Publications de la Société Historique et Archéologique dans le duché de Limbourg. Deel 10
(1873)– [tijdschrift] Jaarboek van Limburgs Geschied- en Oudheidkundig Genootschap– AuteursrechtvrijLe territoire et le chateau de Reckheim.Orthographe: Radechem, Radechim, Radekeim, Radekem, Radeken, Radekeym, Radichem, Raickem, Raikem, Raikeum, Rakin, Recheheim, Recheim, Rechem, Recheym, Reckeim, Reckeimb, Reckem, Reckeym, Reckheim, Reckhein, Reckhem, Reckheym, Reckkem, Reckum, Recum, Redechem, Redehem, Redeikem, Redekem, Redekim, Redichem, Reeckhem, Reecquem, Rehem, Reickeim, Reikem, Rekeim, Rekem, Rekemt, Reken, Rekhem, Rekiem, Reycken, Reyckhem, Reykem, etc. Parmi les ferres autrefois enclavées dans le comté de Looz, la seigneurie de Reckheim était la plus importante. Le village, jadis décoré du nom de Ville, et le château dont le pays tirait son nom, se trouvent sur la rive gauche de la Meuse, à deux lieues au-dessous de Maestricht, et vers l'endroit de la route militaire de Tongres à Nimègue | |
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où, sur la carte de Peutinger, on rencontre la station de Feresne. On ignore ce qu'était Reckheim dans les premiers siècles du moyen-âge. D'après une ancienne tradition, une chapelle y fut élevée en 989Ga naar voetnoot(1), et l'on trouve le nom de Richeim ou Reicheim, au nombre des biens donnés par les empereurs à l'église de Notre-Dame à Aix-la-Chapelle; mais nous croyons avec le savant Quix, dans son Histoire diplomatique d'Aix-la-Chapelle, qu'il s'agit ici du village de Rechain, près de Verviers. Les circonstances dans lesquelles se présente pour la première fois le domaine de Reckheim, au commencement du XIIe siècle, nous autorisent à le regarder dès lors comme une possession déjà considérable. Plus tard, on trouve que, outre le bourg et le château, il comprenait encore la libre baronnie de Boorsheim, avec ses dépendances, comme Cothem, Hal et Huft; les terres et seigneurie de Wezet, Terwyen, Uykhoven, et enfin, s'il faut en croire Butkens, d'autres fiefs, jusqu'au nombre d'environ cent soixante, tous tenus et mouvant d'elle comme terre souveraine. Aujourd'hui le territoire de Reckheim fait partie de la province du Limbourg belge. C'est, dit Saumery, une vaste et fertile plaine, défendue contre les eaux de la Meuse par de fortes diguesGa naar voetnoot(2), et desséchée au moyen de fossés et d'étangs entretenus avec soin. Des avenues plantées de haute futaie, conduisaient au bourg de Reckheim, moins considérable par le nombre ou l'opulence de ses habitants, que par la résidence des comtes de ce nom, membres immédiats de l'Empire et maîtres d'un petit État, qui lui | |
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servait de lointain boulevard contre le choc des puissances voisinesGa naar voetnoot(1). Les premiers sires de Reckheim y avaient déjà leur demeure; mais en 1317, il n'y existait encore aucun fort, ou tout au moins les ouvrages de défense avaient été détruitsGa naar voetnoot(2). Peu d'années après, on battait monnaie à Reckheim, probablement au château, lequel fut ensuite habité par les seigneurs de la maison de Sombreffe, jusqu'en 1507. Comme il tombait en ruines, à la fin du XVIe siècle, et que sa forme ovale paraissait défectueuse, Herman de Lynden le reconstruisit sur un plan nouveau, avec des augmentations considérables. Enfin son oeuvre fut complétée par les soins de son fils, qui releva à son tour l'antique enceinte de la villeGa naar voetnoot(3). Revenons maintenant à l'auteur des Délices du pays de Liége, qui décrit à peu près en ces termes l'état du château en 1744: ‘Il est bâti à l'extrémité du bourg, et n'en est séparé que par une large rue, aboutissant d'un côté à l'ancienne porte, et de l'autre, à une belle place plantée d'arbres, qui fait face à l'église paroissiale. C'est un édifice superbe qu'on devrait plutôt appeler un palais, et qui peut aussi passer pour une bonne forteresse. On rencontre d'abord une vaste enceinte de murs, bordés de charmes taillés en éventail, et renfermant les bâtiments avec les jardins. Après avoir traversé une première cour, on se trouve dans une seconde enceinte, défendue par un large fossé et par de grosses tours, élevées à chacun | |
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des angles. On passe ensuite dans une seconde cour, où est l'entrée du corps-de-logis. Un pont-levis, flanqué de deux grosses tours octogones, donne accès à une troisième cour, moins grande mais plus ornée que les deux autres, et bordée d'un majestueux portique en pierre, qui forme l'entrée des offices. Un large perron, à deux paliers, conduit au haut d'une galerie découverte, formant un équerre, dont la branche en face sert de communication aux appartements, et celle à gauche est clôturée par une balustrade de pierre, qui laisse la vue libre sur un paysage aussi varié qu'étendu. Une balustrade semblable borde la galerie du côté de la cour. Les appartements sont magnifiques, et l'on en compte jusqu'à cent et quarante, sans y comprendre les logements des domestiques. Ils sont distribués tant en face et à droite de la troisième cour, qu'autour d'un parterre carré, qui peut être regardé comme une quatrième cour, et forment partout de longues enfilades, où l'on trouve des logements commodes pour les diverses saisons de l'année. La richesse des ameublements répond à ce brillant extérieur. On remarque principalement un vaste salon d'entrée, éclairé par de grands bras d'argent, attachés sur une tapisserie de petit point en soie, qui représente divers combats. De ce salon on passe à un théâtre parfaitement décoré. De l'autre côté, on trouve une belle galerie couverte, disposée en équerre et ornée de grands tableaux représentant, à cheval et en habit de guerre, plusieurs comtes de Reckheim et d'autres grands hommes, qui leur appartenaient par le sang ou par les alliances. Quoique le rez-de-chaussée dépasse déjà le sol de toute la hauteur du portique, on a encore élevé au-dessus plusieurs étages, dont le premier ne le cède, en rien à | |
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ce que nous avons décrit: on y trouve également une galerie, remplie de portraits des dames de la famille, et, au lieu du théâtre, des billards et autres jeux semblables. Les logements au-dessus de l'étage sont disposés autour de corridors, qui conduisent à la plus haute des tours, dans laquelle on voit une belle et nombreuse bibliothèque. Le château a aussi une chapelle, où l'on conserve la tête de Ste Pétronille: c'est un petit dôme gracieux, décoré d'ornements en stuc à l'intérieur. On peut regarder tous les environs comme autant de jardins, ombragés par de belles allées de charmilles taillées et de haute futaie; néanmoins on doit donner plus particulièrement ce nom à un grand parterre, placé au pied de la terrasse du corps-de-logis et enfermé dans les murs de la première enceinte. Ce terrain, qui fait honneur à la main d'un jardinier industrieux, est orné de grands ifs, taillés avec art en pyramides de diverses figures’. De toutes ces splendeurs, si complaisamment énumérées par Saumery, il ne reste aujourd'hui, triste ironie du sort, que le dépôt de mendicité des provinces de Limbourg et de Liége, installé dans ce palais; et au lieu de l'or, frappé par les anciens souverains du pays, la monnaie fictive à l'usage des détenus! Au-dessus du bâtiment d'entrée, du côté de la cour, on lit encore la date, 1599. Mais une partie du château, avec la grande tour et la chapelle, n'existe plus depuis le commencement de ce siècle; le reste a été complètement restauré par les soins du gouvernement belge, pendant les années 1857 et suivantes. On voit dans le mur de la cour intérieure, à la hauteur du premier étage, plusieurs pierres commémoratives, provenant en partie des premières démolitions: au fond, | |
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les armoiries d'Aspremont-Lynden-Reckheim, sculptées dans un cartouche; à gauche, un petit écusson de Lynden, entouré d'une couronne de lauriers, avec la date, 1597; puis une autre pierre, dont nous parlerons à propos du premier seigneur de cette famille. A droite, se trouve une grande inscription encadrée: POSTERITATI. | |
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Dans les souterrains, plusieurs jolies colonnes de l'époque romane servent à soutenir les voûtes, et se font remarquer par leurs bases, formées d'anciens chapiteaux renversés, bizarrement historiés. On y montre aussi deux caves humides, sortes d'oubliettes, avec la pierre et l'anneau traditionnels, rappelant la justice souveraine du comté. Il y avait à Reckheim deux couvents, l'un de Récollets, avec une belle église; l'autre, situé hors de l'enceinte et habité par des religieuses prémontrées, dont l'église était placée sous le vocable de Ste Madeleine. Nous y reviendrons en écrivant l'histoire des seigneurs avec lesquels ils furent en relation. Quix prétend que les Carmélites d'Aix-la-Chapelle acquirent aussi peu à peu, non seulement certaines possessions à Reckheim, mais encore une habitation spacieuse avec une chapelle, ce qui les engagea à y établir un vicaire, pour diriger quelques membres de leur congrégationGa naar voetnoot(1). Enfin, quelques biens d'origine seigneuriale, situés à Reckheim, le droit de passage sur la Meuse, ainsi qu'un fief à Uyckhoven, formaient des enclaves étrangères au pays et relevaient du château de FauquemontGa naar voetnoot(2). |
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