Bijdragen en Mededeelingen van het Historisch Genootschap. Deel 15
(1894)– [tijdschrift] Bijdragen en Mededeelingen van het Historisch Genootschap– Gedeeltelijk auteursrechtelijk beschermd
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Sommaire de la forme du regime des provinces unies des Pays-Bas. 1647.
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en soit, l'auteur du ‘Sommaire’ connaissait certainement très-bien le gouvernement des Provinces Unies et avait dû vivre longtemps à La Haye. Pour ma part, après avoir parcouru la correspondance des envoyés français auprès des Etats-Généraux à cette époque, j'inclinerais à en attribuer la rédaction au secrétaire d'ambassade Brasset, qui était depuis près de vingt ans en Hollande, et qui y fut nommé résident en mai 1648. Mieux que tout autre, Brasset était au courant des habitudes politiques et des traditions de la république; mieux que tout autre, il se trouvait en état de composer ce mèmoire, qui peut être regardé comme un des documents les plus complets et les plus exacts, que l'on ait sur le régime intérieur de la Néerlande au milieu du 17e siècle. Des notes explicatives ont été ajoutées en marge au 18e siècle; j'ai cru bien faire de transcrire quelques unes des plus intéressantes. J'y ai ajouté en outre quelques annotations, qui serviront à l'occasion, à expliquer ou à rectifier le récit de notre auteurGa naar voetnoot1). Pour plus de détails je crois pouvoir renvoyer à mon article: ‘La République des Provinces Unies en 1630’ (Paris, Alphonse Picard et fils. 1893).
A.W.
Monsieur le Prince d'Orange est gouverneur et capitaine-général des Provinces Unies des Pays Bas et admiral-général de la mer. Chaque province lui donne la commission de son | |||||||||||||||||||||||||||||||||||||
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gouvernement particulier, excepté celle de Frise, laquelle jusqu'à présent a son gouverneur propre, le Comte Guillaume de Nassau, mais elle a consenty qu'après son décès le gouvernement passera en la personne du dit seigneur Prince. En recevant sa commission de chaque province il va sur les lieux lui faire serment de fidélité et elle luy fait un présent. Les commissions de capitaine et admiral-général lui sont expédiées sous le nom des Estats Généraux, auxquels il fait serment de ces deux charges. Elles sont signées du président, qui est en semaine, et contresignées par leur greffier. Il a séance dans l'assemblée des Etats Généraux, laquelle se tient d'ordinaire à La Haye dans l'ancien palais des comtes de Hollande, où le dit Prince a son logement aussi. Parfois cette assemblée se transfère ailleurs pour un temps selon l'exigence des affaires extraordinaires, comme en l'année 1608 elle fut à BergenopzonGa naar voetnoot1), pour estre plus proche d'Anvers, où se commença la négociation de la trève de 1609, et l'année 1629 elle se transporta à Utrecht lors de l'invasion des Impériaux et des Espagnols dans la Veluwe. Et lors de l'assemblée de Munster il fut mis en délibération de la transporter à Zutphen. Le lieu de cette assemblée à La Haye est une grande chambre, d'un costé de laquelle à main droite, approchant de la muraille, en entrant, est une longue et large table arrondie par les deux bouts, au milieu de laquelle vers la muraille le président de semaineGa naar voetnoota) | |||||||||||||||||||||||||||||||||||||
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prend sa place, et tout à l'entour de la dite table sont les députés des provinces, chacun selon son rang. La présidence commence par la duché de Gueldres, à laquelle est incorporée la comté de Zutphen, puis vient la comté de Hollande, la comté de Zeelande, les provinces d'Utrecht, Frise, Overisel et Groeningue; dans la dénomination de Hollande se comprend la Westfrise vulgairement dite NorthollandeGa naar voetnoot1). Les sept provinces président ainsi tour à tour pour garder entr'elles l'égalité dans la souveraineté, laquelle n'a point d'autre représentation que dans la dite chambre. Hors d'icelle les députez ne sont que comme personnes privées, s'ils ne sont en commission de la part de l'Estat. Chaque province y a ses députez, qui plus, qui moins, tant de la noblesse que des villes. Celle d'Utrecht garde encore l'ordre du clergé, bien que les bénéfices qui sont sous son ressort soient en mains séculières de leur religionGa naar voetnoot2). Outre les deputez ordinaires, envoyez par chaque province, les uns desquels y sont à vie, autres pour un, deux ou trois ans, elles peuvent y en envoyer d'extraordinaires selon l'importance des affaires, lesquelles finies, ces deputez extraordinaires s'en retournentGa naar voetnoota): comme en l'année 1633 que les députez | |||||||||||||||||||||||||||||||||||||
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de Brabant furent à La Haye pour traiter de la trève, il y avoit dans l'assemblée des Estats cent ou six vingt députez, pour la scéance desquels les tables furent triplées; mais quand il y en auroit vingt d'une seule province tous ne feroient qu'une voix, ce grand nombre n'estant ajouté que pour mieux examiner les affaires ou par défiance de quelque cabale ou corruption, qui est plus difficile parmi un grand nombre qu'avec peu de gens, et les voix ne se comptent que sept selon le nombre des provinces. Ces députez ont leurs commissions et instructions spéciales de leurs provinces, auxquelles ils donnent avis et information de tout ce qui se passe, y ayant pour cela un greffe, où sont les clercs de chaque province, qui copient les pièces qui leur sont envoyées. Que s'il se presente quelque affaire hors de leur commission et instruction, ils en avertissent leur province pour estre par elle authorisez de ce qu'ils auront à dire ou à faire. Il y a dans chaque provinceGa naar voetnoot1) un conseil ordinaire, estably par les Estats particuliers d'icelle, lequel voit, examine et résout les affaires autant que son pouvoir s'estend. Mais pour les choses qui sont au delà, ce conseilGa naar voetnoot2) fait convocation des Estats de sa province pour en délibérer et résoudre et envoyer leur avis provincial en l'assemblée des Estats Généraux. La noblesse et les villes députent en l'assemblée des Estats de leur provinceGa naar voetnoot3). Les villes ont leurs conseils particuliers, composés de notables bourgeois, | |||||||||||||||||||||||||||||||||||||
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qui ont passé ou peuvent passer par la magistrature de leur ville. Les provinces de Frise et Groeningue vont par pluralité de voix, lesquelles se comptent par teste, chacun estant libre d'y porter et dire son suffrageGa naar voetnoot1). Les villes de chaque province députent tour à tour en l'assemblée des Estats Généraux. Dans l'assemblée des Estats Généraux, selon l'Union d'Utrecht, l'on ne peut résoudre aucun accord, trève ou paix, entreprendre aucune guerre, mettre aucun impost ou contribution, qui touchent la généralité des provincesGa naar voetnoota); mais en autres cas, qui ne touchent point la conduite de la confédération, on se doit régler selon que les provinces en avisent par pluralité de voix. La dite Union d'Utrecht, faite en 1579, authorise bien les gouverneurs de juger des différends, qui peuvent survenir entre les provinces touchant la trève, paix, guerre ou contributions, et de prendre des gens pour en consulter et déterminer, mais cette authorisation a été fort mutilée ou éludée depuis quelque temps. Il est arrivé quelquefois, que les Estats Généraux ont esté convoqués, c'est à dire le corps d'estat de chaque province; cela néanmoins ne s'est fait que fort rarement. Il fut proposé d'en user de la sorte sur le commencement de la présente année 1647 sans effet. Monsieur le Prince d'Orange ne va en l'assemblée des Estats Généraux que pour des occasions extra- | |||||||||||||||||||||||||||||||||||||
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ordinaires. Sa scéance est au bout de la table qui est vers la cheminée, laquelle est proche de la porte par où on entre dans la chambre. On lui don ne une chaire à bras de velours verd. Celles des députez ne sont qu'à simple dossier et de drap verd, celle du président est aussi à bras, et le drap comme les autres. Quand les ambassadeurs extraordinaires des testes couronnées ou quelque prince (comme en l'ann ée 1632 le roy de Bohême, prince Palatin, traité de roy en Hollande, prenant congé pour s'en aller en Allemagne, et dernièrement l'électeur de Brandebourg) on leur donne pareillement une chaire à bras et de velours verd de l'autre costé de la table vis à vis du président. On baille aussi une chaire à bras de drap verd aux résidens et envoyez des couronnes au mesme endroict. L'assemblée commence d'ordinaire à dix heunes du matin et dure jusqu'à midy et demy, s'il ne survient des affaires qui la hastent ou la retardent d'avantage. Elle ne se tient point l'apres-disnée, si ce n'est qu'il se fasse convocation expresse pour des cas survenant. Alors le président fait avertir les députez par un des trois huissiers. Elle se convoque aussi fort souvent le Dimanche après le presche du matin et rarement après celuy du soir. Quand les députez sont dans la chambre, ce n'est point assemblée qu'ils n'ayent pris leurs places. Alors la prière se fait soit par le président ou par le greffier ou par un clerc du greffe. La prière faite, le président propose les affaires, sur lesquelles les députez de chaque province disent leur avis par ordre. Ce n'est pas qu'ils ne puissent changer ou rétracter dans la délibération et contestation, qui s'esmeut entre les provinces, jusques à la conclusion. Quand les députez d'une province trouvent diffi- | |||||||||||||||||||||||||||||||||||||
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culté sur une affaire, ils passent dans une chambre de retraite, puis ayant convenu entr'eux, ils rapportent leurs advis dans l'assemblée, ou bien s'ils ne se trouvent pas suffisamment authorisez, ils remettent d'en informer leur province ou acquiescent à la conclusion sous agréation de leurs supérieurs, pour ne point retarder une resolution qui requiert diligence, comme il se voit en divers résultats et fraischement en celui du 15 Novembre dernierGa naar voetnoot1). Encore que l'avis de M. le Prince d'Orange soit demandé, si c'est qu'il ne porte pas conclusion, sa voix n'estant pas comptée, vray est que les Estats quelquesfois y défèrent. Il déclare ou réserve son avis selon qu'il voit la constitution de l'affaire et de l'assemblée, usant en cela de prudence pour ne point prendre party ou ne se pas commettre, se réservant de mesnager les députez en particulier pour les induire par raisons ou pour tenir lieu de médiateur de leurs différends, pour lesquels il arrive quelquefois que les provinces se remettent à luy quand il ne leur est pas suspect. | |||||||||||||||||||||||||||||||||||||
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La conclusion de chaque affaire se fait par le président, et le greffier en tient note expresse pour former le résultat. Il a esté trouvé bon depuis quelques années de faire la résumption de chaque affaire, quel que ce soit, grande ou petite, le lendemain ou quelques jours après la première conclusion; alors la dite conclusion se relit, et s'il n'y arrive point de contradiction, elle passe pour définie. Cette formalité s'est introduite pour obvier à toutes cabales et surprises, car il est souvent arrivé, que pour faire passer une affaire au gré de quelques uns on donnoit des commissions à ceux que l'on doutoit devoir y estre contraires, afin de les absenter de la conclusion, ou pour voir si le greffier a bien exprimé l'intention de l'assemblée. L'affaire ayant passé par la résumption, elle est tenue pour vuidée et arrestée. Le greffier la couche dans le registre général de l'estat, et on dépesche ensuite les actes, qui sont signez du président de semaine et contresignez du greffier, en l'absence duquel un des députez des Estats contresigne avec cette addition: en l'absence du greffier. Le président signe en dessous de la dernière ligne et met au bout vt, ce qui signifie vidit, et le greffier plus bas par ordonnance des dits seigneurs Estats Généraux. A quelques actes, qui ne sont point en parchemin, il met le cachet de l'Estat en cire rouge sous un papier découpé. Il y a un autre registre particulier et secret, qu'ils appellent des notules, qui est pour les affaires d'importance et secrètes, lequel est gardé par le greffier, et duquel les députez peuvent prendre communication. Es affaires d'importance et considérables, où M. le Prince d'Orange a donné son avis, l'acte porte | |||||||||||||||||||||||||||||||||||||
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quelques fois ces termes: avec l'avis de Son Altesse le Prince d'Orange; ce qui se fait par honneur et pour rendre l'action plus solemnelle, car comme dit est, sa voix n'est point comptée. Lorsque le Prince va de son mouvement à l'assemblée, il en fait avertir. S'il y est appelé, c'est par une députation vers luy. Il y va de son appartement à pied ou en carosse selon que le temps ou sa santé le permet, l'éspée au costé, laquelle hors de l'armée ou de cérémonie il ne porte guères. Devant luy ou son carosse marchent huit hallebardiers, vestus de sa livrée, portant des hallebardes houpées. Ces hallebardiers sont comme ses gardes du corps. Outre cela il a une compagnie de gardes de quatre cents hommes de pied, laquelle est divisée en quatre escouades, l'une desquelles monte en garde chaque jour tambour battant sans drapeau ny mesche allumée. Le capitaine de cette compagnie porte titre de colonel, et dans l'armée les compagnies libres et hors de régiment se joignent à cette compagnie, et alors on l'appelle le régiment des gardes. Quand l'armée est en campagne, il ne se fait point garde au palais, sauf qu'en des saisons tumultuaires il se lève une compagnie extraordinaire, qui fait garde pour Messieurs les Estats, ce qui n'arrive pas souvent. Il y a aussi à l'armée une compagnie de cuirassiers et une de carabins pour la garde du dit Prince, leur capitaine porte aussy titre de colonel, mais ny l'un ny l'autre n'a point de traitement de colonel. Le Prince allant aux Estats, il est suivy de toute la noblesse et officiers militaires, qui se rencontrent auprès de luy. Ils l'accompagnent jusqu'à la porte de la chambre sans y entrer. Les hallebardiers l'attendent au pied du degré dans la cour sans monterplus haut. | |||||||||||||||||||||||||||||||||||||
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L'escouade, qui est en garde au palais, répartie en trois corps de garde aux trois portes d'iceluy, ne fait haye pour qui que ce soit, non pas mesme pour la deffunte Reyne mère, Reyne d'Angleterre et Reyne de BohèmeGa naar voetnoot1). Messieurs les Estats n'envoyent personne au devant de luy. Ils le saluent seulement, quand il entre et sort de leur chambre. Ils ne portent point dans l'assemblée d'autres habits que les leurs ordinaires, le manteau et chapeau de telle couleur que bon leur semble, quelques uns avec la botte. Il s'y en est vu au premier temps avec des pantoufles. Quand des ambassadeurs extraordinaires des couronnes vont à l'audience, les Estats les envoyent prendre chez eux par des députez de leur corps avec quantité de carossesGa naar voetnoota). Ils sont reconduits chez eux avec le mesme accompagnement, et le mesme se fait toutes les fois qu'ils vont à l'audience. Les ordinaires n'ont cet accompagnement qu'en leurs audiences d'entrée et de congé. Aux autres audiences, ils vont avec leurs carosses, à la descente desquels deux députez du corps des Estats les viennent recevoir et les reconduisent jusqu'au mesme endroit. Ils font recevoir les résidents des couronnes par deux députez au haut du degré proche de leur salle et reconduire jusqu'au mesme endroit, d'où les députez ne partent point que le resident n'ait descendu huit ou dix degrés et ne soit à la tournée de l'escalier. Les ambassadeurs extraordinaires et ordinaires, les résidents et envoyés de France parlent à Messieurs les Estats par Messieurs avec le titre de Seigneuries. | |||||||||||||||||||||||||||||||||||||
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Tous ceux des autres couronnes et princes les traitent de Hauts et Puissants SeigneursGa naar voetnoota), en suite du réglement, par eux fait il y a sept on huit ans, duquel la France est exceptée. Quand le président repond aux ambassadeurs des testes couronnées, il les traite d'Excellence. Les ambassadeurs entrant dans la chambre ou salle, Messieurs les Estats ne se lèvent point et quelques uns mesme n'ostent pas le chapeau. Le greffier passe du bout d'en bas de la table, où est sa place, et se met derrière la chaire du président debout et teste nue, auquel le président baille à lire tout haut les lettres de créance, baillées par les ambassadeurs. Il commence par la signature, dit la date, et puis lit la lettre, si c'est en quelque langue extraordinaire à les faire traduire. Les ambassadeurs parlent en la langue de leurs maistres ou usent de la Latine, si la leur est extraordinaire et qu'ils ne veuillent pas se servir de truchement. On leur demande d'ordinaire leur proposition par escrit, de quoy ils s'excusent s'ils veulent. Mais tandis qu'ils parlent, les députez des provinces, qui ont toujours devant chacun d'eux un encrier, plumes et papier, font des notes, lesquelles puis après ils rassemblent et souvent ont jusques aux propres termes de la proposition. Le président répond quelquefois en Latin, si la langue de l'ambassadeur ne luy est pas assez familière, ou bien remet sa présidence à un autre pour le temps de cette action. Il a esté observé autrefois que Monsieur le prince d'Orange se trouvoit aux premières audiences des ambassadeurs des couronnes, | |||||||||||||||||||||||||||||||||||||
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mais le dernier décèdéGa naar voetnoot1) a interrompu cet ordre, et néantmoins il fut obligé d'y venir pour l'audience de l'ambassadeur de Moscovie en 1647, tout incommodé qu'il estoit; cet ambassadeur ayant différé près de six semaines à la prendre, s'il n'estoit assuré de la présence de Son Altesse, disant qu'il estoit de son instruction et qu'il iroit de sa teste, s'il y manquoit, ou qu'il faudroit qu'il dépeschast vers son maistre pour recevoir là-dessus ses ordres. Quand les ambassadeurs ont des affaires d'importance à traiter, ils demandent en audience des commissaires à Messieurs les Estats, qui en députent un de chaque province, la Hollande en toute députation en ayant toujours deux. Les conférences se tiennent chez l'ambassadeur, qui ne donne point la main chez luy aux commissaires députez. Il s'est meu depuis un temps une difficulté sur ce que Messieurs les Estats prétendent que pour les affaires, qui ne sont point purement d'Estat mais quī concernent des interests particuliers, comme pour le différend, qui est entre la Compagnie des Indes Orientales de France et celle de ce pays, entre les Portugais et la Compagnie Occidentale, les ambassadeurs aillent en traiter avec leurs commissaires dans la. chambre de retraite au palais, ce que celuy de France et celuy de Portugal n'ont point voulu admettreGa naar voetnoota). Quand les commissaires vont chez les ambassadeurs, ils font rapport à l'assemblée de leurs conférences. S'il est question de faire un traité, les commissaires ont pouvoir de le conclure et signer. Il s'en fait deux ou plusieurs originaux, signez de | |||||||||||||||||||||||||||||||||||||
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part et d'autre. Les signatures des ambassadeurs sont partout les premières, et sur la mesme ligne signent pareil nombre de commissaires qu'il y a d'ambassadeurs, comme au traité de 1644 et en celuy de 1647 y ayant eu trois ambassadeurs de France au premier et deux à l'autre, puis les autres commissaires signent au dessous de leurs collégues, chacun selon l'ordre de sa province. Sur ces originaux sont dépeschées les ratifications au temps convenu, où les traitez sont insérez avec les pouvoirs réciproques. Celle de Messieurs les Estats est visée par le président de semaine et contresignée de leur greffier avec le grand sceau en cire rouge sur double cordon de soye rouge cordonnée de fil d'or. Ces ratifications se délivrent en mesme temps par eschange. Autrefois Messieurs les Estats donnoient la leur la première par déférence. Les présents, qui se font aux ambassadeurs ordinaires, sont de la valeur de quatre mil francs ou de six mil, selon le temps qu'ils y ont esté continuez en leur employ. Ceux des extraordinaires sont à proportion des affaires qu'ils ont traitées. Messieurs les Estats ont introduit de les offrir en argent pour éviter, disent-ils, le déchet qui peut arriver en l'employant à autres choses; mais si les ambassadeurs désirent, ils sont convertis en chaisnes ou bassins d'or. Ils font aussy présent aux ambassadeurs ou commissaires, qui ont conclu avec eux quelque traité d'importance. A l'arrivée des ambassadeurs, tant extraordinaires qu'ordinaires, Messieurs les Estats leur font réception et trois jours de deffray et de logement dans une maison, que l'Estat tient expressément pour cela. Si cette maison est occupée par quelque autre ambassadeur, ils en prennent une ailleurs, où les extraordinaires demeurent tout le temps de leur ambassade, le louage et reparations se faisant | |||||||||||||||||||||||||||||||||||||
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par l'EstatGa naar voetnoota). Les ordinaires ont une maison expresse, que l'Estat leur baille et paye. Tous les ambassadeurs et résidents sont exempts de toutes axises et impositions. En l'année 1633 Messieurs les Estats pretendirent abolir cette exemption, mais celuy de France s'y opposa. A l'arrivée des ambassadeurs extraordinaires et ordinaires Messieurs les Estats envoyent au devant d'eux quantité de carosses un quart de lieue hors de La Haye avec deux députez de leur corps. Autrefois Monsieur le prince d'Orange y alloit en personne et non des députez. Le dernier mort a fait rompre cette coustume. Ceux de France prétendent encore le mesme traitement, mais le deffunt s'excusoit sur ses incommoditez et celuy d'à présentGa naar voetnoot1) s'est absenté. Messieurs les Estats ont fait un reglement, par lequel ils entendent que cette réception se fist par des seigneurs du païs. Ceux de France ont estimé qu'une députation du corps de l'Estat seroit plus honorable, ces seigneurs estant sujets de l'Estat ou officiers militaires, qui sont au service et traitement de l'Estat. Lorsque les ambassadeurs extraordinaires ou ordinaires arrivent, ils font notifier leur venue. Messieurs les Estats envoyent leur maistre d'hostel à Roterdam ou Leyden, qui sont les deux avenues plus communes, avec ordre de pourvoir à leur deffray pour un ou deux repas. Ils ont voulu par le susdit régle- | |||||||||||||||||||||||||||||||||||||
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ment se dispenser de cette coustume, mais elle est entretenue par ceux de France. Quand ils sont arrivez au logis, Messieurs les Estats les envoyent saluer par les députez de chaque province, et durant le deffray de trois jours des députez de l'Estat leur vont tenir compagnie à disner et souper. Le deffray achevé, les ambassadeurs font un présent au maistre d'hostel de Messieurs les Estats et donnent une somme d'argent pour estre distribuée aux officiers, qui les ont servys. Ils font aussy un présent à celuy, qui est porteur de celuy de Messieurs les Estats, lequel accompagne les députez qui vont faire le compliment. Pour revenir à l'assemblée de Messieurs les Estats, les affaires, qui s'y traitent, sont de paix, de trève, de guerres, d'alliances, d'estat, d'ambassades, ordres et réponses aux dépesches de leurs ambassadeurs, octrois, privilèges, passeports, franchises et autres matières politiques et militaires, tant du dedans que du dehors. Quand Messieurs les Estats envoyent des ambassadeurs, outre leurs lettres de créance ils en portent aussy de Monsieur le Prince d'Orange, comme pareillement en ont pour luy en particulier les ambassadeurs, qui viennent des princes estrangers. Immédiatement après que les ambassadeurs ont eu leur première audience des Estats, ils la prennent du dit seigneur Prince. Ils luy communiquent par avance les affaires dont ils ont à traiter, pour par son moyen les préparer à une bonne négociation. Il les va recevoir à la descente du carosse et les y reconduit, sans partir que le carosse ne roule. Ils le traitent de mesme, quand il leur fait visite. Durant les trois jours de leur deffray, ils ne reçoivent guères de visites des autres ambassadeurs et | |||||||||||||||||||||||||||||||||||||
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n'en font aucune. Il est indéfini, si le Prince d'Orange les doit visiter le premierGa naar voetnoota). Il l'a fait à aucuns, à autres non. Il les traite d'Excellence et eux luy d'Altesse. Il ne reçoit les résidents que dans sa chambre, et les conduit jusque sur le pas de la porte, où il demeure jusqu'à ce qu'ils aient tourné pour se retirer. Il ne leur doune point la main chez luy et ne les visite jamais. Il ne donne point la main aux députez des Estats ny chez luy ny ailleurs. Il la quitte partout aux ambassadeurs. Si les Estats se trouvent en corps, ce qui arrive rarement, il leur cède. Quand il leur escrit, c'est en flamand, et les traite de Hauts et Puissants Seigneurs; la souscription est de trèshumble serviteur. Le deffunt a quelques fois adjousté tres-obéissant. Au Conseil d'Estat et autres colléges il met: vostre bon amy. Tous le traitent d'Altesse, depuis que la France lui a conferé ce titreGa naar voetnoot1); auparavant c'estoit d'Excellence. Les officiers de la milice du pays, finances pour le payement des troupes, fortifications, artillerie, contributions, sauvegardes, monstres, différends entre les militaires et autres choses qui dépendent de l'armée, se traitent au Conseil d'Estat. Autres fois tout le régime des Provinces Unies passoit par ce Conseil, n'y ayant point pour lors d'assemblée spéciale des Estats-Généraux, laquelle fut establie, quand les Angl is tenaient par engagement les villes de Flessingue, la Brille et Ramekens, d'autant que pour raison de ces places l'ambassadeur | |||||||||||||||||||||||||||||||||||||
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ordinaire d'Angleterre avoit scéance en ce Conseil d'Estat et conséquemment connoissance de toutes les affaires et secrets de l'Estat. Pour à quoy obvier il fut trouvé à propos de former cette assemblée, et l'ambassadeur d'Angleterre demeura dans ce Conseil jusque au temps du dégagement de ces trois places, après lequel il prétendit la continuation de la scéance, ce qui luy fut refusé, puisque l'Angleterre n'avoit plus l'intérest, qu'elle prétendoit, de connoistre et estre informée de ce qui concernoit la guerre, afin qu'elle pourvust à la seureté de ces placesGa naar voetnoota). De là vient que l'Angleterre ne tient plus d'ambassadeur ordinaire en Hollande, et n'y a qu'un résident. On y envoye des extraordinaires, afin de demeurer tousjours sur la prétention pour l'ordinaire. Messieurs les Estats disent, que la cause cessant, l'effet doit aussy cesser, et de plus que la France pourroit avec raison prétendre la mesme prérogative. Le Conseil d'Estat est composé de députez de chacune des sept provinces, qui y sont envoyez tour à tour. Ils prennent acte de Messieurs les Estats Généraux, auxquels il y a appel de ce Conseil, et dans des occasions d'importance il est appellé en leur assemblée. La présidence s'y fait aussy tour à tour avec cette différence de l'assemblée generalle, que s'il y a trois députez d'une mesme province, ils président l'un après l'autre trois semaines continuesGa naar voetnootb). | |||||||||||||||||||||||||||||||||||||
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Monsieur le Prince d'Orange est le premier de ce Conseil et après luy le gouverneur de Frise. La voix du Prince en vaut deux. Quand il y va, c'est en la mesme façon qu'aux Estats-Généraux, sauf que deux du Conseil le vont quérir jusques en sa chambre et l'y reconduisent. En chaque fin d'année vers le mois de Novembre, le conseil dresse un estat ou cahier nommé vulgairement pétition, portant les debtes et les frais, qu'il faut pour les dépenses militaires de l'année suivante. Cette pétition est portée par le Conseil en corps aux Estats-Généraux, qui l'envoyent aux provinces, afin qu'elles pourvoient aux moyens et fonds nécessaires, ce qui ne se fait pas tousjours fort réglément, aucunes demeurant en arrière ou faisant difficulté de payer des dépenses, qui vont plus au profit des unes que des autres. De là vient que la Hollande, qui est la plus opulente, avance souvent ce dont les autres demeurent en arrière, s'estant vérifié depuis peu de jours que les provinces de Zeelande et d'Utrecht luy sont redevables de cinquante tonnes d'or, qui font cinq millions de livres, une tonne d'or valant cent mil francsGa naar voetnoot1). Les autres provinces se deffendent sur ce que la Hollande, plus grande et plus maritime, a presque tout le bénéfice du commerce. Monsieur le Prince d'Orange est chef de la justice et police dans les provinces dont il est gouverneur, et les sentences, ordonnances et mandements s'y expédient sous son nom. Il a luy seul le droit de donner grâce de la vie sous enthérinement, d'accorder | |||||||||||||||||||||||||||||||||||||
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seuretés de corps, saufs-conduits, passeports personnels, et non ceux qui dispensent des droits du pays ou de l'estat, sauvegardes et autres. Tous les matins, les présidents de semaine, tant des Estats-Généraux que du Conseil d'Estat, avant que d'entrer en l'assemblée ou conseil, vont luy communiquer les plus importantes affaires, qui s'y doivent traiter. Ils en prennent son avis pour en faire rapport en l'assemblée ou conseil. Toutes les requestes et mémoires, qui s'adressent aux Estats-Généraux ou Conseil d'Estat, sont portez aux présidents de semaine, comme aussy toutes les lettres, qui sont escrites à l'Estat par les princes estrangers, si elles ne sont délivrées en audience par leurs ministres, celles des ambassadeurs de l'Estat, des provinces, des gouverneurs, officiers et autres. Ils ont droit de les ouvrir et lire avant que d'estre dans l'assemblée, si ce n'est qu'il y ait quelque consideration, qui les en retienne, comme quand il y a quelque manquement en la suscription, auquel cas elles sont rendues closes à ceux qui les ont portées, ou elles demeurent au greffe, avec ce mot que le greffier met au dessus: Jacet ou Reformetur. Cette faculté du président luy donne moyen de consulter Monsieur le Prince d'Orange sur les affaires, contenues dans les dites lettres et mémoriaux ou requestes. Le président de la Cour de justice provinciale de Hollande et Zeelande et celuy du Grand Conseil, qui sont deux jurisdictions communes entre ces deux provinces, à cause que ce sont les premières par où a commencé l'Union, vont aussy tous les matins donner avis au Prince et prendre le sien sur les affaires tant de police que de judicature, qui s'offrent importantes. IlGa naar voetnoota) est chef du corps des nobles de ces deux | |||||||||||||||||||||||||||||||||||||
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provinces. Celuy de Hollande consiste en douze ou quinze nobles, qui sont admis aux Estats de cette province par élection; quand il va dans l'assemblée de Hollande, il prend sa scéance au banc des nobles. Il est seul noble de Zeelande, comme marquis de la Vere et FlessingueGa naar voetnoot1), et donne commission à un député pour le représenter aux Estats de la province. Le corps de la noblesse en Hollande ne fait qu'une voix, là où chaque ville, qui sont au nombre de dix huit, a la sienne. Le pensionnaire ou sindie de Hollande, qui est celui qui fait la proposition des affaires dans les Estats de cette province et en prend la conclusion, les va aussy d'ordinaire communiquer au dit seigneur Prince ou devant ou durant l'assemblée, si elle ne fait députation expresse devers luy. IlGa naar voetnoot2) eslit les bourgmaistres des villes, excepté de celle de Dordrecht, laquelle est la première de Hollande et a privilège special de Charles Quint de nommer vingt quatre électeurs, six de chaque quartier des mestiers qui sont divisez en quatre parties, entre lesquels électeurs le Prince en choisit huit, qui valent douze voix pour élire le bourgmaistre, qui est seul et ne peut coucher hors de la ville durant l'année de son administration. Il a droit de faire marcher devant luy deux hallebardiers. Celles, où il a pouvoir d'élire, luy proposent certain nombre de ceux, qu'ils ont choisis propres pour estre pourvus, entre lesquels il choisit qui bon luy semble. Il nomme ou eslit en la mesme forme les prési- | |||||||||||||||||||||||||||||||||||||
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dents et conseillers des deux Cours de justice, et le pensionnaire de Hollande. Les affaires secrètes sont d'ordinaire premièrement communiquées au Prince d'Orange, pour lesquelles examiner il assume des députez de l'Estat, qui sont quelques fois authorisez de les conclure avec luy sans en faire rapport à l'assemblée, pour esviter qu'elles ne se divulguent, et le greffier de Messieurs les Estats intervenant à cette espèce de Junte, en signe et scelle les résolutions après le vidimus du chef des deputez. Mais le Prince use fort sobrement de cette authorisation, et depuis quelque temps les Estats de la province de Hollande l'ont fort restreinte, soit par jalousie ou pour se rendre plus considérables. Cette Junte se fait principalement pour les desseins de la campagne, action de l'armée et attaque de places, où le secret doit estre gardé. En cette derniere occasion il y a d'ordinaire un député de chaque province et deux de Hollande, suivant son droit d'en avoir deux en toutes députations. Quand il va en campagne, Messieurs les Estats commettent auprès de luy des députez de chaque province, avec lesquels il communique des desseins et occurences, qui s'offrent. Que si les choses sont de telle importance, que ces députez n'en puissent résoudre, il en renvoye aucuns vers Messieurs les Estats, ou bien il leur en demande d'autres, qui soient authorisez, mais son pouvoir est fort ample en campagne, estant remis a luy de faire ce qu'il jugera estre du bien et service du pays; néantmoins il en use fort modérément pour ne se pas exposer à reproches ou plaintes. Il ne déclare aux députez de l'armée ce qu'il doit entreprendre que sur le point de l'exécution. Il est bien vray, qu'avant aller en campagne il fait résoudre plusieurs desseins avec les moyens qu'il juge nécessaires pour les entreprendre, | |||||||||||||||||||||||||||||||||||||
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pour luy estre fournis par l'Estat, mais il se réserve la connoissance de celuy, auquel il se veut attacher. Que si tous luy manquent par la prévention des ennemis ou par autre accident, il a recours à nouvelles délibérations, ce qui souvent a rendu la campagne infructueuse à cause des longueurs et difficultés, qui se rencontrent dans l'Estat, soit par la crainte de despense ou par jalousie des provinces les unes envers les autres. Car d'ordinaire la Zeelande désire que l'armée agisse en Flandres à cause du bénéfice, qui peut luy arriver des conquestes voisines; la Gueldre demande que l'on agisse vers son quartier; la Hollande que ce soit sur les rivières, de l'ouverture desquelles son commerce tire avantage. Le Prince d'Orange ne fait point battre monnoye dans l'estendue des Provinces Unies. Hors cette marque de souveraineté il en a toutes les autres apparences. Chaque province la fait battre à son coing sous un mesme cours et alloy; il n'y a point de coing pour la Généralité; la monnoye, qui se bat dans les provinces, a cours dans l'Empire et partout. Chaque province a dans son ressort la disposition pleine et absolue pour la religion, justice et police et finances, sans que la Generalité s'en puisse mesler autrement que par prières, exhortations et recommandations Mais dans les pays et villes de conquestes, elle y ordonne. La Généralité dispose des gouvernements en chef, comme de Bois le Duc, Bréda, Bergenopsom, l'Escluse, Mastricht et Vesel, et a égard à la recommandation du dit seigneur Prince. Les gouvernements sont plustost commanderies, où les plus anciens officiers commandent à la garnison et non à la bourgeoisie, qui obéit à son magistrat. Et le Prince pourvoit à ces commandements. Outre les gouverneurs et places de gouvernement, il y a aussy des commandeurs, que le Prince ordonne. | |||||||||||||||||||||||||||||||||||||
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La Généralité dispose aussy des hautes charges de l'armée, comme d'un mareschal de camp général, qui est seul sans autres mareschaux de camp, du généralat de la cavallerie, lieutenant-général et commissaire-général d'icelle, du généralat de l'artillerie. Le Prince confére les régiments de cavalerie et d'infanterie, qui prennent leurs commissions de Messieurs les Estats, font le serment dans leur assemblée et non au Conseil d'Estat. Il donne toutes les compagnies, qui vaquent en campagne, et celles des nations estrangeres en tout temps. Quand à celles du pays, les provinces, sur la répartition desquelles elles sont affectées, nomment trois ou six, desquels le Prince choisit qui bon luy semble, luy donne son acte, et font le serment dans le Conseil d'Estat. Il y a un conseil de guerre près la personne du Prince, duquel il est chef. Il a son président, lequel avant de prononcer sentence va demander l'avis du Prince, qui confirme, change ou suspend les jugements, selon qu'il estime le pouvoir faire en raison et justice. Il eslit un lieutenant-admiral et un viceadmiralGa naar voetnoot1); le premier est vulgairement appelé admiral; et prennent commission de luyGa naar voetnoota). Quand ces charges vaquent, la nomination se fait par la province de Hollande de trois personnes, dont le Prince eslit qui bon luy semble. La HollandeGa naar voetnoot2) a aussy un lieutenant-admiral, pourveu de la mesme façon, mais quand celuy-cy joint son escadre à la flotteGa naar voetnoot3), il obéit à l'autre. En | |||||||||||||||||||||||||||||||||||||
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temps de campagne, il y a trente deux vaisseaux de guerre sous la direction du Prince. Tous vaisseaux de guerre, c'est à dire leurs capitaines, prennent commission du Prince, mesme ceux des Compagnies particulières des Indes Orientales et Occidentales et du Nort, qui est pour la pesche des baleines. Tous portent la bannière de l'Estat et reconnoissent son pavillon. Il y a cinq colleges d'admirautéGa naar voetnoot1), deux en Sud Hollande et deux en Nort Hollande, ou pour mieux dire un seul en cette derniere, qui est six mois a Horn et les autres six à Enkuse; les deux autres sont à Roterdam et Amsterdam. En chacun de ces quatre préside un noble de HollandeGa naar voetnoot2). Les députez sont de chaque province. La cinquiesme est en Zeelande et se tient à Midelbourg. Celuy qui représente le Prince d'Orange, comme seul noble en cette province, préside en ce collège. L'assemblée des Estats-Généraux n'a pas pouvoir de leur commander ny ordonner. Elle prie et recommande seulement. Ces colléges disposent des deniers, provenant des impositions pour les convois et licentes ou traites foraines. Ces impositions se mettent par le consentement unanime de toutes les provinces, et s'en fait une liste imprimée où chacun trouve ce qu'il doit payer. Le convoy est un droit, qui se paye pour les vaisseaux de guerre, qui escortent les marchands et assurent la mer. Il se fait des armements et equipages de vaisseaux particuliers, que l'on nomme les uns croiseurs, | |||||||||||||||||||||||||||||||||||||
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parcequ'ils doivent incessamment croiser la mer pour attaquer et prendre ceux des ennemis, et pour cet effet l'Estat leur accorde certains droits et récompenses, les autres aventuriers, qui vont busquer fortune sur la mer; à ceux cy l'Estat laisse seulement les prises qu'ils font, son droit réservé. Tous prennent commission du Prince et la bannière de l'Estat; mais ces deux espèces le plus souvent se comportent plustost en forbans qu'autrement, et causent souvent de grandes plaintes et dommages aux marchands. C'est pourquoy leurs commissions sont de fois à autres révoquées. La répartition des contributions des Provinces Unies est telle, que de cent livres
Les moyens pour trouver le fonds de la cotteportion s'establissent par chaque province dans son ressort; cela va principalement sur les consomptions, impositions sur les maisons, quelquesfois sur chaque teste, sur le cent ou deux centiesme denier de la valeur des biens d'un chacun, ce qui ne dure qu'à temps, sur les terres, bétail et autres espèces, selon que la province trouve plus facile et a là moindre foule. Le Prince a traitement de gouverneur, que chaque province luy paye à part, qui plus qui moins. | |||||||||||||||||||||||||||||||||||||
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Lorsqu'il est en campagne, outre le traitement de capitaine-général, les Estats luy donnent une ajude de costeGa naar voetnoot1) pour son plat, tantost plus tantost moins. Le plus, qu'elle ait monté, a esté jusqu'à 38 mil florins. Il a son droit d'admiral-général de la mer du dixiesme de toutes les prises. |
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