Briefwisseling. Deel 2: 1634-1639
(1913)–Constantijn Huygens– Auteursrecht onbekend1439. J.L. Guez de BalzacGa naar voetnoot6). (R.A.)J'ay receu avec vostre lettre la dissertation imprimée de Monsieur HeinsiusGa naar voetnoot7), mais de | |
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vous en escrire mon sentiment, ce me seroit une entreprise trop dangereuse. Je n'ay garde d'oser jamais douter de l'infaillibilité de sa doctrine, et me suis trop mal trouvé du commencement de nostre commerce, pour me hazarder d'aller plus avant. Il me suffit de vous avouer, qu'il y a de l'apparence que j'estois perdu sans vostre protection, puisque soubs elle mesme je n'ay pas esté en seureté. C'est un bouclier qui a esté percé en mille endrois, et qui, a vous parler franchement, m'a plûtost servi de parade que de deffence. Mon grand adversaire, ainsi que vous le nommés, a voulu faire un exemple de vostre pauvre suppliant, et a tesmoigné, ou qu'il ne croyoit pas que vous m'aymassiés beaucoup, ou qu'il ne consideroit pas beaucoup ceux que vous aymiés. Neanmoins, Monsieur, si j'avois l'esprit querelleur, l'affaire iroit peut estre plus loin, et on me veut persuader qu'il n'y a que ma personne de blessèe, mes propositions estant encore aussi saines et aussi entieres qu'avant les attaques qu'il leur a faites. Mais que le champ luy demeure, puisqu'il ne peut souffrir de rencontre, pour ne pas dire de resistence, et je luy cede volontiers tous les avantages de cette action. Il a mieux aymé me prendre que me recevoir, et a preferé un trophée a un hommage. Pour cela je ne suis pas resolu de changer de naturel, ny de me dédire de mes premieres civilités. Je m'arreste d'ailleurs sur les mesmes bornes qu'il a franchies, et respecte le mesme caractere qu'il a violé; je parle de vostre affection et de vostre estime, qui me sont plus cheres que mes escrits ny que ma reputation, et que je ne scaurois ne pas honnorer, en quelque lieu que je les rencontre. Il faut, Monsieur, qu'il y ait tousjours dans le monde des injustes et des opprimés, et que je sois un des innocens qui souffre la persecution d'Herodes. Mais il n'est rien de si dur que l'amitié ne digere. Je vous donne de bon coeur mes injures et mes ressentimens, et suis content d'estre mal traité, pourveu que je vous tesmoigne par là que je suis ..... A Balzac, ce 10 Septemb. 1636. |
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