Bijdragen en Mededeelingen van het Historisch Genootschap. Deel 45
(1924)– [tijdschrift] Bijdragen en Mededeelingen van het Historisch Genootschap– Gedeeltelijk auteursrechtelijk beschermd
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Engelsche correspondentie van Prins Willem IV en Prinses Anna (1734-1743),
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trachtte men, d.w.z. trachtte de regeering der Walpoles, en in het bizonder Horace Walpole, die als gezant overkwam, de gemoederen te bedaren door ‘het huwelijk te doen vergeten’. Willem IV en Anna werden aangemaand om geduld te hebben. Een enkel maal deed men nog een niet heel ernstig bedoelde poging om hun belangen in Den Haag voor te staan. Weldra werd men ten zeerste misnoegd over hun onwil om hun ambitie aan de Engelsche raison d'état op te offeren en men liet hen formeel in de steek. Van die gang van zaken was al wel iets bekend uit de oude uitgave van Horace Walpole's papieren door Coxe (Memoirs of Horatio Lord Walpole). In deze stukken uit het Huisarchief kan men nu iets van de briefwisseling van de Koningin en de Prinses zelf lezen, waarin moederliefde en politiek beleid, kinderlijke onderworpenheid en ongeduldige eerzucht op de eigenaardigste wijze vermengd zijn. In een lange uiteenzetting van de Prins van Oranje over de kwestie van zijn aanspraken op de rang van generaal in het leger der Unie (een kwestie die hij tot in 1747 toe is blijven beschouwen als de onmisbare inleiding tot zijn verheffing in Holland) zal men opmerken, hoe de eigenschappen, waarmee de wereld pas in 1747 zou kennis maken, zijn zucht tot redeneeren, zijn vaardigheid met de pen, tien jaar tevoren al bestonden; men zal tevens zien, hoe onomwonden hij verklaart - van Anna treft dat misschien minder - dat heel zijn toekomst van Engeland's steun afhankelijk is. De stukken onder VI en VII zijn een tragi-komische illustratie van de verslechtering, die in de betrekkingen van Willem en Anna met de Koning was ingetreden na Carolina's vroege dood in 1737. Het laatste stuk (VIII) doet zien, hoe de Prins en de Prinses gedurende de Oostenrijksche successie-oorlog poogden de verwijdering te overbruggen, rekenend op de ontstemming die de vredelievendheid der Staten-regeering in Engeland moest wekken. Als mijn collectie hiermee sluit, dan is dat niet, omdat er sedert 1743 in de verhouding van Oranje en Engeland geen ontwikkeling zat, maar slechts omdat ik op het Huisarchief geen stukken heb gevonden, die er betrek- | |
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king op hebben. Van eigenlijk gezegde familie-politiek is dan toch ook weinig sprake meer geweest. Toen de toenadering kwam, werd zij voornamelijk door de staatslieden (Bentinck, eerst met Carteret, daarna met meer vrucht met Newcastle en Sandwich) bewerkstelligd. Een enkel woord nog over de fragmenten, die ik uit Koningin Carolina's vele en lange brieven aan haar dochter publiceer. Zij hebben mij vrijwat hoofdbreken gekost. Ik heb nog nooit zulk abominabel gespeld Fransch in zulk een onleesbaar handschrift moeten ontcijferen. Enkele woorden zijn mij duister gebleven. Hier en daar zal men de zin maar tenaastebij kunnen vatten, ik geloof echter niet door mijn schuld. Koningin Carolina, wier politiek doorzicht en intellectueele belangstellingen bekend zijn, moet het Fransch niet alleen gesproken hebben als een Duitsche (adentre = attendre; drample = tremble), zij schreef het geheel zooals zij het sprak, vlot, slordig, gemeenzaam, levendig. Hoofdletters, accenten en leesteekens zijn door mij gesystematiseerd, meest ingevoegd. De moeilijkheid met de brieven van Prinses Anna is dat zij alle, als was het stelselmatig, ongedagteekend zijn. Soms zijn de dag van de week of zelfs het uur met veel nauwkeurigheid aangegeven, maar de maand en het jaar nooit. Die brieven liggen op het Huisarchief ongeordend en zullen wel nooit goed geordend kunnen worden. Ik heb de datum van de hier gepubliceerde met inwendige gegevens vrij zeker kunnen bepalen. Ik mag niet nalaten Professor Krämer hier mijn dank te betuigen voor de bizondere voorkomendheid en hulpvaardigheid, waarmee hij mijn onderzoek heeft vergemakkelijkt. P.G. | |
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I.
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2. Richemont le 18/7 June 1734.J'espère, ma chère Anne, que sesy vous trouvera à la Hay..... HorasceGa naar voetnoot3) et party de la Hay. Nous l'adanton (attendons) aujourdehuis, einsy que ma lettre sur votre sujest demande de la répétission: vous scerais (serez) comblimenté des Estat; l'on vous ofrira une garde que vous refugerais (refuserez) d'une maniyer come restant avec eu; vous les prié de vous regarder come hollandoise, | |
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mais que vous informerais le Roy votre père des marque d'atantion qu'il (ils) vous témoigne. Il vous trèteron en tous come à mon passage par la Hollande. Il faut incister que vous este preste de trester les dames toute come la feu R. Marie; s'il (elles) vous veule monderer les précestance (précédance), que vous receverais toute les dames avec politesse. Tâché d'accoster même ceu qui ne vienderon pas ché vous dans les promenate, et ayai votre rire aisé et charment avec eu, qui fait que l'on ne vous peut refuser son coeur. Sur tout (toutes) chose, allé voir sans fasson le madin en vous promenant le pansionnaire; dit (dites) luy que vous ne pourié raproché du Roy ny de moy sans nous randre conte de sa personne; parlé luy dantrement (tendrement), assuré le que vous suiverais ces conseille avoeugulement en tous et que vous le prié de vous les donner pour l'ambassadrice de FranceGa naar voetnoot1); vous diré que vous la salueré; que vous scerais de bout, einsy que de sa ce' voir (s'assoir) ne viendera pas apropo; que vous jouré avec plaisir avec elle; si il sont assé sotte(?) de vous redemandre la vicite, vous leur ferais souvenir que les fille de France n'an ont pas faite au femes d'ambassedeur de votre père. Enfin metté toute la faute sur nous isy et assuré les Hollandès que vous este fâché de ne pas faire tous ce qu'il(s) souhaite(nt). Enfin voilà les instrucion finy. Tâché de venir au plus tost, j'ecrirés d'apor à PépinGa naar voetnoot2), puis-que Horasce et party en réponse aus lettres au Roy et à moy..... | |
3. St. James le 1 (Maart) / 18 Févr. 1735.Je suis ravie, ma chère Anne, que vous avée eu le plaisir de revoir votre Prince. HobeGa naar voetnoot3) ma dit avec son rire glassan que vous l'aiée sallué deu foys, et cela de | |
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si bon coeur don tous le monde este édifié. Je suis charmé de vous savoir heureuse, et les maniyer de se bon Prince le mérite bien. Je ne vous parlerais plus de votre santé, j'espère quand (qu'en) peu elle scera parfaite. Je vous recomande seulment très tandrement d'avoir soin d'elle come d'une chose d'où despan ma yie et, ce qui et sans foys plus, le repos et la tranquillité de votre maman. Je hurle en lescrivean, cela et très ridicule, je ressamble justement à l'aire que Lady Portlande faisait quand vous aviyé la jonisseGa naar voetnoot1)......... | |
4. St. James le 17/6 de May 1735.J'aiy receu, ma chère Anne, vos deu lettres, celle du 29 du mois passé et la suivante. Je suis fâché de voire que mes lettres vous aye doné tant de pène, mais come vous me donai vos raison, ma chère fille, vous voulé bien que je vous fasse les miene en détaille et que nous considéron lesquelles son les plus forteGa naar voetnoot2). Je comancerais par les miene et (.....?) ferait toute la tandresse qui n'est que trop forte pour vous, où la raison deverait agir. Vous vous este marié à un Prince qui doit adantre toute les occasions pour profider et n'an lesser échapper au qu'une. Son devoir et la siturassion l'apelle d'apprandre le mestié qui doit faire la base de sa fortune. Vous este sa feme, Dieu vous a doué de talean et de raison et vous n'este plus enfean, einsy qu'il faut que vous soié atandive (attentive), pantan qu'il est emploiyé allieurs, à le repressanter, à ne pas lesser échaper des moment précieu, à conserver les amis, à les encourager par votre pressance, à leur monterer de l'amitié pour le | |
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peaié (pays) et à ne leur pas témoigner que vous n'este que come prette dans ce peaié que d'apor qu'il a tourné le dos, vous ne leur et (êtes) rien ni eu à vous. Vous devié assé conaistre la situragion d'Europe et come toute chose peu se changer d'un moment à l'autre, que l'amitié et la tandresse que vous avée pour nous doit aller après ces considéragion et qu'enfin vous vous randeré par là plus udille à ce peaié, à votre père et à nous; que les plaisir doive aller toujours après ce qui et udille et raisonnable et qui surtout et notre devoire. Après cela si l'on supsonne seulment que le passage de la mer vous ayée donne ces desrangement, vous scerait-il permise de le hassarder, pour que votre Prince puise seulment soupsonner que c'est la raison que vous n'avée pas des enfeans, ou ces amis, ou sa famille?....... Que l'on croira que vous n'este plus tant aimé isy, cela ne se peut croire puisque les marque témoigne le contraire, et que de vous laisser là et (est) la raison que l'on espère que vous par votre pressance aiderait pour le bien. Mais, ma chère Anne, pourquoy le dibiter avean que vous en este sûre? L'on ne peut croire que puisque l'on a prié le Prince de vous faire revenir après votre mariage icy, et qu'asteur l'on ne le dessire pas, soit une autre preuve d'indiférance. Et ceque (est-ce que) les situragion ne change dans le monde, et cequi et apropo hiere, l'est [il?] aujourdehuis? Et ceque des personne come nous ne doive pas toujours regarder à ce qui et apropo et raisonable? Que gangé (gagnez) vous isy que d'estre avec une mère qui vous aime tandrement, et qui ne vous peut estre udille en rien pantan se tems-là à votre bien, si elle dâche de vous mestre dans le chemain afin que je vous puise monterer ma tandresse, par des marque réelle et non pas enfandine et famellete......... Enfin je suis sûre de votre bone raison, que je vous pri d'amploiyer plus que l'esprit et la vivassité, que vous trouveraie que j'ay répondu plainement à tous, et que vous renoncerais pour c'este anné à c'este idée, qui pour le moin me feraie (ferait) plus de sadisfaction qu'à vous, et que vous ne donnerais pas l'occasion à vos ennemis de vous croire plus vive et june que raisonable. Je vous pri de | |
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réflécir et de croire que je vous done par ma résignassion de ne vous pas voir un exsamble et suver (? suivez?) ce qui et (est) justice et sansces, pour votre mari et pour vous. Je vous aime que trop, et cela me coûte, mais rien ne m'anpêchera de vous marquer combien je suis anver vous une tandre mère. Le Roy vous ambrasse et je fait de même. Mr. Pépin, je suis charmé que tout yra bien, mais pagiance et point de vivassité. | |
5. St. James le 29/18 de May 1735......... Je suis charmé de vous savoir bien et de ce que vous vous amussé agréablement. La Haye a toujours esté pour moy charmante come toute la Hollande. Voilà votre lettre répondu. Je revien à celle d'AmalieGa naar voetnoot1)................ Pour le conseille que vous me demandé pour Mr. Pépin et que vous m'aurié aussy bien pue l'écriere qu'à elle, je vous dirais que celon moy il faut qu'il considère ce que ces amis luy avisseron et qu'il considère le pois de ceullà; que pour mon opingnion, que je prie de ne pas considérer que seulement venan d'une personne qui luy souhaite du bien autan par alliance que d'amitié, il me samblerait que de faire la campange scerois le plus sûr chemain; que c'estte en(?) il pourais aprandre pour le demander autans par mérite que par droit; que vous este la personne la plus proper dans son apsance de le solliciter, de vous y emploiyer, et que ces actions les force à le luy donner, joint aus adanstions (attentions) que vous devée avoir pour le luy procurer. Après cela je vous prie d'an parler à des personne qui pouvee par leur expériance en savoir davantage et qu'elle party il prandera, scera toujours aprouvée du roy et de moy. | |
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6. Kensington le 4 (Juni) / 23 de May 1735.J'ay receu, ma chère Anne, deu de vos chères lettres.
Je revien à celle de la poste passé. Je suis sansiblement douché que l'afeire du générallat n'aye pas estté selon les souhait du Prince. L'on me flade que l'afaire n'a pas estté entièrement rejetté et qu'il fau retourner en quelque tems à la charge. Je ne veu pas excuser Horasce, je luy en écrit cestte poste, mais mon cher anfean, il faut que vous pansié qu'il n'ose paraître, que le Roy doit estre come si cela ne le regardè pas, mais parler à ces Messieurs(?) en particulier, il n'an (m'en?) a ecrit il y a quelque temp que le panssionnaire c'estte (s'est) déclaré pour le Prince, qu'il lui avée promis, quand à tous ce qui estte du millitère, il scerait chautement pour luy. Le greffié le scera en tous, je le scais très certainement et vous pouvés conter sur luy. Je ne le vous aurais pas écrit, si cette lettre ne vous venè pas par le courié que j'anvoie au Roy et je vous pri très instanment de pruller (brûler) d'apor cestte lettre. Se cerais avec bien de raisonGa naar voetnoot1) si votre mariage n'este ny scerais un apuis au Prince, une charge plus tost qu'un profit, hor votre aimable personne, mais come je vois ce madin lord HarwayGa naar voetnoot2), je parlle par comparaison, l'on ne peut arracher un fruit d'un arbre si l'on le veu gouder (goûter), il faut le lesser mûrir, et allor le moindre vean nous le jestte en main. Mais vous connessé le petit Samson qui et avec HorasceGa naar voetnoot3): fait (faites) en votre | |
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amie, fait le venir et tâché de le persouader que vous le consulté: il gouverne Horasce et vous apranderais de luy mille chose qui vous seron udille. Tâché de persouadee à Horasce même que vous le consulté, faite après ce que vos amie vous conseille si vous avée consulté votre proper raison, qui et forte et bone, quand la petite teste y veu pansser calmement, vous ditte(?). Je scais que Horasce vous aime, qu'il aime le Prince et que quand sa vivassité et passé, l'on en peu direr un bon party.................. | |
II.
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rendroit ou moins violent contre nous, ou bien pour éviter le désagrément que leurs causeroit votre Protection déclarée pour nous, ils se comporteroient mieux pour le grand bienGa naar voetnoot1): de cette sorte il me parait qu'au lieu qu'à présent le Prince les empêche pour ainsy dire de faire ce qu'ils devroient faire, l'on pourait se servir de luy pour être un peu la verge de ces Gens. A présent l'on vera les bonnes dispositions de la province d'Utrecht par raport au GénéralatGa naar voetnoot2) et j'ose dire par cet échantillon, auquel l'on ne s'attendoit point, que cet exemple seroit bien suivi d'autres, si l'on pouvait se flatter d'étre soutenu; et que l'on pût donner quelque marque aux Gens qu'en se déclarant pour nous ils font mieux leur Cour à l'Angleterre que ceux qui nous persécutent, et que même on fît conoitre aux Matadores que Papa et vous ne seront pas toujours contens que l'on venille faire tort au Prince. Horace a mille bonnes qualités et j'entre assez dans sa situation pour n'en avoir aucune rancune, mais vous jugerés de sa manière d'agir, quand vous sçaurés qu'il m'a dit luy-même, que son occupation devoit être de faire oublier tant qu'il pouroit le mariage du Prince et qu'il disoit journellement à son amy le Pensionnaire que l'on avoit fait le mariage, seulement parce que le nom plaisait en Angleterre, mais que cela ne les gênoit en rienGa naar voetnoot3). Par là le Pensionnaire le tient dans une véritable sujettion, et il n'ose luy dire | |
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un mot, bien loin de marquer seulement que l'avancement du Prince vous fasse le moindre plaisir. D'un autre côté nos amis, voyant qu' Horace n'en fait aucun cas, ne sçavent où ils en sont et ne travaillent certainement point avec la chaleur qu'ils auraient, s'ils sçavoient combien loin la protection va. Pour moi je conois assez votre bonté pour être persuadée que si vous voyés l'état des choses, vous nous assisteriés, mais ma crainte est que, parlant en partie intéressée, je ne sois suspecte. C'est pourquoy tout ce que je souhaiterois, ce seroit que vous vous fassiez informer par quelques personnes impartiales, et si l'on croit icy que nous ayons aucun lieu de nous flatter de Protection, ou si c'est par humeur, ou tête chaude que je parle. S'il y a quelque apparence qu' à force de nous éloigner ou de nous abaisser pour un tems, les affaires qu' Horace a réussissentGa naar voetnoot1), je suis la première à y consentir, mais d'abord qu'il n'y a aucun lieu de s'en flatter, permettés moy, ma chère Maman, de vous suplier de témoigner seulement que vous ne trouvés pas que ce soit une raison pour faire des injustices au Prince qu'il aye une de vos Filles, et j'ose assurer que si cela se faisoit, l'on trouveroit du changement. Je sçay de tout tems que ne pensant jamais à vous-même, vous faites tout pour les autres, c'est ce qui m'enhardit à vous parler naturellement, quoi que d'un autre côté je devrois craindre de vous incommoder, pendant que d'autres abusent journellement de votre patience. Vous avés la bonté de dire que je puis conter sur Papa. Ayant entendue moy-même comment il s'est expliqué sur cet article, je n'ai jamais douté de son intention et vis dans l'espérance que je ne perdrès pas ses bonnes grâces par ma conduite. Et pour ma chère Maman, elle m'a trop donnée de preuves de bonté pour pouvoir douter qu'elle ne continue à présent et pour ne me pas flatter qu'elle entrera dans ma situation, qui n'est désagréable qu' à mesure que je sens l'inutilité dont je dois être au Prince, que j'ai tant | |
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sujet de souhaiter de pouvoir servir et qui pouvoit attendre davantage de moy........... | |
III.
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Général; idée conciliatoire de ceux qui ne me veulent pas de bien, et que j'ai lieu de croire qu'on a glissé à votre MajestéGa naar voetnoot1). Je m'acquitterai donc à présent, Madame, avec la permission de votre Majesté, et si je le puis faire sans abuser de son tems prétieux et de sa patience, de ce à quoi je me suis engagé à cet égard; et pour y procéder avec ordre je remonterai un peu haut afin de laisser juger votre Majesté plus à fond des circonstances où ont été les choses, et où elles sont maintenant. Notre République depuis assez longtems a été fort chiche de promotions, et bien que ces sortes d'avancements ne coûtent rien à l'état, et qu' au contraire ils contribuent à entretenir l'émulation et à encourrager et augmenter l'ambition des officiers, elle n'en a faite qu'une seule générale depuis le printems de l'année 1709, sçavoir celle de l'an 1727, époque fatale pour moi, puisque à la fin elle fut conclue sans m'y comprendre, et voici comment cela se passa. Par les engagements, où notre République étoit entrée avec le feu Roi George premier et la France, on croioit que nous étions à la veille d'entrer en guerre avec l'EmpereurGa naar voetnoot2). Déjà tant du côté de l'Angleterre que du nôtre, on avoit envoyé des ministres et des officiers en France pour concerter les oppérations de la campagne. Le Général Grovestins y fut de notre part. Enfin tout sembloit menacer une rupture. La République qui depuis dix sept cent neuf, et par conséquent depuis dix huit ans, n'avoit fait de promotion de généraux, s'en trouvoit tellement dépourvue, qu'un chacun étoit également persuadé de la nécessité qu'il y avoit d'en augmenter le nombre, et conséquament les délibérations furent entamées sur cette matière. Feu Mons.r de Goslinga, qui se trouvoit | |
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pour lors aux Etats Généraux de la part de la Frise en informa les Etats de cette province, et demanda leurs ordres, qui furent d'abord d'insister auprès de l'union, que l'on me comprit dans la promotion comme Général d'Infanterie, et cela avec tant de force, qu'il eut à déclarer, que sans cela les Etats ses maîtres n'y consentiroient jamais. La Gueldre se déclara favorablement, et la Province de Groningue se conforma entièrement avec le sentiment Frison Mons.r de Goslinga s'employa dans le commencement avec beaucoup de zèle et de chaleur pour mes intérêts, tout parroissoit promettre une heureuse réussite. Le Député de la Province d'Overijssel s'étoit expliqué, qu'il consentoit à mon élévation sous l'approbation de ses principaux. Messieurs de Zeelande même avoient déja consenti qu'on me fit L.t Général, et pour peu qu'on eut pressé, et qu'on leur eut serré le bouton, ils seroient allé plus loin. Lorsque tout à coup les affaires changèrent de face, et que par des machinations de Messieurs de Hollande on conseilla, sous de spécieux prétextes et de belles promesses pour l'avenir, à ma mère une démarche qui gâta tout, et recula si fort mon avancement et mes intérêts, qu'ils en souffrent et que je m'en ressens encor aujourdhuy. Le Prince GuillaumeGa naar voetnoot1) (car je ne déguise rien à votre Majesté) traîna dans tout ceci, et ne contribua pas peu par ses émissaires à disposer ma mère à cette fatale démarche, à laquelle elle se détermina au mois de juillet de cette même année 1727. Sçavoir qu'elle écrivit une lettre aux Etats de Frise, par laquelle elle déclaroit que, ne voulant pas que son fils serve d'obstacle à l'avancement de tant de braves et anciens officiers, elle renonçoit à sa sollicitation et prioit les Etats de désister, et de faire cesser les instances qu'ils avoient fait faire jusqu' alors en sa faveur. Les Etats lui répondirent d'une manière trés obligeante pour moi; qu'ils avoient passés ces offices avec plaisir et qu'ils étoient prêts à les continuer de même, qu'ils ne s'en départiroient qu' à cause de la renonciation, et | |
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qu'ils ne manqueroient pas de le faire déclarer ainssi à la Haye, et qu'ils attendoient de la justice et de l'équité des autres provinces que dès que j'en aurois l'âge ils m'acorderoient le rang qui étoit dû à ma naissance et à mes charges, et qu'ils feroient valoir cette générosité qu'on avoit eue. Voilà, Madame, la source de mes malheurs dans mon avancement militaire. On emploia pour porter ma mère à cette funeste démarche toute sorte de voyes. Messieurs de Hollande se récrioient sur ma jeunesse, bien que l'exemple de mon père y fût, et que comme luy aiant déjà seize ans j'aurois pu dès lors servir comme volontaire et me former dans ma minorité au commandement. Ils ne négligèrent rien pour détourner de mes intérêts les membres de la Généralité de la Province de Gueldre et réussirent entre autres avec le Comte de Welderen en luy promettant l'ambassade extraordinaire d'Angleterre qui flatta infiniment sa vanitéGa naar voetnoot1). On se servit avec utilité et avec addresse de cet exemple pour faire acroire à ma mère que la Gueldre chancelloit, et que sûrement elle m'abandonneroit. On lui dit, que je m'attirerois la haine de toute l'armée en arrettant l'avancement de tant de généraux dans un tems où tant de Princes faisoient des promotions. Le Prince Guillaume, qui grilloit d'être fait Général de la Cavallerie, aidoit à lui faire goûter ces argumens, qui prévalurent enfin sur ceux de mes véritables amis qui lui conseilloient de se munir de fermeté et de patience; que tant de provinces s'étant déclarées les unes plus, les autres moins, mais toutes excepté la Hollande, assez favorablement, il étoit constant que, pourvue qu'on tint bon, il ne se feroit point de promotion sans que j'en fus, et pour répondre à ce qu'on lui avoit sugéré, que cela m'attireroit la haine des généraux, parce | |
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qu'ils devoient attendre, et voir ceux d'autres puissances avancés devant eux, on luy montra une lettre d'un membre accréditté d'Hollande, qui assuroit que, si la promotion se faissoit quelques mois plustôt ou plus tard, les Généraux n'en souffriroient en aucune façon puis qu' aussi bien on antidateroit leur commissions. Ma mère montra cette lettre à des gens du sentiment opposé, qui taxèrent tout ce qu'elle contenoit de chimère, et elle dépêcha la sienne aux Etats bientôt après. L'évènement vérifia la réalité de ce que ce Hollandois avoit confié à un de ses amis, car ma mère ayant fait désister la frise, on conclud la promotion à l'exception du Prince de Hessen Homburg, pour qui comme pour moi la province de Groningen avoit tenu ferme, et les commissions des Généraux furent toutes antidattées, car bien que la conclusion ne fut prise qu'en aoust, les commissions furent dattées de Mars. Depuis ce tems jusqu' à l'année 1731, que je fis ayant vingt ans accomplis mon serment en Frise, on ne grouilla pas même de promotion, mais alors les Etats de cette province sommèrent ceux des autres provinces de se souvenir de ce qui s'étoit passé en l'année 1727 et insistèrent et exigèrent non qu'on fit une promotion, mais qu'on me donna le poste que sous prétexte de minorité on m'avoit refusé, raison qui ne subsistoit plus. Les Provinces de Gueldre et de Groningue se joignirent aux instances de la Frise, mais tout cela ne produisit aucun effet; au contraire mes antagonistes outrés d'en Hollande, toujours ingénieux à inventer de nouveaux obstacles pour traverser ma fortune, s'avisèrent d'un moyen, qui par sa simplicité ne frappa pas d'abord, et dont on ne découvroit qu' après coup toute la malice. Sous prétexte que par les arrangements faits après la paix et les résolutions de l'Etat pour le ménage prises en 1719 le mombre des Généraux étoit fixé, de la cavallerie à un Général, deux Lieutenants Généraux et autant de maréchaux de Camp; et de l'Infanterie à un Général, quatres Lieutenants Généraux et quatre maréchaux de camp, ils trouvèrent à propos, et disposèrent les Députés des Provinces, qui n'étoient point préparés ni prévenus, à | |
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remplacer à la mort de Mons.r de Vicouse M.r de Caris comme L.t Général. Tous y consentirent sans réfléchir pour lors plus loin, et cela se fit en Novembre, 1732, après la séparation du camp d'OosterhoutGa naar voetnoot1), et pendant que plusieurs de mes amis étoient de même que moi absents de la Haye. Peu de tems après, M.r Huffel mourut, et on fit Mr de Cronstroom Lieutenant Général à sa place. Après cela Mons.r de Keppel vint à mourir et on lui fit succéder en qualité de L.t Général M.r de Savornin. Tous ces remplacements ouvrirent à la fin les yeux de mes amis et les miens, et nous remarquâmes que la politique de Messieurs de Hollande ne tendoit qu'à rendre par là la promotion générale moins nécessaire, et pour l'éloigner. Ainsi la Frise prit la résolution de ne plus consentir à ces surrogations, et aussi l'hyver dernier à la mort de Monsieur Caris ce ne fut qu'avec pluralitéGa naar voetnoot2) que Monsieur Wichers lui succéda comme Général Lieutenant, et qu'on fit une plus grande nouveauté encor, c'est que sans Promotion on prit un Brigadier, sçavoir Monsieur Hirtsel pour suppléer le nombre de Généraux Majors, ce qui ne se seroit point fait, si le Pensionaire défunctGa naar voetnoot3) étoit resté en vie, car à la fin il étoit sur cet article-là dans des dispositions assés favorables, et il étoit convaincu, qu'il étoit pernicieux de continuer cette sorte de remplacements, et je lui avois démontré même que ce n'étoit point en conséquence des résolutions de 1715 qu'ils se faisoient. Car cette résolution n'est relative qu'aux généraux avec gages et non aux titulaires; elle porte, qu'il y | |
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en aura tant de bonifiés sur l'état de guerre, et ainsi on ne peut à la rigueur appeller le Poste vacant, que quand il y a gage et titre ensemble vacant, ce qui depuis 1727 n'a pas encor existé. Car le Prince de Holstein est Général d'Infanterie avec les gages, et les deux autres, Messieurs de Palland et Coljar, sont bien Généraux d'Infanterie, mais n'ont que les gages de L.t Généraux; de sorte que de quatre L.t Généraux il n'y a que les deux plus anciens qui (en) ont les gages; sçavoir Mons.r de Montèse et Cronstroom, et les deux autres, Savornin et Wichers, n'ont que les gages de Maréchaux de Camp; de mème aussi de quatres Généraux-Majors il n'y en a que deux avec gages, sçavoir van Dorth et Dois; Béarn et Hirtsel n'ayant aucuns gages. Leur politique est donc uniquement de reculer une promotion, et de m'opposer par le remplacement de Lieutenant Généraux de nouveau rivaux, quand le Généralat d'Infanterie viendra à vaquer, ce qui ne sera qu'après la mort des trois, que je viens de nommer. Leur grand argument contre moi est ma jeunesse, mon peu d'expérience, et la dureté qu'il y auroit de me mettre par dessus la tête des Lieutenants Généraux que l'Etat a au service, et à cause de cela ils en remplacent chaque fors. J'avoue qu'il y auroit de la dureté à me mettre comme Général devant d'anciens L.t Généraux qui ont servi la République en cette qualité pendant la guerre, et c'est pourquoy en 1727 on ne demandoit que de me faire le plus jeune des Généraux d'Infanterie, et ainsi après ces trois susnommés, mais à présent au contraire il y auroit de la dureté de voir passer devant moi dans ce poste les Lieutenants Généraux d'aujourdhuy, dont, à l'exception de Monsieur de Montèse, il n'y a pas un dans toute l'infanterie, car c'est d'elle que je parle, qui ait été général avant 1729; Monsieur de Montèse étant Général Major de l'an 1709 et Lieutenant Général depuis 1727. Quand aux autres, il y a excor Monsieur Cronstrom qui étoit Brigadier pendant la guerre et jusqu'à 1727, mais pour Savornin et Wichers je les ai connu Collonels jusqu'en aoust 1727, et par conséquent du tems que j'étois en état de faire campagne et du tems, qui | |
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plus est, que les Zélandois vouloient déjà me conférer le grade de L.t Général; ainsi que tout le monde impartial peut juger, si la dureté ne seroit pas plustôt faite à moi, de les voir parvenir au rang de général avant moi, qu'à eux de me voir devant eux dans un poste que trois provinces demandent depuis plus de dix ans pour moi, et cela sans le moindre succès jusqu' à présent, quoi qu'elles réitèrent souvent leurs instances à cet égard; car non contentes d'avoir fait une sommation aux autres provinces de m'accorder le rang de Général en 1731, Messieurs de Gueldre, de Frise et de Groningue ont encor, pour mettre la Hollande et la Zélande d'autant plus dans le tort, écrit tous les trois des lettres circulaires aux autres provinces en 1735, où ils recommandent non seulement ma personne, mais où ils donnent aussi à connoitre qu'ils sont prêts a concourir à une promotion générale. Cela produisit un bon effet dans la province d'Utreeht qui résolut aussi d'y consentir, et que l'on m'y comprendroit comme GénéralGa naar voetnoot1). La Hollande et la Zélande se déclarèrent contre moi non seulement, mais dirent même de ne voir aucune nécessité d'en venir à une promotion. Cependant vers la fin de l'année 1735 étant venu à la Haye, et ayant pressé le deffunct pensionaire qu'on entamât aux Etats Généraux les délibérations sur la promotion, il y consentit moyenant qu'on proposa des tempéraments, et on trouva celuy de faire deux généraux d'Infanterie, dont je serois l'un, mais que l'autre auroit le rang, afin de prévenir la crainte de Messieurs d'Hollande de me voir trop tôt à la tête de l'armée, et ainsi on forma aux Etats Généraux au mois de Décembre 1735 un rapport, qui renfermoit ces trois points, sçavoir, qu'il falloit procéder à une promotion, que j'y serois compris comme Général d'Infanterie et que, pour concilier les sentiments des provinces, on feroit encor un Général, homme de capacité et d'expérience, en même tems que moi, mais qui auroit le rang. Ce rapport fut pris ad referendum par la Hollande, la Zélande et l'Overijssel, | |
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bien que le Comte de RegterenGa naar voetnoot1) dès lors voulut, sans pourtant qu'il sçut l'intention de ses maistres, consentir au premier article. Les provinces, qui m'étoient favorables, déclarèrent, qu'elles ouvriroient leurs avis dès que les autres seroient prêtes à s'expliquer. La Hollande résolut de persister à la négative, et la Zélande fit toujours fidellement l'écho. La province d'Overijssel, qui ne s'assembla qu' au mois de mars 1736 prit une résolution ambigue où ils dissent, qu'ils jugent une promotion nécessaire, mais moyenant qu'elle soit résolue avec unanimité de toutes les provinces, et qu'elle offre à cette fin sa médiation, afin de concilier les avis discrépants des provinces. Les choses en sont resté là depuis ce temps, et de mon côté voyant la difficulté pour en venir dans ces conjonctures à une promotion générale, j'avois établi pour principe d'attendre avec patience le tems qu'il plairoit à la Providence de marquer pour mon avancement, jugeant que cela ne pourroit pas tarder infiniment, le cas dépendant du décès des trois Généraux, dont le premier, le Prince de Holstein, criblé de coups, a soixante et dix ans, et les deux autres, Messieur de Palland et Coljar, en ont quatre vingt passé. A la mort de ces trois, ou du dernier des trois, le poste est vacant, et doit être rempli, et ayant quatre provinces pour moi je pourois me flatter que, comme c'est un point d'ordre, ils le concluroient avec la pluralité sans s'embarasser de trois autres provinces, qui selon la forme du gouvernement ne trouveroient rien à répliquer, et à présent d'autant moins, puis qu'ils ont frayé le chemin de conclure de la sorte dans le cas de Monsieur Wichers et de Hirtsel, à quoi la Gueldre et la Frise ont contredit comme n'étant pas un point d'ordre. Voilà, Madame, la situation des affaires depuis 1727 jusqu'au rapport du 19me juillet dernier, qui a été formé sur une proposition du Comte de Regteren, diamétrale- | |
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ment contre la résolution de ses maîtres, qui lui ordonne de faire des devoirs de médiateurs entre les provincesGa naar voetnoot1). Par ce beau rapport, qui est malitieux s'il en fût jamais, il n'est plus question de promotion de Généraux mais seulement de L.t Généraux, Maréchaux de Camps et Brigadiers, et la délibération sur l'élection des Généraux y est pendue au croq non seulement, mais il s'y trouve une clause, qui dans le militaire est envers moi un second Tome de l'Edit perpétuel, qui a existé contre Guillaume trois. Que de plus clair en effet pour m'exclure de tout emploi dans l'armée, que ce que l'article, dont voici le précis, contient? Il est dit, qu'on devoit à l'avenir fixer le nombre des Généraux au double de ceux, qu'il y a, et ainsi on coupe court aux promotions à l'avenir. Mais qui plus est, - et voilà, si elle avoit lieu, ma sentence d'exclusion pour jamais, - il y a dans cet article, qu'à mesure qu'un des Généraux viendroit à manquer, on devroit arretter qu'on rempliroit cette vacance par le plus ancien dans le rang suivant, sans qu'il seroit permis de se départir de cette règle que du commun avis de toutes les provinces. Enfin pour comble de malice, on a fait une liste de ces nouveaux L.t Généraux, afin de les rendre, et ceux qui s'interressent à eux, impatiens de ce que leur avancement ne se fait pas d'abord, et dans l'espérance d'en rejetter le blâme sur moi, et de les animer tous par là contre moi. Mais la province d'Utrecht a déja arretté ce beau projet en persistant à sa resolution favorable, et la Frise vient de prendre une résolution semblable, et d'écrire une lettre aux Etats Généraux où elle prouve avec décence, mais sans aigreur, le tort qu'on me fait, et rembare l'argument de ceux qui veulent rejetter sur moi le blâme que la promotion ne se fait point, en disant, qu'elle veut soumettre au jugement d'un chacun à qui le reproche d'arretter la promotion convient le mieux, et est le plus applicable, ou bien à quatre provinces qui sont depuis plus de deux ans prêtes d'y consentir, et de m'y comprendre; ou bien à celles, qui pour cette seule raison l'empêchent. | |
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Pour en venir à présent aux raisons, qui m'empêchent de devenir ou d'accepter d'être fait Lieutenant Général, je prie avant toutes choses votre Majesté de bien considérer qu'elles ne sont pas personelles, mais qu'elles viennent de l'incompatibilité qu'il y auroit avec ce grade et mes charges de Capitaine Général de trois Provinces. Le Poste de Capitaine Général est le poste le plus éminent qu'il y ait dans les armées de notre République. Plusieurs Princes d'Orange l'ont été de toute l'union, bien qu'il ne le fûssent pas de toutes les provinces en particulier, le Stadthoudérat de Frise ayant depuis la mort du Prince Guillaume premier toujours resté dans ma branche, et par conséquent aussi celuy (versta: l'office) de Capitaine Général, comme aussi souvent de Groningue, et de Drenthe. Le poste de Capitaine Général des provinces particulières est sans contredit aussi un poste éminent, et bien qu'ils ne soi(en)t pas pourvu d'une commission des Etats Généraux, ils sont pourtant sur le territoire de leurs provinces commandants en chef de toute l'armée, lors qu'elle s'y trouve, tellement que même un Veltmaréchal, s'il y en a, est obligé de leur obéir, et que, posé qu'il y eût un Capitaine Général d'Hollande, qui vint en cette provinceGa naar voetnoot1), qui est la première, je le commanderois. De là vient que depuis l'érection de notre République il n'y a pas d'exemple qu'un Capitaine Général d'une province aye servi dans un carractère subalterne, et qu'ils ont, ou bien commandé des corps de troupes à part, ou bien servi comme Lieutenant Généraux des Princes d'Orange; ce qui est bien différend de ce qu'on appelle Lieutenant Général à présent; ou bien, depuis que les titres avec le luxe ont augmenté, ils ont été Velt-Maréchaux, Généraux d'armée, Généraux d'artillerie, Généraux d'Infanterie, comme je le pourrois prouver par les exemples des Comtes Guillaume Louis, Ernst Casimir, Guillaume Frédérick, Henri Casimir, mon grand père, et feu mon père, qui de son bas âge fut Général d'Infanterie, et qui en exerça la fonction jusqu' à sa mort depuis sa vingtième | |
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année, de sorte que de tous les stadhouders de Frise, je suis le seul malheureux qui, quoique depuis six ans en fonction, n'ai point de caractère dans l'armée de l'Union; et si (ce que mes maîtres, du moins ceux de Frise, ne souffriront pas) j'acceptois le Lieutenant Généralat, je serois le premier qui auroit dégradé le poste de Capitaine Général. Dès l'an 1727, lorsque les Zélandois le vouloient bien, on en jugea ainsi, et à cause de cela, bien que je fûs mineur, et qu'il auroit alors autant valu de servir comme Lieutenant Général durant ce tems que comme volontaire, parce qu'il n'y en avoit point d'exemple, on le déclina; seroit-il juste à présent, que j'ai vingtsix ans, que je comptasse comme perdu pour moi les dix ans, qui se sont écoulés, et que j'accepte un poste subalterne et dans lequel je devrois être de jour, monter la tranchée et rouler avec des gens qui deviendroient Généraux Lieutenants, ou Majors Généraux, et que je commande depuis six les uns, et ceux de Gueldre et de Groningue depuis huit ans, comme Capitaine Général, et cela pour complaire à Messieurs d'Hollande et de Zélande, et pour satisfaire à leur caprice, car se n'est (c'en est) réelement un. Ils disent, du moins quelques uns: pourquoi le Prince ne veut-il pas être fait Lieutenant Général? Je réponds être le plus vieux, et si l'on me le veut faire des nouveaux, ou de tous? Si c'est le dernier cas, sçavoir le plus vieux de tous, je réplique: n'est-ce dont pas me faire en effet le plus jeune Général d'Infanterie? pourquoi donc ne vouloir pas m'en donner le titre, si non par pur caprice, afin de me chagriner, de faire que je déshonore mon poste, et que je renonce à ce que mes ancêtres touts ont eu avant moi, et ainsi afin de me faire frayer un chemin qui seroit fatal à ma postérité, si Dieu m'en bénit. Il n'y a, Madame, qu'une voix sur ce chapîtreGa naar voetnoot1), et ce que j'avance n'est pas de mon seul avis, mais de | |
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celuy des plus entendus et des plus vieux régens, que j'ai consulté il y a deux ans, lorsque certaines gens me proposèrent de me contenter pour entrer en service d'être Lieutenant Général, et qui touts unanimement m'ont deconseillé cette idée, disant que les provinces relâcheroient trop de leurs droits. Le défunct pensionaire même n'osa jamais me le conseiller, et m'a dit plus d'une fois qu'en le prennant à la rigueur il étoit même au dessous d'un Capitaine Général d'être simple Général d'Infanterie. De plus le conseil d'Etat, qui est un collège de l'Union, ne donne des commissions de Collonels qu'auprès des régiments de Généraux. Auprès de ceux des Capitaines Généraux des Provinces il ne le refuse jamais, et de la sorte plusieurs de ceux qui vont être mis sur les rangs comme Maréchaux de Camp ont optenu leur ancienneté; et mes régiments dès ma naissance dans les campagnes d'onze et douze et dans le cantonnement de 1713 ont pris le rang de Général Major; de sorte que même, si on ne me considéroit que selon ce rang, j'aurois dû être L.t Général depuis 1727. Voilà, Madame, un détail de l'affaire de la promotion, et des raisons qui font que je ne puis accepter le poste subalterne de Lieutenant Général. Je demande pardon à votre Majesté qu'il soit devenu si long, mais le sujet et la clarté que j'ai tâché d'y donner l'exigeoi(en)t. Je crains seulement, que cette lecture fatiguera l'attention de votre Majesté, et exercera sa patience; mais de grâce, Madame, qu'elle ne vous rebute point, et que mon indiscrétion ne détruise point ce que vos bontés me donnent lieu d'espérer. Une recommandation du roi aux Etats Généraux, son appui en ceci comme en tout ce qui me concerne, peut seul me faire surmonter milles injustes obstacles. J'ose donc supplier votre Majesté d'y faire réflexion, et de se souvenir du mémoire touchant l'affaire de ZélandeGa naar voetnoot1). Votre Majesté mettra le comble à ma satisfaction, mais | |
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elle ne sçauroit augmenter ces sentiments de respect et de soumission avec lesquels je suis à jamais etc. | |
IV.
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d'être accusé de choses en l'air, que je défie tout l'Univers de prouver, ou même d'en citer un seul exemple, et tout ce que je demanderois à cet égard, ce serait que vous eussiés la bonté d'en demander un seul, ce qui fermerait bien vite la bouche à ceux qui certainement, ou mal informés, ou très mal intentionnés pour nous, prennent plaisir à vous donner ces impressions au désavantage du PrinceGa naar voetnoot1). A l'égard du 2nd Article dont vous parlés, sçavoir le dérèglement dans les finances, il y auroit beaucoup à dire sur ce sujet, mais je n'oseGa naar voetnoot2), toujours je puis dire que la réforme a été grande et que rien de faisable ne se néglige à cet égard et que le Prince ny moy n'avons auquuns reproches à nous faire sur cet article. Pour le 3me qui regarde D(uncan)Ga naar voetnoot3), je ne puis qu'admirer que ceux qui ont si habilement arangés leurs batteries pour nous faire du tort dans votre esprit, ne se soyent pas mieux informés de ce que personne à la Haye n'ignore et qu'ils n'ayent pas sçu qu'il ne passe pas un sou par ses mains, y ayant le Trésorier qui a l'entier soin de l'argent et rien ne se dépensant sans une ordonnance signée du Prince. Je dois d'ailleurs cette justice à D., qu'en toutes occasions je puis remarquer qu'il sert son maître avec attachement et fidélité et tant que l'on n'a des preuves claires, il me semble que l'on aurait grand tort de ne s'en pas servir dans un tems et dans des circonstances où elle est assez rare à trouver, j'entens | |
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pour ses affaires domestiques, celle des Provinces dont le Prince est à la tête étant d'une nature qu'il les fait toujours luy-même, avec les Régens qui y appartiennent sans qu'auquun de ses Domestiques s'en mêlent. Après avoir répondu aux 3 Points, dont il s'agissoit, il faut que j'ajoute que je crains m'être mal expliquée lorsque je vous demandès la permission pour le Prince d'oser sommer ObdamGa naar voetnoot1) sur ce qu'il avoit dit à M. W(alpole) par raport à son avancement militaire, puisque je vois que vous défendés absolument que l'on fasse usage de sa conversation particulière en public; l'intention du Prince ayant été simplement de luy demander entre quatre yeux l'exécution de ce qu'il avait avancé, et est-il possible que vous croyés encore qu'il s'agit de ménager un ennemi déclaré?Ga naar voetnoot2) L'usage que l'on peut faire d'un tel homme peut-il être autre chose que de tâcher à le faire agir comme il faut, malgré luy, ou pensés-vous que l'on doive biaiser avec des gens qui sont tous les jours encouragés à persister dans leur injuste animosité par l'indifférence qu'ils voyent qui est pour nous en Angleterre? Il est doublement fâcheux pour moy de devoir écrire amplement sur cette matière, étant persuadée d'avance que cela est de fort peu de poids, et que vous me croyés devenue depuis que je suis dans ce Pays, ou tout à fait aveugle, ou trop stnpide pour voir les choses par moimême, et cela même doit empêcher que vous fassiés réflexion à ce que j'ai pris souvent la liberté de représenter, et ferme la porte à la grâce, quelques bonnes que soyent les oeuvres. Cela me rend souvent plus triste que je ne le puis dire, quand je songe aux charmantes idées que j'osois me faire autrefois pendant que j'étois en Angleterre, et à la différente situation d'à présent, et | |
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que, pendant que la voix générale dans ces pays est l'étonnement du peu de cas qui se fait en Angleterre de ce qui nous arrive, il paroit impossible que cette voix vienne jusques à vous, les précautions étant prises par ceux qui ont le bonheur de votre confiance, que dès que nous avons recours à votre protection, ils ont soin de donner une liste de torts, et de fausses accusations contre nous, et la plupart si je l'ose dire d'un genre que, à moins d'être hébétés, elles seroient impardonnables à 15 ans. J'ai balancée pendant quelques heures si j'oserois risquer à vous envoyer une lettre qui ne peut qu'être ennuyante, et qui d'ailleurs peutêtre m'attirera le surnom de tête chaude, mais après m'être examinée, et tout ce que vous avés cue la bonté de m'écrire avec tout le calme dont j'ai été capable, j'ai cru devoir à la vérité la réfutation des rapports désavantageux qui sont venus jusques à vous, heureuse si enfin j'ai pu réussir à détruire les malicieuses insinuations qui vous ont été faites à notre préjudice, et très persuadée que notre sort deviendra plus heureux dès que vous le voudrés, faisant dans ce abstraction de ma chère maman qui est toujours bonne pour moy, et ne parlant à cet égard qu'à la Reine. | |
V.
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de Mr. Trevor votre lettre du 27 passé, et j'espère que Mr. Trevor, selon que je l'en avois prié, vous aura mandé les raisons qui m'empêchèrent de vous répondre d'abord. J'ai pour répondre en plus grand ordre et en plus grand détail à celle que vous m'avés fait le plaisir de m'écrire mieux aimé différer d'une poste que de le faire incomplettement. Pour m'en acquitter donc suivant les articles de votre lettre, je vous dirés quand au premier, sçavoir la demande de la moitié de la dotte pour l'usage que vous sçavés, j'ai ordonné à de BackGa naar voetnoot1) de suivre entièrement vos idées, et il a déjà travaillé conséquament. Je vous suis très obligé des fortes assurances que vous me donnés de vouloir m'aider de vos bons offices qui, joint à ceux de Mr. votre FrèreGa naar voetnoot2), pouront m'être d'un grand secours. Je vous prie de l'assurer de mes devoirs, et de luy dire que je ne manquerés pas de les luy demander la poste prochaine. Quand au second article, sçavoir de l'idée que je vous avois communiqué de vouloir désister de la manière la plus ample du Stadhoudérat d'Hollande, et donner à cet égard à leurs Nobles et Grandes Puissances toutes les sûretés qu'ils pouroient prétendre, moyennant qu'ils consentissent à mon élévation au Généralat d'Infanterie, et à ma scéance actuelle au Conseil d'EtatGa naar voetnoot3) - ouy, même qu'en ce cas je pousserois, s'il le falloit, la complaisance jusqu'à voir placer un autre Général devant moy, pourvu qu'il ne fut pas trop jeune; - quand à cet article, dis-je, ma pensée n'étoit | |
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point que vous en fissiés une proposition formelle, mais que soit vous, ou à présent Mr. Trevor, en tâchant insensiblement de faire tomber la conversation sur la promotion, ouvriés cela comme une idée qui vous étoit venue et qui leurs prouveroit combien vous étiés porté à leur faire plaisir, et à contribuer à leur tranquilité, pourvu qu'ils voulussent me faire justice sur ces deux articles; que quand à vous, si ces Mess.rs, que je suppose des Républicains outrés, goûtoient votre proget, vous tâcheriés de me sonder là-dessus, et que vous feriés votre possible pour m'y disposer. C'étoit là ma manière de penser, car si cela venoit en forme de proposition, ils s'appercevroient bientôt de quel cru cela étoit, et se tiendroient plus bouttonés afin d'obtenir des conditions plus avantageuses pour eux, et dures pour moy, soit par rapport au rang qu'on me donneroit, ou à la personne à placer au dessus de moy, soit enfin qu'ils voudroient peutêtre encore à cette occasion m'extorquer quelque déclaration par rapport à la Zélande, car enfin rien ne me surprendroit de leur part, et dans la dangereuse crise où se trouve notre République, ils feroient de tout bois flêche, sçachant bien qu'ils jouent de leur reste. Vous me faites un sensible plaisir, Monsieur, de me communiquer vos idées avec tant de franchise. Je ne sçai quels sont ces Mess.rs Gueldrois dont vous voulés parler. Quand à M.r TorckGa naar voetnoot1), à qui le militaire doit tomber en partage l'année prochaine, et M.r de BrantzenburgGa naar voetnoot2), qui l'a eu cette année, je leurs en ai parlé, et surtout au premier très amplement à Dieren, et je crois qu'il a été content de moy, comme à l'égard de la promotion j'ai eu lieu de l'être de luy, mais celuy-là croyoit que je devois m'en tenir simplement à mon mémoire, et à la résolution de Frise, sans témoigner que je souffrirois qu'on en mit | |
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un autre au dessus de moy, devant garder cela comme mon ultimatissimum, crainte qu'en me déclarant ou moymême, ou par mes amis là-dessus d'avance, Messrs d'Hollande le prissent comme un point déjà cédé, et n'en demandassent encore plus, au lieu de me payer de ma complaisance. L'éloignement de Duncan produira, j'espère, l'effet que bien des gens en ont prédit, mais je ne puis déguiser que ceux qui ont rompu avec moy sous prétexte qu'il étoit seul écouté et suivy, en ont pris un bien futile, et n'ont attendu qu'après une occasion bonne ou mauvaise pour tourner casaque, car ceux qui ont voulu prendre la peine de suivre de près mes démarches, et tous les Régents de Frise, Province dans le politique de laquelle je suis le plus mêlé, me devront la justice de déclarer que jamais je n'ai employé Duncan dans ces sortes d'affaires. Ce ne peut être que le BurgraveGa naar voetnoot1) qui, honteux de sa conduite envers un élève qui l'a comblé de bienfaits, et que sa conscience luy reproche, tâche de la pallier par des contrevérités. Quand Burmania aura le plaisir de vous voir à Londres, comme je l'espère en Dieu, il poura vous instruire de la façon dont le Burgrave en a agy, et de ce que j'ai fait pour tâcher de le ramener. Enfin je passe, Monsieur, au 3me et dernier article de votre lettre, sçavoir touchant les vues que le Prince Guillaume pouroit avoir pour l'avantage du Prince son fils en ce pays. Il est seur que le Prince Guillaume a un certain party dans la Hollande, et la seule preuve que j'alléguerés, et qui suffit pour en convaincre, c'est qu'on le garde au service comme Général et Gouverneur de Mastricht, non obstant une résolution formelle, et aceeptée par luy, qu'en cas de mort du Landgrave, soit qu'il le devint, ou qu'il fût fait Stadthalter du Roi de | |
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Suède, il seroit déchu de ses emplois icy. Le feu pensionaire, qui ne l'aimoit point, me l'a plusieurs fois répété. Or, dans ces circonstances, et connoissant les sentimens républicains, qui non seulement sont contre le gouvernement Stadhoudérien, mais qui, en cas qu'il en falut venir là, croient qu'il vaudroit mieux, pour diminuer et rompre l'autorité de cette charge, et la rendre selon eux moins formidable, ne la pas réunir de toutes les 7 Provinces en une même personne, mais en avoir deux, jaloux pour la plupart du tems les uns des autres; j'ai cru que le prince Guillaume pouroit profiter de ses amis qui lui restent, des conjonctures présentes, et du mariage prochain de son filsGa naar voetnoot1), pour insinuer quelque chose de semblable, et se servir auprès des Régens qui veulent ménager l'Angleterre du prétexte que son fils a aussy bien l'honneur d'être le beau-fils du roy que moy, ce qui pouroit les éblouir, et arriver que le Prince Guilamme le fît, si le Roy n'a la bonté de luy faire connoitre qu'il ne luy seroit pas agréable qu'il entreprît quelquechose au préjudice de celuy auquel il a fait le grâce de donner sa fille aînée, grâce qui m'est garand, que ce seroit contre l'intention de Sa Majesté qu'on me fît du tort. | |
Willem iv aan?Ga naar voetnoot2)2. (Ontwerp of kopie.) Mei of Juni 1740.J'ai chargé mon conseiller ordinaire et Griffier de mes domaines De Back de faire à votre Excellence des propositions, par le moyen desquelles le Roy s'il l'accorde | |
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peut me mettre à l'aise, et faire cesser toutes les machinations qu'on trame pour me demander le remboursement des capitaux, à quoy mes ennemis dans la République, et Mr. de FénelonGa naar voetnoot1) ne cessent de travailler pour m'embarasser et me distraire, et ce moyen pouroit être exécuté, sans qu'il en coûte rien au Roy, la Princesse le souhaite autant que moy, et attend de votre zèle que vous le favorisiés. Ce seroit, Monsieur, que le Roy permît que le reste de la dotte fut remise icy, ét votre Excellence pouroit assurer sa Maj.té qu'on n'en feroit auqu'un autre usage qu'à rembourser les capitaux et à remettre le crédit; la seureté de la Princesse n'en souffriroit auqu'unement, la dotte donne déja à la Princesse une hypothèque legale, et préférable dans tous mes domaines, et mon testament luy en guarantit la possession; mais outre cela, j'offre de faire passer des obligations pour 440.000 florins en faveur de la Princesse, qu'elle poura garder, ou faire garder en Angleterre, et mes domaines étant déchargés de pareil 440.000 Florins, nous (woord uitgevallen) ma vie durant les 12000 Florins de rente en ne payant plus les intérêts de cet argent remboursé, ce qui revient à la même chose. Votre Excellence peut engager ma parole qu'on n'en fera pas d'autre usage, et si tout cela ne suffit pas encore, V. Ex. peut assurer le Roy que la première chose à laquelle je ferés travailler en Allemagne ce sera d'y régler le Douaire de la Princesse, selon ce que le contract porte, et cela sera en subside de mes Domaines. V. Ex. sçait elle même trop combien il m'importe que mon crédit se remette, et je n'y vois pas de moyen plus sûr et plus facile. J'espère qu'elle n'oubliera pas l'article touchant le fils du Prince Guillaume, et celuy du Généralat, et du Conseil d'Etat moyennant la renonciationGa naar voetnoot2) etc. J'ai l'honneur d'etre avec une parfaite considération. | |
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VI.
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rendent, nous devrons au risque d'y être mal receu risquer le pacquet, et si le Prince Frédéric s'y rend seul avec son père, bien que vous sçavez que je ne quitte que très difficilement et très peu volontiers la Princesse ne fût-ce que pour trois jours, il faudra que je résoude de me rendre à Hanovre, où seul je puis loger à l'herberge et n'être importun, pour une couple de jours au levé et dîné du Roi. La chose est trop sérieuse pour moi, on n'a que trop réussi dans la République à persuader que le Roi est tout à fait indifférend et froid sur notre sujet, les ennemis en triomphent, les amis s'en affligent et en sont tellement abatus que j'ai beau leur chanter que le Roi m'a accordé très efficacement son appui pour mes intérêts d'Allemagne; tout cela ne peut les ranimer et ils disent: pourquoi le Roi ne se montre-t-il pas sensible aux avanies et criantes injustices qu'on vous fait? L'affaire de Zélande et la promotion et plusieurs autres articles sont de nature que sa Maj.té pourroit et devroit parlé. La Princesse, disoit on, étoit la fille chérie mais à quoi cela paroit-il? il ne l'a vu qu'une foix, à tout ses passages. Les trop grands ménagements pour les outrés Républicains avancent-ils autant les intérêts du Roi, qu'ils ont visiblement et palpablement reculé ceux du gendre, et la République ne montre-t-elle pas par sa conduite d'à présent quels en sont les effets? le Parti François a-t-il perdu des adhérans? la balance ne panche-t-elle pas au contraire de ce côté-là? Voilà comme raisonne les plus sensés et les moins prévenu dans la République, et encor par la dernière poste de La Haie on me marque de la surprise qu'on n'entende pas que nous nous rendions à Hanovre, là où on ne cesse d'y parler du voyage du Prince Guillaume et de son fils. Communiquez, oui lisez même ceci en propre termes à mylord HarringtonGa naar voetnoot1) et dites lui que c'est de l'aveu de la Princesse et de plénitude de coeur que j'écris ceci, sans la moindre vivacité et sans surfaire, car on ne | |
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sçauroit assez croire quelles fatales impressions toute la République a conçu des sentimens du Roi pour ma personne, et qui sont tels que ceci y mettra le comble sans que la permission de faire pour un quart d'heure la cour au Roi à son passage puisse les effacer...... | |
Prinses Anna aan Koning George II.2. (Ontwerp)Ga naar voetnoot1).La crainte d'importuner ce que l'on aime et respecte ne peut être vaincue chés moy que très difficilement, et il faut que je voye visiblement le danger que courent les intérêts du Prince, pour oser prendre la liberté de m'adresser directement à mon cher Papa. J'ai sçu toujours restraindre le désir trop naturel de me jetter à vos pieds, craignant que cela vous fut désagréable, mais apprenant que ma soeur Marie aura ce bonheur avec son Mary, je je ne puis me taire. Je ne le luy envie point, mais je ne puis m'empêcher de frémir en songeant combien par une distinction si marquée, tout l'Univers devra nous croire en disgrâce, - et quelles réflexions désavantageuses pour nous cela fera faire, surtout dans la République, pendant que j'ose répondre tant pour le Prince que pour moy qu'il est impossible d'être dans des sentimens plus respectueux, et plus soumis pour sa personne que nous le sommes. Je supplie très humblement mon cher Papa de pardonner ma hardiesse, mais mon coeur est trop sensible à ce qui me vient de sa part, pour ne pas l'ouvrir devant elle, dans la ferme persuasion qu'elle me fera toujours la justice d'être persuadé qu'entre tous ses enfans il n'y en a point qui luy soit plus sincèrement attaché et dévoué que moy. Anne. | |
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Koning George II aan Prinses Anna.3. Herrenhausen ce 11 d'aout 1740.Vous avez tort, ma chère Anne, de croire que j'aie changé de sentimens sur votre sujet, et j'aurois été charmé de vous voir icy, et de vous y embrasser, mais par raport à votre mary, la lettre impertinente qu'il a écrite lui en ferme la porte pour toujours. Comme je connois votre tendresse pour lui, je n'en dirai pas davantage, et par égard pour vous, je continuerai comme par le passé à m'intéresser à ce qui le regarde, et je tâcherai en toute occasion, ma chère Anne, de vous convaincre de la tendresse que j'ai pour vous. George R. | |
Willem IV aan Koning George II.4. (Projet).Sire,
Si jamais j'ai pris la plume à la main agité de différentes pensées qui se combattent et si jamais j'ai eu à paroitre devant votre Maj.té le coeur navré, c'est bien à présent. Je vois, Sire, que j'ai eu le malheur de vous déplaire. L'équité de V.M. m'est trop bien connue pour supposer qu'elle voudroit faire ressentir sa disgrâce à qui ne l'a pas méritée, et d'un autre côté la pureté de mes sentimens, le témoignage que ma conscience me donne, de n'avoir jamais de mon sçu manqué au respect que je dois à V.M., font que je n'en scaurois pénétrer la raison. Je ne prétends point me disculper ni disputer avec V.M. et si ma faute m'étoit connue je ne balancerai et ne tarderois point à l'avouer et à en demander pardon, et votre Majesté est trop juste et trop généreuse pour ne pas me l'accorder en ce cas. Avec ces sentimens, Sire, daigné me permettre encor de représenter à votre Majesté que je serois au désespoir qu'il y eut eu dans ma lettre à mon Conseiller Privé | |
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Von der Luhe la moindre chose qui pût chocquer ou offenser V.M., bien qu'elle n'étoit écrite qu'à lui et nullement dans l'intention qu'elle parût devant V.M. En la relisant encor actuellement je ne puis trouver que deux passages qui comme je la lui ai écrit à la hâte ont besoin de quelque explication, personne ne pouvant mienx interpréter ses pensées qu'on le peut faire soi-même. J'y dis que connoissant la façon de penser du Roi je n'ai pas été surpris de la réponce qu'il avoit eue, par où je n'ai entendu autre chose sinonque, quoique je connu la tendresse que V.M. a pour la Princesse que j'ai le bonheur d'avoir, comme aussi pour toute sa famille Royale, je n'ignorois pourtant pas que V.M. ne vouloit pas être gênée, et que peut-être ma présence le pourroit faire. Ensuite, pressé je l'avoue par les lettres que je recevois sans cesse de la République, j'ajoutois qu'au risque d'être mal receu je hasarderois le pacquet, mais cela uniquement dans la vue d'obliger d'autant plus Mylord Harrington de faire encor de très h(umbles) remontrances à V.M. et nullement dans le dessein de commettre une pareille indiscrétion, étant tres éloigné de m'exposer à encourir par une démarche si peu mesurée le mécontentement de V.M. Voilà Sire, aussi succintement que le peu de liberté de penser que m'a laissé l'abbattement où je suis, de passer dans l'esprit de V.M. pour capable d'écrire d'une façon impertinente, m'a permis de l'exprimer, l'explication de mes pensées. Si malgré cela elle y a trouvé quelque chose qui lui a déplu je proteste que ce n'a nullement été mon intention et lui en fais mes très h(umbles) excuses. Le reproche que V.M. me donne m'est trop sensible, surtout avec les sentimens que je lui porte, pour le laisser sur moi et ne pas tâcher de m'en justifier et c'est uniquement dans ce but que je prend la liberté d'adresser encor cette lettre à V.M.. Quelque soit la résolution de V.M. sur mon sujet, je n'en seré pas moins dans la suite comme je me suis fait un devoir de l'être par le passé avec tout le respect (etc.). | |
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Willem IV aan Lord Harrington.5. (Kopie). Dillenburg le 23 d'aoust 1740.My lord,
Je vous avoue que (je) fus frapé comme d'un coup de foudre lorsque je vis hier la lettre que la princesse reçut du roy où Sa Magesté lui dit que, quant à son mari, après l'impertinente lettre qu'il a écrit, la porte lui est fermée pour tout jour. Ce reproche me parut si dur et mon coeur ne me reprochant rien de son costé, je ne puis me résoudre de le laisser sur moi et c'est pour men justifier que je prens la liberté d'écrire la ci-jointe au Roy, que je prie V. Ex. de lui remettre et d'y ajouter tout ce qu'elle croira de plus cabable pour persuader Sa Majesté de l'étendue de mon respect pour son auguste personne. Il m'est très sensible de passer dans l'esprit du Roy pour être si imprudent et avoir si peu de discernement que de ne pas savoir rendre à une telle couronne ce que je lui dois, et bien plus encor à un Roy qui outre cela est mon Beau Père et à qui j'ai par conséquent tant d'obligation. La lettre que j'avois écrite à von der Luhe étoit écrite à la hâte. Je ni (n'y) parlois du peu de surprise que j'avois de la réponce qu'il avoit reçue que par ce que j'avois été tout jour d'une autre opinion que lui et que je m'étois tout jour douté que quant à moi on ne me permetteroit pas de venir à Hanover. Je lui ordonois, pressé par tants de lettres que je recevois de la République, de faire encor une tentative et de déclarer qu'au risque d'être mal reçu je hasarderois le paquet, mais cela uniquement fondé sur l'idée qu'il avoit que cette suposition pouvoit l'aider dans ces offices, et pour serer pour ainsi dire le bouton à ceux à qui on parleroit, mon intention n'ayant jamais été de faire une démarche si peu circonspecte et si étourdie qu'on la passeroit à peine à un jeun home qui ne fait que d'entrer au monde, bien moins à un home de 29 ans. Et de m'exposer à déplaire au Roy, et à | |
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être mal reçu, non mylord, mon parti étant tout pris de ne me pas rendre à Hanover, et de souffrir passivement le tort que la distinction faite au Prince Frédérick me feroit dans ma patrie, j'avois aussi résolu de renfermer dans un profond silence le chagrin que j'ai déjà depuis bien du temps de savoir qu'on prenoit plaisir à débiter toute sorte de chose sur mon compte que j'ignorois, et auroit tout jour ignoré, ne s'étant jamais passé, et bien que je sçu que mes ennemis faisoi(en)t tout pour me nuire auprès du Roi, je me tenois tranquille, assuré que l'équité du Roy et l'eficace de la vérité et de l'inocence me rendroit un jour justice. Mais à présent, que malheureusement je vois que l'esprit du Roy est actuellement préoccupé contre moi, je n'ai pu me refusser la satisfaction de me laver du blâme que sa Majesté me donne, et cela dans les termes qui ne pouront que lui faire connoistre et mon douleur et mon respect. Je suis avec toute l'estime,
De votre Ex.: | |
Prinses Anna aan Koning George II.6. (Ontwerp)Ga naar voetnoot1).Sire,
Le désir sans égale que j'ai de faire ma cour à votre Majesté m'oblige à luy en demander la permission par ces lignes, et j'ose me flatter qu'elle pardonnera la liberté que je prens, en considération des motifs qui me font agir. Je ne puis supporter l'idée d'être privée davantage du bonheur dont jouissent toutes mes soeurs, et je me trouverés heureuse pourvu que je puisse assurer votre Majesté de bouche qu'elle n'a point d'enfans qui luy soyent plus dévoués que moy. Au premier ordre je volerés à ses pieds, espérant de trouver toujours les | |
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mêmes bontés dont votre Majesté m'a autrefois comblé, et mon étude continuelle sera de luy marquer par une conduite soutenue que je suis avec la soumission et l'attachement le plus parfait. | |
VII.
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YarmouthGa naar voetnoot1) est plus jolie que belle. Mais en un mot tout ce train ne me plait guères, et je languis d'être avec mon Pip, plus que pour toute chose du monde. Dieu veuille me ramener auprès de vous au plus vite, car tout m'est insupportable sans vous....... | |
Herenhausen ce Dimanche au soir à minuit.
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sur quelque nouvelle arrivée de France. L'on n'ose pas nommer CarthagèneGa naar voetnoot1), mais il est aisé d'entrevoir que Vernon est fort blâmé et Grovestins a beau dire, je trouve notre homme tout comme je l'ai laissé, et jusques à présent tout aussy peu communicatif. Dieu veuille que ce pas de vous quitter pour tant de jours, qui me coûte tant, tourne à votre profit, mais pour le coup contés que je ne ferés plus d'ambassades pour vous dans les cours étrangères, et j'aimerois mieux être seule avec vous dans un petit recoin qu'au milieu des plus grandes fêtes et plaisirs. J'ai fait vos complimens au bon Pont, qui a paru bien sensible à votre souvenir, et j'ai vu tous les Messieurs ce matin chès moy, et cet après-dîné les dames; entre lesquelles il y a bien des racuncles (?). Demain l'on me promet une visite du Roy seul, je vous manderés demain au soir ce qui en aura été, et je conte toutes les minutes afin de pouvoir honnêtement prendre mon congé icy. Le Hérauld d'ArmesGa naar voetnoot2) n'est pas encore arrivé, et on l'attend tous les jours, le Prince Frédéric meurt d'impatience d'avoir son ruban, et enrage que le Roy ne luy en a pas parlé. Bonsoir mon coeur, je ne dors que pour raccomoder mes spirits qui sont bien pouris, et vous n'êtes jamais un moment hors de mes penseés. Me revoicy mon Ange, ce lundyGa naar voetnoot3) après avoir passée encore 24 heures détestablement. Le Roy est si occupé que je ne l'ai point encore vue seule un moment. D'ailleurs il paroit si embarassé, et si honteux de vant moy qu'il évitera, je crois, tant qu'il poura les audiences particulières. Il dit aujourdhuy à table qu'il faisoit illuminer le jardin jeudy pour me le montrer, que l'année passée cela avoit été pour la famille de Cassel, mais à présent que c'étoit pour | |
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moy. Derière mon dos il dit mille biens de moy, mais c'est incompréhensible d'ajuster cela avec la manière froide dont il me traite. AnstisGa naar voetnoot1) est arrivé, mais je croy que le ruban bleu se donnera sans grande cérémonie. Notre BenêtGa naar voetnoot2) l'est toujours beaucoup, et trouve mince approbation parmy tous les Messieurs qui le trouvent encore plus sot que l'année passée. Pour moy je n'y trouve auqu'un changement, et je répons bien qu'il n'y en aura jamais. La Princesse Marie s'ennuye fort, et n'est pas trop contente de son appartement, ce qui fait qu'elle nous pèse cruellement, et encore entre nous me paroitelle moins aimable qu'autrefois. J'ai vu Harrington, et tous les ministres Allemans tous les jours, tous les Messieurs attendant l'heure que le Roy se met à table dans mon anty-chambre, mais je n'ai encore parlée à auqu'un en particulier. MunichhausenGa naar voetnoot3) ne prévient guères ny par sa figure, ny par auqu'un côté, mais il est le tout à présent, et je luy parlerés une fois au long avant de partir; Lenthe est un très joly homme, et a beaucoup de conversation, Hauss paroit bon, mais son extérieur ne promet pas un grand génie. La grande favorite a reparu ce soir, aussy l'humeur a-t-elle été bien meilleure que hier, mais tout cela me fait enrager, et jamais je n'ai souffert un plus rude combat que celuy que me donne(nt) icy journellement mille passions différentes. Je conte toute les minutes que je passe icy comme autant de preuves, et rien ne me les feroit passer que la crainte de manquer à quelqu'un de mes devoirs. Contés fermement au moins que je ne resteré pas plus longtems qu'il ne sera nécessaire absolument, et que je vous joindrés au plustôt, ne pouvant m'imaginer qu'ilGa naar voetnoot4) vous fera encore | |
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venir, puisqu'il n'y a pas un appartement vuide dans toute la maison. Je ne mange ny ne dors, mais n'importe, je conte que la joie de vous embrasser me rendra plus gaye et folle que jamais, après que j'aurés premièrement découvert tout ce qui me mine à celuy qui est le dépositaire de toutes mes pensées, et que j'aime, et adore, bonsoir mon délicieux, et hagelGa naar voetnoot1) Pépin, je me couche, et finirés ce griffonage demain, qui sera plein de fautes, et de peaux pouris, mais vous les excuserés, sçachant combien mon pauvre esprit est en capilatade et combien je suis déplacée. SaumaiseGa naar voetnoot2) se déplait icy, autant que moy, et m'a donné cette lettre que je vous envoye, et nous languissons tous de revoir notre excellent et gracieux Maître Pépin, mais personne je croy ne peut pousser ce désir au point que je le fais, me trouvant malheureuse dans la force du terme san mon Angélique Pip. Je vais finir cette lettre, mon coeur, ce mardyGa naar voetnoot3) après diné, Grovestins m'avertissant que l'exprès est prêt à partir, et j'ai jugée qu'il valoit beaucoup mieux l'envoyer de cette manière que de courir le risque de l'exposer aux curieux. Le Roy m'a surpris ce matin dans mon profond négligé à 8 et demy. Il y a trouvé Marie, et je crois qu'il craignoit de me trouver seule, ayant passée par sa chambre. Il a été gratieux, mais ne m'a pas donné occasion de parler de la moindre chose, même l'évité d'une manière si marquée que l'on ne peut s'y tromper, et a une honte pour moy qu'il ne peut cacher. J'ai fait dire à Harrington de venir chés moy la première fois qu'il auroit du tems, et je luy parlerés brièvement mais vertement, en suite je suivrés la même methode avec les ministres Allemans, et c'est là tout ce que jusques à présent je me trouve en état de faire, n'ayant jamais rien vu de comparable à ce qui se fait icy. L'on se dit à l'oreille que le roy part au premier jour pour son camp, mais les gens qui devroient être au fait sont | |
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fort mistérieux. Le Prince Frédéric va recevoir son cordon dans une heure d'icy, tout le monde aura permission d'y être présens, mais il n'y aura auqu'une cérémonie. Il semble que le Roy se familiarise peu à peu avec votre nom, mais c'est encore d'une manière si timide qu'il ne me donne à peine le tems d'y répondre quand il me fait quelque question qui vous regarde. Surtout il parle de votre table, et me demande à tout moment si je trouve la sienne bien servie et si Cevas en est content. J'ai trop peu de familiarité avec le Monarque pour l'initier à notre petit couvert, aussy rendroit-il la compagnie un peu trop sérieuse...... Après l'installation, nous allons à la Comédie, ce soir je recommencerés une nouvelle lettre, n'ayant nul agrément que celuy de m'entretenir avec vous. | |
2. Herenhausen Ce Mecredy au Soir 12 Juillet.VendredyGa naar voetnoot1) à 4 heures de l'après diné.
La Masquerade hier a été fort jolie, et l'illumination a parfaitement réussy malgré le vent qui a été violent toute la journée et qui n'a baissé, qu'à l'heure que l'on devoit dancer. Je n'ai jamais vu un plus joly coup d'oeil que ce théâtre illuminé, et c'étoit ordonné avec goût et exécuté à merveilles. Le Roy en a paru content, et a resté au bal jusques après 3 heures, et nous nous sommes retirés d'abord après. Il y avoit, dit-on, au-delà de 500 masques. D'abord l'on a dancé beaucoup de menuets, et pour ma part du moins, j'en ai dancée 50; ensuite l'on a dancé beaucoup de contredances, et il n'y eu que le mal au piés causé par le gravier qui ait incommodé les danceurs. A onze heures on a soupé dans l'Orangerie et d'abord après l'on a dancé à nouveaux fraix. Lord Harrington a été hier chés moy, et j'ai eue une | |
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ample explication avec luy sur plusieurs choses. Je ne puis assés me louer de sa manière d'agir, et je croy pouvoir répondre qu'il est sincèrement attaché à vos intérêts, mais il donne assés à comprendre que tout le Ministère ne pense pas de même. Il m'a enfin dit le sujet du couroux qu'il y a contre vous, et je croy que vous le devineriés aussy peu facilement que moy, étant question de la dotte que vous auriés dû avoir de ce pays-cy, et quand Marie a dû se marier, il y eut quelque murmure dans ces pays de ce que l'on ne nous avoit pas donné l'argent qui leur avoit été demandé pour cet usage. Des âmes bien nées ont dit pour pallier ces désagréables bruits au Roy que vous éties l'instigateur et le bouteen-train de ce chipotage. J'ai chargé Harrington de dire au Roy de ma part que, s'il croyoit pouvoir se fier à ma parole, j'étois prête à jurer que vous n'aviés jamais eu simplement une telle pensée, et que celuy qui avoit pu dire une telle calomnie ne méritoit plus de paroitre devant luy. C'est là, à ce que m'assure Harrington, le sujet de son aigreur contre vous, et j'ai tout lieu de croire qu'il raisonne juste. Après cela jugés combien il doit avoir été irrité par cette belle histoire, puis qu'il est si aisé à voir qu'il craint la moindre explication avec moy, et toute sa bonté envers moy consiste à me parler poliment, et à me faire les honneurs qui se doivent. J'ai à présent, voyant la bizarrerie de cette conduite, prié Harrington de demander de ma part permission de partir au bout des dix jours qu'il avoit nommé à Grovestins, et s'il ne me parle seul de rien pendant que je suis encore icy, je luy ferés remettre une lettre avant de partir, où je m'expliquerés du moins un peu........ Dieu mercy mon cher Pépin, j'ai mon congé, et je pars Mecredy matin pour vous joindre, et languis extrêmement de vous revoir. Marqués moy où je vous trouverés, et soyés persuadée que je vous aime et adore. M.me de Hattorf qui m'a été d'un grand secours vous fait dire mille belle choses, et viendra nous voir chés nous.
Anne. | |
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Prinses Anna aan Koning George II.3. (Ontwerp)Ga naar voetnoot1).Comblé des grâces de votre Majesté pendant le tems que j'ai eue le bonheur de luy faire ma cour, il ne me reste d'autre chagrin en partant que celuy de craindre que le Prince soit encore en disgrâce auprès d'elle. Permettés, Sire, que je demande pardon pour luy s'il a eu le malheur de luy déplaire, et que j'ose l'assurer qu'il n'a d'autre désir que de témoigner par sa conduite l'attachement respectueux qu'il a pour V.M. C'est entre autres ce qui me le rend si cher, étant toujours avec la vénération et la soumission la plus parfaite, Sire. | |
VIII.
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caractères de ceux avec lesquels il auroit à faire, et de la situation générale. Selon moy il s'agit de faire un portrait avantageux du party que le Prince a dans la République, et de le relever, même en gasconant un peu, pour remédier aux fausses idées que les Walpoles ont tâché depuis longtems à en inspirer au Roy, de se tenir clos, et de ne faire nullement l'empressé, mais d'attendre avec beaucoup d'indifférence que d'autres s'ouvrent, et de prendre alors son tems pour témoigner combien le Prince est résolu de ne point être le jouet d'autruy, et qu'il ne donnera jamais dans auqunes mesures qu'en tant qu'elles s'accordent avec ses principes, et qu'il est trop content de la vie tranquile qu'il mène pour la vouloir changer à moins d'être persuadé qu'il peut être un instrument dans la main de Dieu pour relever sa Patrie, et pour être utile à la bonne cause, auquel cas il est toujours prêt de se sacrifier, et en faisant bien comprendre cette manière de penser du Prince, le Ministère Anglois sera persuadés qu'il n'a point besoin de leur chétive protection, ce qui les rendra doublement souples. Le Duc de NewcastleGa naar voetnoot1) est un bon diable jaloux de son ombre, mais qu'il est aisé d'avoir pour amy par des complimens et des politesses un peu distinguées. L.d CarteretGa naar voetnoot2) paroit avoir tout le crédit chés le Roy, et est un génie au dessus du commun, mais je doute que sa probité soit à toute épreuve, de sorte que ce seroit un homme gagnable; d'ailleurs avec luy il faut bien être sur ses gardes, la sincérité n'étant point sa vertu favorite, et la finesse étant son talent particulier. L.d WilmingtonGa naar voetnoot3) n'a guères à dire à ce que je crois, mais doit pourtant | |
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être ménagé. L.d HarringtonGa naar voetnoot1) est généralement reconnu pour un honnête homme, et ayant toujours paru prêt à rendre service au Prince, il mérite une attention particulière. Ce sont pour autant que j'en suis instruite ces Messieurs avec lesquels vous pouriés avoir le plus à faire. A l'égard des courtisans en général, peu de distinction dans les manières d'agir avec eux est bien le plus seure, et dépendra naturellement du plus ou du moins d'honnêtetés qui vous seront faites. Un article assés délicat est celuy qui a raport à la conduite à tenir avec la famille royale. Beaucoup de respect devant le Roy, et une grande assiduité à luy faire la cour, est bien un ingrédient, mais ce n'est pas le tout, il s'agit d'allier beaucoup de respect aussy pour le Prince et la Princesse de Galles, sans donner auqu'un ombrage au premier, et vous ne pouvrés être trop sur vos gardes avec le Prince de Galles à cet égard, ayant un don particulier pour accabler de politesses, même jusques à la bassesse, ceux qu'il voudroit rendre suspect à son père. Le meilleur donc seroit d'aller très souvent à ses heures de cour, mais d'éviter autant que possible les entretiens particuliers, ou les parties qu'il pouroit vous proposer: il seroit très bon aussy que vous vous trouviés souvent apportée de faire votre cour aux princesses, et s'il est possible que vous y soyés admis les soirs, ce seroit excellent, puisque par là vous veries peutêtre le Roy quelquefois un peu plus à la familière, ce qui pouroit donner occasion à des conversations dans lesquelles vous pouriés toujours faire glisser des choses qui ne tomberoient pas à terre. Servés-vous de SchutzGa naar voetnoot2) et de Bilderbeck pour redire à la cour ce que vous souhaités que l'on y sçache; mais évités toutes confidences, qui pouroient être dangereuses. Faites des visites de politesse à Lady Yarmouth sur le piés que chaqu'un les | |
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fait, mais selon ma manière de penser cela suffit. Sa soeur M.me de Steinberg mérite de l'attention; elle et son mary s'efforçant de marquer à toute la famille Royale un respect soutenu. Je n'ay pas besoin de vous faire souvenir de la conduite à tenir avec Lady Portland, les raisons vous étant le mieux connus pourquoy elle doit être traité d'une manière distinguée. Evités autant que possible Lord Chesterfield, qui est personellement plus en disgrâce chés le Roy que tout autre, et que l'on seroit le plus prêt à soubçonner d'intelligences avec vous par les relations qu'il a autrefois eu au PrinceGa naar voetnoot1). (Koninklijk Huisarchief, 's-Gravenhage.) |
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