Briefwisseling. Deel 6: 1663-1687
(1917)–Constantijn Huygens– Auteursrecht onbekend6944. Aan prins Willem III. (K.A.)Il y a desjà longtemps que je me suis amusé à faire comprendre tant par escrit que de bouche à Messieurs de la Chambre des comptes que dans le plus beau lieu du monde, qui est la Haye, le plus bel endroit de tons, qui est l'entrée du Vyverbergh du costé de la Place, se voit occupé par le plus vilain de tous les bastimens imaginables, qui est l'eschaffaut. Et ces Messieurs ont voulu trouver mes considerations si raisonnables, que pour avancer peu à peu la destruction de cette infame motte, depuis quelques années en ça ils n'ont pas faict employer un seul morceau de brique à la reparer, par où presentement elle est comme en estat de s'ebouler quelque jour de soy mesme. Il n'y avoit entre tous que le vieux de WithGa naar voetnoot4), qui soustint avec son obstination naturelle - et certes en ce particulier assez fatale - qu'il falloit maintenir ledit bastiment pour le respect de la Justice. A quoy fut repliqué, qu'on ne parloit point de l'abattre, que pour en avoir un de bois tout prest, qui se pourroit planter dans la mesme place en moins de deux heures, quand on en auroit besoin, chose prattiquée dans toutes les meilleures villes de Hollande - hormis deux - comme elle l'est universellement en tout ce que j'ay jamais veu de païs en ma vie. Ainsy que mesme le magistrat de la Haye a commencé à en user depuis quelque temps, s'estant fort bien faict bastir un eschaffaut de bois peint, qu'en moins de rien ils font dresser contre leur maison de ville au cimetiere, et le demontent aussitost qu'il a servi. Icy le dessein seroit de | |
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planter au pied de ceste belle montée du Viverbergh - qui de dessus la grande Place faict une veuë trop noble et glorieuse pour estre perpetuellement embarassée d'un regard de roues ou de potences, au grand deplaisir de tant de voisins de condition - on eleveroit une belle statue representant la Justice avec l'espée et la balance en main, erigée dessus une maniere de fontaine ou de pompe, contre laquelle ledit eschaffaut seroit dressé aux occasions, qui auroit bonne et majestueuse mine. Je crains bien que V.A. trouvera que je l'importune hors de propos d'une bagatelle si esloignée des grands soins qui occupent presentement son esprit, mais je me trouve dans ce train là depuis le gouvernement de S.A. de glorieuse memoire, mon sage Maistre, qui ne se trouva jamais en aucune occupation de campagne ou autre qu'il n'entendist parler volontiers et avec plaisir de ce qui se pouvoit faire pour l'embellissement de la Haye qu'il cherissoit comme une maistresse, tesmoings tant de grands ouvrages et nouveaux bastimens dont elle a esté ornée par sa direction. Aussi suis je bien asseuré, veu le temps où nous vivons, où on n'a l'oeil que sur les volontez de vostre Alt.e, que si elle gouste la proposition, et daigne m'en envoyer le moindre tesmoignage de sa main, que je puisse produire où il convient, elle abattra ce triste et importun morceau de terre d'un souffle de sa bouche, et à son retour trouvera la Haye ameillorée d'un changement que tous les gens d'esprit approuvent et souhaittent de veoir mis en oeuvre au plus tost. En tont cas j'espere que vostre [Alt.e] me fera la grace d'aggreer que je tasche de procurer le bien du publiq sans aucun interest mi de moy, ni des miens. C'est de quoy je la supplie avec tout ce que je doibs de respect et de soumission. 2e Juill. 1674. |
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