Judith Herzberg:
un regard
sur le réel
Le prix P.C. Hooft, la plus importante distinction que puisse recevoir un auteur néerlandais, récompense une année un romancier, l'année suivante un essayiste et, une troisième année, un poète. Portant le nom d'un des plus grands écrivains du XVIIe siècle, ce prix est revenu en 1997 à une femme poète, Judith Herzberg. Sans avoir écrit une ‘somme’ littéraire, cette dernière n'en peut pas moins se prévaloir d'une oeuvre profonde et de qualité.
Née à Amsterdam en 1934, Judith n'est pas la première dans la famille Herzberg à jouir d'une renommée littéraire, pas même la première à recevoir ce prix! En effet, le prix P.C. Hooft a été décerné en 1974 à son père, Abel Herzberg (1893-1989), fils de juifs russes émigrés aux Pays-Bas, naturalisé et devenu avocat après avoir fait son droit. S'il a laissé des nouvelles, des chroniques et des pièces de théâtre, Abel doit surtout sa célébrité aux ouvrages qu'il a consacrés à la déportation des juifs hollandais ainsi qu'à un livre traitant du procès Eichmann.
Judith Herzberg, autrement dit, a de qui tenir. On relève d'ailleurs certains points communs entre le père et la fille, entre autres choses une préférence marquée pour le théâtre: explorant de nouvelles formes, celle-ci a composé quelques pièces qui recueillirent un réel succès. Ajoutons qu'elle porte comme lui, sans se départir de son esprit critique et sans jamais non plus s'emporter, un intérêt tout particulier aux questions de société. Rares sont ceux qui, se sentant tout autant qu'elle concernés par les heurs et malheurs de l'État d'Israël, savent demeurer pondérés et objectifs dans leurs jugements. Mais c'est une autre de ses qualités qui lui vaut d'être à l'honneur aujourd'hui, et bien la plus importante: son talent de poète qui s'exprime dans chaque oeuvre, y compris celles écrites pour la scène, et qui prend bien entendu toute sa mesure dans les poèmes.
Judith Herzberg a publié une première plaquette en 1963 sous le titre Zeepost (Courrier maritime). Auparavant, Tirade, revue autour de laquelle gravitaient quelques jeunes poètes comme Rutger Kopland (o1934), Hanny Michaelis (o1922) ou Dick Hillenius (o1927), avait repris quelques-uns de ses poèmes. Sans véritablement former un groupe, les auteurs susnommés présentaient certains traits communs indéniables et révélateurs d'une nouvelle génération - le visage, pourrait-on dire, d'un nouveau réel.
Dans la création de Judith Herzberg, cette caractéristique peut être interprétée comme