Het Boek. Serie 3. Jaargang 33
(1958-1959)– [tijdschrift] Boek, Het– Auteursrechtelijk beschermd
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V.L. Saulnier
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tion. Et puis, comme toujours dans les collections de qualité, une foule de curiosités de détail (un mot, une formule, une date, un rapprochement de noms) à travers lesquelles on aimerait s'attarder en flâneries. La collection ancienne nous a naturellement retenu. De belles reliures. Des autographes singuliers: tel le discours de Louis XVI aux Etats Généraux, du 23 juin 1789. De beaux manuscrits: ainsi, du milieu du XVe siècle, ce Lancelot (Lancelot du Lac, La Quête du Graal, La Mort d'Arthur), quatre volumes in-folio illustrés, ayant appartenu à Guyot Le Peley de Troyes. (Ce titre fournit la plus forte enchère de la vente pour le rayon ancien, et fut adjugé à plus de quatre millions). Mais il faut se borner, même parmi les 132 numéros de ce fonds ancien. Et c'est à trois ou quatre des plus grands auteurs français de la Renaissance que nous voudrions nous en tenir, faisant profiter les curieux des indications du précieux catalogue, et à la fois complétant ces indications lorsque la pièce le mérite, par l'intérêt qu'elle présente pour l'histoire des lettres et du livre. François Rabelais ne mérite pas ici de nous retenir longtemps. Les Oeuvres, édition de 1553 (no 98) et les Songes drôlatiques, édition de 1565 (no 99) ont été répertoriés par P.P. Plan dans sa Bibliographie rabelaisienne (respectivement, no 92, et p. 243, no XXXI). Rappelons que l'auteur des Songes (François Desprez) a été identifié en 1936 par M. Jean Porcher, dans un article des Mélanges Abel Lefranc. Un bel exemplaire des Oeuvres, dans l'édition de 1741, se trouve d'autre part complété (no 100) par un volume de dessins originaux à la plume (certains coloriés): deux portraits de Rabelais (début du XVIIe siècle), et surtout cent vingt-trois figures de la fin du XVIe siècle, qui (sauf trois esquisses) reproduisent celles des Songes drôlatiques. Cette collection de dessins avait été signalée lors de l'Exposition organisée par la Bibliothèque Nationale, en 1933, pour le quatrième centenaire du Pantagruel (catalogue, no 580). La rubrique ‘Montaigne’ comporte un seul titre: un exemplaire du Chronicon urbis Matissanae, de 1559, portant la signature de l'auteur des Essais (no 81). Il s'agit d'une histoire de la ville de Mâcon, par Jean Fustailler ou Fustallier, dans l'abrégé donné par le juriste mâconnais Philibert Bugnyon. L'ouvrage se trouvera répertorié dans la Bibliographie des éditions des De Tournes, par Alfred Cartier et Marius Audin (no 435), étudié par Ferdinand Brunot dans sa thèse latine De Philiberti Bugnonii uita.... (1891, pp. 15-22). Ce livre portant l'ex-libris autographe de Montaigne, on l'ajoutera à la série de fac-similés donnés dans l'album Montaigne publié en 1933 par les soins de la municipalité de Bordeaux. Toutefois, le présent exemplaire n'était pas inconnu. Au cours de ses beaux travaux sur les Essais et leur auteur, Pierre Villey | |
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ne le connaissait pas encore en 1908, lorsqu'il publiait son étude sur Les livres d'histoire moderne utilisés par Montaigne: il faut ajouter l'ouvrage à la liste (p. 237) des ‘ouvrages historiques possédés par Montaigne’. Mais le Chronicon signé de notre auteur était un peu plus tard signalé à Villey par M. Salles, et Villey le mentionnait dans son grand travail sur Les sources et l'évolution des Essais. (Voir la deuxième édition, 1933, t.I, p. 96). Il n'apparaît pas toutefois jusqu'ici que Montaigne ait utilisé dans son oeuvre des souvenirs du Chronicon. Pour Clément Marot, le manuscrit proposé (no 78) est un morceau de choix. Il s' agit d'un exemplaire du Premier livre des Métamorphoses d'Ovide, traduit en vers français. D'après le catalogue, il s'agiraitGa naar voetnoot1 du manuscrit étudié par F. Gaudu, en 1924, dans la Revue du Seizième siècle (pp. 258-269). Notons que le manuscrit en question fut signalé d'abord par Pierre Villey (Marot et Rabelais, 1923, pp. 68 et 413) avant d'être étudié par Gaudu, qui était un élève de Villey, et consacrait à ce sujet son mémoire en vue du Diplôme d'études supérieures. Il s'agit de ce qu'on appelle le ‘manuscrit Henri Parguez’, du nom de son possesseur de l'époque. L'intérêt de ce texte, comme l'a montré Gaudu, est de révéler le soin avec lequel Marot se corrige, depuis 1530 environ jusqu'à la date de 1534, qui est celle de la publication imprimée. Il faut, pour la bibliographie de Marot, apporter à ce propos deux corrections. D'une part, Gaudu ne datait pas d'environ 1530 le manuscrit qu'il étudiait, mais bien le texte retranscrit sur ledit manuscrit à la fin du XVIe siècle: c'est le texte seul qui pourrait remonter à des exemplaires offerts peut-être par Marot à François 1er et au duc de Lorraine. D'autre part, la récente et précieuse Bibliographie des oeuvres de Clément Marot (1954), due à C.A. Mayer (voir t.I, p. 91, et II, p. 95), déclarait que le manuscrit Parguez avait été acquis par la Bibliothèque Nationale (nouvelles acquisitions françaises 12037). On avait alors de quoi s'étonner. Y aurait-il eu deux manuscrits jumeaux? En fait, les choses sont plus simples. Le manuscrit Parguez (semble-t-il) n'a été vendu qu'à la vente Lucien-Graux. Le manuscrit 12037 n'est en réalité qu'une copie toute moderne du manuscrit Parguez. C'est ce qu' indique d'ailleurs la notice de H. Omont (Nouvelles acquisitions du département des manuscrits pendant les années 1929-1931, Paris, 1932, p. 14): ‘Copie faite par M. Vaudouer d'un manuscrit offert en 1531 au duc | |
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de Lorraine, appartenant à M. Henri Parguez, et accompagné de peintures grossières. XIXe siècle, papier, 107 ff., 220 × 170 mm.; cartonné. Don de M. Vaudouer’. Enfin, une jolie série de Ronsard appelle, par son intérêt même, quelques remarques. Elle comporte notamment quelques pièces venues de la collection Prosper Blanchemain, et décrites par Seymour de Ricci dans son fameux Catalogue d'une collection unique des éditions originales de Ronsard. Relevons ici (no 114) la dernière édition publiée du vivant du poète, l'in-folio de 1584, Les Oeuvres de Pierre de Ronsard: car l'exemplaire semble avoir appartenu au poète Philippe Desportes. Un autre volume rare (no. 111): l'Epithalame d'Antoine de Bourbon et Janne de Navarre (1549). Il s'agit comme on sait de Jeanne d'Albret, fille de Marguerite de Navarre et future mère du roi Henri IV. Signalons que cet opuscule franco-latin fut acquis à la présente vente par la Bibliothèque Nationale. Pour l'édition originale des Amours, de 1552, le catalogue (no 113) indique qu'elle semble manquer à toutes les bibliothèques publiques parisiennes. La chose est inexacte, depuis peu il est vrai. Signalons qu'un exemplaire figurait dans la bibliothèque d'Abel Lefranc: dont le catalogue (no 370) indiquait alors (le catalogue Lucien-Graux paraît lui reprendre sa formule) que l'ouvrage semblait manquer aux bibliothèques parisiennes, et que celui du British Museum était incomplet. Mais à la vente Lefranc (février 1954) cet exemplaire précisément fut acquis par la Bibliothèque Nationale, pour la somme de 690.000 francs. Cette importante acquisition fut notée par la grande presse parisienne (Le Monde, 21 février 1954; Les nouvelles littéraires, 25 février) avant d'être indiquée par telle revue savante (Bibliothèque d'Humanisme et Renaissance, t. XVII, p. 87). Un dernier livre curieux, au compte du poète vendômois: le De re medica de Celse, suivi d'autres oeuvres médicales, dans l'édition lyonnaise de Guillaume Rouillé, de 1566 (no 116): ce livre portant la signature de Ronsard. (On verra sur cette édition la Bibliographie lyonnaise de Baudrier, t. IX, p. 304). L'exemplaire en question appartint à la bibliothèque de Pierre Louys, et figurait au catalogue de sa vente, en 1930. Remarquons que ce Celse avait été repéré par Paul Laumonier et noté par lui dans la liste des volumes connus en 1927 pour avoir appartenu à Ronsard: Laumonier le mentionnait dans son article de la Revue du Seizième Siècle (XIV, 324). Toutefois, Laumonier ne connaissait le livre que d'après le catalogue Louys: il n'avait pas pu le trouver. Le catalogue Lucien-Graux nous donne le fac-similé de la signature, au titre. On l'ajoutera aux fac-similés analogues, à valeur d'ex-libris, que donnaient un premier article de la Revue du Seizième siècle, en 1921 (VIII, 133), puis celui de Paul Laumonier, et entre | |
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temps (1925) le catalogue de l'exposition Ronsard et son temps (frontispice et p. 17). Et puisque nous en sommes à ce chapitre, mentionnons que des Rime diverse de Giolito (1546-1548), l'exemplaire ayant appartenu à Ronsard, connu depuis Blanchemain, et décrit dans l'article de Laumonier (pp. 319-321), a été acquis par la Bibliothèque Nationale, acheté par elle à la librairie Maggs en 1949. On sait l'importance de ces recueils italiens dans le développement du ‘pétrarquisme’ de la Pléiade. Le Celse de 1566, Ronsard dut l'acheter à peu près en même temps que ses exemplaires signés du De Subtilitate de Cardan (édition de 1560), des Neuf lyriques grecs publiés par Henri Estienne (édition de 1566), et des Sententiae et Exempla (édition de 1569). Aux temps qui furent ceux de ses séjours à Croixval et Saint-Cosme: temps de lecture, de méditation savante et morale. Temps de maladie aussi: la maladie ne fut peut-être pas pour rien, à le pousser vers des lectures médicales. ‘Mes bons hôtes muets qui ne fâchent jamais....
O douce compagnie, et utile et honnête....’
Ronsard aimait ses livres. Ce n'est pas, pour les bibliophiles et les amis des livres, un mauvais ancêtre. On aime que, dans un bel ensemble de collection, sa place soit une des places de choix.
P.S. - Puisque cet article se trouve intéresser la bibliothèque de Desportes, j'indique aux curieux qu'il possédait aussi un exemplaire de l'ouvrage suivant: Le premier (et second) volume de la Toison d'or, Paris, Antoine Bonnemère pour François Regnault, 1517, 2 tomes en un vol. in-folio. Il y a laissé quelques notes. (Catalogue E. Rossignol no. 111, octobre 1957, no. 119). Le même Desportes possédait aussi l'ouvrage connu de Pierre Charron: Les trois véritez contre tous athées, idolatres... Le tout traicté en trois livres. Avec l'indice des principales mathières. Reveu, corrigé, et augmenté de nouveau. Paris, Léger Delas, 1594, in-8o. (Signature de Desportes au titre.) Voir Livres anciens, rares et curieux, Paris, Librairie Giraud-Badin, 1957 (vente du 28 novembre 1957), no. 31 du catalogue. |
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