Briefwisseling. Deel 5: 1649-1663
(1916)–Constantijn Huygens– Auteursrecht onbekend6114. Prinses Amalia van Oranje. (H.A.)J'ay esté fort aise d'apprendre par vostre depesche du 5/15 du courant vostre heureux passage, vostre arrivée à Londres, vostre reception, et vos premieres audiences. J'en attendray la suite, et ce que produira ceste conference que le Roy et Monsieur le chancelier vous ont promise sur nos affaires d'Orange. Je suis bien satisfié de ces commencemens, et bien aussi de ce sentiment que vous estes venu fort a propos pour ayder a perfection l'instruction du lord Hollis sur ce qui nous touche, a la veille de son depart. Dieu vueïlle que nous puissions voir l'effect qu'ilz se promettent avec tant d'asseurance de ses intercessions. Cependant le poinct principal sur lequel il est necessaire que presentement nous soions esclaircis, et que nous sachions les sentimens et la | |
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resolution finale de Sa Maj.té, sur quoy vous devéz insister le plus, est ce que nous aurons a faire ou a laisser, au cas que le Roy tres-chrestien persiste comme il faict, et comme j'ay peur qu'il ne continue en cette contraincte d'un gouverneur catholique romain. La violence et l'injustice est bien toute evidente en cela; mais quel remede contre une puissance si obstinée. Si on se resout a ne la pas recevoir, comme il semble qu'on juge pardela que la Tutele ne le doit ni ne le peut, faudra il donc tout abandonner? Que deviendra la principauté? Croyons nous que la France se rende plus flexible, ou que le Roy vueïlle relascher de cette rigueur? C'est sur quoy je me trouve bien en peine et obligée de demander l'assistence et les tres-prudens conseils et advis des autres tuteurs, et particulierement du Roy de la Grande Bretagne, et de M.r son grand chancelier, a qui le S.r MiletGa naar voetnoot1) ne se doibt pas bien estre expliqué, au moins pas selon mon intention, s'il a tesmoigné que j'enclinois a laisser couler cette catholicité, et que j'avois jetté l'oeil sur sa personne. Il me dit bien qu'il sonderoit en passant les sentimens de Sa Maj.té, qu'a la verité j'estois fort desireuse de sçavoir, comme je le suis encore, et vous ay envoié pour cet effect. Mais s'il est allé plus avant, cela ne vient pas de moy, qui serois bien marrie qu'on en voulust tirer une mauvaise consequence au prejudice des affaires, et vous avéz fort bien respondu que je ne vous ay jamais donné autre ordre que d'insister sur la libre et franche restitution, et que le lord Hollis trouveroit pour ce regard la toutes choses entieres en France. Mais apres tout il est plus que temps d'en sortir une fois d'une façon ou d'autre; tout le monde s'estonne et parle desadvantageusement de ce qu'on vous laisse si longtemps a Paris a la honte, et aux grands frais du Prince mon petit-filz, et mesme s'en trouve qui croyent que je vous ay faict passer en Angleterre pour vous retirer de meilleure grace de la cour de France, ne pouvans comprendre comment nous y avons pu souffrir tant de longueurs, et tant de rencontres indignes, sans qu'on s'y mette encore beaucoup en peine de nous donner satisfaction. C'est donc bien une chose digne de la consideration de la Tutele sur quoy il est tres necessaire de se resoudre. Je vous prie d'y travailler autant qu'il se pourra, sans vous arrester a une instruction plus particuliere sur ce que de ma part vous auréz a proposer sur ce poinct delicat, sur lequel j'estime que je ne feray pas mal d'attendre les sentimens de pardela avant que de pouvoir bien prendre mes mesures. J'ay bien reçeu les articlesGa naar voetnoot2) que vostre filz m'a apportéz; mais outre que la pluspart semble tendre a consentir directement ou indirectement a un gouverneur catholique, a quoy l'Angleterre tesmoigne tant de repugnance, je ne me trouve pas bien en estat pour encore de pouvoir rien determiner la dessus. L'article 5e est bien le plus plausible; mais j'ay peur que la France n'y voudra pas consentir, puisqu'elle a absolument declaré vouloir avant toutes choses estre asseurée de la religion du gouverneur. Si cependant vous pouviéz aussi faire gouster au Roy ce que vous m'avéz ci devant proposé touchant vostre filzGa naar voetnoot3), et que Sa Maj.té l'aggrée, je n'y seray pas contraire. J'attendray donc ce que m'en diront vos prochaines. Je suis bien aise que le Sieur BrandtGa naar voetnoot4) vous a donné de bonnes addresses et instructions. Je n'ay jamais pu remarquer qu'il ayt esté imbu d'aucune chose | |
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frivole par Sylvius ou PorteclaireGa naar voetnoot1), et ne puis aussi comprendre sur quel fondement. Quoy qu'il en soit, vous avéz fort bien faict de l'en desabuser, et de parler a ce dernier du stile que vous me marquez. Il y a de quoy s'estonner de l'impudence et arrogance de ces gens la, qui je m'asseure ne sont gueres contens de vostre venüe. J'ay bien creu que d'abord vous ne deviéz pas parler touchant nos affaires d'argent, qui se feront mieux en effect apres que le lord Hollis sera depesché. Cependant le dernier estat des debtes vous a esté envoié l'ordinaire passé. Je croy bien que l'argent est rare pardela, mais encore ne faut il pas laisser de poursuivre vertement cette affaire, qui est de la derniere importance au Prince mon petit filz dans l'incommodité de ses finances, comme vous scavéz aussi bien que moy, ce qui faict que nous ne cessons d'emploier toutes sortes de moiens et d'efforts pour tirer aussi du Roy d'Espagne ce qu'il nous doibt, en sollicitans mesme sans cesse cet Estat de nous prester la main, et de faire arrester, comme ilz ont promis de faire, les biens des prelats du Brabant, situéz dans le ressort de cet Estat, afin de pouvoir satisfaire a ce que mon petit-filz doibt a d'autres, et particulierement a la comtesse d'IsenguienGa naar voetnoot2), qui poursuit tousjours ses executions; ce qui nous met en grande perplexité, ne sachans comment satisfaire aux termes de nostre accord, s'il ne nous vient quelque ressource d'Espagne ou d'Angleterre. Je vous prie donc de pousser cette affaire le plus qu'il vous sera possible, et de vous asseurer que nous vous sçaurions un gré tout particulier du bon succes que nous nous promettons de vostre industrie et bonne conduite. Au moins, j'espere que vous ne quitteréz point cette cour que vous n'ayéz mis l'affaire en estat que nous en puissions une fois attendre quelque satisfaction, particulierement du dot de la Princesse Royale, que je ne croy pas difficile de faire accepter par le Parlement, puisque ci devant cela s'est tousjours faict, en cas semblables. Je ne vous dis plus rien sur les nouvelles d'Orange, qui ne sçauroient estre autres, tant qu'on en exclut l'authorité legitime du Prince. Dieu la remettra un jour, j'espere. Je vous recommande a sa garde, et suis tousjours .... A la Haye, ce 22 Juin 1663. |
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