Oeuvres complètes. Tome XXI. Cosmologie
(1944)–Christiaan Huygens– Auteursrecht onbekend
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Considérations ultérieures sur la forme de la terre. | |
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Avertissement.Huygens nous apprend en 1688Ga naar voetnoot1) que Newton lui avait fait don d'un exemplaire de ses ‘Principia’ dont nous savons que l'impression fut terminée en juillet 1687. La présente Pièce montre en effet qu'en novembre 1687 le livre de Newton lui était connuGa naar voetnoot2): il le reçut apparemment immédiatement après la publication. Ce furent, paraît-il, les considérations de Newton sur la forme de la terreGa naar voetnoot3) qui attirèrent en premier lieu son attention. Ceci s'explique fort bien par le fait qu'il venait d'écrire lui-même une page sur ce problème: c'est la Pièce de la p. 375 qui précède. Dès les §§ 2 et 3 de la présente Pièce - la division en §§ est de nous, comme d'habitude - Huygens parle de l'‘aequilibrium canalium ut apud Neutonum’. Or, le calcul du § 1, où il n'est pas encore question de cette méthode des canaux, mais seulement du rapport que les axes de la terre, supposée spéroïdale, c.à.d. de la forme d'un ellipsoïde aplati vers les poles, doivent avoir entr'eux pour qu'en un endroit déterminé, d'ailleurs arbitrairement choisi, de sa surface, cette surface soit perpendiculaire à la résultante de la force centrifuge et de la pesanteur dirigée par hypothèse vers le centre de la terre, ce calcul, disons-nous, lui avait fourni pour la différence de lon- | |
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gueur des deux axes a (rayon de l'équateur) et b (demi-distance des poles) la valeur 1/578 a. Mais les considérations du § 4 (donnant aussi, au début, cette fraction 1/578) font voir que si le calcul du § 2 donne pour le rapport des deux axes la même valeur, quel que soit le point choisi sur la surface de la terre, il n'en est pas de même pour les longueurs absolues de ces axes correspondant aux différents points: ce calcul n'est donc pas probant et la surface de la sphère déformée par l'effet de la force centrifuge n'est apparemment pas exactement sphéroïdale. Par conséquent Huygens abandonne l'hypothèse de la forme exactement sphéroïdale qu'il avait déjà émise dans la Pièce de la p. 375 et qui est aussi celle de Newton dans la Proposition ‘Invenire proportionem axis Planetae ad diametres eidem perpendiculares’Ga naar voetnoot4). Il n'en trouve pas moins dans les §§ 10-12, en se servant cette fois de la méthode des canaux du savant anglaisGa naar voetnoot4), la valeur 1/578 a pour la différence entre les grandeurs a et b, la section de la terre par un plan passant par l'axe de rotation étant ‘proxime ellipsis’, ceci dans le cas de la rotation lente en 24 heuresGa naar voetnoot5) telle que nous la connaissons. Mais si la terre tournait 17 fois plus vite, elle prendrait la forme déjà indiquée dans la Fig. 106 de la remarque finale, ajoutée plus tard, du § 4 - voyez aussi le § 6 et la remarque finale ajoutée au § 7 - d'un ensemble de deux conoïdes paraboliques ayant leurs sommets aux poles et tel que le diamètre de l'équateur serait le double de la distance des poles (donc a - b = ½ a). Newton, lui, avait trouvéGa naar voetnoot4) une valeur 1/229 a au lieu de 1/578 a pour l'aplatissement (lequel est en réalité à fort peu près 1/300 a). C'est que Huygens n'accepte pas l'attraction universelle de toutes les particules matérielles suivant la loi de Newton du rapport inverse des carrés des distances (ni d'ailleurs suivant une autre loi); par conséquent il ne croit pas à la proportionnalité dans l'intérieur de la terre - la densité étant supposée constante - de la pesanteur à la distance du centre. ‘Un corps pesant au fond d'un puits, ou de quelque mine profonde’, disait-il dans la Pièce de la Cause de la PesanteurGa naar voetnoot6), ‘y devroit perdre de sa pesanteur, ce qui ne se trouve point par expérience’. Il ose en conclure, ou du moins il croit pouvoir baser son calcul sur la supposition, que la pesanteur reste constante jusqu'au centre de la terre. Pratiquement ceci revient, peut-on dire, à admettre la loi de Newton - du moins pour les rotations lentes où l'écart de la forme sphérique | |
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est faible - en y ajoutant l'hypothèse que la densité est partout en raison inverse de la distance du centre.
Aux considérations sur la forme de la terre sont joints (§§ 8 et 9) des calculs sur la longueur variable du pendule à secondes, ou inversement sur la variation de la période d'oscillation d'un pendule déterminé, gardant par hypothèse sa longueur, lorsqu'on le transporte, du pole p.e., en d'autres endroits de la surface du globe terrestre. La connaissance de cette variation, nous le disons aussi à la fin de l'Appendice I, était nécessaire pour corriger le calcul des longitudes basée sur l'indication des horloges transportées du Cap de Bonne Espérance à Texel dans l'expédition de 1686-1687. On peut consulter sur ce sujet la Partie ‘Résultats de quelques expéditions maritimes’ du T. XVIII. Dans ces calculs il n'est pas question de la forme de la terre: elle y est considérée comme sphérique. Il y est parlé de la grandeur de la pesanteur apparente, c.à.d. de la pesanteur vraie diminuée de la composante verticale de la force centrifuge due à la rotation de la terre, et cette pesanteur vraie y est supposée partout la même. On peut observer que Huygens lui-même ne se sert point des expressions ‘pesanteur vraie’ et ‘pesanteur apparente’; l'on ne trouve chez lui - §§ 1 et 4 - que les expressions ‘pondus absolutum’ et ‘gravitas absoluta’; au § 1 il donne la définition de cet adjectif. Au § 9 Huygens énonce sans preuve la règle que les diminutions de la longueur du pendule mathématique à secondes lorsqu'on le transporte d'abord du pole en un premier endroit, ensuite du pole en un deuxième endroit de la surface terrestre, sont proportionnelles aux carrés des rayons des cercles parallèles à l'équateur correspondant à ces deux endroits. C'est ce dont il donnera dans le ‘Discours de la Cause de la Pesanteur’ de 1690 une longue démonstration géométrique; on le voit bien plus facilement en partant de la formule - comparez la p. 97 du T. , qui fait voir que, lorsque g devient g - f cos β, f étant l'accélération centrifuge et β la latitude de l'endroit considéré, il faut, pour que t conserve sa valeur, que l aussi soit multipliée par 1 - f/g cos β, de sorte que sa diminution est l/g f cos β. Or, pour deux endroits différents, les produits f1 cos β1 et f2 cos β2 sont proportionnels aux carrés des rayons des cercles parallèles correspondants puisque leurs facteurs sont l'un et l'autre proportionnels à ces rayons.
Au § 13 Huygens intercale une remarque sur la cartographie: il veut placer ‘chaque | |
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lieu en sa longitude et latitude’ en prenant ‘les degrez des meridiens egaux entre eux et aux degrez de l'equateur et dans chaque parallele les degrez aussi egaux et dans la vraije proportion aux degrez de l'equateur’. En d'autres termes il propose ce qu'on a coutume d'appeler la projection de Flamsteed; on pourrait donc aussi appeler celle-ci la projection de Huygens (bien qu'elle soit en réalité plus ancienne); nous nous sommes toutefois servi de l'expression usuelle ‘projection de Flamsteed’ dans le T. XVIII à propos de la carte de Huygens [Fig. 129 de la p. 640] de l'expédition de 1686-1687 déjà mentionnée plus haut. Quoique la remarque considérée se trouve sur une page occupée en majeure partie par des calculs sur la véritable forme de la terre, il semble bien que Huygens n'ait en vue ici que la représentation de notre planète considérée comme exactement sphérique: aussi longtemps que les longueurs des degrés du globe terrestre n'avaient pas été mesurées en des pays de latitudes fort différentes, les cartographes ne pouvaient guère faire autre chose que s'en tenir à la terre sphérique. Ce n'est qu'après la confirmation par des observations du dix-huitième siècle de l'existence d'une forme sphéroïdale et la mesure de son aplatissement qu'on a pu songer sérieusement à tracer des cartes conformes à cette réalité où, cela va sans dire, la place de chaque endroit serait indiquée, comme auparavant, par sa longitude et sa latitudeGa naar voetnoot7). |
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