Victor, André Francis, Henri Barbusse, Alain Labraux, René Maran, Romain Rolland, Ferreira de Castro et Roger Peyrefitte. Dès cette époque, il se consacra aussi à la traduction de textes littéraires néerlandais en français. En 1935 parut le célèbre Filasse d'Ernest Claes. A côté des poètes Henriëtte Roland Holst-Van der Schalk et Noto Soeroto (La chanson de Wayang, 1935), Roelandt fait connaître au public de langue française toute une série d'auteurs néerlandais plus ou moins populistes: A.M. de Jong: Un enfant parmi les hommes (1942), La mort du patriarche et Vive-la-joie au village (1943); Antoon Coolen: Les trois frères (1943), La légende frisonne (1949); P.H. van Moerkerken: La légende de la cathédrale d'Utrecht (1938), La statue dans le jardin (1946); Willem van lependaal: Mémoires d'un cambrioleur (1944), Main basse (1956); Sam Goudsmit: L'anniversaire de la mère Zijpe (1946); Marie Koenen: Frère Udo (1949). Il traduisit en outre un roman historique de Jane de Jongh (Marguerite d'Autriche, 1944), une oeuvre moins connue de Bertus Aafjes, un ouvrage philosophique de Mannoury et quelques récits policiers de R. Bulthuis, A.C. Baantjer et W. van Eemlandt.
Roelandt avait été fasciné très tôt par l'oeuvre de l'auteur néerlandais très controversé que fut Multatuli. Après divers extraits et des Pages choisies de Multatuli (1938), il présenta une traduction du magistral chef-d'oeuvre anticolonial Max Havelaar en 1942.
Dans les années cinquante, Roelandt s'intéressa beaucoup à cet autre monument profondément humain de la peinture néerlandaise qu'est Vincent van Gogh. Il publia notamment des Lettres à Van Rappard (1950), Lettres à sa mère (1952) et Lettres à son frère Théo (1956), que suivit un livre consacré au mythe des deux frères: Théo et Vincent van Gogh (1957). Ces travaux aboutiront, en 1960, à la publication d'un document d'intérêt capital pour l'étude et la connaissance de l'artiste, la Correspondance complète de Vincent van Gogh (1960, trois volumes).
A partir de 1950, Roelandt collabora aussi comme journaliste au quotidien socialiste gantois Vooruit (En avant). Il y écrivit principalement sur la littérature et l'art français, sur ses souvenirs des milieux parisiens et ses contacts avec des auteurs français, et présenta au lecteur néerlandophone des auteurs de langue française d'outre-Mer comme de Belgique. Parallèlement, il publia aussi des souvenirs parisiens dans le journal bruxellois Le Soir, qui présenta à ses lecteurs quelques-unes de ses traductions sous forme de feuilleton et où il tenait également une intéressante chronique consacrée aux lettres néerlandaises à l'intention du lecteur francophone.
Sur le plan strictement littéraire, Roelandt nous donna encore des traductions d'Albert Helman: Mon singe pleure (1965), Harry Mulisch: Qu'arrive-t-il au sergent Masuro? (1965), Simon Vestdijk: Le passage (1965) et Les voyageurs (1966), de Louis Paul Boon: Menuet (1973) et de Jan Wolkers Les délices de Turquie (1976). A sa mort, il nous laissa, achevée mais pas encore publiée, la traduction de Lijmen (Entourloupettes) de Willem Elsschot et celle, inachevée, de Terug naar Oegstgeest (Retour à Oegstgeest) de Jan Wolkers.
Compte tenu de ce vaste éventail d'activités et de publications, par lesquelles il fut notamment l'incarnation, avant la lettre, d'un premier accord culturel à conclure entre la Flandre et la Wallonie dans une Belgique renovée, Lode Roelandt méritait certes d'être plus connu. Toutefois, homme discret et retiré, il fuyait délibérément toute publicité et ne quittait guère son cabinet de travail que pour entretenir ses contacts avec les milieux littéraires parisiens et néerlandais. Les Pays-Bas lui en surent gré et reconnurent officiellement ses mérites: en 1971, le fonds Prince Bernhard lui décerna le prix Martinus Nijhoff, couronnant des traductions littéraires, dont le jury tenait à rendre hommage à l'‘éclectisme sur la base d'un travail linguistique créateur’ et à louer ses efforts de faire connaître les lettres néerlandaises, et plus particulièrement Multatuli, au public de langue française. Septentrion se rallie volontiers à cet hommage en commémorant ce précurseur lointain de ses propres idéaux dans le domaine des relations culturelles internationales.
Willy Devos.