de grand style dont la dernière, exposée récemment au Salon d'Automne, pourrait être à la fois la plus extérieurement monumentale et la plus grandiose de conception. C'est une Trinité, inscrite en trois ogives, avec un Dieu le Père au front olympien dont le manteau, enveloppant les corps du Rédempteur, de saint Pierre et de saint Jean, serait assez large, assez résistant pour contenir le monde: symbole d'amour et trouvaille décorative. Le coeur et l'esprit sont comblés.
La Trinité domine l'autel; on l'aperçoit dès qu'on franchit le seuil du sanctuaire. Les deux autres toiles sont placées, dans la partie publique de la chapelle, au-des-sus des grilles de clôture. Elles paraissent bien adaptées à l'emplacement, avec l'allongement de leurs figures verticales, le style large de leurs draperies, leurs éclairages contractés, leur rythme immédiatement perceptible. La première, une Madeleine aux pieds du Christ, est de tonalité discrète en même temps que d'une remarquable unité dans l'ordonnance. On y voit un ange et deux saintes femmes exprimer, avec d'infinies nuances de sentiment, le repentir et l'espérance. L'autre composition, Le Sacré-Coeur de Jésus et de Marie accueillant les brebis égarées, vibre picturalement davantage. Sous un ciel glorieux et dramatique, les toisons et les robes blanches se répondent comme les accords d'une symphonie héroïque et pastorale.
Une exégèse idéologique de ces peintures ne serait pas une exégèse des lieux communs. On y découvrirait ds intentions mystiques, toujours respectueuses de l'orthodoxie; on pourrait, en les commentant, illustrer une belle homélie sur la miséricorde, le rachat des âmes, la pénitence. Pour nous, qui ne cherchons ici qu'à préciser la situation des Lemaître dans les cadres renouvelés de l'art religieux moderne, nous les louerons d'abord en tant que créateurs de thèmes. Le décorateur d'église n'a pas toujours le choix de son sujet mais il importe qu'il le traite à sa manière et, pour se faire entendre, s'exprime dans un langage personnel. Les Lemaître ont pensé leurs tableaux avant de les peindre. Ils les ont sentis.
Ils ont encore pratiqué l'art et la vertu de sacrifice, condition nécessaire du style auquel ils se sont élevés. Ce style á quelque chose d'ascétique. Il vise plus à convaincre qu'à plaire. Il réussit à s'imposer. Un profane estimera-t-il que la décoration du Refuge manque d'exubérance, de gaîté? Pouvait-on décemment souhaiter autre chose que du recueillement. La pauvreté de la palette est la conséquence d'un voeu. D'ailleurs, nous avons assez, nous avons trop de coloristes. La peinture religieuse ne peut se contenter de pochades et de ‘morceaux’. André-Hubert et Ivanna Lemaître ne sont pas impressionnistes. On