Publications de la Société Historique et Archéologique dans le duché de Limbourg. Deel 10
(1873)– [tijdschrift] Jaarboek van Limburgs Geschied- en Oudheidkundig Genootschap– Auteursrechtvrij
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Mélanges.I. Le Monument funêbre de Frédérique-Maurice duc de Bouillon gouverneur de Maestricht (1632-1641) dans l'église abbatiale de Cluny. (Voyez tome III p. 18).Emmanuel de la Tour d'Auvergne, surnommé le cardinal de Bouillon, était abbé commendataire de la célèbre abbaye de Cluny en Bourgogne. C'était un prince très-riche et d'une magnificence si fabuleuse qu'à certains moments il excitait la jalousie de son magnifique et glorieux maître, le roi de France, Louis XIV. On raconte que son train de maison, pendant sa résidence à Rome s'élevait à 100,000 livres par mois, ce qui, au taux actuel de l'argent, représente au moins 500,000 francs de notre monnaie. M. Emile Montégut raconte dans la Revue des deux Mondes (1 Janvier 1873 p. 181) l'histoire du monument colossal que ce cardinal avait eu l'intention d'ériger dans l'abbaye de Cluny à son père Frédérique Maurice duc de Bouillon, ancien gouverneur de Maestricht et à sa mère Eléonore van den Bergh dame de Stevensweert, près de Ruremonde. Nous allons transcrire en l'abrégeant toutefois cette page qui se rattache à l'histoire de notre province par un double lien. ‘Parmi toutes ses folies de magnificence, le cardinal de Bouillon en avait fait une qui était au moins excusable dans son principe, et que tous les amis des arts auraient trouvée louable par ses résultats. Il avait rêvé de construire à la mémoire de son père et de sa mère un mausolé dont le faste surpassât tous les monument princiers passés et à venir. Nous connaissons le plan de ce monument, il est gigantesque en effet. Il devait atteindre presque jusqu'à la voûte d'un des transepts de la grande église abbatiale; l'échantillon qui nous reste de ce transept nous permet de juger | |
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de cette élévationGa naar voetnoot(1). Aux deux côtés devaient s'élever deux statues de grandeur naturelle, l'une consacrée au fondateur de sa maison, Godfroi de Bouillon, comte de Flandre et roi de Jérusalem, l'autre consacrée au fondateur de Cluny, Guillaume le Pieux, comte d'Auvergne et duc d'Aquitaine, qui était luimême un de ses lointains ancêtres. Audessus du monument sont groupées d'autres statues allégoriques, le Temps, la Charité, la Force. Enfin le tombeau présentait les statues du duc de Bouillon et de sa femme Eléonore de Bergh. Ce rêve d'orgueil était réalisé; le cardinal avait fait exécuter les statues en partie à Rome en partie en France; toutes les pièces diverses du tombeau étaient arrivées à Cluny dans des caisses soigneusement fermées, et il n'y avait plus qu'à disposer le mausolée, lorsqu'un ordre de Louis XIV, appuyé de considérans rédigés par d'Aguesseau, vint défendre que le monument fut érigé, sous le prétexte qu'il tendait ‘à conserver et consacrer par la religion d'un tombeau toujours durable, les prétentions trop ambitieuses de son auteur sur l'origine et la grandeur de sa maison’. ‘Tout ce qui reste de ce mausolée, ce sont les deux figures du duc de Bouillon et de sa femme, une tour crénelée et une figure d'ange s'envolant du pied de cette tour et portant entre ses bras un vase fumant. La tour fait aujourd'hui partie du musée de Cluny; l'ange l'a quittée pour aller prendre son vol au-dessus de l'autel de l'hôpital, et les deux statues du duc et de la duchesse de Bouillon décorent les deux côtés de l'entrée de cette même chapelle. Ce sont ces deux belles statues dont il faut admirer le travail, mais dont l'originalité nous paraît contestable. Le duc de Bouillon est étendu à terre, le buste relevé; sa physionomie est pensive, un peu soucieuse; il paraît absorbé dans une sorte de rêveuse incertitude. En face de lui, la duchesse, assise dans une pose pleine d'élégance, lui montre | |
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du doigt quelques lignes écrites dans un livre que soutient un petit ange nu; mais que sa physionomie est différente de celle de son époux! Une gaieté radieuse, qui n'est pas exempte d'une sorte de malice espiègle, brille sur son visage; on dirait qu'elle a surpris son mari en flagrant délit d'erreur, et qu'elle s'amuse à le confondre par un texte sans réplique. Le secret de cette joie doit être contenu dans les lignes qu'elle lui montre, et il y est contenu en effet, car ces lignes se rapportent à la consécration de l'Hostie et affirment le mystère de la transsubstantiation, nié par les protestants. Cette expression et cette pantomime veulent donc dire: le duc de Bouillon était protestant, et il se convertit au catholicisme par les conseils et les instances d'Eléonore de Bergh, sa femme. La base de la statue du duc de Bouillen est ornée d'un petit bas-relief du travail le plus remarquable, qui nous paraît de beaucoup la pièce la plus originale de ces sculptures. Ce bas-relief qui consacre le souvenir de quelqu'une des batailles auxquelles le due prit part, représente une mêlée pleine de furie et de mouvement. L'artiste s'est évidemment inspiré des mêlées classiques de l'art italien; mais transformant ses souvenirs avec une intelligence des plus rares, il a donné un aspect tout moderne à ces batailles italiennes qui ont toujours l'air de se rapporter aux combattants d'Enée et du roi Turnus. Cette mêlée est un carnage de gentilhommes français du temps de Louis XIII; ces têtes, ces corps, sont modernes et français’. | |
II. Supplément à l'histoire de Reckheim.Nous prions le lecteur de joindre aux notices sur les seigneurs de Reckheim les détails supplémentaires suivants: Par lettres du 4 Janvier 1300 (V.S.), Jean II, duc de Brabant, autorise la ville d'Aix-la-Chapelle à payer annuellement sa rente de cent marcs à Gérard de La Marck, jusqu'à concurrence de la somme de mille marcs qu'il doit à ce seigneur. (Quix, Codex diplomaticus aquensis, No 253). On trouve en outre, dans les archives de Lille, une promesse de Jean, duc de Brabant, Gérard, comte de Juliers, Renaud, | |
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sire de Fauquemont et de Montjoie, Florent Bertaut, sire de Berlaer, de dédommager Robert, comte de Flandre, pour avoir, à leur prière, remis à Gérard de La Marck et Isabeau, sa femme, la terre de Bevere, que le comte de Flandre avait fait saisir, à cause du procès qu'il y avait en la cour du roi, pour la propriété de cette terre, entre la duchesse de Lorraine, d'une part, et monseigneur Jean de Bevere, d'autre part, 1308. (De Saint-Genois, Monuments anciens, t. II, p. 32). D'après M. de Saint-Genois, Histoire des avoueries en Belgique, p. 120, messire Henri de Diepenbeek, que l'on rencontre en qualité d'Avoué de Liége, dans la première paix des XXII, en 1373, ne serait pas un Haut-Avoué, comme l'avance Villenfagne, mais seulement un Sous-Avoué de Liége. L'épitaphe de Jean de Hennin nous apprend qu'il mourut le 12 Février 1562, mais d'après un compte rapporté dans l'Inventaire des archives des chambres des comptes en Belgique, le grand-bailli des bois de Hainaut serait mort le 12 Février de l'année suivante. Nous croyons que cette contradiction n'est qu'apparente et résulte de l'emploi, dans le Hainaut, du style de Cambrai, d'après lequel la fête de Pâques était le terme de l'année courante. Quant aux décès de Herman Frédéric Gobert et d'Anne Marie, enfants de Ferdinand de Lynden, les dates fournies par Le Fort nous semblent erronées. On voit dans la cinquième édition d'Imhof, t. II, pp. (164) et (165), que l'une mourut le 4 Février 1724, et l'autre le 24 Avril 1706. Le mariage de leur soeur Anne Salomé fut célébré en 1677.
J. de C. | |
III. Une ancienne sonnette et un tableau du ci-devant château de Fauquemont.Nous avons trouvé chez M. Elias à Fauquemont une belle sonnette en style de renaissance dans le genre de celles que nous avons rencontrée dans l'église de Nunhem et chez M. Cramer à Amby (v. t. V, p. 339). Celle de M. Elias date de l'an 1541 | |
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comme l'indique l'inscription suivante: ✠ MATER DEI MEMENTO MEI ✠ IC BEN GHEGOTEN INT IAER MCXLI. Ce charmant petit meuble est orné d'un St. Michel terrassant le dragon, d'un dieu Comus et de la Muse comique Thalie. La manche forme une colonne soutenue par trois génies. Nous avons été à même d'admirer chez le même amateur un magnifique tableau à l'huile représentant le château des anciens sires de Fauquemont avant sa destruction définitive par les Hollandais en 1672. Tout touriste qui veut se rendre compte de ces belles ruines fera bien de ne pas oublier d'aller voir d'abord ce tableau; l'imagination saura alors redresser d'une manière facile tous ces pans de murs qui nous paraissent hyéroglyphiques et indéchifrables à la première vue. Quelques parties anciennes du château, par exemple la chapelle castrale et le mur orné d'une fenêtre ogivale dans les ruines du sud datent du règne de Jean III dernier sire de Fauquemont, qui mourut vers l'an 1352. D'autres parties ont été ajoutées par les ducs de Brabant et les possesseurs subséquents. Chaque génération y a pour ainsi dire laissée ses traces, et il est difficile de les démêler. Les derniers changements y ont été apportés par les Hollandais en 1671 une année avant sa destruction finaleGa naar voetnoot(1). | |
IV. La famille espagnole de Verdugo dans les Pays-Bas.Dans la chronique de Ruremonde publiée dans ce volume par M. Nettesheim apparaît trés-fréquemment le nom de Verdugo. Nous nous permettons de donner ici un petit croquis généalogique qui mettera en évidence les différents membres de cette puissante famille, qui ont commandé dans notre Pays. Don Francisco de Verdugo, Feldmaréchal espagnol, amiral et gouverneur de la Frise, né à Tavalero près de Tolède en Espagne, ✠ le 22 Septembre 1595 à Luxembourg, épousa en 1578 Dorothée, comtesse de Mansfeldt, ✠ à Leeuwarden en 1585 et | |
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enterrée auprès de son mari au couvent du St. Esprit à Luxembourg. Leurs enfants sont: 1. Don Juan de Verdugo, ✠ après 1643, général espagnol, gouverneur de la Gueldre et du Bas-Palatinat. 2. Guillaume comte de Verdugo, seigneur de Tuppau, Maschau et Neprowitz en Bohème, général espagnol, gouverneur de la Gueldre et du Bas-Palatinat. Il décida en 1622 à la tête de ses troupes Wallonnes de la victoire du Weissenberg en faveur de l'Autriche. 3. François Jean comte de Verdugo, seigneur de Tuppau, Masschau et Neprowitz, conseiller de guerre espagnol, général au service de l'Empire, épousa Anna Marie baronne de Hasenburg, veuve d'un comte de Nagarola. De cette union sont sortis les comtes de Verdugo en Bohème. 4. Dona Margaretha Anna de Verdugo, mariée à Don Antonio de Menessis y Padilla. 5. Dona Walburga de Verdugo, née à Leeuwarden en 1585, morte à Luxembourg le 16 le Octobre 1587. 6. Dona Isabella de Verdugo. 7. Dona Magdalena de Verdugo, religieuse de St. Augustin à Talavero, près de Tolède. 8. Dona Dorothea de Verdugo, religieuse de St. Augustin à Tavalero près de Tolède. | |
V. Notice biographique du Docteur Jean Joseph Jaegers de Heerlen.La Société historique et archéologique du Limbourg vient de perdre un de ses membres les plus dévoués. Notre estimé président, en nous communiquant lors de la dernière assemblée générale cette triste nouvelle, a rendu aux mérites de feu M. Jaegers un tribut d'hommages bien chaleureux. Nous prenons la liberté d'y ajouter quelques détails. Jean Joseph Jaegers est né à Heerlen, le 14 Mai 1810; après avoir achevé ses études préliminaires au collége de Ruremonde, qui alors comme de nos jours était un des plus florissants de la | |
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province, il se rendit en 1831 à l'université de Louvain et en 1832 à celle de Liége, où il obtint maxima cum laude le doctorat en médecine. Après un court séjour dans différents hôpiteaux de Paris M. Jaegers est veau s'établir comme praticien dans son village natal, qu'il ne devait plus quitter. Le 1 Janvier 1843 il fut nommé bourgmestre de Heerlen, charge qu'il remplit consciencieusement, mais qu'il fut obligé de quitter en 1853, à cause du nombre toujours croissant de ses pratiques. Vers 1855 il fut nommé membre des états provinciaux et ne discontinua point de soigner les intérêts de ses commettants jusqu'en l'année 1865. M. Jaegers a été en outre inspecteur des écoles primaires durant 27 ans. Cette dernière fonction cadrait avec ses études de prédilection; car M. Jaegers était un ami zélé de notre langue et de nos traditions nationales. Il s'occupait dans ses loisirs d'antiquités classiques et lorsqu'en 1863 notre Société fut fondée, il fut un des premiers qui adhéraient à cette utile entreprise, qu'il ne cessait de favoriser depuis. Il était également membre de la Société flamande ‘Met tijd en vlijt’ de Louvain. Le gros bourg de Heerlen, est une de ces terres classiques de notre province où l'on trouve à chaque bout de champ des reliques du passé. Le docteur qui savait apprécier les découvertes à leur juste valeur avait formé une petite mais intéressante collection de monnaies et d'objets romains, germains et francs recueillis à Heerlen même. Une partie de oes objets vient d'être achetée pour le musée provincial de notre société. M. Jaegers est mort à Heerlen le 31 Octobre 1872; sa veuve Marie Anne Reynaerts, née à Heerlen le 21 Octobre 1808 l'a suivi le 21 Novembre de la même année au tombeau.
A.A. VORSTERMAN VAN OIJEN. | |
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VI. Bijdrage tot de kennis van den regeringevorm van Maastricht en zijn ressort, moer bijzonder gedurende het tijdvak 1632-1794, academisch proefschrift door Lucas Johan Suringar. Leiden 1873 de 283 bladz. in 8o.L'auteur partage son travail en deux parties fort distinctes, dont l'une s'occupe de l'histoire politique de la ville et l'autre de la forme de son gouvernement. Nous ferons quelques réflexions sur cette première partie qui au point de vue historique nous semble être la plus importante. M. Suringar suit la bonne méthode pour écrire l'histoire; il juge rarement les faits mais il les expose; cependant dans le cours de cette exposition il a parfois dû se contenter, faute de documents précis, de suivre l'opinion des historiens qui l'ont précedé; or ces historiens comme on sait, sont tous fort enclins à servir les parties de la ville auxquelles ils étaient attachés. C'est ainsi que nous pensons que M. Suringar a tort d'attribuer une grande importance aux déductions d'avocats hollandais qui plaident leur cause et tâchent en cette encontre d'infirmer la valeur des diplômes concernant les droits de l'évêque de Liége sur Maastricht, (p. 17-33). Une critique paléographique loyale et sage pourrait seule déterminer la valeur de ces pièces. Ces diplômes ont été pour la plus part confirmés par les empereurs, ils ont été reçus dans les anciens cartulaires de Liége et ont circulé comme authentiques jusqu'à ce jour. La perte de l'original à lui seul n'infirme pas la copie, ni le chiffre fautif de l'indiction ou de la date. La seconde réflexion que nous avons à faire se rapporte à la vieille charte de l'année 1283. Quoiqu'en dise Pelerin, il nous semble difficile d'affirmer lequel des deux princes, l'êvêque de Liége ou le duc de Brabant a gagné par ce traité. Le dossier des pièces qui ont servi aux conférences de ce fameux traité est perdu. On ne peut donc faire à ce sujet que des inductions plus ou moins hasardées. Nous pensons que M. Suringar (p. 45, 54 et 87) attache trop d'importance à l'opinion qui attribue à l'évêque ‘de grands droits’ dans l'article XII de cette charle, où il est dit que | |
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non seulement les suppôts de St. Lambert et de Notre-Dame de Liége, mais aussi ceux de Notre-Dame de Maestricht, de Tongres et de Huy ainsi que ceux de Ste Ode à Amay, s'ils viendraient s'établir à Maestricht, devraient appartenir à la juridiction de l'évêque. Or nous pensons que ce fameux article XII ne donne à l'évêque de Liége que ce qu'il avait déjà à Maestricht, en foi du diplôme de l'empereur Lothaire de l'an 1132 (Miraeus I p. 95). Le diplôme impérial de 1132 dit en effet: Omnes qui de quacumque regione ad manendum (in Trajecto) confluxerint, praeter familiam S. Mariae et Sti Lamberti, ad justitiam regis pertinent. La fameuse déclaration de 1243 éclairçit singulièrement ce texte lorsqu'elle dit: Esse de jurisdictione episcopi hoc est pertinere ad Stem Lambertum. (Franquinét Oorkonden van O.L. Vrouwekerk p. 23). Que veut dire cette locution? On désignait généralement dans le moyen-âge par familia ou ecclesia Ste Mariae et Sti Lamberti ou Sti Lamberti tout court tous les sujets de la principauté de LiégeGa naar voetnoot(1). Or qui serait assez hardi pour affirmer qu'en l'année 1283, les églises de Tongres, Amay et Huy ne faisaient pas partie du territoire Liégeois? Dans quelle intention donc l'article XII nomme-t-il ces églises à côté de celle de la cathédrale? Nous croyons trouver la raison dans la circonstance que dans ce temps-là les chanoines de la cathédrale étaient prévôts de Huy, Tongres, Amay et Notre-Dame de Maestricht. Ces églises faisaient pour ainsi dire un seul corps avec le chapitre cathédrale et faisaient partie de la régence du pays. De cette manière leurs noms dans l'article XII de la vieille charte sont plutôt explicatifs qu'extensifs. Voilà ce que nous pensons du fameux article XII. Mais supposons que ces noms doivent s'interpréter d'une manière extensive, comme le veulent Pélerin et son école, alors il ne s'en suivrait pas encore que l'évêque eut gagné des droits notables à Maestricht. Les chanoines, les marguilliers et les suppôts de ces divers chapitres ne pouvaient être que peu nombreux, et par l'établissement à Maestricht, de l'un ou de l'autre de ces suppôts | |
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l'évêque de Liége n'aurait pû se féliciter d'un grand accroissement de juridiction. Enfin admettons l'interprétation la plus large et disons qu'on doit ranger parmi les suppôts de ces quatre chapitres les habitants des différentes Seigneuries qui en dépendaient. Dans ce cas là encore l'évêque de Liége a gagné fort peu de chose, car si nous sommes bien renseignés, ces Seigneuries, si l'on excepte celle de Bemelen et peut-être quelques autres petites terres, faisaient toutes partie du territoire de Liége; ce qui plus est le village de Bemelen lui-même aurait été d'après de Lenarts, territoire Liégeois avant l'année 1155. On peut donc envisager l'art. XII de toutes les façons possibles, on n'en saurait jamais tirer de grandes faveurs pour l'évêque de Liége. A vrai dire cette question nous fait l'effet d'une tempête dans un verre d'eauGa naar voetnoot(1). Les écrivains du parti Brabançon (Suringar p. 35 et 36) prétendent que les évêques de Liége avant le 13me siècle n'avaient aucune juridiction territoriale et pas une ombre de souveraineté sur Maestricht, ce qui d'après les Liégeois reste toujours à prouver. Nous pensons que si même on refuse de ranger parmi les droits souverains la juridiction des évêques de Liége sur Maestricht on doit pourtant avouer que celle-ci n'en était pas moins réelle et sérieuse et qu'elle devait singulièrement gêner les droits souverains et territoriaux des ducs de Brabant. Leurs droits mutuels devaient aboutir de temps en temps à des compromis et des arrangements pour le bien-être des deux partisGa naar voetnoot(2). Les écrivains Brabançons jettent en cette occurence sans aucun ménagement à la tête de l'évêque de Liége le titre d'usurpateur, (Suringar p. 36). Mais ils ne corroborent leur dire, d'aucune preuve positive; comment et où donc l'évêque de Liége a-t-il mérité ce titre? Lorsqu'on ne sait ou ne veut pas expliquer l'origine d'un pouvoir établi ce pouvoir n'est pas pour cela nécessairement illégal et usurpé. Quant | |
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à la circonstance que dans les premiers diplômes de l'empereur en faveur du duc de Brabant les droits de l'évêque de Liége ne sont pas réservés et signalés, cela ne doit étonner personne, les droits de l'évêque étant parfaitement indépendants de ceux de l'empereur, ils n'avaient pas besoin d'être cités. Cependant s'il y aurait lieu d'étonnement cela devrait être du côté des Liégeois qui voient qu'on néglige de mentionner leurs droits à cette occasion. (Suringar p. 35). Ces droits furent définitivement arrangés en 1283 par la vieille charte dont nous venons de parler plus haut. A la page 19 M. Suringar, en suivant toujours la route battue par son auteur favori Pélerin, semble vouloir puiser un argument contre la souveraineté précoce des évêques de Liége, dans la circonstance que vers l'année 919 la terre de Herstal, qui se trouvait dans le coeur de leur principauté, ne faisait pas encore partie de leur domaine. Nous pensons, sauf correction, qu'avant l'achat de 1740 l'évêque de Liége n'a jamais possédé la souveraineté de Herstal, cette terre étant restée une enclave dans la principauté de Liége. (Delvaux Dict. géogr. de Liége art. Herstal). Voilà quelques réflexions détachées qui nous ont été suggerées par la lecture de la savante et très-intéressante dissertation de l'auteur sur l'origine de la double juridiction de Maestricht (p. 15-42). Son ouvrage au reste mérite tous les éloges; nous avons admiré l'impartialité et la franchise du jeune écrivain dans les questions les plus ardues et les plus tendres au point de vue religieux. Son livre se distingue par de vastes recherches, une parfaite connaissance des questions spéciales et un exposé clair et méthodique. Nous ne disons rien de trop en affirmant que son essai est ce qui a paru de plus complet et de plus soigné sur l'histoire de la ville, et l'auteur a eu raison de se faire accompagner de son oeuvre lors de son doctorat ès lettres. Nous espérons que notre Société historique et archéologique trouvera dans M. Suringar un membre actif et dévoué. | |
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VII. Die mittelalterlichen Kunst- und Reliquienschätze zu Maestricht aufbewahrt in den ehemaligen Stiftskirchen des H. Servatius und Unser Lieben Frau daselbst von Mgr Dr Fr. Bock canonicus und M. Willemsen Thesaurar. Ouvrage de 166 pages in 8o, orné d'une chromolithographie et de 66 figures sur bois. Cologne et Neuss 1872.
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des papes et des évêques prodiguées aux trésors de St. Servais et décrit les fêtes qui ont accompagné tous les sept ans l'exposition de ces reliques. Cette savante introduction est suivie de la description du trésor de l'église de St. Servais. Ce sont d'abord des objets de la plus haute antiquité: la clef de St. Servais, sa coupe à boire, son bâton de voyage, sa crosse épiscopale, son vêtement pontifical et un autel portatif dont il fit usage (p. 53-96). Nous avons vu avec plaisir que les auteurs ont également publié dans l'édition française le grand sarcophage en pierre de Rolduc, où ont reposé les corps des SS. Candide, Gondulphe, Valentin et Monulphe, et qu'ils y sont revenus d'une erreur, en rapportant au 4me siècle tout le bâton de voyage de St. Servais, que l'édition allemande avait, quant à la poignée abusivement placé au Xme siècle. Enumerer tous les trésors artistiques et religieux du moyen-âge qui se trouvent à l'église de St. Servais serait l'affaire de quelques pages; nous nous contenterons donc d'en nommer quelques uns. La description du crucifix d'ivoire (p. 115), de la grande châsse de St. Servais (p. 120), des différents bustes (pp. 172 et 176), et des cors de chasse (pp. 177 et 197), nous a beaucoup charmé et nous semble être un modèle d'exposition scientifique. Dans la seconde partie de l'ouvrage les savants auteurs décrivent quelques objets du trésor de Notre-Dame. Sans doute pour le nombre des objets cette église reste beaucoup en arrière de celle de St. Servais, mais pour la beauté, et la valeur artistique des objets elle peut rivaliser avec celle-ci. Le reliquaire grec du XIme siècle publié à la page 230 est un objet unique dans nos contrées, et les reliquaires de la page 235 et 241 sont sans conteste des monuments d'art de toute beauté. Comme annexe au trésor de Notre-Dame on a ajouté le dessin d'une sorte de tunicelle en soie rouge trouvée sur les reliques de St. Gerlac à Houthem. Nous pensons que la description de cette dernière pièce, dont l'antiquité nous semble douteuse, aurait pu rester de côté. Elle nous fait l'effet d'un hors-d'oeuvre dans ce charmant volume. | |
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La description archéologique des Antiquités Sacrées est suivie d'une collection de chartes et d'une liste assez complète des chanoines-trésoriers qui ont été préposés à la conservation du trésor de St. Servais. Disons entre parenthèse que le 27 Juillet de cette année le trésor vient d'être solennellement installé à côté des cloîtres de l'église dans une chapelle gothique magnifiquement peinte. L'ancienne salle des archives dans une des tours du choeur était devenue d'un accès trop difficile pour les nombreux visiteurs. Nous ne saurions finir ce petit compte-rendu sans féliciter MM. Bock et Willemsen du nouvel ouvrage qui leur fait honneur. Leur livre est le fruit bienfaisant et savoureux d'un talent supérieur rehaussé par des recherches consciencieuses et pleines d'érudition. | |
VIII. Oudnederlandsche psalmen door Dr P.J. Cosijn, Haarlem Erven F. Bohn 1873.La rédaction thioise de ces psaumes date du IX ou du Xme siècle. Quelques savants d'Allemagne y ont cru voir une traduction saxonne, d'autres un dialecte de la Franconie. M. Cosijn après une étude longue et bien réfléchie vient d'aboutir à d'autres résultats; selon lui c'est le dialecte du duché de Limbourg actuel qui y domine, surtout du Limbourg entre Maestricht et Aix-la-Chapelle. Les mots deil, teican (teiken), geist, stein, fleisch (fleisc), loos (slim) hôh (hoog), bluot (bloed), cuo (koe), bruother (broeder), neigen, koupen, loupen et mil autres, sont encore de nos jours conservés dans notre langue actuelle. Au reste il n'est pas étonnant de trouver une traduction Néerlandaise des psaumes dans nos contrées, où depuis le temps de Charlemangne les lettres n'ont pas discontinué à être cultivées avec succès, et où les psaumes étaient chantés jour et nuit dans les nombreux chapitres et abbayes de Maestricht, Aix-la-Chapelle, Susteren, Meerssen, Alden-Eyck, Munsterbilsen, Borcette et Cornelimunster. Le travail de M. Cosijn à d'abord paru dans le Taal- en Letterbode de 1872 et 1873. |
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