La chanson douce
‘Une haleine a soufflé; la lampe s'est éteinte:
La nuit, bleuâtre et tiède, entre, avec sa langueur.
Un chant d'oiseau lointain, triste comme une plainte,
S'élève, par instant, dans la paix de mon coeur.
Qu'il est doux d'être au monde! Et d'aimer! Et d'entendre
Un aveu dérobé répondre à ses aveux...
J'ai couronné ton front d'un rameau frêle et tendre;
Les larmes de la nuit tremblent dans tes cheveux.
Rapproche-toi... L'amour a de ces mots suprêmes
Qui ne sont point compris, s'ils ne sont dits tout bas.
Vois-tu, ma chère enfant, je sais bien que tu m'aimes,
Mais mon âme, sans eux, ne le sentirait pas.
Plus près, plus près de moi! Tout nous sépare encore!
Qu'un soupir, une haleine, un frisson moins discret
Me livre eet aveu que la parole ignore:
Il ne sera si doux qu'au prix d'un tel secret.
O mon enfant! Les morts, qui dorment sous la terre,
Ont tout perdu, sans doute, avec l'aspect du jour...
Mais rien n'afflige tant leur songe solitaire
Que le seul souvenir de eet instant d'amour.
Je t'aime... En cette nuit, toute claire d'opales,
Où monte en frissonnant la lune à son lever,
Les fleurs qui font aimer, adorables et pâles,
Se mêlent sur ta tête aux fleurs qui font rêver.
Nous nous croyons unis, et l'amour a des ailes!
Ah! parle, parle encor! Que j'entende ta voix,
Vague, ailée, enfantine, aux inflexions frêles,
Mourir dans l'air des nuits comme un lointain hautbois.
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Prolonges-en toujours la douce résonnance!
C'est ton coeur qui tintait dans ce frais timbre d'or.
Endors-toi... J'entendrai chanter dans le silence
Tous ces aveux passés, dont l'écho vibre encor.
... Une haleine a soufflé; la lampe s'est éteinte:
La nuit, bleuâtre et tiède, entre avec sa langueur.
Un chant d'oiseau lointain, triste comme une plainte,
S'élève, par instants, dans la paix de mon coeur.’
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