De Gulden Passer. Jaargang 56
(1978)– [tijdschrift] Gulden Passer, De– Auteursrechtelijk beschermd
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Prosper Marchand, ‘trait d'union’ entre auteur et éditeurGa naar eind(*)
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Ill. 4. Frontispice des Lettres juives du Marquis d'Argens, La Haye, Paupie 1738.
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Cette tâche, Marchand ne la remplit pas uniquement pour les Lettres juives: il l'accomplira tout sa vie, aussi bien à la demande des libraires qu'à celle des auteurs eux-mêmes, faisant ainsi fonction d'intermédiaire entre ces deux groupes. Il occupe pour ce faire, comme nous allons le voir, une position particulièrement privilégiée dans le monde de l'édition hollandaise d'expression française. En 1709, Marchand avait dû s'enfuir de Paris avec les graveurs Picart, père et filsGa naar eind7, convertis comme lui au protestantismeGa naar eind8, ce qui leur rendait l'exercice de leurs métiers respectifs difficile à ParisGa naar eind9. Marchand comptait bien poursuivre en Hollande son métier de libraire, puisqu'il se fait inscrire comme tel à La Haye en 1709, puis à Amsterdam en 1711Ga naar eind10, année où il publie le Cymbalum mundi et la Conférence de Mr. LebrunGa naar eind11. Vers 1713 cependant, il renonce à ce négoce: la ‘mauvaise foi’ du monde de la librairie l'en a à jamais dégoûtéGa naar eind12. Mais il n'en perd pas pour autant le contact avec ses anciens confrères: d'une part, il publie chez eux de nombreuses oeuvres de tierces personnes qu'il a annotées ou dotées de remarquesGa naar eind13 et, d'autre part, les libraires eux-mêmes lui confient non seulement des travaux de correctionGa naar eind14 mais également la rédaction d'avertissements du libraire, de préfaces etc..., destinés à leurs propres éditionsGa naar eind15. D'autre part, nous voyons également plusieurs libraires solliciter l'avis de Marchand quant à l'opportunité d'une édition ou d'une réédition éventuelle. Parfois même, on lui fait parvenir le manuscrit afin qu'il juge mieux sur piècesGa naar eind16. Ceci corrobore entièrement l'opinion du premier biographe de Marchand, J.N.S. Allamand, qui l'avait particulièrement bien connu: ‘La connoissance des livres et de leurs auteurs fit toujours son occupation favorite, et il s'y distingua si fort que de tout côté les libraires venoient le consulter sur les livres qu'ils se proposoient de mettre sous presse, et ils se felicitoient quand ils pouvoient obtenir de lui qu'ils s'imprimassent sous sa direction’Ga naar eind17. Dans un cadre légèrement différent, il arrive à Marchand de solliciter lui-même d'un auteur l'envoi d'un manuscrit qu'il se charge de placer ensuite chez un libraire. C'est le cas de l'Essai de | |||||||||||||||||||||||||
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mythologie physique du médecin français réfugié en Angleterre Daniel DuncanGa naar eind18. Si les relations entre les libraires et Marchand semblent donc très intenses, nous ne possédons malheureusement sur elles qu'une information sporadique. Par contre, les contacts entre les auteurs et Marchand nous sont mieux connus. En effet plusieurs de ses correspondants s'adressent à lui pour trouver en Hollande un libraire disposé à imprimer leurs oeuvres. Certes, il ne faut point chercher parmi eux des auteurs de tout premier rangGa naar eind19, bien que les ouvrages d'un d'Argens eussent à l'époque un retentissement beaucoup plus grand que le demi oubli dans lequel ils sont tombés ne le ferait supposerGa naar eind20. Mais la variété de leurs origines (Angleterre, Suisse, Allemagne, France) et des sujets qu'ils traitent (Histoire, Philosophie, Littérature, Sciences exactes) n'en forme pas moins une palette fort évocatrice de l'activité érudite de la première moitié du XVIIIème siècleGa naar eind21. Il existe bien sûr d'autres cas semblables à celui de MarchandGa naar eind22. Ce qui rend le sien si intéressant et si peu commun, c'est à la fois l'abondance et l'étendue chronologique des sources conservées: entre 1713 et 1755, une trentaine de manuscrits sont proposés à notre réfugié. Les auteurs de ces manuscrits ont par ailleurs un dénominateur commun: ils se meuvent dans un cadre scientifique ‘éclairé’. Ainsi d'Argens, Formey, Jordan et Pelloutier gravitent autour de Frédéric II. Le mémoire de Trembley sur les polypes - une des sources d'inspiration de La Mettrie - marque le triomphe de l'observation scientifique minutieuse sur la science théorique figée tandis que, de son côté, Louis de Beaufort met en doute la véracité des récits de Tite-Live, ce qui lui vaudra, un siècle plus tard, l'appréciation toute particulière de Michelet et de TaineGa naar eind23. Ces auteurs s'adressent tout naturellement en Hollande, où la relative liberté de l'édition leur permet d'espérer une mise sous presse que la France leur refuserait immanquablementGa naar eind24. En effet, les libraires hollandais profitèrent largement des restrictions imposées à la librairie française pour ‘déloger de leurs positions les presses parisiennes et lyonnaises’Ga naar eind25. La Haye, Amsterdam et Leyde comptent le plus grand nombre de libraires éditant des ouvrages françaisGa naar eind26. Pour La Haye, nous constatons que plusieurs auteurs | |||||||||||||||||||||||||
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en mal d'éditeur s'adressent à Marchand - définitivement établi dans cette ville dès 1723Ga naar eind27 - plutôt que directement à un libraire. Quelle est la raison de cette attitude? Contrairement à A.S. Collins, pour qui les relations auteurlibraire se mouvaient dans une sphère amicale à l'abri des conflits sérieux, nous pensons qu'une certain méfiance régnait dans le camp des érudits envers le monde de la librairieGa naar eind28. L'exigeante impatience des auteurs ne laisse de se heurter à l'indolence récalcitrante des libraires. Comment, dans ces conditions, obtenir pour l'édition d'un manuscrit les conditions les plus favorables aussi bien du point de vue financier que du point de vue de la fidélité à l'esprit de l'oeuvre, surtout s'il faut négocier à distanceGa naar eind29? Seul un homme de confiance, résidant sur place et rompu à toutes les ficelles du métier sera capable de mener à bien une telle entreprise et de veiller à sa réalisation effectiveGa naar eind30. Les correspondants voient dans Marchand, ancien libraire retiré des affaires, l'intermédiaire idéal pour leurs transactions éditoriales à La Haye. Pour certains, c'est un ami de longue date (I. de Larrey, L. de Beaufort). À d'autres, il a été recommandé par des amis ayant eux-mêmes commerce avec lui (C.E. Jordan, J. Deschamps, J.H.S. Formey). Ceux qui n'ont pas l'honneur de le connaître personnellement se réclament de sa réputation d'érudition et d'équité dans la République des Lettres pour prendre contact avec lui (César de Missy)Ga naar eind31. Louis de Beaufort résume bien leur état d'esprit: ‘Que voulez-vous’, écrit-il, ‘ce sont les gens obligeans et serviables qu'on importune!’Ga naar eind32. Les correspondants de Marchand ont fort bien conscience cependant du fait que cette amabilité pourrait l'entraîner à faire des frais importants (ports de lettres, envois de livres etc...). Ils se montrent fort exacts à l'en rembourserGa naar eind33. La plupart des requêtes sont directement accompagnées du manuscrit à éditer ou tout au moins d'une partie de celui-ciGa naar eind34: Marchand pourra ainsi se forger lui-même un jugement sur la valeur de l'oeuvre proposée. S'il refuse de s'en charger ou s'il ne parvient pas à trouver un libraire prêt à faire rouler la presse, il renvoie généralement le manuscrit à l'expéditeurGa naar eind35. C'est le cas, par exemple, des Sources de la morale de Formey dont il écrit à l'auteur: ‘malgré tous mes soins je n'ai absolument pu rien faire. | |||||||||||||||||||||||||
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De la Manière dont sont bâtis nos Libraires, si ç'avoit été quelque Traité libre et sale même des Agrémens du Vice, j'aurois infailliblement réüssi’Ga naar eind36. Mais la négociation manquée à La Haye peut quand même réussir ailleurs: la Chronologie de des Vignoles, refusée par Marchand en 1730, paraît en 1738 chez Haude à BerlinGa naar eind37. La Vie de Baratier et le Triomphe de l'évidence de Formey, proposés initialement à Marchand mais n'ayant pas trouvé preneur à La Haye, seront placés par l'auteur sans intermédiaire cette fois respectivement chez Neaulme d'Utrecht et Haller de Göttingen. Dans ce dernier cas, Marchand se charge de faire suivre le manuscritGa naar eind38. Parfois même, il cherche lui-même à placer dans une autre ville un ouvrage refusé à La Haye: à sa demande expresse, Arkstée et Merkus d'Amsterdam entreprennent - mais à contre-coeur, il faut bien le dire - l'édition du Cours abrégé de la philosophie wolfienne de Jean Deschamps. La tempête de critiques que souleva la parution de cet ouvrage et qui portent à la fois sur les ‘fautes d'écolier’ commises par l'auteur et sur son acharnement à critiquer plusieurs membres éminents de la République des Lettres, montre que l'hésitation de part et d'autre n'était pas sans fondementsGa naar eind39. Lorsqu'à la grande joie de ses correspondants, Marchand accorde son approbation à leurs manuscrits - faisant ainsi office d'écluseGa naar eind40, si l'on peut dire - ceux-ci trouvent généralement preneurs à La Haye. C'est ainsi que nous y voyons paraître, grâce à l'intermédiaire de Marchand, les ouvrages suivants:
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Le premier des auteurs de cette liste, le marquis d'Argens, est un de ceux qui, de leur propre aveu, doivent le plus à Marchand. Ne lui écrit-il pas: ‘Vous etes le veritable pere de mes ecrits’Ga naar eind41? En effet, les Lettres juives, les Lettres cabalistiques et la Philosophie du bon sens doivent beaucoup à Marchand, surtout le premier de ces ouvrages. Comme une édition complète et annotée de la correspondance entre Marchand et le marquis est actuellement sous presse (par S.J. Larkin et W. Steinsieck) et qu'il n'est pas dans nos intentions de déforcer cette étude en utilisant ces sources de manière exhaustive, nous n'y ferons appel que pour appuyer des faits déja relevés par ailleurs et dans certains cas particuliers. Une fois le manuscrit ‘approuvé’ par Marchand, il s'agit de lui trouver un libraireGa naar eind42. Il n'est pas rare que les auteurs fassent euxmêmes quelques suggestions à ce propos. Ainsi le philosophe et mathématicien suisse Jean-Pierre de Crousaz aimerait voir sa lettre critique sur la Belle Wolfienne publiée par la Veuve Levier, à la fin du dernier volume de l'ouvrage de FormeyGa naar eind43 et d'Argens trouve que l'ouvrage qu'il projette sur la vie de tous les grands hommes français et anglais ‘conviendra fort bien à Moetiëns’Ga naar eind44. Mais dans la plupart des cas, les correspondants de Marchand lui donnent carte blanche dans le choix du libraire. Notre réfugié concentre principalement ses efforts sur La Haye où il a le choix entre un certain nombre de libraires éditant des ouvrages ‘sérieux’ en français. On peut se demander dès lors si ses préférences s'expliquent par une certaine logique du genre ou par quelque faveur momentanée. Nos données ne nous permettent malheureusement pas d'entrer dans beaucoup de détails. Quoiqu'il en soit, la première hypothèse s'avère inexacte: les libraires choisis publient indifféremment des ouvrages d'histoire, de théologie ou de sciences exactes. Aucun ne semble prospecter un terrain bien particulier. Quant à l'hypothèse des faveurs momentanées, la comparaison chronologique des libraires choisis - réels ou potentiels - ne permet guère de tirer de conclusions fort probantes. Néanmoins, certaines réflexions échappées à la plume des correspondants de Marchand donnent à penser. Ainsi, le marquis d'Argens fait savoir à Marchand, avec son emphase coutumière: ‘Je travailleray pour qui vous voudres, à quel prix vous voudres pour ceux que vous protegeres et | |||||||||||||||||||||||||
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gratis pour eux s'ils n'ont pas de quoy’Ga naar eind45. Et quelques années avant la mort de Marchand, en 1753, le publiciste Rousset de Missy lui écrira: ‘Comme je vois que vous affectioné Van Laak ou Van Kleef, je vien de recevoir de Moscou un MSC superbe... si l'un de ces deux libraires voulait l'entreprendre...’Ga naar eind46. Le choix de l'éditeur paraît donc dépendre en grande partie de Marchand. Dans ce choix, il est difficile de discerner une ligne de conduite bien précise. Tout ce qu'on peut dire, c'est qu'il semble avoir, à certains moments, préféré certains libraires à d'autres. Un des points les plus délicats des négociations confiées à Marchand est sans nul doute la fixation des conditions matérielles de la cession des manuscritsGa naar eind47. Cette cession a ceci de particulier - et de différent de tout autre contrat commercial - que l'auteur conserve un certain droit spirituel sur le manuscrit vendu: il lui est loisible, dans certains cas, de l'amender et il peut en corriger les épreuves, deux droits que Marchand exercera souvent en lieu et place des auteurs. La correspondance conservée nous offre une grande abondance de détails sur ces tractations qui comportent diverses possibilités: le payement peut se faire en argent, en livres, à quoi s'ajoute - adjacent - le problème des exemplaires d'auteur. Un point commun cependant: l'affaire se règle en une fois et il n'est jamais question de gains successifsGa naar eind48. Certains auteurs, comme l'oratorien français Bernard Lamy, refusent non sans mépris toute transaction financière: ils n'écrivent pas ‘pour de l'argent’Ga naar eind49. D'autres correspondants de Marchand marquent au contraire une préférence manifeste pour un payement en espèces sonnantes et trébuchantesGa naar eind50. Malheureusement pour eux, les libraires se font souvent tirer l'oreille: Levier ne consent pas à payer en argent le deuxième tome de la Belle Wolfienne et Neaulme demandera deux mois de répit pour s'acquitter du prix convenu pour le troisième tome dont il s'est chargéGa naar eind51. En cas d'urgence, Marchand avance l'argent luimême. C'est ainsi que d'Argens recevra de lui cinquante florins que le libraire ne sera en mesure de débourser que quelques jours aprèsGa naar eind52. La négociation peut également aboutir à un compromis: l'auteur reçoit une partie de ce qui lui est dû en argent, le reste en livres (Formey pour le premier tome de sa Belle Wolfienne). | |||||||||||||||||||||||||
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Troisième possibilité: le payement s'effectue entièrement en livres (Jordan, Pelloutier). Pour faire leur choix, les auteurs demandent parfois aux libraires d'envoyer leurs catalogues avec les prix courants (Pelloutier, Formey). Mais il leur arrive aussi de désigner à l'avance le ou les ouvrages qu'ils désirent: le Dictionnaire de Bayle, par exemple, apparaît dans les desiderata de trois d'entre eux: Formey, Pelloutier et Veyssière de La CrozeGa naar eind53. Si le prix des livres choisis excède celui du manuscrit, l'auteur complétera la somme nécessaire (Pelloutier, Formey). La fixation du nombre et de la qualité des exemplaires d'auteur à fournir par le libraire fait intimement partie de la négociation du manuscrit. Certes, l'envoi gracieux de quelques exemplaires de l'édition ‘dûs de franc-jeu’Ga naar eind54 à l'auteur ‘se pratique ordinairement’Ga naar eind55, mais il est soumis à de très grandes fluctuations qu'il est souvent difficile d'apprécier à leur juste valeur. Gosse ne paraît en tout cas pas très généreux quand il en promet six à Ducrey, mais La Croze et Beaufort semblent voir grand lorsqu'ils demandent à Marchand d'essayer d'en soutirer cinquante - voire plus s'il se peut - au libraire. Quant à Rousset de Missy, s'il ne demande point d'argent pour l'auteur du Philosophe au Parnasse, il n'en demande pas moins de 250 exemplaires! La qualité des exemplaires demandés varie également: en blanc, cousus, brochés, reliésGa naar eind56. Les exemplaires destinés à de grands personnages devront être imprimés sur ‘très beau papier’ (La Croze), et le volume de dédicace sera ‘magnifique’ (Formey). Mais il arrive fréquemment que les auteurs aient besoin de plus d'exemplaires que ne leur accorde le libraireGa naar eind57. Dans ce cas, ils cherchent à obtenir ces volumes à prix réduit (Formey, La Croze), proposant de les payer eux-mêmes directement, de les ‘rabattre de l'accord fait’Ga naar eind58, ou encore du prix d'un manuscrit en préparationGa naar eind59. La tendance générale est donc claire et de tout temps: les libraires accordent le moins possible d'exemplaires d'auteur et les auteurs tentent par tous les moyens d'en obtenir un maximum. Ce n'est qu'en désespoir de cause qu'ils consentent à faire l'emplette, fût-ce à prix réduit, de leur propre ouvrage, comme l'a fait par exemple, J. Pérard qui, dans l'espoir de décider ainsi un libraire hésitant à entreprendre l'édition, s'engage à prendre lui-même une | |||||||||||||||||||||||||
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grande quantité d'exemplaires d'un ouvrage dont il avait fourni le manuscritGa naar eind60. L'envoi de ces exemplaires - en ‘droiture’ ou par l'intermédiaire de quelque libraireGa naar eind61 - est parfois aléatoireGa naar eind62. Tous les auteurs, sans exception, attendent avec impatience l'arrivée de leur ballot et se plaignent amèrement des retards encourrusGa naar eind63. Formey demande avec insistance à Marchand de lui faire envoyer ses exemplaires dès leur sortie de presse sans quoi les libraires de Berlin pourraient commencer à vendre sa Belle Wolfienne avant qu'il ait pu la distribuer à ses amisGa naar eind64. Dans le cas du manuscrit de Russie, Rousset demande qu'on envoie les exemplaires d'auteur à Pétersbourg un mois avant la parution effective à La HayeGa naar eind65. De plus, les auteurs chargent parfois Marchand de faire parvenir à telle ou telle personne l'exemplaire qui lui est destinéGa naar eind66. Le dénominateur commun de toutes ces négociations est sans nul doute l'entière liberté laissée à Marchand par ses commanditaires. Même dans les cas où les auteurs lui suggèrent un montant ou une certaine quantité d'exemplaires à obtenir du libraire, ils lui accordent en définitive un blanc-seing pour mener les transactions comme il l'entend et fixer l'accord définitifGa naar eind67. ‘Je vous laisse le maître de le négocier de la maniere la plus avantageuse’, dit Formey en parlant de sa Belle WolfienneGa naar eind68. Pelloutier renchérit: ‘Au reste, j'en passerai par tout ce que vous jugerez à propos de conclure avec lui’Ga naar eind69 et La Croze fait chorus: ‘Je me contente de dire en général, que j'approuverai tout ce que vous ferez’Ga naar eind70. Les bons soins de Marchand ne se limitent cependant pas à la négociation des manuscrits: il suit pas à pas tout le processus d'édition, prenant sur lui la responsabilité de sa réussite. Il lui arrive fréquemment, lors de la préparation à la mise sous presse, d'apporter des modifications de forme ou même de fond au texte initial, ce que H. Hiller considère comme ‘un des éléments de la ‘collaboration active de l'éditeur’Ga naar eind71. Le nom de Marchand n'apparaît pourtant nulle part dans les ouvrages placés par lui et dont il surveilla l'éditionGa naar eind72. Marchand demande quelquefois la permission expresse de l'auteur avant de se décider à une certaine modification mais il se voit souvent forcé d'intervenir sur le champ et de son propre chef, | |||||||||||||||||||||||||
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comme dans le cas de Formey. Marchand s'en explique dans une lettre du 9 juin 1741:
‘Dans le t. II de la Belle Wolfienne p. 39, vous faisiés dire à Mme de B. à propos du Roy je m'estime heureuse d'achever ma carrière sous lui. Il n'en falloit pas davantage à quelque mauvais plaisant pour donner à tout votre Ouvrage un Ridicule dont il n'est nullement digne; et pour en ôter l'occasion, j'ai crû devoir mettre sous son Règne, qui coupe toute Racine à la mauvaise Plaisanterie’.
Formey n'a guère pu qu'accepter avec reconnaissance ce changement judicieux! En règle générale, Marchand effectue les modifications qui lui paraissent nécessaires en s'appuyant sur le ‘pouvoir absolu’Ga naar eind73 que lui ont littéralement conféré ses correspondants. Après avoir approuvé une certaine correction, La Croze poursuit: ‘Si vous en trouvez d'autres à faire, je les approuve d'avance, et j'abandonne le tout à vôtre prudence et à vôtre discrétion’Ga naar eind74. D'Argens répète à plusieurs reprises qu'il s'en remet totalement à son ami: ‘Une fois pour tout, tailles, rognes, brules. Ce sera de nouvelles obligations que je vous auray. Point d'égard je vous en prie’. Jacques Pérard emploie une phrase curieusement parallèle: ‘Coupez, taillez et faites comme des choux de votre jardin, je m'en rapporte à vôtre amitié et à votre savoir faire’Ga naar eind75. D'autre part, il n'est pas rare que les auteurs demandent expressément à Marchand de compléter ou d'élaguer certains passages de leurs ouvrages dont ils ne sont point satisfaits. D'Argens lui écrit qu'il serait bien en peine de terminer sa lettre sur les Écossais - une des Lettres juives - sans le concours de l'érudition de Marchand pour y introduire un ‘éloge de quelques savans de cette nation’Ga naar eind76. Et Van Effen compte sur Marchand pour revoir son texte: ‘Je puis surtout m'etre trompé sur les préterits ou j'avoue ingénument que je m'embarasse quelquefois’Ga naar eind77. Si la plupart des auteurs approuvent hautement les ‘angéliques corrections’Ga naar eind78 de Marchand, il en est cependant qui ne le ménagent pas. Formey, par exemple, critique le manque de différenciation entre les additions de Marchand et les notes de Le Duchat qu'il avait lui-même fournies pour la nouvelle édition des oeuvres de VillonGa naar eind79. Et si de Larrey, en consentant à amender trois endroits | |||||||||||||||||||||||||
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de son Histoire des sept sages sur les conseils de Marchand, l'engage à poursuivre ses corrections, il ne peut s'empêcher d'ajouter: ‘Ne soyés pas si exact, ou si scrupuleux sur la Pureté du Langage. Le Stile de l'Histoire ne demande pas autant d'Affectation’Ga naar eind80. La critique la plus acerbe vient de Jacques de Roubaix, qui s'oppose avec force aux pouvoirs de Marchand qu'il estime dictatoriaux: ‘C'est à dire qu'a votre ordinaire, en qualité maître, vour ferez publier ce que vous trouveriez conforme a vos sentiments et convenable a vos interest et retrancheriez le reste’Ga naar eind81. L'accusation de retrancher à sa fantaisie ou au contraire d'ajouter trop du sien dans les éditions dont il s'occupe poursuivra Marchand toute sa vieGa naar eind82 et n'est pas sans revêtir une certaine gravitéGa naar eind83. D'un autre côté cependant, on pourrait fort bien comparer ce phénomène de correction préalable - en collaboration ou non avec l'auteur - à l'activité des ‘readers’ modernes qui, bien qu'appréciée ouvertement par de nombreux écrivains, n'en provoque pas moins chez d'autres des mouvements d'humeur parfois retentissantsGa naar eind84. Le manuscrit une fois sous presse, il faut en corriger les épreuves. Il semble que Marchand ait pris sur lui les premières corrections et parfois même la correction définitive, comme le lui demande Formey, par exempleGa naar eind85. L'année suivante, à propos d'un autre manuscrit du même auteur, Marchand lui écrit: ‘Je suis fort content du livre, à l'édition duquel j'ai aporté tous mes soins, du moins au 15 premières feuilles que j'ai lues 2 fois chaque. Pour les autres, on s'est si fort pressé pour les foires que je crains qu'elles ne soient pas aussi exactes. Cependant, il n'y manquera rien d'important’Ga naar eind86. La correction des épreuves par Marchand en personne semble apporter un grand sentiment de sécurité à l'auteurGa naar eind87. Lorsque Marchand doit se démettre de la correction de l'Histoire des Celtes dont il avait primitivement accepté de se charger, Pelloutier s'en montre extrêmement mortifié et fait part à Marchand de son inquiétude quant au sort de son manuscrit: des Vignoles, qui l'avait révisé, avait laissé subsister quelques bagatelles (capitales manquantes, mots étrangers mal orthographiés etc..) ‘parce qu'il etoit persuadé que Monsr. Marchand en corrigeant les feuilles rectifieroit tout cela’Ga naar eind88. Ces premiers élagages terminés, les dernières épreuvesGa naar eind89 sont | |||||||||||||||||||||||||
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Ill. 5a. March. 52, f. 61v. Épreuve de l'Avertissement de l'Éditeur de la Nouvelle histoire de M.F. de Salignac de la Mothe-Fenelon. La Haye, J. Neaulme 1747.
Les corrections indiquées ont été apportées sur l'édition définitive. ordinairement envoyées à l'auteur, où qu'il habiteGa naar eind90. Celui-ci les renvoie, dûment corrigées, à Marchand ou directement au libraireGa naar eind91. Malgré toutes ces précautions, il arrive néanmoins que quelque erreur se glisse encore dans le texte définitif. Ainsi La Croze signale à Marchand l'existence de certaines petites fautes ‘... ausquelles je remedierois par un petit errata si j'étois sur les lieux’Ga naar eind92. La tâche, ingrate s'il en fut, de correcteur d'imprimerieGa naar eind93, était bien connue de Marchand puisque, comme nous l'avons vu, il en | |||||||||||||||||||||||||
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Ill. 5b. March. 21:2, f. 4r. Liste de corrections à apporter à un ouvrage non identifié.
retirait une partie de sa subsistanceGa naar eind94. Il possédait même une certaine renommée dans cette branche: dans une lettre du 10 novembre 1753, de la Roque lui écrit: ‘Je vois que vostre dessin est de quiter la correction, mais je crain mon cher ami que vous n'en soyez pas le maitre, car on aura toujours besoin de vous et jamais on ne fera, pendant votre vie, imprimer quelque bon livre sans que vous l'ayez examiné en toute manière auparavant’Ga naar eind95. | |||||||||||||||||||||||||
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L'année suivante, Superville se réjouit encore, dans une lettre à Wolters en date du 11 novembre 1754 de ce que ‘notre cher Monsieur Marchand soit en état et dans la disposition de se prêter à la correction d'un aussi bon ouvrage; il ne peut terminer plus dignement sa carrière littéraire’Ga naar eind96. Marchand a alors 88 ans! Quelques mois plus tard, une attaque lui fait perdre l'usage de la main droite, réduisant à néant les espoirs de SupervilleGa naar eind97. Nous reproduisons ici deux specimina de corrections de Marchand, apportées sur l'épreuve même ou consignées dans une liste destinée à l'auteur ou au libraire (Ill. 5). Toutes sont d'une minutieuse précision et s'accordent particulièrement bien avec un petit poème intitulé ‘Le correcteur d'imprimerie’ dont nous avons retrouvé une copie de la main de Marchand, sans qu'il nous soit possible d'établir s'il en est ou non l'auteur (cf. annexe p. 78). La fonction de correcteur de livres édités en langue française à l'étranger est doublement importante au XVIIIème siècle. Si le français est devenu la langue universelle de l'Europe en lieu et place du latin, sa pénétration culturelle n'en reste pas moins superficielle et sujette à des déformations dues à l'éloignement du foyer français. La plupart des grands éditeurs hollandais publiant en français n'avaient de cette langue qu'une teinture plus ou moins prononcée. Il leur fallait donc s'entourer de lettrés français capables de les seconder à la fois dans le choix des manuscrits et dans le contrôle de la pureté de la langue. Les Réfugiés les aidèrent singulièrement dans cette tâche et il est vraisemblable qu'on retrouve la même situation dans les autres pays d'EuropeGa naar eind98. Pourtant, dans le cadre qui nous occupe, les correspondants de Marchand ne s'adressent pas à lui en tant que spécialiste de la correction mais bien en tant qu'érudit bien connu dans le monde de la librairie, capable de faire accepter leurs manuscrits par quelque libraire de sa connaissance. Tous lui sont extrêmement reconnaissants quand il accepte également d'en assurer la correction. Or, si nous sommes sûrs que Marchand tirait une partie de sa subsistance des travaux que lui confiaient plusieurs libraires (Fritsch, Neaulme, Paupie, Arkstée etc...), nous ne trouvons aucune mention, | |||||||||||||||||||||||||
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dans la correspondance qui nous occupe, d'un quelconque salaire de correcteur touché par Marchand pour la correction des manuscrits placés par ses soins. Certes, c'était là une affaire entre libraire et correcteur, de même que la gratification d'un ‘exemplaire de correction’Ga naar eind99. Mais on peut se demander si Marchand ne mit pas souvent sa serviabilité et son érudition au service de ceux qui s'adressaient spontanément à lui, sans recevoir pour cela de contrepartie. Peut-être Formey fait-il allusion à cela lorsqu'il écrit à Marchand: ‘Je ne vous réitère point mes excuses des peines que je vous donne. Votre caractère obligeant vous les fait prendre avec plaisir’Ga naar eind100. L'édition terminée, les exemplaires d'auteur expédiés, les comptes clôturés, comme celui des Pacta Conventa de Formey que nous reproduisons ici (Ill. 6) (le titre Pacta Conventa désigne, dans la correspondance les Mémoires pour servir à l'histoire et au droit public de la Pologne, contenant particulièrement les Pacta Conventa d'Auguste III... La Haye, P. Gosse 1741), on pourrait croire que les relations entre Marchand et les écrivains ayant eu recours à lui s'arrêtent là. Rien n'est moins vrai! Dans trois des principaux cas relevés, il va être question maintenant de rééditionsGa naar eind101 et de traductions, entreprises qui s'accompagnent souvent de beaucoup de difficultés comme quelques exemples vont suffire à le montrer. Dès la sortie de presse de l'Histoire du christianisme des Indes, La Croze envisage déja la possibilité d'une seconde édition: il est en mesure de ‘fournir diverses choses qui l'embelliroient’ au libraireGa naar eind102. Bien que cette nouvelle édition nécessitât comme la première l'achat de livres coûteux, il se décide quand même à l'entreprendre cinq ans plus tard, en ajoutant que ce sera là son dernier ouvrageGa naar eind103. Il y renonce cependant l'année suivante: ‘je me bornerai désormais à lire et à étudier’Ga naar eind104. Mais en 1732, ce même La Croze confie à Marchand qu'il a promis les additions en question à Pierre Humbert d'AmsterdamGa naar eind105. Ce dernier attendra plusieurs années avant de les mettre sous presse. Ce n'est qu'en 1737 qu'il publiera une seconde édition de l'ouvrage de La Croze - absolument identique à la première - et, à part, les additions et corrections destinées par l'auteur à être intégrées dans la seconde éditionGa naar eind106 et | |||||||||||||||||||||||||
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Ill. 6. March. 2. J.H.S. Formey à P. Marchand, 8 septembre 1741, app.
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qu'en désespoir de cause, La Croze avait fait imprimer en 1737 à Halle, chez les héritiers de RengerGa naar eind107, Humbert les réimprime donc accompagnées d'un avertissement de l'auteur particulièrement injurieux à son propre égard, puisque La Croze l'accuse d'être de ‘mauvaise foi’, de l'avoir ‘obligé à travaillé’, puis ‘abandonné tout d'un coup pour des raisons qui me sont assez connues mais que je n'entreprendrai point ici de révéler au public’Ga naar eind108. Humbert se défend vigoureusement dans deux longues notes des accusations portées contre lui, révélant lui-même les raisons qui l'empêchèrent d'intégrer les additions et corrections dans une seconde édition remaniée: leur ampleur et leur intérêt ne justifiaient en rien, selon lui, une telle entreprise. En tout état de cause: ‘Il est en état de prouver clair comme le jour sa droiture, et le tort de l'Auteur à son égard. Il l'a démontré, à ce qu'il croit, dans un Mémoire remis à M. de la Motte, qui l'a ensuite envoyé le 10 novembre 1734 à Mr. de Beausobre à Berlin. Le 24 février 1735, il en a informé de même Mr. Marchand à La Haye. Ces Messieurs peuvent témoigner ce qu'ils ont pensé des raisons alléguées dans ce mémoire dans lequel je puis protester n'avoir rien avancé qui ne soit dans la plus exacte vérité’Ga naar eind109. Les ouvrages édités par l'intermédiaire de Marchand font parfois également l'objet de traductionsGa naar eind110. Ainsi, cette même Histoire du christianisme des Indes avait eu assez rapidement une traduction allemande par Bohnstedt, mais La Croze voudrait en publier une seconde: il demande à Marchand de lui trouver en Hollande une presse allemande disposée à s'en chargerGa naar eind111. Quant à d'Argens, il devient presque lyrique lorsque Marchand lui apprend que ses Lettres juives sont traduites en anglais et en néerlandais. Il le supplie à plusieurs reprises de lui en envoyer ne fût-ce qu'une épreuveGa naar eind112. Un des derniers points qui nous paraît particulièrement digne d'intérêt et que nos documents nous permettent d'étudier, c'est l'état d'esprit des correspondants de Marchand au cours de l'édition même et après sa sortie de presse. Disons tout de suite que les malentendus ne manquent pas: La Croze parle de l'‘espèce d'esclandre qui nous mit tous de mauvaise humeur’Ga naar eind113; D'Argens est deux fois sur le point de rompre avec Marchand pour des affaires d'ordre personnel: la première à cause d'un loyer en retard dû à un ami de | |||||||||||||||||||||||||
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Marchand, Monsieur de Bey, et la seconde à cause des accusations dont Madame d'Argens fit l'objet de la part de Marchand. Celui-ci craint en effet, à un certain moment, de voir la retraite du marquis trahie par le manque de discrétion de sa femme. Dans les deux cas, cependant, la réconciliation ne tarde pasGa naar eind114. Quant aux plaintes réitérées dont retentit la correspondance de Jordan, elles ne s'adressaient, s'empresse d'ajouter l'auteur, qu'à Moetjens, responsable de l'omission du discours préliminaire de La Croze et de la suppression du passage du Juif errant dans la première édition du Voyage littéraireGa naar eind115. Le malentendu une fois éclairci, les auteurs n'ont qu'une seule crainte: que Marchand leur garde rancuneGa naar eind116. Car le sentiment prédominant de tous ceux qui se sont vus édités grâce à son intervention est sans nul doute une reconnaissance débordante, qui devient même dithyrambique chez d'Argens. ‘Vous etes mon pere litteraire et je vous dois entierement le peu de reputation que j'ai acquis’Ga naar eind117, lui écrit-il, ou encore: ‘Je vous regarde non comme mon ami mais comme mon frere et mon dieu tutelaire’Ga naar eind118. Sur un ton plus mesuré, tous remercient Marchand de façon souvent émue. Charmés de ses bons soins, ils lui confieront avec joie d'autres produits de leur plume (d'Argens, La Croze, Formey) et déploreront ne l'avoir point toujours faitGa naar eind119. En conclusion, nous croyons pouvoir dire que Marchand occupait véritablement à La Haye une position privilégiée pour servir de trait d'union entre auteurs de sa connaissance et libraires et arriver à faire imprimer leurs oeuvres. Nos documents ne nous permettent malheureusement pas de déterminer avec autant de précision la part de Marchand aux rééditions ultérieures ou aux traductions des ouvrages en question, mais nous croyons pouvoir affirmer qu'il y fut parfois mêlé. On serait peut-être tenté d'assimiler sa fonction à celle d'agent littéraire, apparue dans le courant du XIXème siècle, mais ce serait d'abord un anachronismeGa naar eind120. De plus, Marchand prend obligeamment à son compte, à la demande des auteurs, plusieurs activités ressortant en fait du métier de libraire, telles la lecture du manuscrit, son appréciation, sa préparation pour la presse etc...Ga naar eind121. Et d'autre part, ses anciens collègues se déchargent volontiers sur lui d'activités pour lesquelles ils ne se sentent pas l'érudition | |||||||||||||||||||||||||
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nécessaire. On ne peut s'empécher de penser ici à la place qu' occupait Daniel Heinsius auprès des Elzevier et à la notion de ‘learned corrector’ dont parle SimpsonGa naar eind122. Marchand représente un maillon supplémentaire et souvent bénévole entre l'auteur, son éditeur et son public. De plus, les négociations financières entre les deux parties reposent également sur ses épaules. Nous nous trouvons donc devant un enchevêtrement inextricable d'éléments sociaux, économiques et culturelsGa naar eind123 qui ne peuvent se comprendre que quand on les insère dans le cadre historique de la librairie hollandaise de la première moitié du XVIIIème siècle et, de manière plus large, dans celui de l'édition française hors de France. Ce n'est certes pas un hasard si la plupart des correspondants de Marchand sont des réfugiés ou des descendants de réfugiés. Ils font partie du ‘chemin de ronde’ tracé autour de la France, qui passe par Londres, Berlin et La HayeGa naar eind124. Pour publier leurs oeuvres, ils se tournent volontiers vers l'‘entrepôt culturel’ hollandaisGa naar eind125. Que Marchand soit parvenu, même pendant les années difficiles de la librairie haguenoiseGa naar eind126, à faire publier certains de leurs ouvrages est un signe manifeste de l'influence non négligeable dont il jouissait dans la République des Lettres. | |||||||||||||||||||||||||
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Annexe
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