Het Belfort. Jaargang 7
(1892)– [tijdschrift] Belfort, Het– Gedeeltelijk auteursrechtelijk beschermd
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Latijnsche uitspraak.Het is verwonderlijk hoe, sedert weinige jaren, de verfranschte uitspraak van het Latijn bij de Fransche schrijvers zelven hevige tegenstrevers vindt:
Zoo schrijft Darras (Histoire générale de l'Eglise, tome 17, p. 483-484): ‘Nous avons dit que Charlemagne comprenait le grec, mais qu'il le prononçait mal. Aujourd'hui après mille ans révolus, la France du 19e siècle en est encore là. On peut en dire autant du latin, que nous nous sommes, par une bizarrerie inexplicable, obstinés à travestir dans une prononciation particulière qui n'a d'autre mérite que d'être la nôtre, et le rend sur nos lèvres inintelligible à tous les autres peuples...’
Dom Joseph Pothier (Les Mélodies grégoriennes, Tournay, 1881, p. 106) spreekt in denzelfden zin, wanneer hij de gelegenheid waarneemt
... ‘de dire un mot des divergences que présente la prononciation du latin chez les différents peuples. Ces divergences sont telles que deux interlocuteurs se parlant latin, mais chacun avec sa prononciation, ont peine à se comprendre, quand encore ils y parviennent. Ces manières diverses de prononcer une même langue tiennent aux habitudes différentes prises dans la langue maternelle, et dépendent peut-être aussi de la conformation des organes vocaux. Ce serait donc une entreprise difficile à réaliser, sinon impossible, que de vouloir arriver sous ce rapport à une parfaite uniformité. Il est cependant certaines règles de prononciation | |
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plus importantes, qu'il serait possible et facile à observer partout, et que l'on nous permettra de signaler à l'attention des maîtres de lecture et de chant. 1. Il faudrait d'abord, ce nous semble, poser en principes qu'en latin toutes les voyelles aussi bien que toutes les consonnes doivent être prononcées. Cette règle est, il est vrai, formulée dans toutes les grammaires; mais il est de fait qu'elle n'est pas observée partout avec toutes ses conséquences. Ainsi le mot latin constantia est prononcée chez nous comme son dérivé français constance, dans lequel l'articulation de la lettre n ne se retrouve plus représenté que par le son nasal donné à la voyelle. Le latin demande que dans constantia, on soit prononcé comme dans connexio, et an comme dans pannus; que l'on dise par conséquent aussi in'ten'de, en donnant aux voyelles i et e le ton pur qu'elles ont dans in terra.... 2. Les Italiens et en général, comme l'on sait, tous les peuples, hormis les Français et quelques uns de leurs voisins, donnent à la voyelle u le son de l'ou français. Ici encore il serait à désirer que cette prononciation pût devenir universelle.... 3. Les diphthongues que nous exprimons en français comme une voyelle simple, doivent être en latin proférées comme deux voyelles, mais d'une seule émission de voix. Ainsi en français autel se prononce comme s'il y avait ôtel, mais en latin autem se prononce aoutem, en ouvrant la bouche sur a et en la fermant sur ou par un seul mouvement. Si nous insistons sur ces détails, c'est aussi parce qu'ils sont nécessaires pour l'intelligence des anciens neumes, dont plusieurs particularités ne peuvent s'expliquer qu'en supposant le latin prononcé à la manière italienne, c'est-à-dire, après tout, à la manière latine....Ga naar voetnoot(1) 4. L'accentuation est dans le langage la règle des règles; et tout ce que l'on pourrait dire sur la prononciation latine ne serait d'aucun avantage pour rendre un texte intelligible, si l'on négligeait la règle de l'accent. L'accent ne sert pas seulement à donner à la récitation | |
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plus de vie et de mouvement, en variant le ton et la force des syllabes: il y a une raison d'être plus intimement et plus essentiellement liée aux lois naturelles du langage: son but est de fondre en un tout vivant les éléments du mot, en même temps que d'aider l'oreille à distinguer les uns des autres les mots dont se compose le discours..... Dans une accentuation régulière, chaque mot est produit par une impulsion unique, qui commence avec la première syllabe du mot, atteint le point culminant de sa force sur la syllabe principale, appelée pour cela syllabe accentuée, et vient expirer pour ainsi dire sur la fin du mot. Jusqu'à ce que la syllabe accentuée soit prononcée, la voix semble monter, elle retombe ensuite sur les dernières syllabes du mot, et s'y repose un instant avant de prendre un nouvel essor..... En latin, dans le latin tel que le parlaient nos pères et tel que nous devrions encore le prononcer, si grande était la force de l'accent tonique, que nous voyons la syllabe affectée de l'accent dans chaque mot conserver dans les langues dérivées sa prépondérance native, et résister ferme et intacte au courant destructeur qui, dans la transformation du langage, attaque et souvent emporte les autres syllabes... Nos pères avec bónus ou bónum n'auraient pas fait bon, avec presbyter, prêtre (presb'tre, prestre, prêtre); avec anima, âme (ánima, an'ma, âme); s'ils avaient prononcé, ainsi qu'on l'enseigne et qu'on le pratique trop souvent, sous prétexte de prosodie, bonum comme le mot français bonhomme; presbytér, comme presbytère; animá comme dans il anima.’
Emile Burnouf (Revue des Deux-Mondes, sept. 1886): ‘Si nous rendions à la langue latine l'accent et la quantité dans notre enseignement, nos éèves, à la fin de leurs classes, se trouveraient savoir, en grande partie, l'italien et l'espagnol, langues parfaitement vivantes et presque latines. En outre, leur oreille serait accoutumée de bonne heure aux intonations musicales; ils seraient tout près de comprendre les belles mélodies cachées sous le plain-chant...’
Arthur Loth schreef onlangs (in Juni l.l.) in L'Univers: | |
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‘Le prochain siècle s'occupera d'établir une langue universelle. Déjà la terre unifiée par les chemins de fer et les télégraphes appelle un idiome international. Quand sera résolu le problème des ballons dirigeables, un nouvel élément d'unification s'ajoutera aux inventions de ce siècle. Que deviendra la terre avec la navigation aérienne? Il n'y aura plus de frontières ni de patries. Avec les ballons dirigeables et les formidables instruments de destruction que l'homme possède déjà, toutes les conditions des Etats, des nationalitées, du commerce, de la paix et de la guerre seront changées. C'est alors que l'on voudra une langue commune au genre humain, pour que les divers peuples rapprochés par les inventions de la science puissent communiquer directement entre eux... La langue dogmatique et liturgique d'une religion doit être une langue morte, sous peine de varier... Même au milieu des évolutions de l'avenir, le latin peut prétendre à rester une langue générale, comprise et parlée par l'élite de l'humanité... Les prêtres, les savants de toutes les parties de la terre continueront à s'entendre dans cette langue... Tant qu'il sera la langue de l'Eglise, le latin vivra. La France devrait le rapprendre. Elle s'est fait un latin à elle qui n'est pas celui des autres nations catholiques. Au concile du Vatican, on ne l'entendait pas et elle n'entendait pas non plus. Un sot amour-propre national ne doit pas faire croire qu'on a raison contre la pratique communne. Les documents littéraires et épigraphiques prouvent que la meilleure tradition du parler latin est en ItalieGa naar voetnoot(1). Au dernier congrès des sociétés savantes de la Sorbonne, on a posé la question de la réforme de la prononciation latine. Dans nos collèges, dans nos séminaires, dans nos églises, partout, on a oublié depuis longtemps que le latin est une langue essentiellement accentuée. Les autres peuples ne comprennent rien à notre manière de prononcer sans accent. Faute de faire entendre les syllabes toniques, les mots latins dans notre bouche deviennent méconnaissables. Notre prononciation toute française des consonnes et des | |
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voyelles achève de dénaturer la vieille langue de Cicéron. Puisque l'Eglise a adopté le latin, il faut le parler comme elle le parle à peu près partout à son imitation. L'uniformité de prononciation est nécessaire pour lui conserver son caractère de langue universelle. C'est à la France de se réformer. L'exemple devrait venir de nos maisons ecclésiastiques d'éducation.’
Musica sacra (p. 107, 1892) neemt bovenstaanden artikel van den Franschman Arthur Loth over, en voegt er bij: ‘Dans la pensée de l'auteur, ces observations s'adressent à ses compatriotes, mais elles peuvent tout aussi justement nous être appliquées, à nous qui, comme nos voisins, avons la détestable et funeste habitude de relever et de renforcer toujours, dans la lecture, la dernière syllabe des mots.’
Musica sacra vergeet ‘notre prononciation toute française des consonnes et des voyelles’. Andere Fransche schrijvers gaan het voor haar zeggen: In Nouvelle méthode pour apprendre facilement la langue latine... Paris, 1709 (zonder naam van den schrijver), lezen wij bl. 647: ‘G retenait toujours sa même prononciation. Car au lieu que nous l'avons beaucoup amollie devant l'e et devant l'i, le prononçant dans Regis et dans Rege de même qu'en Français dans Regent et dans Regir: eux au contraire le faisaient sonner partout comme dans Rego.’
J.L. Burnouf (Méthode pour étudier la langue latine. Bruxelles, 1845). Bl. 2 (in nota): ‘Chez les Romains, C et G étaient durs devant toutes les voyelles, et ce, ci se prononçaient ké, kiGa naar voetnoot(1)s. De même on donnait à ge, gi le son que nous donnons à gué, gui dans guérir, guider.’
Bl. 3: ‘Les Romains n'avaient pas, pour la consonne J, d'autre | |
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signe que la voyelle I; le mot major (plus grand) s'écrivait et se prononçait maior.’
De la prononciation du grec et du latin. Bruxelles, 1840 (zonder naam van den schrijver; maar in de Koninklijke Bibliotheek van Brussel, waar ik het werk raadpleegde, staat er op het afdruksel in potlood bijgeschreven: par Loumyer). Bl. 1: ‘Il n'y a guère de différence entre l'articulation du gamma et du kappa. Ainsi gamma ne peut se prononcer comme le j français; car alors je ne puis imaginer le moindre rapprochement entre cette lettre et le k. La même analogie entre les deux lettres existe en latin. La conclusion doit donc être la même.’
J.H.R. Prompsault (Traité des lettres, de l'orthographe et de l'accentuation. Paris, 1842). Bl. 126: ‘Les Romains prononçaient legio, legere de même que s'ils avaient écrit leghio, leghere.’
Chavée (Essai d'étymologie philosophique ou Recherches sur l'origine et les variations des mots qui expriment les actes intellectuels et moraux. Bruxelles 1843). Bl. 12: ‘G ne peint que le son g (gue)... Vous savez assez comment les langues romanes et germaniques vous altèrent le g devant les voyelles e et i. Les français en font j et s; les italiens les défigurent moins dans j et c (dj et tch); les allemands convertissent c en ts...’
Na van eenige andere veranderingen in de uitspraak gesproken te hebben, besluit hij: ‘Ces quelques données suffisent à rectifier les principaux abus que les modernes ont introduits dans la prononciation du latin. Convaincu de l'importance de cette réforme, nous la demandons de tous nos voeux...’
P. Burggraff (Principes de grammaire générale. Liège, 1863): ‘Les Grecs prononçaient devant toutes les voyelles leur consonne cappa comme un k; de même les Romains, tant qu'a duré l'empire d'Occident, paraissent avoir prononcé leur consonne c devant toutes les voyelles comme un k; ci | |
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était donc pour eux une articulation gutturale, qui s'est changée dans les langues néo-latines en articulation linguodentale, comme dans d'autres mots les gutturales j et c, γ et χ ont été remplacées par nos chuchotantes j et ch.’
J.M. Guardia et J. Wierzeyski (Grammaire de la langue latine. Paris, 1876Ga naar voetnoot(1)). Bl. 7: ‘I avait le son de l'y des modernes au commencement des mots, au milieu des mots entre une consonne et une voyelle: iudico, ab-iudico, ad-iungo, e-iuro, e-iectus. Les grammairiens l'appellent i consonne par opposition à i voyelle... Après l'époque classique, dans le latin populaire, le j commença à se prononcer avec le son de la sifflante douce: Zanuari, Ζουλιαε, Ζϵσυ. Cette prononciation était générale dès le commencement du sixième siècle après J.-C.... L'i peut servir sans inconvénient à deux fins dans l'écritureGa naar voetnoot(2).’
Bl. 11: ‘G n'est qu'une modification du c, et représente la gutturale douce. La prononciation du g était plus forte devant les voyelles a, o, u, et les consonnes, que devant e et i. Devant ces deux voyelles, le g eut plus tard dans le latin populaire le son de j, et, dans les langues romanes, un son sifflant palatal.’
Georges Edon (Ecriture et prononciation du latin savant et du latin populaire. Paris, 1882). Bl. 48: ‘G se prononçait comme le g français dans gamme, godet, goût, guerre, guide. Quant au son chuintant de notre g devant e, i, comme dans les mots géant, givre, rien n'indique qu'il ait été en usage chez les Romains.’
Bl. 50: ‘Quelle était la prononciation du j? Avait-il le son chuintant du j français? Evidemment non.’ | |
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Martin Schweisthal (Essai sur la valeur phonétique de l'alphabet latin, principalement d'après les grammairiens de l'Epoque impériale. Paris, 1882). Bl. 18: ‘Iconsonne se prononçait comme le j allemand moderne.’ Bl. 87: ‘Les gutturales sont au nombre de quatre, c, g, q et k... Les faits admis par les savants modernes concordent complètement avec ceux donnés par les anciens, et il y a lieu d'en conclure à l'identité du g et du c latins avec le g et le k modernes...’
Bl. 99: ‘G est la gutturale sonore qui correspond à la sourde c, de même que gu correspond à qu.’
('t Gaat voort.) Jan Bols. |
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