- Et deux qui s'arrêtent devant, continua Soetkin.
Claes se leva.
- Qui va-t-on appréhender en cette rue? dit-elle. Jésus Dieu! mon homme, ils
entrent ici.
Claes sauta de la cuisine dans le jardin, suivi de Nele.
Il lui dit:
- Sauve les carolus, ils sont derrière le contre-coeur de la cheminée.
Nele le comprit, puis voyant qu'il passait par-dessus la haie, que les sergents
le happaient au collet, qu'il les battait pour se défaire d'eux, elle cria
& pleura:
- Il est innocent! il est innocent! ne faites pas de mal à Claes mon père!
Ulenspiegel, où es-tu? Tu les tuerais tous deux!
Et elle se jeta sur l'un des sergents & lui déchira le visage de ses
ongles. Puis criant: ‘Ils le tueront!’ elle tomba sur le gazon du jardin
& y roula éperdue.
Katheline était venue au bruit, &, droite & immobile, considérait
le spectacle disant, branlant la tête: ‘Le feu! le feu! Creusez un trou: l'âme
veut sortir.’
Soetkin ne voyait rien, & parlant aux sergents entrés dans la chaumine:
- Messieurs, que cherchez-vous en notre pauvre demeure? Si c'est mon fils, il est
loin. Vos jambes sont-elles longues?
Ce disant, elle était joyeuse.
En ce moment Nele criant à l'aide, Soetkin courut dans le jardin, vit son homme
frappé au collet & se débattant sur le chemin près de la haie.
- Frappe! dit-elle, tue! Ulenspiegel, où es-tu?
Et elle voulut aller porter secours à son homme, mais l'un des sergents la prit
au corps, non sans danger.
Claes se débattait & frappait si fort qu'il eût bien pu s'échapper, si
les deux sergents auxquels avait parlé Soetkin ne sussent venus en aide à ceux
qui le tenaient.
Ils le ramenèrent les deux mains liées, dans la cuisine où Soetkin & Nele
pleuraient à sanglots:
- Messire prévôt, disait Soetkin, qu'a donc fait mon pauvre homme pour que vous
le liiez ainsi de ces cordes?
- Hérétique, dit l'un des sergents.
- Hérétique? répartit Soetkin; tu es hérétique, toi? Ces démons ont menti.