Oeuvres complètes. Tome XX. Musique et mathématique
(1940)–Christiaan Huygens– Auteursrecht onbekend
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Huygens à l'Académie Royale des sciences.
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AvertissementDans son ‘Harmonie Universelle’ de 1636 Mersenne ne s'était pas servi de logarithmes; il est permis de croire que, malgré l'étendue de ses connaissancesGa naar voetnoot1), cette branche des mathématiques - n'en fut-il pas de même pour Descartes?Ga naar voetnoot2) - lui était restée étrangèreGa naar voetnoot3). Toutefois il ne mourut pas avant d'avoir fait leur connaissance, d'ailleurs apparemment fort superficielle. Dans un ‘Monitum’ de l'‘Universae Geometriae mixtaeque Mathematicae Synopsis’ faisant partie des ‘Cogitata physicomathematica’ de 1644Ga naar voetnoot4) il mentionne ‘Gellibrandus, post Neperum & Briggium’ disant: ‘Qui serio Trigonometriae suam operam dare voluerit, adeat Gellibrandi Britannicam TrigonometriamGa naar voetnoot5), etc’; et dans une lettre du 2 mai 1648 à Chr. | |
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HuygensGa naar voetnoot6) il parle, à propos de Grégoire de St. VincentGa naar voetnoot7), d'‘un probleme [que celui-ci “supose”] plus difficile que celuy de la quadrature lequel il ne resoût point, ascauoir Estant données trois grandeurs rationelles, ou irrationelles et deux de leurs logarithmes estant aussi donnez, trouuer Geometriquement le logarithme de la troisiesme’. Il n'est évidemment pas question ici - Mersenne ne donne aucune définition du logarithme - de ce que nous entendons aujourd'hui par ce mot. Si l'on appelle logarithme du nombre n le nombre l défini par l'équation bl = n, il est manifeste que lorsqu'on donne un seul nombre et son logarithme, la base bGa naar voetnoot8) est déterminée; de sorte qu'on peut alors calculer le logarithme correspondant d'un nombre quelconque. Mais si l'on donne arbitrairement encore un deuxième nombre et son logarithme, ces données correspondront en général à une deuxième base, et l'on ne peut alors raisonnablement demander quel sera, d'après les données du problème, le logarithme d'un troisième nombre. Cette objection subsiste lorsqu'on définit le logarithme d'un rapport A - voyez la définition de Briggs et de MercatorGa naar voetnoot9) - comme le nombre N, c.à.d., par opposition à l'exposant de la première définition, le nombre entier N des ‘ratiunculae’ (la ‘ratiuncula’ étant un rapport fort peu supérieur à 1/1) comprises dans ce rapport A: un premier nombre donné (ou plutôt le rapport A de ce nombre à l'unité) et son logarithme définissent (à une petite incertitude près) la grandeur de la ‘ratiuncula’, et si l'on donne arbitrairement encore un deuxième nombre et son logarithme, il en résultera en général une ‘ratiuncula’ fort différente, de sorte qu'on ne pourra conclure logiquement au nombre des ‘ratiunculae’ correspondant à un troisième nombre. Dans le cas du problème de Mersenne il faut apparemment se figurer (comparez l'écrit de de Sarasa, cité plus loin) deux séries de grandeurs représentées par des lignes droites (Euclide, Grégoire de St. Vincent), dont l'une constitue une série géométrique, l'autre une série arithmétique. Qu'on établisse ensuite une correspondance entre le n-ième terme de la première et le m-ième terme de la deuxième série, | |
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de même entre le p-ième de la première et le q-ième de la deuxième (on peut pendre p - n = q - m), appelant ‘nombres’ ou ‘grandeurs’ les termes de la série géométrique et ‘logarithmes’ les termes correspondants de la série arithmétique; alors on peut raisonnablement demander à quoi correspond soit le r-ière terme de la série géométrique, soit aussi (Sarasa) une longueur intermédiaire entre ce terme et le suivant. La solution exige en général une interpolation: l'on n'obtiendra en général qu'une solution approchée. Or, pareille solution approchée peut, tout aussi bien qu'une quadrature approchée, être considérée (c'est sur cela, nous semble-t-il, que Mersenne veut fixer l'attention) comme n'en étant pas uneGa naar voetnoot10). Pareil problème n'avait d'ailleurs pas été ‘supposé’ par Grégoire. Le mot ‘logarithme’ ne se trouve pas dans l'‘Opus Geometricum’Ga naar voetnoot11). Mersenne a cru pouvoir formuler à sa manière un problème équivalent à un (?) de ceux de l'oeuvre de Grégoire, mais il ne dit pas lequel et sa trop brève remarque demeure énigmatiqueGa naar voetnoot12). Il avait d'ailleurs déjà formulé dans les mêmes termes cette remarque, ou plutôt cette critique, un an plus tôt, en 1647, dans une page de son ‘Novarum Observationum Physicomathematicorum Tomus III’Ga naar voetnoot13). En septembre 1650 F. van Schooten attira l'attention de Huygens sur cette page de Mersenne quoique sans mentionner les logarithmesGa naar voetnoot14). Une lettre de Huygens à Grégoire de novembre 1651Ga naar voetnoot15) nous apprend qu'il avait fait connaissance avec le livre de A.A. de Sarasa de 1649 intitulé: | |
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‘Solutio Problematis a R.P. Marino Mersenno Minimo propositi datis tribus quibuscunque magnitudinibus, rationalibus vel irrationalibus, datisque duarum ex illis Logarithmis tertiae Logarithmum Geometricè inuenireGa naar voetnoot16), etc.’ Huygens n'approuvait point les quadratures de Grégoire: son Ἐξέτασις de décembre de la même année 1651Ga naar voetnoot17) était déjà prête en septembreGa naar voetnoot18); néanmoins il parle dans sa lettre de novembre du ‘[liber] · Patris A. de Sarasa, qui te feliciter à Mersenni censura vindicavit’. Comme il n'est aucunement question de logarithmes dans l' Ἐξέτασις ni par conséquent d'une interprétation de la critique si vague de Mersenne il ne semble pas permis de conclure qu'en ce temps Huygens avait déjà considéré avec quelqu'attention la théorie des logarithmes. D'ailleurs - soit dit en passant - nous n'avons pas trouvé qu'il en ait jamais donné une définition netteGa naar voetnoot19). La lettre de Wallis d'août 1656Ga naar voetnoot20) ne paraît pas non plus l'avoir amené à s'occuper de la théorie ou de la pratique des logarithmes; dans sa réponse de septembreGa naar voetnoot21) il dit que pour des raisons de santé ‘a tempore aliquo prorsus perfunctorie in studijs hisce [les études des sciences mathématiques] versor’. Rien, nous semble-t-il, ne nous empêche de croire que 1661 est bien l'année où il commença à se servir du calcul des logarithmesGa naar voetnoot22) et que ce fut, comme il le dit, | |
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une question de musique, la considération de la περιϰύϰλωσιςGa naar voetnoot23) exigeant l'interpolation d'un nombre quelconque de termes en progression géométrique entre deux grandeurs données, qui l'y amena. C'est donc aussi de 1661, pensons-nous, que date la Pièce qui constitue le § 7 de notre Appendice I à la p. 294, où il s'agit de la même interpolation, non pas, il est vrai, entre deux cordes correspondant à deux tons musicaux, mais entre deux capitaux dont le premier doit s'accroître par des intérêts composés jusqu'à atteindre le montant du deuxième. Il est vrai que cette dernière application n'a nullement, comme la précédente, le mérite de l'originalité: Huygens connaissait au moins depuis 1652Ga naar voetnoot24) le ‘Cours mathematique’ de P. Hérigone qui, en traitant des logarithmes dans son troisième volume, consacre huit pages à la considération de problèmes concernant l'accroissement de capitaux ‘auec les interests des interests’Ga naar voetnoot25).
On pourrait objecter que nous avons dit ailleursGa naar voetnoot26) qu'‘on trouve dans le Manuscrit A et dans les Chartae astronomicae plusieurs calculs logarithmiques [sur les couronnes et parhélies, traité achevé vers la fin de 1662Ga naar voetnoot27)]’; que les feuilles des Chartae astronomicae, il est vrai, ne sont pas datées; mais que, dans le cas du Manuscrit A, il s'agit de feuillets découpés qui y faisaient, selon nous, suite à la p. 242Ga naar voetnoot28) et que cette page et les suivantes, et par conséquent aussi les feuillets enlevés, datent probablement d'avant 1661, plus précisément de 1660Ga naar voetnoot29). Toutefois, en consultant le T. XVII on peut constater que ce que nous disions n'est pas absolument correct: les feuillets provenant du Manuscrit A sont, par opposition aux autres feuilles des Chartae astronomicae dont il est ici question, des feuillets qui ne contiennent pas de calculs logarithmiquesGa naar voetnoot30). Par conséquent, ces calculs sur les couronnes et parhélies corroborent notre thèse, bien loin de l'infirmer. Ce qui rend aussi plus ou moins probable que les calculs de Huygens sur les intérêts | |
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composés ne soient pas antérieurs à 1661Ga naar voetnoot31) c'est que, d'après les données de la note 1 de la p. 291 qui suit, ces calculs ne sont en tout cas pas antérieurs à octobre 1658, qu'ils ne datent donc pas d'une des premières années après l'acquisition (?), en 1652 ou plus tôt (?), du Cours d'HérigoneGa naar voetnoot32). Autre argument: les calculs de Huygens sur les intérêts composés sont rédigés en flamand (ou, si l'on veut, en néerlandais); or, il en est de même pour les petites Tables de Vlacq, contenant des problèmes sur ce sujet (note 5 de la p. 456 qui suit), qui parurent à la Haye en 1661.
On pourrait dire aussi que déjà en 1652 - neuf ans avant la rédaction de la Pièce qui occupe les p. 460-471 du T. XIV - Huygens trace une courbe qui n'est autre que la logarithmiqueGa naar voetnoot33). Mais ici - quoique connaissant le Cours d'Hérigone - il ne parle pas encore de logarithmes. Comme dans le cas de la Fig. 24 de la p. 291 qui suit, il s'agit apparemmentGa naar voetnoot34) d'une représentation graphique des termes d'une série géométrique par des droites ordonnées éloignées l'une de l'autre à des distances a toujours égales entr'ellesGa naar voetnoot35); or, suivant Huygens, les ‘linearum proportiones’Ga naar voetnoot36) d'une courbe convenable - d'une courbe, peut-on dire, qui exprime une loi; comparez la Pièce de Huygens de 1646 ‘de motu naturaliter accelerato’, où il critique LobkowitzGa naar voetnoot37) - doivent jouir des mêmes propriétés quelle que soit l'unité des distances a (dans sa lettre suivante du 7 janvier 1653 à van Schooten Huygens parle de leur ‘magnitudo arbitraria’); par conséquent parmi les courbes passant par les extrémités des ordonnées considérées une seule, selon lui, est bonne: c'est celle qu'il trace. À la p. 27 du T. XIV nousGa naar voetnoot38) disions déjà - mais sans discuter la date probable des calculs sur les capitaux placés à intérêts composés - qu'avant 1661 on ne trouve pas de calculs logarithmiques dans les manuscrits de Huygens. | |
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NousGa naar voetnoot38) ajoutions: ‘tandis qu'alors ce calcul est approché par lui du côté géométrique en connection avec la quadrature de l'hyperbole’. Voyez toutefois l'Addition à la p. 555 du T. XIV, Malgré la remarque de 1647 de Mersenne dont nous parlions plus haut, et qui aurait pu amener Huygens déjà en cette année à s'occuper des logarithmes en connexion avec le problème des quadratures, il n'y a pas de raison pour attribuer la priorité à ce calcul-là contrairement à ce que Huygens dit luimêmeGa naar voetnoot39). On pourrait certes être en doute en regardant la feuille séparée 11 du portef. ‘Musica’: un côté de cette feuille - non numérotée par Huygens - se rapporte au problème musical de l'interpolationGa naar voetnoot40), l'autre (Appendice II à la p. 295) à sa règle (Pièce I qui suit) sur le calcul des logarithmes basé sur la quadrature approchée de l'hyperbole. Impossible de dire, en regardant cette feuille, quel est le texte le plus ancien. Mais dans le Manuscrit BGa naar voetnoot41) la chose est plus claire: ses premières pages contiennent des calculs brouillonnés sur le problème musical; les brouillons sur l'hyperbole etc. n'y commencent qu'à la p. 5. C'est par ces calculs de la p. 5 et suiv. que Huygens trouva sa règle qu'il rédigea ensuite aux p. 18 et suiv. sous le titre ‘Fundamentum regulae nostrae ad inveniendos logarithmosGa naar voetnoot42)’. Sans doute, quoiqu'il n'en dise rien en cet endroitGa naar voetnoot43), il s'est souvenu en entreprenant les calculs des p. 5 et suiv. que dès 1647 il avait été question de logarithmes en connexion avec l'‘Opus Geometricum’ de Grégoire de cette année. Mais nous ne pouvons souscrire entièrement à ce que l'exposé suivant de Ch. Hutton dans la partie ‘Construction of logarithms’ de son ‘Introduction’ à la Collection des ‘Scriptores logarithmici’ par Fr. MaseresGa naar voetnoot44) dit à propos de Mersenne: ‘As to the first remarks on the analogy between logarithms and the hyperbolic spaces, it having been shewn by Gregory St. Vincent, in his Quadratura Circuli & Sectionum ConiGa naar voetnoot45), published at Antwerp in 1647, that if one asymptote be divided into parts in geometrical progression, and from the points of division ordinates be drawn parallel to | |
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the other asymptote, they will divide the space between the asymptote and curve into equal portionsGa naar voetnoot46); from hence it was shewn by Mersennus, that by taking the continual sums of those parts, there would be obtained areas in arithmetical progression, adapted to abscisses in geometrical progression, and which therefore were analogous to a system of logarithms. And the same analogy was remarked and illustrated soon after by Huygens, and many others, who shew how to square the hyperbolic spaces by means of logarithms’. Nous ne voyons pas que les paroles de 1647 de Mersenne, qui rapporte des propos d'autruiGa naar voetnoot47), impliquent la connaissance de la proposition que Hutton lui attribue et qui est en réalité la Prop. III (ou plutôt le corollaire de cette proposition) de 1649 de de SarasaGa naar voetnoot48). Pour éviter tout malentendu nous ajoutons que le passage cité de Hutton ne se rapporte pas à la règle de Huygens pour calculer les logarithmes, basée e.a. sur la considération d'un segment d'hyperbole (comme on peut le voir au T. XIV) et que ni Hutton ni Maseres n'ont connue; voyez sur les considérations de Huygens qui s'y rattachent sur la quadrature de l'hyperbole par les logarithmes, ce qui est le sujet dont parle Hutton, les p. 474 et suiv. du T. XIV (pages manuscrites également inconnues à Hutton et Maseres), ou plutôt la p. 221 du T. XVIII appartenant à l'‘Horologium oscillatorium’ universellement connu au dix-huitième comme au dix-septième siècle. Nous disons encore quelques mots plus loinGa naar voetnoot49) sur la logarithmique, qui fut considérée de nouveau (nous voulons dire, après 1661) par Huygens en 1668, donc à Paris, comme on l'a vu au T. XIXGa naar voetnoot50).
Le texte des treize Communications de Huygens à l'Académie qui suivent, dont celle sur la règle pour trouver les logarithmes est la première, est emprunté en majeure partie aux Registres de l'Académie conservés à ParisGa naar voetnoot51), mais en tenant compte, lorsqu'il y a lieu, des pièces de la collection-Huygens à LeidenGa naar voetnoot52). Ceci s'applique aux Pièces I, II, III, IV, VII, X et XIII. Les Pièces V et VI ne çonsistent qu'en quelques lignes indiquant les sujets traités par Huygens d'après les Registres; pour la Pièce VI ce sont surtout les | |
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Appendices, empruntés aux manuscrits de Leiden, qu'il faut consulter. Il en est de même pour la Pièce XII; sauf que nous empruntons ici quelques lignes au Manuscrit E, non pas dans un Appendice, mais dans la Pièce elle-même. Exceptionnellement nous avons ajouté à cette Pièce 1680 un Appendice datant, quoique peu, d'après le départ définitif en 1681 de Huygens de Paris; ceci à cause de la liaison étroite existant apparemment entre les considérations géométriques développées dans ces pages et ce que Huygens a dû proposer à ses collègues de l'Académie. La Pièce XI est mentionnée dans les Registres mais ils n'en contiennent pas le texte; celui-ci est emprunté aux Chartae mathematicae; nous l'avons publiée dans le T. XVIII auquel nous renvoyons le lecteur. La Pièce VIII (problème d'Alhazen) est empruntée en partie aux Chartae mathematicae et en partie aux ‘Divers ouvrages’Ga naar voetnoot53) de 1693. D'après une lettre de Huygens à Oldenburg de juin 1669Ga naar voetnoot54) ‘nos Messieurs ont jugè assez heureuse’ sa construction du problème d'Alhazen que l'on trouve, imprimée par lui-même, vis-à-vis de la p. 462 du T. VI. Il a donc dû la présenter à l'Académie en cette année quoique les Registres de 1669 n'en fassent pas mention. AilleursGa naar voetnoot55) Huygens affirme cependant qu'une construction provenant de lui est dans les Registres. C'est, pensons-nous, celle, différente de la construction de 1669, qu'on trouve à la p. 336 des ‘Divers ouvrages’Ga naar voetnoot56). La Pièce IX enfin (construction d'une hyperbole) est également empruntée aux ‘Divers ouvrages’: il est possible qu'elle se trouvait dans un des tomes perdus des Registres (1670-1674), quoique le manuscrit conservé de Huygens dont le texte est le même porte la date du 30 janvier 1669 et qu'on ne voit donc pas pourquoi il ne l'a pas pas communiquée à l'Académie en cette annéeGa naar voetnoot57). | |
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Pièce I. Après tout ce qui a été dit plus haut et au T. XIV sur la règle pour trouver les logarithmesGa naar voetnoot58) il n'est plus nécessaire d'y revenir. Pièce II et suivantes. La ‘Demonstratio regulae de maximis et minimis’, rédigée en latin, n'a certainement pas été lue par Huygens sous cette sorme. D'ailleurs il dit à la p. 264 du T. XIX qu'il vaut mieux que les sujets de ‘la geometrie pure et arithmetique’ - ceci s'applique aussi à la Pièce I - soient traités par écrit, ou, pour le citer littéralement, ‘que de telles speculations ne sont pas une affaire d'assemblee’. Il y eut néanmoins des communications orales, puisque les Registres disent que Huygens ‘continuera sa Methode de Maximis etc.’ et qu'il note sur son manuscrit: ‘parler de Hudde’Ga naar voetnoot59). Nous nous abstenons de remarques analogues sur les autres PiècesGa naar voetnoot60). Toutes les communications - à l'exception, peut-on dire, de la première, puisque Huygens donne sa règle sans aucune démonstration; et aussi en partie de la cinquième - se rapportent à des sujets de géométrie. Il est question p.e. d'‘investiganda maxima et minima in geometricis quaestionibus’Ga naar voetnoot61). C'est de géométrie plane qu'il s'agit en premier lieu. Ceci est évident pour la Pièce III: ‘Regula ad inveniendas tangentes linearum curvarum’. Mais on le remarque aussi dans la Pièce II. Néanmoins Huygens voit fort bien que la méthode fournit des maxima et des minima d'expressions algébriques d'où qu'elles proviennent: dans l'Appendice II de la p. 300, datant de 1669, il l'applique à deux problèmes sur le cône, ce qui n'est plus de la géométrie plane. C'est d'ailleurs ce que tout-le-monde voyait depuis longtemps: dès 1644 Hérigone applique la méthode de Fermat à la question ‘Trouuer le plus grand des cones droicts contenus sous egales superficies coniques’Ga naar voetnoot62). Nous avons déjà dit dans le T. XIGa naar voetnoot63) qu'on trouve dans le Manuscrit 12, apparemment destiné en premier lieu à l'usage personnel du jeune Huygens, quelques pages de la main de F. van Schooten le fils intitulées: ‘De Maximis et Minimis sive Ratio inveniendi casum determinationis in Problemate determinato juxta Methodum Domni | |
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de Fermat’, et que deux des quatre problèmes traités se trouvent (à l'endroit cité) dans le Cours d'Hérigone. Faut-il en conclure que dès son séjour à Leiden Huygens connaissait fort bien ce Cours? Dans ce cas n'est-il pas quelque peu étonnant que ses calculs logarithmiques sur les intérêts composés datent d'après octobre 1658? Il faut répondre à cette question que ce n'était pas uniquement par le volume de 1644 d'Hérigone que van Schooten connaissait la théorie de FermatGa naar voetnoot64). Il suffit de remarquer que le nom de Fermat ne se trouve pas chez Hérigone qui intitule son chapitre simplement ‘Propos. XXVI. De maximis & minimis’ et ne mentionne pas non plus Fermat dans son ‘Introduction en la Chronologie’ ni dans sa ‘Table .. des Autheurs Mathematiques’. Van Schooten avait connu Mersenne à Paris en 1642 et 1643; c'est peut-être celui-ci qui lui a fourni en ce temps les Pièces manuscrites retrouvées par de Waard à Groningue (qui contiennent le premier mais non pas le deuxième des problèmes cités)Ga naar voetnoot65). D'ailleurs Huygens écrit en 1656 que MersenneGa naar voetnoot66) lui envoyait souvent à lui-même des écrits français ‘et principalement de Monsieur de Fermat’Ga naar voetnoot67). Il faut pourtant ajouter, nous semble-t-il, qu'il est possible que Huygens considère ici, brevitatis causa, les écrits envoyés à van Schooten comme adressés à lui-même. Consultez aussi le T. XIGa naar voetnoot68) sur une copie d'un manuscrit de Fermat envoyée par Mersenne à Constantyn Huygens pèreGa naar voetnoot69). | |
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En juin 1659 Huygens peut écrire à Wallis avoir réduit depuis longtempsGa naar voetnoot70) la méthode de Fermat sur les maxima et les minima ‘ad idem hoc compendium quo Huddenius utiturGa naar voetnoot71)’ et avoir mis cela par écrit pour J. de Witt. Nous ne connaissons pas cet écrit dont Huygens parle aussi dans le Manuscrit CGa naar voetnoot72). Mais on peut voir dans le T. IVGa naar voetnoot73) un écrit de Huygens de 1663 également adressé à de Witt et contenant, celui-ci, la réduction à un ‘compendium’ de la méthode de FermatGa naar voetnoot74) pour tracer des tangentes aux courbes planes données par des équations algébriques entre les deux coördonnées x et y (c.à.d. des équations contenant des puissances entières de x et de y), ce qui est aussi le sujet de la présente Pièce III. Notons que Huygens ne désigne pas ces courbes par l'expression ‘courbes algébriques’, comme d'autres l'ont fait, mais qu'il parle, avec Descartes, de courbes ou lignes géométriques: voyez p.e. le premier alinéa de la p. 403 du T. XVIII. En comparant la Pièce III avec l'écrit adressé à de Witt on voit qu'en 1667 de très grandes parties ont été simplement copiées par Huygens. En 1667 toutefois il commence par énoncer la règle et en donne ensuite la démonstration, tandis qu'en 1663 la règle n'avait été énoncée qu'après la déduction. Dans la Pièce IIGa naar voetnoot75) Huygens a interverti l'ordre primitif exactement comme dans la Pièce III. Ou plutôt: il l'a fait pour la Pièce III exactement comme il l'avait fait pour la Pièce II. Seulement dans le cas de la Pièce II l'ordre primitif est celui d'un projet de 1667 du Manuscrit CGa naar voetnoot76). L'existence de ce projet nous permet de conclure que dans ce cas Huygens n'a pas copié de grandes parties de l'écrit adressé déjà avant 1659 à de Witt. Cet écrit se rattachait sans doute aux considérations de Huygens de 1652 et d'un peu plus tard qu'on trouve aux p. 60 et suiv. du T. XIIGa naar voetnoot77). | |
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Vers 1864 J.M.C. DuhamelGa naar voetnoot78) s'est livré à une discussion assez étendue sur les méthodes de Fermat pour les maxima et minima et pour les tangentes. La lecture de ses conclusions, comprenant douze propositions historiques, suffit pour montrer qu'il s'est surtout intéressé à la question des mérites respectifs de Fermat et de Descartes. Huygens a jugé bon de faire quelques brèves remarques historiques sur la question des tangentes au début de la Pièce III, remarques que DuhamelGa naar voetnoot79) cite sans les approuver. Duhamel ne fait aucune observation sur l'affirmation de Huygens - on a vu plus haut qu'elle est exacte - d'avoir composé son compendium sur le problème des tangentes ‘multo ante istas litteras vulgatas’, c.à.d. avant la publication par Clerselier en 1667 du Vol. III des Lettres de DescartesGa naar voetnoot80); mais il déclare: 1. ‘que cette méthode, attribuée à Fermat par Hughens, appartient à Descartes seul’, 2. ne pas être de l'avis de Huygens lorsque celui-ci ‘reconnaît [la méthode de Descartes] comme satisfaisante jusqu'à un certain point, mais cependant moins claire que celle qu'il donne [lui-même]’. Après avoir parlé de l'édition de 1679 des ‘Varia Opera’ de Fermat où l'‘usus’ de la règle pour les tangentes ‘nec bene expositus est, nec demonstrationem ullam adjectam habet’ Huygens avait ajouté: ‘Cartesium verò in his quae dixi litteris rationem ejus aliquatenùs assecutum invenio, nec tamen tam perspicue eam explicuisse quam per haec quae nunc trademus fiet’. Nous nous contentons de signaler la différence d'opinion entre Huygens et Duhamel au sujet du rôle de Descartes, non sans ajouter que Duhamel peut avoir raison. Quant à la clarté de l'exposé de Huygens on voit que Duhamel ne la nie pas. AilleursGa naar voetnoot81) il avait | |
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dit au sujet de la Pièce II (sur les maxima et minima): ‘Tous les calculs de Huygens sont rigoureux: tous ceux de Fermat ne sont qu'approchés jusqu'au moment où il remplace e [petit accroissement de la variable] par zéro’. En 1672Ga naar voetnoot82) Huygens dit qu' Hérigone ne montre pas ‘le vray fondement’ de la règle ‘de Monsieur de Fermat ... pour les Tangentes ...’ ‘que j'ay trouuè tout autre’. | |
Pièce IV.Huygens indique cette Pièce par les mots ‘Dimensio Paraboloidum’Ga naar voetnoot83), nous l'avons intitulée ‘De curvis paraboloidibus et hyperboloidibus’. | |
Pièce V.Le nom Wallis figure déjà maintes fois dans les pages précédentes de ce Tome. En 1667 Huygens ne pouvait encore en aucune façon parler à l'Académie de Wallis musicologue: l'édition des ‘Harmonica’ de Ptolémée est de 1682Ga naar voetnoot84). Mais Wallis mathématicien lui était fort connu dès 1652; dans le présent Avertissement nous avons déjà fait allusion à sa correspondance avec van Schooten sur Wallis de cette annéeGa naar voetnoot85). Plusieurs lettres furent échangées entre Huygens et Wallis de 1655 à 1659Ga naar voetnoot86), et Wallis lui envoya en ce temps quelques-uns des ouvrages que nous citons à la p. 258 qui suit; une partie d'un de ces ouvrages lui était même dédiéeGa naar voetnoot87). En 1661 Huygens fit à Londres la connaissance personnelle de WallisGa naar voetnoot88), mais la correspondance ne fut reprise qu'en 1668, après la communication de Huygens sur Gregory qui constitue notre Pièce VIGa naar voetnoot89). On peut voir dans les lettres échangées avant 1660 combien l'impression que | |
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Huygens reçut des publications de Wallis était favorableGa naar voetnoot90). Il critique cependant les démonstrations où il est fait usage de l'inductionGa naar voetnoot91) et dont Wallis défend amplement l'admissibilitéGa naar voetnoot92). Comparez sur ce sujet la remarque de 1686 de Huygens à la p. 390 qui suitGa naar voetnoot93). Le fait que Huygens - autrement que Wallis - exprime plusieurs fois sa préférence pour la géométrie par rapport à l'arithmétique et l'algèbre ne constitue évidemment pas une critique. Dans sa lettre du 1 janvier 1659Ga naar voetnoot94) Wallis montre que Huygens s'était trompé en affirmantGa naar voetnoot95) que l'‘arithmetica infinitorum’ ne pourrait probablement pas servir à calculer ce qu'il avait lui-même déterminé géométriquement, savoir les aires comprises entre certaines droites et la cissoide. Toutes ces choses, et beaucoup d'autres, peuvent avoir été exposées par Huygens en détail à l'Académie. | |
Pièce VI et Appendices.Pour ne pas trop allonger le présent Avertissement, nous ne nous étendons pas ici sur la polémique avec J. Gregory sur la question de la démonstrabilité de l'impossibilité de la quadrature du cercle, dispute à laquelle Wallis lui aussi prenait part: voyez surtout sa longue lettre à Brouncker du 14 novembre 1668Ga naar voetnoot96). Mieux vaudra revenir sur la recherche de la quadrature du cercle dans un autre AvertissementGa naar voetnoot97). Il a d'ailleurs déjà été question de ce sujet dans cet Avertissement-ci, puisque nous avons citél ‘Opus Geometricum’ de Grégoire de St. Vincent en mettant en lumière l'influence de cet ouvrage sur d'autres chercheurs et en particulier sur Huygens. | |
Pièce VII.Si d'une part les logarithmes proviennent de la nécessité d'abréger les calculs trigonométriques des astronomes, si d'autre part il fut remarqué que la théorie des capitaux croissants, ainsi que celle des intervalles musicaux, présentent avec celle | |
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des logarithmes des analogies frappantes de sorte que les tables de logarithmes peuvent servir dans ces deux cas, il n'en est pas moins vrai que la recherche des quadratures, telle qu'elle se trouve chez Grégoire de St. Vincent, était propre, elle aussi, à faire réfléchir les mathématiciens sur des problèmes logarithmiques. Mersenne, tout mucisologue qu'il était, avait été amené vers la fin de sa vie par les disputes sur l'oeuvre de Grégoire, et nullement par une question musicale, à poser un problème logarithmique qui, on l'a vu plus haut, a assez généralement attiré l'attention des savants. Remarquons cependant en passant que dans les ‘Cogitata physico-mathematica’ de 1644 de Mersenne se trouve l'assertion ‘musicale’ que le rapport d'égalité correspond à zéroGa naar voetnoot98); ce que Wallis, à la fin de son ‘Tractatus Elencticus’ contre MeibomiusGa naar voetnoot99), dit considérer comme pouvant avoir été le point de départ de la théorie des rapports de ce dernier. Quoique N. MercatorGa naar voetnoot100) connût le problème logarithmique de Mersenne, sa théorie à lui des logarithmes a un caractère plutôt musicalGa naar voetnoot101); mais il s'est occupé aussi d'une quadrature, celle de l'hyperbole, et c'est à cette quadrature que la ‘Logarithmo-technia’ doit sa célébrité puisqu'il s'y agit d'une sommation de ce qu'on a voulu appeler des ‘indivisibles’ à l'aide du développement d'une fraction en une série convergente; et, comme l'hyperbole avait déjà été mise en rapport avec les logarithmes, ceci se trouva conduire au développement en série d'un logarithme. On comprend que Huygens ait tenu à faire immédiatement connaître à Paris la quadrature de l'hyperbole par Mercator, la dispute avec Gregory se trouvant ainsi reléguée dans le passéGa naar voetnoot102). Les Registres disent que Huygens, après que Wallis eut expliqué et réformé cette quadrature, ‘y a adiousté plusieurs choses pour en faciliter | |
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l'intelligence’. Lorsqu'on compare la version de Huygens avec celle de WallisGa naar voetnoot103) on voit que Huygens a en effet le mérite de la simplicité et de la clarté qui chez Wallis est déjà plus grande que chez Mercator. Il a omis tout ce qui se rapporte à la série de Mercator et de Wallis 1 - A + A2 - A3 etc. pour ne conserver que la série de Wallis 1 + A + A2 + A3 etc. Mais nous ne voyons pas qu'il y ait rien ajouté (du moins dans la Pièce écrite; il peut avoir parlé plus longuement). On ne peut pas en effet considérer comme une addition qu'au lieu de se servir de petites ‘areolae’ découpées, devant de nouveau être sommées pour obtenir l'aire totale, il dit, plus correctement que Mercator, prendre de petits parallélogrammes qui ‘surpassent de quelque chose l'espace’ considéré; ce qui donne évidemment, lorsque les parallélogrammes, comme les ‘areolae’, deviennent infiniment minces, la même somme. Ceci est en effet entièrement dans l'esprit de Wallis quoiqu'en cette occasion celui-ci n'indique pas les parallélogrammes dans la figureGa naar voetnoot104). Dans la Pièce tirée des Registres (voyez les dernières lignes de cette Pièce) Huygens n'observe pas, bien que la chose dût être évidente pour Mercator, pour Wallis et pour lui-même, que lorsque les tranches ou parallélogrammes correspondant à une aire limitée deviennent ‘innumerae’ (Mercator), les ‘ratiunculae’ - le nombre dix millions (dernière ligne de la p. 11) est évidemment arbitraire - se rapprochent indéfiniment de la valeur 1/1 de sorte que les exposants des puissances de ces ‘ratiunculae’, c.à.d. les | |
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logarithmes (si l'on veut s'en tenir à la définition du logarithme de la p. 11), tendent à devenir infiniment grands, ce qui à ses auditeurs eût pu sembler une difficulté sérieuse. Probablement - il est vrai que nous ne connaissons pas sa communication orale - il a cru bien faire de passer ce fait sous silence. | |
Pièce XI.On a vu dans le T. XVIIIGa naar voetnoot105) que les théorèmes de Huygens de 1678 sur l'εὔϑυνσιςGa naar voetnoot106) de l'épicycloïde et la quadrature des espaces épicycloïdaux se rattachent tant à la rectification de la cycloïde - trouvée par Huygens en 1659, après Wren, suivant une méthode fort différente - qu'aux considérations de Descartes et de Vaumesle sur les figures roulantes. Depuis une dizaine d'années le problème de la rectification des courbes - que Descartes dans sa Géométrie de 1637 avait jugé insolubleGa naar voetnoot107) - était à l'ordre du jourGa naar voetnoot108). Quelques mois plus tard de la Hire, devenu membre de l'Académie en cette année 1678, y parla sur le même sujetGa naar voetnoot109). En 1675 Römer avait déjà traité à l'Académie de l'usage de l'épicycloïde dans les engrenages, sujet auquel de la Hire et Huygens s'intéressèrent également, de la Hire peut-être en cette même année 1675 indépendamment de RömerGa naar voetnoot110). | |
Pièces IX et X.Ces Pièces - voyez sur la Pièce IX ce que nous disons un peu plus loin en parlant de la Pièce VIII - se rapportent aux équations de l'hyperbole et de la circonférence de cercle. C'est donc de la géométrie analytique, mais d'une tournure archaïque. Construire l'hyperbole d'après son équation s'appelle chez Huygens ‘constructio loci ad hyperbolam’Ga naar voetnoot111). L'on voit combien le problème de déterminer | |
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les éléments d'une conique d'après son équation - notons que dans l'Appendice de 1682 à la Pièce XIIGa naar voetnoot112) Huygens parle simplement de l'‘aequatio parabolae’Ga naar voetnoot113) - paraissait encore ardu malgré les travaux de Wallis et de WittGa naar voetnoot114). Les fameux livres d'ApolloniosGa naar voetnoot115) - nommé dans le titre de la Pièce X, cité aussi dans l'Appendice II à la Pièce VIII, dans celui à la Pièce XII et dans la Pièce XIII -, ne pouvaient être incorporés qu'avec difficulté dans un ensemble logique d'allure moderneGa naar voetnoot116). On voit que la construction de l'hyperbole de la Pièce IX se rattache à une construction de Florimond de Beaune, et que la Pièce X n'est guère autre chose que la construction d'une circonférence de cercle d'après son équationGa naar voetnoot117). Il faut remarquer que pour Huygens dans sa jeunesse, comme pour Apollonios, le mathématicien par excellence est le géomètre. Il n'a jamais abandonné cette préférence pour la géométrie: voyez p.e. la l. 5 de la p. 208 où il est question de ‘geometrie pure et arithmetique’ et les l. 4-6 de la p. 213 où nous citons ses observations sur les écrits de Wallis. Néanmoins l'étude d'autres auteurs - nous pouvons mentionner Viète (antérieur à Descartes) qu'il connaissait depuis longtempsGa naar voetnoot118) et dont l'algèbre ou, comme Viète s'exprime, l'‘Arithmetica speciosa sive symbolica’ a eu aussi tant d'influence sur WallisGa naar voetnoot119) - l'ont amené peu à peut à attacher plus d'importance aux équations et même à regarder parfois, comme GirardGa naar voetnoot120) et Descartes, certaines équations comme intéressantes en elles-mêmes et capables d'être interprétées par des figures géométriques. | |
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Pièce VIII.Le célèbre problème d'Alhazen avait d'ailleurs amené Huygens de bonne heure à bien saisir l'utilité de l'algèbre dans la résolution des problèmes géométriques: en août 1657Ga naar voetnoot121) il écrit à de Sluse: ‘semper miratus sum illum [Alhazen] absque Algebrae auxilio id construere potuisse’. En ce moment de Sluse ne voulut pas encore s'occuper de ce problème; mais lorsqu' Oldenburg lui communiqua en 1670 la solution de Huygens de 1669Ga naar voetnoot122), il se mit lui aussi au travail. Les diverses solutions, proposées tour à tour par Huygens et par lui en 1671 et 1672, et qu'ils se faisaient connaître qar l'entremise d'Oldenburg - nous avons déjà parlé de ces lettres à la p. 196 qui précède - font preuve d'une concurrence acharnée entre les deux amis. Oldenburg publia des ‘Excerpta ex Epistolis nonnullis, ultrò citróque ab Illustrissimis Viris, Slusio & Hugenio, ad Editorem scriptis’ dans les ‘Philosophical Transactions’ de 1673Ga naar voetnoot123). En excerpant la lettre de Huygens du 1 juillet 1672 il omet l'endroit qui caractérise bien ce combat de finesse: Huygens dit que sur ce problème il lui ‘semble que nous rafinons de mesme que les deux peintres Grecs sur la diuision de la ligne’. Nous ne pouvons ici réimprimer les lettres du T. VII. Voyez cependant un morceau qui s'y rattache dans l'Appendice I à la Pièce VIII. Ce qui mérite surtout d'être noté, c'est que, déjà en 1669, une solution du problème d'Alhazen amena Huygens à considérer avec attention la forme de l'équation du deuxième degré dans le cas où celle-ci correspond à une hyperbole. On voit dans le Manuscrit D que c'est cette considération qui l'a amené à écrire la Pièce IX dont nous avons déjà parlé plus haut. | |
Pièce XII.Conformément à ce que nous avons dit à propos des Pièces X et XI, cette Pièce de 1680 est intitulée: ‘Sur les équations solides’. Quoique Huygens débute par le problème ‘des 2 moyenes proportionelles’, pour parler ensuite ‘de la perpendiculaire a une hyperbole d'un point donnè’, il ne désigne le calcul conduisant à la construction géométrique de ces moyennes ou de cette perpendiculaire que comme ‘quelques exemples’ de ‘cette methode’, c.à.d. de la méthode consistant, on le voit aussi dans l'AppendiceGa naar voetnoot124), dans l'introduction d'une nouvelle variable à l'effet de | |
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substituer à l'équation donnée qu'il s'agit de résoudre un ensemble équivalent de deux équations plus maniables. Or, ce long Appendice - que Huygens eût pu publier, paraît-il, dans le recueil ‘Divers ouvrages etc.’ de 1693Ga naar voetnoot125) - fait voir en même temps que la nature ‘tamen usque recurrit’Ga naar voetnoot126): c'est en fin de compte un géomètre plutôt qu'un amateur de l'algèbre qui a la parole. | |
Pièce XIII.La dernière Pièce académique sur les coniques, datant également de 1680, est bien de nature géométrique, quoique dans la démonstration du théorème, ou plutôt dans la première des deux propositions faisant office de lemmes, il soit fait usage - Huygens (ou du moins celui qui a écrit ces pages du Registre) ne fait qu'indiquer la démonstration, mais elle se trouve dans le brouillon du Manuscrit E (voyez l'Appendice) - de certaine propriété d'une équation du quatrième degré (‘équation quarré quarrée’), de sorte que cette proposition ‘se demontre .... par Algebre’. Cette proposition se rattache d'ailleurs à une proposition de van Schooten, également démontrée par algèbre (voyez l'Appendice). Plus tard Huygens réussit à trouver une preuve purement géométrique (même Appendice).
Nous avons signalé à propos de la Pièce VIII - et nous aurions pu le faire aussi à propos de la Pièce III sur les tangentesGa naar voetnoot127) - la concurrence de Huygens avec René de SluseGa naar voetnoot128). A propos de la Pièce XII il faut signaler la même concurrence et aussi celle de Huygens avec Philippe de la Hire. Cette dernière concurrence apparaît encore bien plus clairement dans le cas de la Pièce XIII. Les solutions de Slusius du problème déliaque ont fait une grande impression sur Huygens. On peut consulter là-dessus la note 2 de la p. 334. Quant à de la Hire, nous avons mentionné plus haut à propos de la Pièce XI de 1678-1679 qu'il discourut sur le même sujet que Huygens peu de temps après lui. Dans l'Appendice de 1682 de la Pièce XII de 1680 Huygens nous | |
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apprend (en le désignant par les mots ‘gallus quidam geometra’) que de la Hire s'occupait vers le même temps que lui (il s'agit d'un livre de de la Hire de 1679) du problème déliaque (ou plutôt plus généralement de l'équation du troisième degré). Enfin la Pièce XIII, également de 1680, est immédiatement suivie dans les Registres par un discours de de la Hire sur le même sujet, savoir les coniques à axes parallèles ou perpendiculaires se coupant en quatre pointsGa naar voetnoot129). On peut voir dans notre T. VIII que de la Hire prétendit même dans la séance où parla Huygens d'avoir traité avant lui dans l'Académie du sujet de sa communication ce qui toutefois ne sut pas confirmé par les RegistresGa naar voetnoot130). Devenu membre de l'Académie en 1678 de la Hire y déployait une grande activité. On peut consulter la liste - d'ailleurs incomplète - de ses ouvrages dans l'‘Histoire de l'Académie Royale des Sciences depuis 1666 jusqu'à son renouvellement en 1699’Ga naar voetnoot131). Nous avons cité jadis ses ‘Nouveaux élémens’ de 1679, auxquels nous faisions allusion dans l'alinéa précédentGa naar voetnoot132), lesquels se rattachent aux ‘Elementa’ de 1659 de J. de WittGa naar voetnoot133). Il s'était occupé de coniques déjà depuis longtemps - comparez sa biographie dans le T. VIIIGa naar voetnoot134) - et devait publier en 1685 in folio ses ‘Sectiones conicae in novem libros distributae’Ga naar voetnoot135). C'est aussi, et peut-être surtout, à Desargues qu'il se rattache, lui et son maître le peintre et graveur Abr. Bosse. Notons que Huygens connaissait Bosse - et DesarguesGa naar voetnoot136) - personnellement, et probablement aussi leur grand livre d'architecture et de perspectiveGa naar voetnoot137), longtemps | |
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avant d'avoir rencontré de la HireGa naar voetnoot138). Les mérites de de la Hire en ce qui concerne l'étude systématique des coniques sont évidemment supérieurs à ceux de HuygensGa naar voetnoot139). Huygens, il est vrai, n'avait pas l'ambition - voyez la page citée dans la note 137 - de composer sur la perspective ou les coniques ‘de si grands livres’ de nature didactique. Quant aux relations personnelles des deux savants, en 1683, donc après le départ de Huygens de Paris, de la Hire, opposé en général aux candidatures à l'Académie | |
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de savants étrangers, fait preuve d'une certaine animosité contre HuygensGa naar voetnoot140); mais ceci ne fut qu'un incident; Huygens resta en correspondance avec lui jusqu'à la fin de sa vie et dans la Préface de son Traité de la Lumière de 1690 il parle du célèbre Monsieur de la Hire. |
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