand van een binnenmuur, haar vroeger keukentje. Ik zei haar troostende woorden... maar met een glimlach stond ze met moeite recht, nam mij bij de hand, leidde mij op haar ‘koerken’ en met een opgeruimd gerimpeld aangezicht je wees met den vinger naar een geschonden konijnenhok. - ‘'k hebbe toch nog mijn konijntjes’. Zei ze. En inderdaad. Een tiental gezonde konijntjes sprongen naast elkaar in het hokje, onwetend welk gruwelijk drama zich in de ronde afgespeeld had, menschen, dieren, huizen, alles vernietigende. | |
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Het vrouwtje, bijna zonder woonst, was dankbaar omdat zij hare konijntjes nog bezat. Is dat geen les van optimisme? | |
Het paardToen ging ik verder in de richting eener vroeger gekende hoeve. De schoone boerderij bestond niet meer. Alleen nog hoopen puinen. Huis, schuur, varkenskotten, fruitboomen, alles was ingeslagen. En de bewoners en de beesten zouden deze ook allen dood zijn, vroeg ik mij af? Geen mensch in de ronde. Alleen een groot sterk paard stond onbeweeglijk op een hoop stalmest en steengruis, zijn vroegere stal dacht ik. Treurig kijkend en gelaten bleef het dier staan toen ik naderde. Het had een deken op den rug. Later heb ik vernomen dat eene meedoogende verpleegster die goede daad verricht had. Ik kwam naast het dier en hief heel zachtjes het deken op: het paard rilde ietwat, en ik zag eene diepe, bloedende, groote rugwonde terwijl het beest zijn goeden kop naar mij omdraaide, alsof het vragen wou: - ‘Kunt gij mij toch niet helpen; ik heb honger en pijn’. De veeartsenijschool werd verwittigd, het paard werd weggehaald, ondergebracht en verzorgd. Maar wat zal er van zijne meesters geworden zijn?? | |
Over hondenWie herinnert zich niet meer de opeischingen tijdens de bezet-ting? De hartelooze vijanden namen onze trouwe honden mee en in menige familie werden tranen - veel tranen - gestort over het brutaal wegnemen van den vriend des huizes. En wat zou er met al die slachtoffers gebeuren? Hoe dikwijls hebben bedroefde meesters mij die vraag gesteld? Het eenige wat ik antwoorden kon is dat een kerel uit het Gentsche een veertigtal herdershonden dresseerde voor het Duitsch leger. Maar voor welke doeleinden? | |
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Later is men echter te weet gekomen dat, in de concentratiekampen Schapershonden opgeleid waren om de gevangenen te bijten, op bevel van de onmenschelijke bewakers, waaronder vrouwen. Ik heb met eigen oogen bij een teruggekomen gedeporteerden zieken jongen zeer ernstige wonden gezien aan beide beenen. Dat hadden op bevel de honden van het kamp gedaan, diezelfde honden misschien zoo trouw aan hun meester gehecht toen ze nog het geluk hadden bij hem te verblijven in België. Onze vijanden hadden er misdadigers van gemaakt.
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Fan en haar jongenGa naar voetnoot*Harry stormde het huis binnen. Suzy-Suzy-Suzy riep hij kom eens zien wat Fan thans heeft gekregen. Suzy kwam naar haar broeder aangeloopen en te zamen gingen zij al over den koer naar den stal. Daar lag Fan in het stroo met vier wit en zwarte jongen van de schoonste die men ooit gezien had. Suzy wilde hen naar huis overbrengen om met hen te spelen maar Harry liet haar ze niet aantasten. Wacht nog eenige dagen zegde hij, dan zullen zij in staat zijn te zien. Zijn zij blind vroeg Suzy? Alle honden zijn blind vóór zij negen dagen oud zijn, zegde haar broeder. Van zoohaast de jongen konden zien, gingen Harry en Suzy terug naar den stal en toen zij er toekwamen, zagen zij de jongen tegen hun moeder aangedrukt. Suzy legde ze dan in een bakje en na ze in huis te hebben laten aanschouwen, droeg ze terug bij de moeder. Iederen dag gingen de kinderen hun kleine lievelingen bezoeken en wanneer zij in staat waren te loopen, kwamen zij dan zelf naar hen toegesneld. | |
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CesarCesar woonde met zijn baas ergens in een rustig Vlaamsch dorpje recht over het kerkje dat midden het kerkhof staat.
De hond verliet nooit zijn meester. Hondenhok en ketting waren hem onbekend: hij leefde met de familie in huis en sliep voor zijn meesters slaapkamerdeur. Hij was een groote schoone schapershond en meester was er fier op. De hond liep overal mee en toen meester, die een onvermoeibare handelaar was, ergens binnen ging, ging het trouwe dier naast het rijwiel liggen en niemand zou het gewaagd hebben het aan te raken. De jaren verliepen, de oorlog barstte los, woedde over het dorpje, huizen en menschen vernielend, maar Cesar en zijn baas bleven ongedeerd.
Het geluk was van korten duur. Op een zonnigen namiddag gingen Cesar en zijn baas wandelen, toen opeens de meester ineen zakte en ten gronde bleef liggen. Buren kwamen toegesneld, droegen den zieke naar huis en de hond ging zenuwachtig mee. Toen de stervende baas in het bed zachtjes werd neergelegd, verliet het dier de kamer niet meer. Men liet hem doen. Meester stierf denzelfden nacht; de hond weigerde alle eten en bleef dagen lang op de kamer liggen, den dooden meester trouw. Niemand vond den moed het dier te verjagen, en toen zijn baas ten grave gedragen werd ging Cesar naast de familie mee. Met valavond verdween de hond... De grafmaker kwam de bedroefde weduwe verwittigen dat haar dier snuffelend op het versch gesloten graf ronddwaalde. En nu nog zien de bewoners van het dorpje Cesar iederen dag een lang bezoek brengen aan zijn meester die voor eeuwig rust in de schaduw van het kerkje dat midden op het kerkhof staat.
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Les parents inconscientsLa mort du cygneOn était en juillet, l'époque heureuse des vacances. Jacques avait bien travaillé et le jour anniversaire de ses onze ans, papa lui offrit une carabine pour récompense. Il est logique que Penfant qui reçoit une carabine s'exercera à ‘tirer’. La propriété de ses parents, très vaste, avec ses arbres séculaires peuplés d'oiseaux, allait devenir pour Jacques un alléchant champ d'apprentissage. Dès le matin chaque jour il se mit à l'affut des oiseaux et les manqua tous, fort heureusement. Papa et maman l'observaient de la terrasse en lui souriant. Dans le vaste étang naviguaient majestueusement deux superbes cygnes, Coco et Coquine, très apprivoisés. Jacques un instant les devisage avec convoitise, épaule sa carabine, vise et tire... La pauvre Coquine touchée, déploie ses ailes battantes, culbute et vient s'affaler près de la berge. Elle était mortellement atteinte, un peu de sang rougit ses plumes immaculées et... ce fut la mort du cygne.
Maman accourut, pleura; papa indigné arracha furieusement la carabine des mains de l'enfant en lui reprochant durement son crime. Et pourtant, la faute en est a vous parents inconscients, et pas à votre garçon dont vous avez armé la main pour accomplir un mauvais acte. Vous avez oublié que ‘la cruauté c'est l'école du crime’. | |
La mort du cochonLes enfants, par une lumineuse journée d'automne, s'amusaient follement dans le pare, tandis que les parents ravis, les regardaient faire en songeant à la délicieuse nuit qui allait réparer cette bienfaisante fatigue. Et voilà que maman arrivé en courant: ‘Venez vite, les enfants, vite, on peut voir tuer le cochon’. | |
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La bande joyeuse se précipite vers les dépendances, le coeur débordant de bonheur pour assister... à l'assassinat d'une pauvre bête. Que vous êtes donc inconsciente maman, d'offrir ce douloureux spectacle à de jeunes enfants! Les bêtes doivent être immolées, nous le savons bien, mais évitez l'horreur de cette mort violente à de jeunes cerveaux impressionnables. Vous vous en êtes rendue compte d'ailleurs le lendemain. Les enfants avaient mal dormi, poursuivis de cauchemars et d'hallucinations dont vous êtes coupable en leur faisant voir le triste spectacle que la pureté de leur âge doit ignorer. Ils sont bouleversés, vos enfants, par le sang qu'ils ont vu gicler à flots, inconsciente maman.
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Un triste souvenirC'était un jour gris de décembre. Ma bonne tante venait de s'éteindre au château de X. après de longs mois de souffrances stoïquement endurées. Il avait neigé tout le jour et le soir tombait comme nous arrivions au vieux manoir. Je voulus voir la morte tout de suite: ‘Il faut éloigner le chien d'abord’, dit mon oncle. Et il nous dit que depuis le matin, la chienne Elsa qui ne quittait jamais sa maîtresse était étendue devant le lit de la défunte, refusant obstinément de s'en aller et montrant les dents à quiconque tentait de s'approcher du lit, où un ange de bonté dormait de son dernier sommeil. Le vieil Ivo, le bon serviteur d'un autre âge, traîna la bête hors de la chambre pour nous permettre de dire un dernier adieu à ‘Tanteken’. Nous passâmes la nuit au château et vainement on essaya de faire descendre la chienne pour lui donner à manger. Elle s'obstina à rester auprès de sa maîtresse, attendant... qui sait... son réveil sans doute. ‘Laissez-l[a]’ dit mon oncle. Le jour des funérailles, dans le grand hall un catafalque était dressé sur un cercueil inondé de fleurs et les nombreux amis qui vinrent | |
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rendre un dernier hommage à la défunte virent, devant la bière, un grand chien épagneul couché, les yeux tristes et rompant de temps à autre le lugubre silence par un grognement sourd. Lorsque le clergé pénétra dans le hall, le chien alla se coucher derrière le catafalque et suivit le tout premier la dépouille de sa maitresse, portee à bras le long de l'interminable drève de platanes qui mène du château à l'église. On le laissa faire. La fidélité de eet ami obscur remua tout le monde et ce ne fut qu'à la porte de l'église qu'il fut pris en laisse. Il accompagna le cerceuil à sa sortie de l'église et voulut descendre dans le caveau de familie.
Il ne revint pas à la maison. Vers le soir mon oncle se mit à la recherche de la bête que sa femme aimait tant et la trouva tristement étendue devant le caveau. Elsa fut de force ramenée à la maison, refusa toute nourriture, languit et mourut peu de temps après. On l'enterra dans le parc, sur les bords de la Lys et on planta des fleurs sur la petite tombe de l'animal fidèle qui mourut de chagrin paree que maîtresse s'en était allée!...
De Keyser-Buysse | |
Ik ook heb zulks beleefdIn mijne kinderjaren woonde te Nevele de notaris D. rechtover mijn ouders huis. Hij was een vriend mijner ouders en paard rijden was zijne grote liefhebberij. Als ik op het middaguur de dorpsschool verliet rende ik vlug naar huis met de hoop de notaris te zien binnen rijden en eens te mogen op de zadel zitten.
Toen moest Knorrepot Guust, de tuinman, naast het paard met mij de grote tuin rondwandelen en mompelde steeds dat zijn meester het kleine meisje aan 't bederven was. | |
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En het was ook zo. Paard rijden is mijn leven lang een gelukkige gebeurtenis geweest, paard rijden heeft mij ontelbare zonnige uren verschaft.
Een diepe teleurstelling viel mij toen te beurt. De vriend notaris vertrok naar het Zuiden om gezondheidsredenen, en Sapho werd toevertrouwd aan een beste pachter, op een grote hoeve gelegen op 20 km. afstand van Nevele. Het paard moest er niet werken en gra[a]sde hele dagen op een grote weide naast de hoeve. Ik treurde over het verdwijnen van het lieve paard. ‘Niet zo overdreven zijn, zei vader, notaris en paard zullen terug komen en gij gaat naar de kostschool te Gent...’. Op een nacht werden wij uit onze slaap gewekt door het onophoudend hunkeren en trippelen van een paard. Ik sprong uit mijn bed en in de zilveren maneschijn zag ik Sapho heen en weer lopen voor de hekkens van notaris D. Guust had het eveneens gehoord en kwam het hekken openen. Het paard rende zenuwachtig naar zijn oude stal en wentelde zich zalig in het verse stroo. Waarom kwam het paard naar huis en hoe heeft het dier de weg gevonden? Mysterie... Sapho is thuis gebleven, haar meester keerde terug uit het [Z]uiden en ik moest naar Gent, de ernstige studiejaren braken aan, maar... aan paard rijden heb ik nooit meer kunnen verzaken.
Dekeyser - Buysse | |
De wreede muitMen noemt ons land een christelijk land, en nochtans gedoogen wij dat de onmenschelijke vogelvanger onze zangertjes met duizenden gaat vernietigen tot zij eindelijk zullen uitgemoord zijn. Wij gedoogen dat die hartelooze kerels, de vogelen in massa gaan vangen om ze in eene kamer zonder lucht - het vogelenmagazijn - op te stoppen en naar de markt te koop te brengen. Meer dan de helft van die rampzalige martelaars sterven uit schrik van in eene muit opgesloten te worden. Zij die overblijven worden tot een eeuwige | |
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gevangenschap gedoemd, en zullen achter de nare trali[ë]n den verlossenden dood afwachten. Ze zingen - die arme minnezangertjes - omdat ze geen andere taal hebben. Maar de zang van een opgesloten vogeltje is een zang van wee, nooit een zang van geluk. En de wreedaardige handel in zangertjes blijft steeds bestaan en de luie schurk die men vogelvanger heet, zet steeds den laffen handel voort, tot op het oogenblik dat de regeering de oogen eindelijk openen zal, daar Belgi[ë] al meer en meer van vogelen beroofd zal zijn en onze vruchten al meer en meer door insekten zullen vernield worden, hetgeen de aangroeiende levensduurte niet verminderen zal.
De voorzitster | |
De voorbeeldige woonwagenTijdens hunne wandelingen ten lande zijn wellicht menigen onder u blijven stilstaan bij zoo'n leurderswagen waar omheen groote menschen en kinderen met bruine huid, donkere haren, mooie zwarte oogen slordig-vuil krioelen. Zoo'n wagen huist langs den openbaren weg, onder eene rij boomen of ergens op een graspleintje aan den rand van kant of gracht. Die lui vestigen zich in de buurt der bewoonde plaatsjes met de hoop zich bij de inwoners kosteloos te bevoorraden.
Hebt gij wel eens opgemerkt welke rommel er in de nabijheid van den huiswagen heerscht? Potten, pannen, kokende ketel op houtvuur, half gewasschen linnen, de ongelukkige hond - uitspringende ribben en opgetrokken ruggegraat - onbarmhartig onder den wagen te kort vastgebonden? Het arme dier heeft niet eens den moed om te blaffen als de voorbijgangers de ontzettende wanorde aankijken.
Het lot van het paard is vooral beklagenswaardig, het arme paard, meestal versleten, maar toch gedwongen den zwaren woonwagen van het eene dorp naar het andere voort te sjouwen. | |
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Zijne belooning? Nooit onderdak gebracht te worden, steeds aan het rijtuig geketend, met enkele stonden vrijheid om langs de baan wat bevuild gras als voeding te gaan zoeken... En 's avonds een weinig hooi voor het gelaten beest, gedoemd, jaar-uit, jaar-in bij regen, wind, storm of sneeuw, zonder eenige beschutting, naast den wagen, zijne nachten door te brengen.
En toch had ik in den loop van den verleden zomer eene troostende verrassing en ik weersta aan de vreugde niet ze u mee te delen.
Het had dagen lang geregend. Op een vroegen morgen rende ik St.-Denys-Westrem voorbij naar de richting van Deinze toe. Daar stond alweer een woonwagen op zij van de baan. Alweer het droef verschijnsel dacht ik, en mijne oogen zochten in 't voorbijrennen naar het paard. Ik zag geen paard, maar wel een gezellig hondenhok onder den wagen, met een hond erin, die in volle vrijheid, den goeden kop op zijne voorpooten rustend, half slaperig van uit zijn houten huisje vriendelijk naar mij lag te kijken. Ik zag nog aan den rand van den wagen eene groote overdekte vogelkooi met opene deur, waaruit lieve witte duifjes bedrijvig uitvlogen om dan weer in alle haast terug te keeren en de korrels te gaan oppikken door eene milddadige hand overvloedig rondgestrooid.
Maar het paard?
Ik bleef kuieren bij het frisch groen geschilderd wagentje met zijne reine witte gordijntjes waarachter alles zoo rustig-gelukkig scheen. Een kinderhandje schoof het kanten gordijntje weg, een knaapje lachte mij toe, een emmer ging aan 't rinkelen, de deur vloog open en de knaap daalde vlug den houten trap af, een dampenden emmer aan den rechterarm dragend, ‘'t Is voor Mirza’ lachte hij mij toe en verdween langs de andere zijde van de wagen. Mirza?? Ik volgde hem op de hielen. Hij keek mij aan met verwondering, wees met den vinger op een eenvoudig stalletje uit houten planken, bijna deelmakend van den wagen: ‘Vader heeft het voor ons paard laten maken, en moeder zegt dat ons paard nu ook zijn bed heeft en wij zijn allemaal zoo blij’, en 't kind bood Mirza het warm ontbijt aan terwijl hij zachtjes het | |
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paardje streelde, het paardje dat zoo taai medehielp om het bestaantje zijner meesters te helpen verzekeren. - ‘Wacht eens, brave jongen, ik wil uw portret maken en zal het u dan later opzenden, gij zijt een heel braaf kind.’ En zoo kwam het dat ik u vandaag met het woonwagentje, met het van regen en wind bevrijde paardje en met het goede knaapje kennis kan laten maken.
Mocht ik dit verhaaltje aan al de eigenaars van woonwagens rondzenden om hen aan te wakkeren hun trouw paard een onderkomen te verzekeren - eenige planken die thans aan den kant van het rollend huisje vastgehecht worden bij zijne plaatsverandering - zoo voelde ik mij beloond met de verzekering eenen nieuwen stap vooruit gemaakt te hebben in het edel werk der dierenbescherming.
De Keyser-Buysse | |
DuivenschietenIk verblijf des zomers ten lande en stel veel belang in alles wat de dieren betreft. Ook in reisduiven, die mij altijd zooveel medelijden inboezemen. De ‘liefhebber’ rukt brutaal de arme diertjes van hunne liefde weg, buit de moederliefde uit om ze verre weg te sturen naar Arras, Creil, Angoulème, Bordeaux, enz. alwaar ze na een of twee dagen zullen losgelaten worden in de hoop dat het uitgebuit ‘liefdesgevoel’ de vogelen zal aansporen zoo vlug mogelijk naar huis te komen aangevlogen... Hetgeen dan ook gebeurt!
Als ze maar niet geschoten worden door de zondagjagers, op Franschen bodem, die menschen-sperwers die alles wat vliegt vernietigen! En wint de duif geen voldoende prijzen meer ten gunste van den hebzuchtigen baas, ze wordt veroordeeld. Het lieve vogeltje dat misschien tien, twintigmaal - meer nog - zijn meester voldoening heeft gegeven, wordt zoodra het oud of zwak geworden is, onmeedoogend verkocht voor ‘de scheut’. | |
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Geen enkele maal denkt de ondankbare baas aan al de vreugde, die het zielige duifje hem verschafte en dat toch wel verdiend had zacht te mogen sterven. De poeldenier wordt ontboden, stopt de in ongenade gevallen vogels in enge manden en weg zijn ze, zonder eten of drinken naar de ongeluksoorden van Spa, Monte-Carlo, Aix-les-Bains, Vichy en meer anderen. Na dagen reizen en lijden zullen de duiven één voor één van hunne staartpennen beroofd worden, om het regelmatig vliegen te verhinderen. Eén voor één zullen de vogels in een mandje opgesloten worden, dat op een gegeven oogenblik automatisch opengaat... De vogel vliegt de lucht in... de moordenaar loert... pan - pan - en daar stort het duifje neer, stervend, als het maar niet verminkt vlucht om ergens, na uren of dagen doodstrijd ellendig om te komen. En die moorderijen gebeuren onder het teeken van ‘sport’ en rijke dames en heeren van den hoogen stand maken zich plichtig aan dat walgelijk plezier.
Honderdduizenden franken zijn te winnen met die duizenden en duizenden diertjes stuk te schieten, ze met afgerukte pootjes, met bebloede lijfjes langzaam te doen sterven ergens in de omgeving van het ‘veld van eer’ der barbaren. Hoeveel geluk zou men kunnen in arme huisjes verschaffen met dat geld door gruwelen verdiend en dat ten slotte toch verspild zal worden, zeer dikwijls op schandelijke wijze. In menig land is het schieten op levende duiven verboden en oefent men zich op automatische ‘clay birds’ en namelijk in de Zoute-aan-Zee is dit het geval.
In verband met het doodenspel ontving ik een brief van een schooljongen uit Gent, brief dien ik aan mijne lezers ter overweging geef.
Waarde Mevrouw,
Verleden Zondag ging ik wandelen langs de Leie en aan ‘Den Anker’ komende zag ik hoe wreede menschen de duiven neerschoten. Men heeft mij daar verteld dat er zoo op twee dagen acht honderd arme diertjes | |
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gedood werden. Ik was zoo erg bedroefd dat ik het u schrijf opdat het niet meer gebeuren zou. Beleefde groeten.
Handteeken.
Braaf kind, kon ik het maar beletten! Treurig is het te moeten bestatigen dat menschen uit de zoogezegde ‘hooge wereld’ daden daarstellen die het gevoelig hart van het kind kwetsen. En nog treuriger is het, te zien dat jonge vrouwen, jonge moeders vreugde vinden in het martelen en bloedvergieten van onschuldige duifjes, wier ras menschenlevens redde in den oorlog, en aan wie dankbare steden - namelijk Verdun en Rijsel - een monument oprichtten. Ik vraag mij af, - en niet zonder angst - welke kinderen die moeders zullen groot brengen, zij die zooveel genot vinden in het walgelijk doodenspel. Wat zal er van het hart dier kinderen geworden?
De Keyser-Buysse | |
Arme vinkjesIk kan niet beschrijven hoe treurig ik gestemd ben, iederen Zondag voormiddag van de maand November als ik over den ‘Kouter’ der stad Gent voorbij kom. Eene dichte massa nieuwsgierige menschen schaart er zich rond kleine kooien opgepropt van versch-gevangen vogeltjes - meestal vinkjes - die angstig-hopeloos tegen de tralies botsen tot ze eindelijk doodmoe en afgemat op den bodem hunner gevangenis gaan neerzitten. Arme vinkjes, de vreugde van onze landelijke streken waar zij ieder jaar schaarscher worden, omdat de ongehoorde massamoorderij [,] door de Regeering toegelaten, ze uitroeit. Zal er nooit een Minister komen die de bekoorlijkheid van die zangertjes-insekteneters begrijpen en waardeeren zal en voor goed het vogelvangen zal afschaffen? | |
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Ik zou wenschen dat onze Ministers naar Aix-les-Bains enkele vakantiedagen gingen doorbrengen. Het vogelvangen is er streng verboden en het is met honderden en honderden dat men de lieve vinkjes ten gronde ziet zitten om graantjes en korreltjes op te pikken. Ze schrikken voor niemand en zingen... zingen... De vinkjes van Aix-les-Bains! Iets wat men nooit vergeet als men ervan genoten heeft! Waarom niet hier? Waarom die poëzie uit ons land verbannen, door het afschuwelijk vogelvangen toe te laten? Politieke mysterie... misschien!
De Keyser-Buysse | |
Het vogelenparadijs te Neuch[â]tel (Zwitserland)Meer dan eens had ik prachtige verslagen gelezen over eene instelling gelegen op de boorden van het meer van Neuch[â]tel in Zwitserland en sinds jaren koesterde ik de hoop met eigen oogen ‘het vogelenparadijs’ te gaan zien. Dezen zomer werd mijn wensch verwezenlijkt. De indruk van opbeurende en troostende goedheid, welke dit bezoek bij mij nalaat is zoo sterk, zoo diep, dat het voor mij een waar genot is, van uit mijn kalm studievertrek, de les van goedheid, die ik genoten heb, aan mijn lezers mede te deelen. Wij zijn aan het meer van Neuch[â]tel: kalm, blauw, heerlijk. Prachtige villa's weerspiegelen zich in het rustig en klare water. Een torentje, puntend uit het weelderig groen, overheerscht het meer: daar is het. Een uitgestrekt park, een rijke villa, bloemen overal: geraniums, begonia's, fuchsia's en duizend andere bloemen schijnen naar het meer te glijden. Het is een pracht! Wij zijn aangekomen; een sympathiek personeel wacht ons op. De meester, de groote weldoener, is ziek en bedlegerig. Maar de bevelen zijn gegeven: wij zullen tot in de kleinste bijzonderheden het meesterwerk bewonderen opgericht door een mensch, die het geluk heeft rijk te zijn en zijn fortuin te gebruiken om menschen[-] en dierenleed te lenigen. | |
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‘De vogel is niet geschapen om in eene kooi opgesloten te worden’. Door dat gedacht bezield, tracht de goede vriend zooveel mogelijk de opgesloten vogeltjes aan hun gevang te ontrukken. Deze die de luchtgesteldheid van Zwitserland niet verdragen, beschut hij tegen koude en verschaft hun een verblijf zoo uitgestrekt, zoo genoeglijk, dat de vogels om zoo te zeggen in volle vrijheid leven en hun levenslust uitgalmen van 's morgens tot 's avonds. Het vogelenparadijs bestaat uit drie plaatsen, waarvan de derde een groote tuin is. De eerste plaats is derwijze aangelegd dat geen onvoorzichtig vogeltje kan ontvluchten. Het is eene kooi van 4 m. breed, 3,5 m. hoog en 7,5 m. lang. De thermometer wijst er steeds 14 graden en die temperatuur komt best te pas aan de nieuw aangekomen[en] en de kouwelijken. Niets ontbreekt: echte muren van klimop, loopend water, rekken, tafels vol graantjes, eetbakjes, kleine boompjes aan wier takken klompjes spek vastgehecht zijn. Eene menigte kanarievogels schijnen ons welkom te heeten. De bediende, die ons rondleidt, heeft een massa salaad medegebracht, die in enkele oogenblikken opgepikt is. Men trekt onze aandacht op een tiental vogels, die 's morgens aankwamen. Zij schuilen in een hoekje, stijf van hunne voorgaande gevangenschap. ‘Binnen twee dagen zullen zij even als de andere hun geluk luid uitgalmen’ zegt onze vriendelijke gids en hij wijst ons boven de deur eene kleine opening langs waar de vogeltjes komen in de Tweede plaats. Drie dagen zijn er zeker niet noodig aan de kleine vrijgelaten diertjes om den weg te kennen naar het oord, waar zelfs bij de ergste kou de thermometer steeds 5 graden aanwijst. Hier is nogmaals eene gelukkige bevolking, hier weerom overvloed van graantjes, vruchten, groenten, struikgewas, kleine rotsen, een badkom. En nogmaals boven de deur een rechthoekig venstertje, dat aan de gevleugelde bewoners toelaat den hof in te vliegen die de derde plaats is. Bij het binnentreden ben ik vol bewondering en ontroering: zooveel geluk aangeboden aan duizend verrukkelijke vrij gelaten vogeltjes; zooveel innige goedheid van wege iemand die daar eenzaam leeft in zijn ‘paradijs’ hebben mij diep bewogen en ik pink een traantje van aandoening weg. | |
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Die hof, want men kan zulks geen kooi meer noemen, is 30 m. lang, 15 m. breed en 5 m. hoog. Een vijftiental kloeke boomen, struikgewas, eene kleine rots, waarover een murmelend beekje kabbelt en zelfs miniatuurwatervallen vormt, even als kristalheldere plasjes, waar de vogeltjes komen drinken en met wellust baden. De zon beschijnt de rots en eene menigte zeldzame vogeltjes spelen in het water, dat schittert met al de kleuren van den regenboog. Zij zijn echt mak en hunne pareloogjes schijnen den bezoeker uit te noodigen deel te nemen aan hunne spelen. Lang blijf ik staan voor het kleine strand om de vogeltjes uit het bad te zien komen en zich in het fijne en mulle zand in de zonnestralen te koesteren. Eene bloeiende haag begrenst langs een kant den vogelentuin. Een pad is met fijn zand bestrooid, waarin de gelukkige bewoners stukjes erts vinden en oppikken; ook in de welverzorgde grasperken vinden zij wormpjes als versnapering. De gevederde zangers versieren de boomen en struiken, waarop hunne pluimage schittert als witte, gele, groene, roode en blauwe bloemen. Welk eene verscheidenheid in die pracht! en welk een onvergetelijke geluksdroom, want liefde heerscht in het vogelenparadijs en meer dan eene serenade stijgt uit een gorgeltje voor een geliefkoosd kameraadje. De lieve vogeltjes beminnen elkander onder de groote zonneschermen, ze zingen in koor het geluk vrij te mogen leven en heffen zeker wel een danklied aan voor hun bevrijder. Wij hadden graag uren doorgebracht in dat aardsch paradijs; maar aan alles komt een einde. M. Russ, want zoo heet de dierenvriend, heeft den wensch uitgedrukt ons te ontvangen. Zeer stil nader ik het bed waarin een man ligt uitgestrekt, kalm en glimlachend. Door het open venster laat hij zijn blik waden op de prachtbloemen en op het blauwe meer. Geene voorstelling; een zelfde ideaal maakt ons tot vrienden. Wij vernemen dat M. Russ op 22 jarigen leeftijd aangetast werd door doodskramp en nog altijd lijdt aan de gevolgen dier schrikkelijke ziekte. Hij is niet gehuwd en heeft zijn eenzaam leven gewijd aan het lenigen van menschen- en dierenleed. Alles bij hem is goedheid en zijn personeel omringt hem met de beste zorgen. De verkleefde huishoudster leidt ons door verscheidene kamers, alle gebruikt voor vogelbescherming. De secretaressen zorgen daar voor | |
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een voorbeeldige schikking van al de dokumenten. In de bureelen wordt het bulletijn ‘De kleine dierenvriend’ opgesteld en de wereld ingezonden. De ziel van gansch het werk is M. Russ alleen. De nederige vriend zal het mij niet ten kwade duiden den sluier opgelicht te hebben van zijn bewonderingswaardig leven. Het bezoek aan de vogelkooien van Neuch[â]tel, opgericht met het eenig doel de vogelen vrij te laten leven, is een zonnestraal geweest in onze reis en doet bij ons een vurig verlangen ontstaan: terugkeeren naar Serrières! Daar vergeet men de soms zoo donkere levensdagen, men voelt zich beter worden bij zooveel goedheid en als men al die gelukkige vogeltjes aanschouwt denkt men onwillekeurig aan deze waarheid. ‘De vogels zijn geschapen om in vrijheid te leven, hij die ze in eene enge kooi opsluit is hun gevangenbewaarder en niet hun vriend’. Al de dierenvrienden, die door het lezen van dit verslag zullen overtuigd zijn van het oneindig geluk, dat de vrijheidskooien aan hunne bewoners verschaffen, zullen den grooten weldoener dankbaar zijn en zullen, even als ik, uit den grond des harten hopen dat hij eens navolgers hebben zal. Vooral zullen zij zijne woorden hoogschatten, als M. Russ zegt: ‘Gij allen, die gevoelvol de dieren behandelt, pleit overal en altijd ten voordeele der vogeltjes, die nutteloos en onverstandig tot onschuldige gevangenschap gedoemd worden’.
De Keyser-Buysse | |
A nos amis grands et petitsJe me sens envahie de tristesse sous le poids de l'année qui va finir et mes pensées lourdes se posent sur les souffrances de la terre... Inquiétude, menaces, bouleversement partout: en divers pays l'horrible guerre, en d'autres le mécontentement, la révolte, les grèves. Les nuages noirs s'accumulent. Il ne règne plus d'entente entre les peuples, il ne règne plus d'harmonie entre les hommes paree que la bonté a fait faillite. C'est elle qu'il faut faire revivre, c'est elle qu'il faut faire germer dans le coeur de l'enfant, l'homme de demain. | |
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Voilà le but que nous poursuivons et j'ajoute avec bonheur que des résultats encourageants, chaque jour grandissants, sont atteints. Le public a compris combien notre oeuvre est une oeuvre de grande charité et de haute moralité; aussi la légion des coeurs compatissants accuse un nombre impressionnant de par le monde. C'est grâce à vous, grands et petits amis si bons, grâce à votre vigilante collaboration que des résultats consolants sont atteints et au seuil de l'année qui commence je vous souhaite à tous le bonheur, la santé et la paix dans un ciel rassénéré. Je remercie tout spécialement le personnel enseignant paree qu'il comprend si clairement son devoir d'humanité: dans l'avenir comme par le passé nous comptons sur lui pour développer dans le coeur des enfants cette suprême vertu qui mène à la paix: la Bonté.
La Présidente | |
NieuwjaarDe beschaving heeft hare beteekenis verloren en oorlog woedt over Europa. Velen onder ons beleven voor de tweede maal in hun leven den laffen, onbegrijpelijken oorlog, en velen onder ons zullen voor de tweede maal ijveren om, in de maat van het mogelijke, het onverdiende leed te verminderen. Wij zullen uit al onze kracht strijden om het lot der menschen te verzachten, maar wij zullen ook de lijdende dieren niet vergeten. Zij zijn immers onze helpers en vrienden, zij lijden in deze nare tijden aan ontbering, zij sterven naast de soldaten op het slagveld. De dieren verdienen dat de menschen zich om hun lot bekommeren. Daarom zetten wij moedig en onverpoosd onze schoolpropaganda voort, want meer dan ooit moet de goedheid in de kinderharten geprent worden om den verderfgeest tegen te werken die thans over de beroerde wereld waait. En gij, vrienden van het onderwijzend personeel, blijft ons trouw, helpt ons mee. Gij hebt met de meeste toewijding jaren lang ons bijgestaan en wij zullen u dankbaar zijn de verhevene kruistocht voort te zetten. | |
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Laat ons vooral allen optimistisch blijven tot de dag aanbreken zal dat het oorlogsspook zal vernietigen om de zon van den vrede te doen schijnen over een herschapen wereld. In die troostende hoop wenschen wij aan onze vrienden groot en klein een rustiger jaar 1940.
De voorzitster | |
De bloemen van meester DeprestIk ken een dorpje in de buurt van Gent, een lief rein dorpje, met aan den ingang de school, omgeven van een met bloemen overladen muur; 't is eene echte bloemengordijn die op vele meters lengte den muur komt afgedaald. Ik ben er blijven stilstaan om die bloemenweelde, uit talrijke houten bakjes boven op den muur gesproten, te bewonderen. En ik was fier, want dat dorpje - Drongen - is mijn dorpje en de meester die de prachtige bloemen op den muur laat groeien is de uitstekende dierenbeschermer, meester Deprest. Eens te meer geeft hij bewijzen welke bewonderaar en beschermer hij is van alles wat leeft. Daar getuigen nu ook de mooie bloemen van, de bloemen die zonder twijfel verzorgd worden door de schooljongens zelf. En denkt ge niet dat die kinderen die opgroeien in liefde voor de natuur, in liefde voor de Schepping, denkt ge niet dat die jongens vader en moeder lief zullen hebben, vader en moeder zullen helpen en degelijke menschen worden in onze samenleving? Mocht het voorbeeld van meester Deprest in de maat van het mogelijke in alle scholen nageleefd worden!
De voorzitster | |
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Het oudje heeft ons diep ontroerdEen donderdag namiddag op het bureel der dierenbescherming. Daar stonden ze talrijk, de arme menschen, in de gangen, om, op hunne beurt onze hulp te vragen voor het betalen der geëischte hondentaks. Tusschen de menigte, een oud gebogen ventje, met een klein hondeken in de armen. Wij lieten hem voor de andere binnen komen. Het oudje vertelde ons dat hij bijna tachtig was, zijn vrouwtje zeventig en het hondje 15 jaar. Ze konden er niet van scheiden, zei hij, terwijl tranen in zijne oogen blonken, en hij het hondje bijna teeder tegen zijne borst drukte. Eene onzer leden, bekend voor hare groote liefdadigheid stopte bescheiden het oudje een waardevol briefje in de hand. De zaak was opgelost. De hondentaks was dubbel betaald geworden; ik zag de oude goede oogen door tranen verduisteren, dankbare tranen die langs de gerimpelde wangen vloeiden en op den rug van het kleine hondje terecht kwamen. Het gelukkig ventje verliet ons bureel, niet ziende dat de voorzitster der dierenbescherming twee dikke tranen wegveegde.
De Keyser-Buysse | |
Un bon petit garçonJe connais un petit garçon - un bon petit garçon - qui adore son papa, sa maman, son grand-papa et qui aime toutes les bêtes. Il a six ans et s'appelle Max. Il est très bien élevé et quand sa maman le mène en visite, il salue non seulement les habitants de la maison, mais aussi les animaux de la maison. Grand-père le conduit souvent à la promenade et il n'est pas rare de voir le petit Max retirer son chapeau quand un cheval vient à passer. L'autre jour il s'arrête dans la rue, regarder passer un corbillard triste attelé de deux chevaux noirs. | |
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‘Grand-père, quand je mourrai, il faut qu'on m'enterre avec le corbillard automobile’. - ‘Pourquoi, mon petit garçon? - - Mais grand-père, parce que je ne veux pas que les chevaux travaillent pour moi.’ Au cours des vacances grand-père le régale d'un voyage et d'une visite au jardin Zoologique d'Anvers. L'enfant émerveillé ne parvient pas à s'arracher du logis des singes, auxquels il offre maintes douceurs. Un singe immense essaie de lui enlever son chapeau en passant sa menotte humaine entre les barreaux. Max rit à gorge déployée et, sans rancune, offre au chimpanzé un grand morceau de gâteau. La bête empressée arrache trop h[â]tivement le beau morceau qui... tombe dans le sable. Le singe regarde l'enfant de ses yeux consternés, mais aussitôt Max ramasse le gâteau, l'essuie soigneusement à son beau costume et avec un accueillant sourire le tend à la grande bête en lui disant ‘pardon’. Et j'ajoute: heureux parents, heureux grand-père qui possédez un enfant révélant dès son très jeune âge cette noble vertu la Bonté qui rayonnera sur son existence et sur la vôtre.
De Keyser-Buysse | |
Het vinkje van den groentenboerEmiel D.S. is een braaf vlijtig jongetje van 8 jaar oud. Hij is dol op buitenleven en 's Zondags, bij mooi weer, kent hij geen grooter vreugde dan met zijn ouderen broer, Jantje van den groentenboer te gaan opzoeken op het boerderijtje, en er uren lang door 't groene gras te hollen onder de boomen van den vruchtbaren boomgaard. [D]e lente is teruggekomen en de zon verspreidt hare warme stralen door het jeu[g]dige groen. De vogeltjes zingen hunne vrijheid, de blijde vischjes spartelen in de heldere Leie die het boerderijtje omsluit. Alles getuigt van geluk en liefde. Jantje staat op straat bij 't hekje en ziet de speelkameraadjes komen. Hij huppelt van vreugde en roept hen van verre toe: ‘Komt al gauw, il zal u iets laten zien.’ De drie levenslustige jongens ijlen | |
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de keuken binnen en Jantje, fier, met den vinger naar den muur wijzend, den muur waaraan een vogelmuitje hing: ‘Kijk eens, dat schoone vinkje heb ik dezen morgen gevangen.’ Vader knikt, moeder lacht hem vriendelijk toe en Mielken spreekt geen woord. Stil blijft hij bij het gevangen vogeltje staan, en zijne bedroefde oogjes volgen weemoedig het beestje dat van het stokje op de ijzeren traliën onverpoosd heen en weer zit te springen. ‘Hij is nog wat vreemd, zegt Jantje, 't zal wel beteren.’ ‘Die vogel zal sterven van verdriet[’], weerlegt braaf Mielken en zijne goede oogen staren steeds treuriger het vinkje en dan weer den ouderen broer aan. Het kinderhandje verdwijnt zoekend in het broekzakje, haalt een frank te voorschijn en deze aan Jantje aanbiedend: ‘Jan, die is voor u als ik het vogeltje mag vrij laten.’ Verwonderd en tevens gretig neemt Jan het geldstuk aan. ‘Voor een frank! Ja zeker moogt gij hem hebben.’ Moeder haalt het muitje van den muur, Mielken ijlt er zegevierend mee naar buiten, zet voorzichtig het deurken wijd open en ... wip zegt het vinkje en vliegt de wijde wereld in. Blijde oogjes staren het achterna, een vingertje poogt een oogenblik de vlucht van 't vogeltje na te sporen en Mielken, zich jubelend naar de toekijkers omkeerend: ‘Hebt ge gezien hoe blij hij was? Zeker is het dat hij al gauw naar zijn nestje gevlogen is, waar zijne jongskens met opene bekjes zitten te piepen van den honger.’ ‘Mijn broer droomt van de beesten’, onderbreekt de oudere broer. - ‘En ik heb een boekje van dierenbescherming, en ik lees er toch zoo gaarne in,’ was het antwoord. Dit kleine vertelsel is waar gebeurd, mij door eene vriendin des huizes medegedeeld. Ik betreur den jongen Emiel niet te kennen om hem de beide handjes te drukken en te feliciteeren voor zijne goede daad. Want weest verzekerd dat het kind als hij eenmaal groot zal geworden zijn even goed de menschen zal behandelen en beschermen zooals hij met het gevangen vogelken heeft gedaan. Wij hebben geen twee harten: het een voor de menschen en het andere voor de dieren.
De Keyser-Buysse |