Briefwisseling. Deel 6: 1663-1687
(1917)–Constantijn Huygens– Auteursrecht onbekend6342. Aan prinses Amalia van OranjeGa naar voetnoot7). (H.A.)En attendant le resultat de la deliberation de laquelle V.A. me faict l'honneur de me parler par sa derniere du 23e de ce moisGa naar voetnoot8), j'ay encor entrepris M. l'ambassadeur d'AngleterreGa naar voetnoot9), et apres luy avoir communiqué les sentimens provisionels de V.A. sur les longueurs dont il semble nous menacer, premie- | |
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rement luy ay representé comme durant la negociation de M. de Blumenthal on ne cessoit de l'asseurer que son traicté venant à reuscir, asseurement on rendroit S.A. Elect.c satisfaicte en ce qui estoit de l'affaire d'Orange, de quoy tout le contraire s'estant veu depuis, et comme dit le proverbe italien, apres le danger passé le Saint ayant esté mocqué, je l'ay prié de considerer s'il ne luy en prendroit de mesme apres son traicté conclu, et si durant la negociation le Roy son Maistre ne seroit pas plus consideré lcy que quand on n'aura plus besoin de luy; mais il n'a pas voulu demordre, ains tousjours soustenu qu'il fau[t] attendre pour si peu de temps, que M. le chancelierGa naar voetnoot1) luy avoit mandé la mesme chose par une de ses dernieres depesches et, en somm[e], que le temps estant venu, le Roy de la Grande Bretaigne ne se lairroit pas affronter, et viendroit bien à bout de l'affaire, avec plusieurs semblables belles paroles, que j'ay tant ouy chanter et icy, et en Angleterre sans que je m'en ose promettre plus d'effect que nous n'en avons veu jusques à preseut, qui est une miserable consolation. Je me suis avancé en second lieu à luy proposer, puisque le Roy icy a voulu payer de refus tous les moindres intercesseurs, et qu'en suitte, si jamais il se rend, ce ne sera qu'au plus grand, qui est le Roy son Maistre, s'il ne jugeroit à propos qu'en attendant ceste occasion je dechargeasse le Prince Monseigneur ensemble et de la depense et de la honte d'avoir icy un homme si longtemps et si inutilement à la suitte du Roy et que je me retirasse en Hollande, pour revenir en France lorsque l'apparence de quelque succes m'y pourroit rappeller. Mais il s'est encor plus fortement opposé à ce project disant que le proprietaire mesme ne pouvoit faire seulement semblant de quitter la partie sans un dernier prejudice. J'ay demandé en troisiesme lieu, s'il ne seroit pas expedient que je fisse encor une tentative de mon chef, en suitte des bonnes paroles que me donna le Roy quand je pris dernierement congé de Sa Maj.té, parce que je m'imagine tousjours qu'enfin la honte mesme portera ce Prince à la raison. Là dessus il m'a dit qu'il ne pouvoit pas m'en empescher, mais qu'il se tenoit fort asseuré que cela n'aboutiroit à rien, et en suitte pourroit plus nuire que profiter. C'est icy le sommaire de cette conversation dont je me suis retiré avec peu de joye, en me comparant tousjours au valet dans une anciene comedie, qui dit: Je voudroy bien sçavoir combien j'ay de maistres, chacun le chargeant de quelque ordre divers. Mon deplaisir plus secret, et que j'aymerois mieux expliquer de bouche qu'en papier, c'est que la maniere d'agir de ce Seigneur ne l'a pas rendu des plus aggreables en ceste cour, où parfois des grands m'ont dit, que ce n'est pas de son entremise que nous avons à nous promettre des merveilles; que le Roy se lairra beaucoup plus volontiers disposer par moy qu'il estime et ayme, comme il leur plaist de parler, sans que, grace à Dieu, je m'en fasse à croire la moindre chose. Il me reste donc de veoir quels seront les ordres de V.A. qui doibvent regler toute ma conduitte. J'attrappay ces jours passez M. de Lionne comme en volant, au Louvre, et insistay à ce qu'il me voulust gratifier d'une demie heure de conference chez luy, et il me pria de remettre cela jusques à demain, quoyque je luy remonstrasse que j'eusse souhaitté que cela eust pû se faire devant le jour de | |
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l'ordinaire. Il est chargé d'affaires par dessus les oreilles, et je me souviens que c'est de semblables embaraz. Le viel AccostaGa naar voetnoot1) enfin estant venu à son terme le 18me de ce mois, je voy que le S.r Chieze se dispose à pretendre à la place, et ne croy pas qu'on la puisse confier à un plus honest homme et plus intelligent, à quoy sa longue conversation avec le defunct aura beaucoup contribué; outre que sa charge au Parlement d'Orange, qui n'est pas loing, et où les seances sont peu frequentes, ne l'empescheroit pas de vacquer à ceste function en un païs, où maintenant il s'est establi par mariage. Mais je ne sçay en quelle sorte V.A. trouvera necessaire de disposer de la dignité, que le grand aage et la longue experience avoit acquise au bonhomme. Si j'avoy esté sur les lieux je pourroy mieux juger de ce que le service de la Maison pourroit requerir en ce particulier. Il se presentera quantité de gens du païs pour la charge, comme en voyci desjà un qui par ses amis icy m'a faict adresser le memoire cy joinctGa naar voetnoot2). Dans les lettres cy joinctes d'Orange V.A. verra entre autres comme nostre bon Sylvius d'AngleterreGa naar voetnoot3) s'accouple à Orange avec ceux qu'il connoist les moins affectionnez à S.A. leur Prince. Ce garçon est mutin et brouïllon de nature. Je l'avoy tant exhorté à destourner son frere d'avec des Bedarrides, des Beauregards, et autres, s'il avoit envie de rentrer aux bonnes graces de V.A., et il me l'avoit tant promis; et voyci tout le rebours. Orange me faict tousjours pitié dans son oppression, quand je considere toutes nos longueurs infructueuses. V.A. verra s'il luy plaist, par ma lettre cy joincte à Sauzin, comme ne sachant plus leur dire, je les entretiens d'un certain galimatias dont ils ne peuvent rien conclure. Sur la lettre du Parlement à S.A. je n'ay rien à dire, sinon que si V.A. trouve mauvais qu'on ne s'adresse point à elle, j'auray soin de les en advertir. A Paris, ce 31e Octobre 1664. |
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