Briefwisseling. Deel 3: 1640-1644
(1914)–Constantijn Huygens– Auteursrecht onbekend3268. Aan R. DescartesGa naar voetnoot2). (K.A.)Si ce n'estoit la consideration des importunitez qu'on vous donne à mon subject, je seroy ravi de l'erreur qui porte le pere Mersenne à vous charger, comme soldat, de l'adresse de mes pacquets. Mais il est temps que nous l'en detrompions. Pour moy, je sçay trop bien ce que valent les moindres momens de vostre loisir, pour souffrir que ceux qui ne les considerent pas si bien, en abusent, mesmes a mon avantage. Ce mesme respect, Monsieur, m'a faict veoir aveq un peu d'indignation que vous ayez prins la peine de copier mes povres defenses contre Mons.r de SaumaiseGa naar voetnoot3); et d'ailleurs j'advouë en avoir tiré tant de vanité à par[t] moy, que, malgré que vous en puissiez avoir, j'ay resolu de me garder ceste copie aveq le mesme soin et reverence que je defere à tout petit papier de vostre main. J'espere que vous aurez assez de complaisance pour aggreer l'eschange de ceste copie a une autre, qui ne sera pas moins exacte, si encore l'envie vous demeure de laisser place à ceste mauvaise piece dans vostre cabinet. J'ay veu, tout du long des chemins que nous avons faict jusques icy, la bonne justice que vous rendez à Voetius et à son ayde de campGa naar voetnoot4). Ainsi fault il bien appeller vostre escrit, car ils ont doublement merité le foüet que vous leur donnez. Quelqu'un des plus sensez d'entre Messieurs les Estats d'Utrecht, qui est icy, m'en jugea de mesme hier, et que cest homme - ce sont ses paroles - commence à püer en leur ville, n'y ayant plus que les femmelettes et quelques imbecilles qui en fassent cas. Cependant je m'asseure qu'il remuera toute pierre, pour se revancher de ce que vous luy faictes souffrir d'une main si vigoureuse, qui, à tout prendre, ne s'est employée qu'aveq ce qu'il fault de ressentiment, en une tres-juste defence contre la plus noire calomnie dont un gentilhomme Chrestien puisse estre entaché. Vous disputez sagement contre l'impertinence des predicateurs, descrians sans retenue les pechez du peuple ou du magistrat en chaire, mais cela en alarmera beaucoup d'autres aveq Voetius contre vous. Un homme estourdi me fit un jour une plaisante comparaison, disant que les theologiens estoyent semblables aux porceaux, que, quand on en tire un par la queue, tous crient. Cela vous arrivera de la part de gens de mesme farine, mais les discrets vous scauront gré, ou de les avoir confirmez en leur opinion, ou de les avoir obligez d'une leçon d'importance. Quoy qui advienne, | |
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Monsieur, soit icy la fin de ces ordures, et ne prodiguez plus voz bonnes heures à respondre aux mauvais en leur folie. Vous avez, comme vous dites, employé tout ce qui est en vostre pouvoir pour tirer raison de leurs accusations, et la posterité le sçaura. C'est la satisfaction pleniere que vous vous debviez. Si pergunt latrare, rejettez tout aveq douceur et modestie, et vous offrez à tout honest' homme à l'esclaircir de ce qu'il ne peut avoüer ou comprendre en vostre philosophie. Je vous rends graces tres-humbles de ce que vous avez prins la peine de me raisonner sur les mouvemens de l'aymant, et ce qui en dependGa naar voetnoot1). Tout cela ne faict que m'agacer l'apetit davantage à voir toute vostre PhisiqueGa naar voetnoot2) en corps, sans quoy nous flottons dans des incertitudes facheuses, et ensuitte vous attribuons tous les jours des positions, qui ne sont rien moins que vostres, comme vous l'avez desja trop esprouvé. Sur ce propos de l'aymant, et le mouvement du reflux qui nous y a porté, j'adjouste icy, par ordre du pere Mersenne, un extraict de sa lettre, portant quelques nouvelles particularitez du mouvement du filet perpendiculaireGa naar voetnoot3), dont l'experience est si aysée à faire, à la longueur de cinq ou six pieds, au travers de quelque serbacane, ou autre tuyau, aveq quelque piece de mauvais verre en bas, pour exclurre tout mouvement exterieur, que je m'asseure que vous y voudrez porter la main, pour philosopher dessus aveq plus d'asseurance; dont il me tardera extremement de veoir pronunciata, comme tousjours de rencontrer les occasions de vous pouvoir tesmoigner combien veritablement je suis.... Voorn, 6 Juin 1643. |
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