permettre une telle modification. Aussi la question fut-elle posée de savoir si la Belgique ferait bien de reconnaître à nouveau, en juillet prochain, la juridiction de la Cour, tel que le prévoit la Convention. On fit remarquer (notamment le journal chrétien-démocrate ‘Het Volk’) que les trois pays européens les plus importants - la France, l'Angleterre et l'Italie - n'ont pas signé la Convention.
Celui qui, à présent, considérerait l'affaire en tant qu'observateur d'un point de vue purement juridique et théorique, peut estimer que la plainte n'est pas sans fondement. Afin d'être à même d'apprécier exactement les choses, l'on ne peut perdre de vue la toile de fond des lois linguistiques. Cette toile de fond tire sa couleur de toute l'histoire politico-sociale de la Belgique qui, il n'y a pas si longtemps, était entiérement gouvernée en français et dont la couche sociale supérieure continue à être dominée par des francophones.
Le ‘Nieuwe Gids’ fit remarquer que les lois linguistiques sont essentielles et seules susceptibles d'organiser la coexistence pacifique entre Flamands et Wallons, tout simplement parce qu'elles doivent permettre aux Flamands de devenir, dans leur propre pays, des citoyens à part entière.
Les lois linguistiques qui du reste ne se réalisèrent pas sans sacrifices du côté flamand, furent qualifiées, à juste titre, de ‘digues d'alerte’. Elles constituent une défense contre les puissances socio-économiques. Elles ne font que défendre les droits d'une minorité sociologique.
Qu'elles soient appelées, entretemps, à ‘bannir’ le français hors de Flandre ou à ‘éloigner’ les Flamands ‘des sources de culture internationales’ et à les ‘enfermer dans le cadre de leurs frontières et de leur folklore’ n'est que nonsens. Dans toutes les écoles flamandes, le français est enseigné comme seconde langue, souvent d'ailleurs avec un excès de zèle. Les vrais bilingues se trouvent au Nord en non au Sud du pays.
Lorsque j'entends discuter de tout cela, je pense toujours à la situation de tant de Flamands en Wallonie, situation dont j'ai pu me rendre compte personnellement, il y a des années déjà.
Etant donné que les Belges ne possèdent pas officiellement une sous-nationalité, il est difficile d'évaluer exactement le nombre des Flamands habitant la Wallonie. On les estima, au début de ce siècle, entre 400.000 et 500.000. Actuellement encore, plus de 20.000 ressortissants flamands doivent résider dans la seule ville de Liège. L'émigration de cultivateurs vers le Sud prit des proportions considérables après la deuxième guerre mondiale.
Exception faite d'un prêche fait de temps à autre par un ‘Père Brun’ généreux, ils n'y ont jamais reçu ni écoles ni paroisses particulières.
Dans les écoles qu'ils fréquentaient, on n'enseignait, (et on n'enseigne) que rarement le néerlandais de façon sérieuse.
Ils se sont adaptés.
La seconde génération parle français.
La différence entre les deux régions du pays résidait dans le fait que ces immigrants étaient des ouvriers qui n'exerçaient que peu d'influence sur la vie publique.
Ils se réjouissaient déjà de pouvoir gagner la leur tout court.
(Traduit par Urbain Dewaele)