Briefwisseling. Deel 6: 1663-1687
(1917)–Constantijn Huygens– Auteursrecht onbekend6682. Aan De VauroseGa naar voetnoot3). (K.A.)Je ne sçauroy vous remercier assez dignement de tant de peines que vous prenez pour satisfaire à ma sotte curiosité. Elle dure cependant tousjours, et n'oseroy vous promettre quand vous en verrez la fin. La copie de M. Laura, que vous me faictes esperer de dessus l'original conservé dans l'illustre famille de SadoGa naar voetnoot4), me sera la tres bienvenue. Comme vous me depeignez cest original, il pourroit sans miracle estre de la main propre de Memmio SaneseGa naar voetnoot5); les bons peintres pourront decider cela sur la bonté du contour, quoyque le coloris manque. Mais, Monsieur, si vous avez tant veu d'auteurs que moy sur le lieu de la naissance de M. Laura, vous sçavez comme il est en controverse entre Avignon, Graveson et Cabrieres, le petit village aupres de Vaucluse que j'ay esté visiter pour l'amour de la belle. Pour moy, apres avoir examiné les arguments de toutes parts, j'avouë que j'en sois incertain quam dudum, et je voy que mesme l'evesque Jacobus Philippus TomasinusGa naar voetnoot6), qui dans son Petrarcha redivivus, imprimé à Padouë l'an 1650, a tant prins de peine à eplucher toute ceste matiere, quoyque deferant beaucoup à une scavante lettre que luy en escrivit l'an 1647 l'evesque de Veson, qui tient pour Avignon, et en suitte pour la maison de Sado, enfin ne sçait non plus que moy, comment se depetrer entre autres de ces deux tesmoignages invisibles de Petrarque mesme, qui semble en devoir estre creu sur tout autre. Il faict dire à Laura en un endroitGa naar voetnoot7): In tutte l'altre cose assai beata,
In una sola à me stessa dispiacqui,
Che 'n troppo humil terren mi trouvai nata.
AilleursGa naar voetnoot8) il dit: Mira il gran sasso donde Sorga nasce,
Ove giace il tuo elbergo, e dove nacque
Il nostro amor, vo' ch' abandoni e lasce,
Per non veder ne' tuoi quel ch' à te spiacque.
| |
[pagina 239]
| |
En effect ces passages sont pour le commentateur VellutelloGa naar voetnoot1), qui cite force autres raisons en faveur de Cabrieres, et sur des informations qu'il y a esté prendre en personne pose ce petit bourg pour le veritable lieu de la naissance en controverse, et pour son pere Henri de Chabau, seigneur du lieu. Ce qu'il remarque d'un testament, où M. Laura seroit nommée, et sur lequel la maison de Sado semble se fondre, est fort considerable, et ne l'ay encor veu refuter, à sçavoir qu'en suitte de ce testament la signora devroit avoir esté en aage entre les annees de 1360 et 1370, là où il conte qu'elle mourut en 1348. Je veux croire pourtant, Monsieur, que ceste maison de Sado ne doibt pas manquer de replique contre ce raisonnement, ayant de pere en fils eu tant de soin de la conservation de ce portraict, qui ne pouvoit luy estre si cher, s'il eust appartenu à d'autres. Vous en pourrez estre esclarci, si tanti est. Esset nimirum, si vous estiez aussi amoureux de ceste belle ombre que j'avoue l'estre. Je me souvien qu'à Avignon au vestibule de la cathedrale - comme je pense - qui est sur la montaigne, on m'a montré de la peinture in fresco, où les testes de Petrarque et de Laura se verroyent sur quelque balcon ou fenestre. Je jugeay que c'estoit un conte du peuple; qu'en pensez vous? Et ont ils quelque ressemblance à nos tableaux? Tomasinus dit avoir veu ‘apud virum nobilissimum Hieronymum de Eualdo effigiem Laurae de Sado, penicillo clarissimi pictoris AldegraviGa naar voetnoot2) expressam, alteram a Fabricio de Peiresq pictoris recentioris transmissam’, mais que pas une n'avoit du rapport à celles dont il donne les tailles douces, ni mesme l'une à l'autre. Cecy me met encor en beaucoup d'ambiguité, ne sachant à quoy me fier. Aldegrave certainement estoit grand homme et a vescu .....Ga naar voetnoot3), et ne scauroy je croire qu'il se soit appliqué à copier un original mauvais ou doubteux. Ay je pas eu raison, Monsieur, de dire que je ne pouvois vous asseurer de la fin de mes importunitez? Je croy qu'à cest' heure mesme je la pousseroy plus loin, si le bout du fueillet ne m'advertissoit qu'il est temps de finir. Desino ineptire donc, et vous demande pardon de tout, en vous asseurant qu'en tout vous me trouverez sans faulte ..... A la Haye, ce 24e Octob. 1668. Je ne voy nulle apparence, Monsieur, que le Petrarque que vous m'avez faict la faveur de m'envoyer auroit esté changé. Il est de mesme toile que l'autre, et ne sera necessaire d'en faire tirer d'autres copies. Sachons seulement des bons maistres de Turin, s'il est vray que le portraict de Petrarque original cede d'autant en valeur à celuy de Laura, comme nous le trouvons icy, quoyque veritablement pas un de[s] deux me fournit guere à ce qu'il y a lieu de se promettre d'un original de Memmio Sanese. Je ne puis encor vous laisser en paix sans vous dire que je trouve dans un recueil des vies des anciens troubadours provençaux, faict par Jehan Nostradamus et imprimé à Lion en 1575Ga naar voetnoot4), en chapitre expres, la vie de Laurette de Sado et de Stephanette de Cantelmeo, dame de Romaniq, sa tante, où Laura est declarée manifestement de ceste | |
[pagina 240]
| |
maison, et comme native d'Avignon, et maistresse de Petrarque, et, ce qui autorise cest auteur, c'est qu'il a tout tiré des escrits de certains escrivains moines, dont le principal est surnommé Lou monge des Isles d'or, un autre religieux de S.t Pierre de Montmajour d'Arles, surnommé Lou flagel dels troubadours, et de plus semblables, qui semblent avoir vescu si proche du siecle de nos amants, qu'ils en doibvent meriter quelque creance extraordinaire. Si les auteurs que Nostradamus cite se pouvoyent recouvrer, asseurement on y trouveroyt plus de lumiere; hactenus in tenebris versor. |
|