Septentrion. Jaargang 34
(2005)– [tijdschrift] Septentrion– Auteursrechtelijk beschermdChantante mais pas toujours tranchante:
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Paul van Ostaijen (1896-1928).
Henri Michaux et ses Idéogrammes en Chine, Paul van Ostaijen (1896-1928) et sa Mélopée (admirablement traduite par Maurice Carême), les poèmes à la fois alertes et méditatifs de Roland Jooris (o1936), ceux de Charles van Lerberghe, de Robert Vivier, de Guy Goffette, de Hugo Claus, de Stefan Hertmans, de Karel van de Woestijne (1878-1929, autre prouesse de Maurice Carême, qui fut décidément un traducteur de premier plan!), du regretté Eddy van Vliet (1942-2002), de Charles Ducal, de Leonard Nolens, de Luuk Gruwez (o1953), d'André Balthazar, d'Eugène Savitzkaya, etc. Bien entendu, l'anthologie a ses partis pris. A l'évidence, Francis Dannemark n'aime pas la poésie ‘rébarbative’, entendez trop difficile; il la préfère plutôt chantante et narrative: ‘Un poème’, écrit-il dans son avant-propos, ‘est peut-être la combinaison idéale d'un long roman et d'une simple chanson’, définition qui réduit le champ de l'expérience poétique moderne, mais
Charles van Lerberghe (1861-1907).
tend à se justifier en grande partie par la volonté, fortement accentuée, de promouvoir la poésie auprès d'un public qui souvent la refuse, parce qu'il la juge trop hermétique, trop ardue, souvent incompréhensible. L'option est défendable, la complaisance dans l'emberlificotage ayant souvent nui à la perception de la création poétique contemporaine. Mais à se poser comme critères absolus ou exclusifs, la lisibilité directe et une certaine ‘narrativité’ dans le poème risquent d'amener une autre complaisance, en versant cette fois un peu benoîtement dans la facilité! Je ne parlerai pas des absents dans cette anthologie, mais de ceux, présents avec un petit poème léger, qui en réalité auraient mérité mieux et dont, par conséquent, l'image ‘promue’ risque d'être faussée. Je songe par exemple à Lucien Noullez, à Werner Lambersy, à Eugène Savitzkaya ou, côté flamand, à Richard Minne (1891-1965), à Hubert van Herreweghen (o1920) et même à Paul van Ostaijen: ces poètes ont écrit | |
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de nombreuses pièces autrement profondes et consistantes que les charmantes pralines retenues ici...!Ga naar eind(3). D'ailleurs, la soudaine présence au milieu de ces poèmes d'une rengaine d'Adamo ou même de chansons de Brel ou de Beaucarne (aurait-on oublié, côté flamand, Clouseau et Raymond van het Groenewoud?) ne peuvent qu'accentuer une impression gênante. A maintes reprises, la poésie retenue dans ce livre relève d'une séduction par trop gentille: gentiment sentimentaux, gentiment ironiques, gentiment amoureux ou gentiment révoltés (disons-le tout net, les ‘provocations’ surréalistes d'un Chavée ou d'un Moerman ont très mal vieilli...), une part de ces poèmes ‘pralinés’, emballés dans de généreuses évidences signées par deux ministres (n'en jetez plus), donnent la nette impression que G.M. Hopkins, Baudelaire, Lautréamont, Rimbaud, Apollinaire, Artaud, W.B. Yeats, Dylan Thomas ou T.S. Eliot, pour ne citer que ceux-là, n'ont jamais existé. Il semble pourtant que la poésie se doive de répondre à des exigences esthétiques plus subtiles. Et plus tranchantes. Frans de Haes francis dannemark, Ici on parle flamand & français. Une fameuse collection de poèmes belges, collection Escales du Nord, Le Castor astral, Bordeaux, 2005, 187 p. (ISBN 2 85920 600 0). |